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26 novembre. Saint Jean Berchmans, jésuite. 1621.

- Saint Jean Berchmans, jésuite. 1621.

Papes : Paul V (+1621) ; Grégoire XV. Roi de France : Louis XIII.

" Plutôt mourir que de transgresser la moindre règle."
Saint Jean Berchmans.


Saint Jean Berchmans. Imagerie populaire.

Ce jeune Saint, patron des novices, naquit à Diest le 13 mars 1599, dans le diocèse de Brabant, en Belgique. De condition modeste, les parents de saint Jean Berchmans étaient profondément chrétiens. Une atmosphère de piété, de foi et de pureté angélique régnait dans leur foyer. C'est au sanctuaire de Notre-Dame de Montaigu que le pieux enfant fit le voeu de chasteté perpétuelle.

A l'âge de seize ans, une charité anonyme lui permit d'entrer au collège des Jésuites de Malines. En lisant les écrits du bienheureux Pierre Canisius et la vie de saint Louis de Gonzague mort vingt-cinq ans auparavant, Jean Berchmans se sentit attiré vers la Compagnie de Jésus. Il obtint difficilement le consentement de son père qui fondait sur lui ses plus belles espérances.

Entré au noviciat de Malines, Jean s'y distingua par sa grande fidélité à observer la Règle et par une singulière amabilité de caractère. Dans le procès de sa canonisation, les témoins ont déclaré ne jamais l'avoir vu enfreindre une seule de ses Règles. Accomplir les actions communes d'une manière non commune, telle fut la ligne de conduite à laquelle le saint novice demeura toujours fidèle.

Son exercice le plus cher était de faire le catéchisme aux petits enfants pauvres. A son édifiante piété, il alliait une gaîté qui charmait tous ceux qui avaient quelques rapports avec lui. Sa charité prévenante, son caractère doux et enjoué, sa fidélité absolue à toutes les exigences de la Règle le firent surnommer par les novices l'Ange de la maison et le Saint joyeux. Celui qui avait écrit :
" Si je ne deviens pas un saint maintenant que je suis jeune, je ne le serai jamais ", poursuivit son idéal de sainteté en vivant chaque journée dans un total abandon à Dieu.


Autel de la Vierge de l'Annonciation et de Saint Jean Berchmans.
Filippo della Valle & Andrea Pozzo. Eglise du Gesu. Rome.

Sa confiance en Marie était sans limite. " Mon frère, confia-t-il un jour à un religieux, dès que j'ai songé à m'avancer dans la perfection, j'ai posé pour fondement de mon édifice, l'amour de la Reine du Ciel..."
Devenu veuf, son père entra dans les Ordres et fut ordonné prêtre; vers le même temps, saint Jean Berchmans prononça les voeux traditionnels d'obéissance, pauvreté et chasteté.

Ses supérieurs l'envoyèrent à Rome à pied, en compagnie d'un confrère, pour y compléter ses études. Arrivé au collège romain, le saint religieux occupa la chambre de saint Louis de Gonzague. Saint Jean Berchmans imita ses vertus tout en se montrant moins austère et plus gracieux. L'étude de la philosophie et des mathématiques à laquelle il s'appliqua ne diminua en rien sa ferveur angélique.

C'est à Rome que sonna son départ pour le ciel, à l'âge de vingt-deux ans et cinq mois.
" C'est une mort toute divine, mes remèdes n'y peuvent rien ", affirmait le médecin impuissant. Saint Jean Berchmans reçut les derniers sacrements avec une indescriptible ferveur. Avant de quitter la terre, le Saint eut à subir une dernière épreuve: le démon l'assaillit à deux reprises à l'article de la mort.


Saint Jean Berchmans. Imagerie populaire.

Le pieux moribond serra son crucifix dans ses mains défaillantes, son chapelet et son livre des Règles :
" Voici mes armes, dit-il, avec ces trois trésors, je me présenterai joyeusement devant Dieu."

Il renouvela ses voeux de religion et recouvra la paix. Prononçant les noms bénis de Jésus et de Marie, saint Jean Berchmans s'endormit paisiblement dans le Seigneur. Le vendredi 13 août 1621, la cloche du collège romain annonçait le départ de cet ange terrestre pour les demeures éternelles. Léon XIII l'a canonisé le 15 janvier 1888.

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dimanche, 26 novembre 2023 | Lien permanent

4 janvier. L'Octave des Saints Innocents.

- L'Octave des Saints Innocents.


Massacre des Saints Innocents. Pieter Brueghel le Jeune. XVIe.

Nous terminons aujourd'hui les huit jours consacrés à honorer la mémoire des bienheureux Enfants de Bethléhem. Grâces soient rendues à Dieu, qui nous les a donnés pour intercesseurs et pour modèles ! Leur nom ne paraîtra plus sur le Cycle, jusqu'au retour des solennités de la Naissance de l'Emmanuel : rendons-leur donc aujourd'hui un dernier hommage.

La sainte Eglise, qui, au jour de leur fête, a revêtu dans ses habits sacrés une couleur de deuil, par égard pour les douleurs de Rachel, reprend, dans ce jour de l'Octave, la pourpre des Martyrs, dont elle veut honorer ceux qui ont la gloire d'en être comme les prémices. Mais l'Eglise ne cesse pas pour cela de s'attendrir sur la désolation des mères qui ont vu égorger entre leurs bras les enfants qu'elles allaitaient. A l'Office des Matines, elle lit ce passage si dramatique d'un ancien Sermon attribué autrefois à saint Augustin :


Massacre des Saints Innocents. Missel à l'usage de Besançon. XVe.

" A peine le Seigneur est-il né, qu'un deuil commence, non au ciel, mais sur la terre. Les mères se lamentent, les Anges triomphent, les enfants sont enlevés. Un Dieu est né : il faut des victimes innocentes à Celui qui vient condamner la malice du monde. Il faut immoler des agneaux, puisque l'Agneau est venu qui ôte le péché et qui doit être crucifié. Mais les brebis, leurs mères, poussent de grands cris ; car elles perdent leurs agneaux, avant même qu'ils puissent faire entendre le bêlement. Cruel martyre ! Le glaive est tiré, et sans motif ; la jalousie seule est en fureur, et Celui qui est né ne fait violence à personne.

Mais considérons les mères se lamentant sur leurs agneaux. Une voix a retenti dans Rama, des pleurs et des hurlements : c'est qu'on leur enlève un dépôt qu'elles n'ont pas seulement reçu, mais enfanté. La nature, qui se refusait à leur martyre, en face même du tyran, attestait assez sa puissance. La mère souillait et arrachait les cheveux de sa tête, parce qu'elle en avait perdu l'ornement dans son fils ! Que d'efforts pour cacher cet enfant ! et l'enfant lui-même se trahissait. N'ayant pas encore appris à craindre, il ne savait pas retenir sa voix. La mère et le bourreau luttaient ensemble : celui-ci ci arrachait l'enfant, celle-là le retenait.

La mère criait au bourreau :
" Pourquoi sépares-tu de moi celui qui est sorti de moi ? Mon sein l'a enfanté : aura-t-il donc en vain sucé mon lait ? Je le portais avec tant de précautions, celui que ta main cruelle enlève avec tant de violence ! A peine mes entrailles l'ont-elles produit, que tu l'écrases contre terre."
Une autre mère s'écriait, parce que le soldat se refusait à l'immoler avec son fils :
" Pourquoi me laisses-tu privée de mon enfant ? Si un crime a été commis, c'est moi qui en suis coupable : fais-moi mourir aussi, et délivre une pauvre mère."
Une autre disait :
" Qui cherchez-vous ? Vous n'en voulez qu'à un seul, et vous en tuez un grand nombre, sans pouvoir atteindre le seul que vous cherchez."
Une autre s'écriait :
" Venez, oh ! Venez, Sauveur du monde : jusqu'à quand vous laisserez-vous chercher ? Vous ne craignez personne : que le soldat vous voie, et qu'il laisse la vie à nos enfants."
Ainsi se mêlaient les lamentations des mères ; et le sacrifice des enfants montait jusqu'au ciel."


Massacre des Saints Innocents. François-Joseph Navez. XIXe.

Parmi les enfants si cruellement immolés depuis l'âge de deux ans et au-dessous, quelques-uns durent appartenir aux bergers de Bethléhem qui étaient venus, à la voix de l'Ange, reconnaître et adorer le nouveau-né dans la crèche. Ces premiers adorateurs du Verbe incarné, après Marie et Joseph, offrirent ainsi le sacrifice de ce qu'ils avaient de plus cher au Seigneur qui les avait choisis. Ils savaient à quel Enfant leurs enfants étaient sacrifiés, et ils étaient saintement fiers de cette nouvelle distinction qui venait les chercher au milieu de leur peuple.

Cependant, Hérode, comme tous les politiques qui font la guerre au Christ et à son Eglise, était déçu dans ses projets. Son édit d,e carnage embrassait Bethléhem et tous ses alentours ; il enveloppait tous les enfants de cette contrée, depuis la naissance jusqu'à l'âge de deux ans ; et malgré cette atroce précaution, l'Enfant tant recherché échappait au glaive et fuyait en Egypte. Le coup était donc manqué comme toujours ; et de plus, contre le gré du tyran, l'Eglise du ciel ne tarderait pas à recevoir avec triomphe de nouveaux protecteurs pour celle delà terre.

Ce Roi des Juifs nouveau-né, que la jalousie d'Hérode poursuivait, n'était qu'un Enfant sans armées et sans soldats ; Hérode cependant tremblait devant lui. Un secret instinct lui révélait, comme à tous les tyrans de l'Eglise, que cette faiblesse apparente cachait une force victorieuse ; mais il se trompait, comme tous ses successeurs, en essayant de lutter avec le glaive contre la puissance de l'Esprit. L'Enfant de Bethléhem n'est pas encore arrivé au terme de son apparente faiblesse : il fuit devant la face d'un tyran ; plus tard, quand il sera un homme, il restera sous les coups de ses ennemis : on l'attachera à une croix infâme, entre deux larrons ; mais c'est précisément ce jour-là qu'un gouverneur romain proclamera, dans une inscription écrite de sa propre main : " Celui-ci est le Roi des Juifs ".
Pilate donnera au Christ, d'une manière officielle, ce titre qui fait pâlir Hérode ; et malgré les sollicitations des ennemis du Sauveur, il s'écriera : " Ce que j'ai écrit est écrit ".

Jésus, sur l'arbre de la croix, associera à son propre triomphe un des compagnons de son supplice ; aujourd'hui, dans son berceau, il appelle des enfants à partager sa gloire.


Massacre des Saints Innocents. Heures à l'usage de Besançon. XVe.

ORAISONS

Les deux Oraisons qui suivent sont empruntées au Sacramentaire Léonien :

" Ô Dieu, grand dans les grandes choses, mais qui opérez cependant, avec plus de gloire, vos merveilles dans les petites ; accordez-nous, s'il vous plaît, de nous réjouir dans la solennité de ceux qui, même sans parler, ont rendu témoignage à votre Fils, Notre Seigneur."

" Faites, Seigneur, que vos fidèles, selon la parole de l'Apôtre, ne deviennent pas enfants par l'intelligence, mais qu'ils deviennent innocents en fait de malice, comme des enfants; en sorte qu'ils imitent, par la simplicité de l'âme, les martyrs de la présente solennité, s'ils ne peuvent les égaler en mérites. Par Jésus-Christ notre Seigneur."


CAPITULA

L'Eglise Gothique nous donne cette belle prière que nous empruntons au Bréviaire Mozarabe :

" Ô Christ, ineffable lumière du monde, qui, encore dans le berceau, n'étant pas encore martyr, avez consacré, par la palme du martyre, la troupe des Innocents ; qui, lorsqu'ils ne parlaient pas encore, leur avez fait pousser des gémissements sous le glaive des soldats ; et qui, au moment de votre mort volontaire pour nous, avez retiré avec joie leurs âmes des profondeurs secrètes de la terre : inspirez-leur de prier sans relâche pour nous qui sommes faibles et petits, afin que nous, dont les prières ne sauraient nous purifier de nos péchés, nous en soyons lavés présentement et à jamais, par les supplications de ceux qui vous accompagnent de leurs hymnes et de leurs cantiques, partout où vous allez."


Massacre des Saints Innocents. Pierre-Paul Rubens. XVIIe.

ORAISON

La même Eglise, nous offre cette autre prière dans son Missel :

" Ô Dieu ! Dont la miséricorde s'adresse, avec empressement, à tout sexe et à tout âge, vous avez daigné montrer une affection et une tendresse paternelle aux Innocents, en ne permettant pas que la captivité de l'Egypte retînt ces enfants, ni que l'Evangile leur fût celé, leur faisant éviter les souillures du monde, comme à leurs pères, au moyen de la Loi, et les appelant par grâce dans votre royaume, avec les parfaits : afin que leur innocence, exempte de tout mal, devînt un exemple solennel ; accordez à nous, qui sommes vos serviteurs, que, purgés du virus du péché, affaiblis dans la concupiscence de la chair, nous conservions une volonté docile à vos enseignements. Que notre esprit ne soit ni rigide ni superbe; qu'il soit doux sans mollesse, innocent et prudent ; qu'il soit humble sans être faible ; afin que, par la maturité d'un jugement discret, il sache discerner ce qui vous plaît, et qu'il ne sache pas entreprendre ce qui vous offense. Enfin qu'il sache employer une salutaire tempérance, un conseil discret, au moyen desquels il puisse imiter la simplicité des enfants, revendiquer le courage des combattants. Amen."

HYMNE

Le chantre des Mystères et des Martyrs, Prudence, à qui l'Eglise a emprunté les gracieuses strophes Salvete, flores Martyrum, célèbre l'immolation des enfants de Bethlehem, dans sa belle Hymne de l'Epiphanie, à laquelle la Liturgie Romaine a emprunté encore plusieurs de ses chants :


Massacre des Saints Innocents. Fresque de l'église
Saint-Sauveur-in-Chora de Constantinople. Début du XIVe.

" Le tyran soucieux a ouï dire que le Roi des rois vient de naître, celui qui doit régir Israël et occuper le trône de David.

A cette nouvelle, il s'écrie avec transport : " Un compétiteur nous presse ; on nous détrône ; allez, soldats, prenez le fer, inondez de sang les berceaux.

Tuez tout enfant mâle, cherchez jusque dans le sein des nourrices ; que l'épée égorge le fils sur la poitrine même de la mère.

Je soupçonne quelque fraude de la part des mères de Bethlehem ; je crains que quelqu'une ne soustraie son enfant du sexe mâle."

Un bourreau, dans sa fureur, transperce du glaive ces petits Corps à peine nés a la vie ; il poursuit une vie toute nouvelle en eux.

Sur ces faibles membres, à peine le meurtrier trouve-t-il place aux blessures ; son épée dépasse en largeur la gorge même de ses victimes.

Ô spectacle barbare ! La tête des enfants, brisée contre la pierre, répand la cervelle blanche comme le lait, et les yeux sortent par l'horrible blessure.

Ailleurs l'enfant palpitant est précipité dans un gouffre profond ; son faible gosier dispute cruellement le passage à l'eau.

A quoi aura servi un tel forfait ? Quelle utilité apporte ce crime à Hérode ? Seul le Christ échappe au massacre général.

Au milieu des flots du sang des enfants d'un même âge, le fruit de la Vierge évite seul les atteintes du fer qui désolait les mères.

Ainsi fut soustrait à l'édit insensé de l'impie Pharaon, Moïse, libérateur de son peuple et figure du Christ."


Massacre des Saints Innocents. Psautier à l'usage d'Arras. XVe.

SEQUENCE

Nous terminerons par cette antique Prose de Notker, empruntée au recueil de Saint-Gall :

" Louange à vous, Ô Christ ! Fils du Père très bon, Dieu de toute-puissance :

Vous que le brillant concert de ce peuple qui habite au delà des astres, célèbre avec joie dans les cieux ;

Vous que des troupes d'enfants chantent sur les sommets du firmament, dans des hymnes retentissantes.

Ce sont ceux qu'un impie, en haine de votre Nom, immola par une cruelle blessure :

Maintenant, dans les cieux, vous payez, Ô Christ, leurs peines par la gloire, dans votre bonté ;

Usant de votre grâce, par laquelle toujours vous décorez les vôtres de splendides couronnes.

Par leurs prières sacrées, daignez, nous vous en prions, effacer les crimes de notre vie.

Et comme vous les associez à votre gloire, faites-les aussi participer pour nous à votre clémence.

Vous leur donnez la lumière de gloire éternelle : donnez-nous de triompher des choses terrestres ;

Qu'il nous soit donné d'obtenir pleinement, par des actions pures, l'effusion de votre grâce.

De tous ceux qui s'empressent à la louange des Innocents, que nul ne devienne compagnon d'Hérode ;

Mais que tous soient éternellement mêlés à leur troupe glorieuse, en votre présence, Seigneur !

Amen."


Massacre des Saints Innocents. Sano di Pietro. XVe.

PRIERE

" Nous vous quittons aujourd'hui, Ô fleurs des Martyrs ! Mais votre protection demeure sur nous. Dans tout le cours de cette année de la sainte Liturgie, vous veillerez sur nous, vous parlerez pour nous à l'Agneau dont vous êtes les fidèles amis. Nous plaçons sous votre garde les fruits que nos âmes ont produits pendant ces jours de grâce. Nous sommes devenus enfants avec Jésus ; nous recommençons avec lui notre vie : priez, afin que nous croissions comme lui en âge et en sagesse, devant Dieu et devant les hommes. Par votre suffrage, assurez notre persévérance ; et pour cela, maintenez en nous la simplicité chrétienne, qui est la vertu des enfants du Christ.

Vous êtes innocents, et nous sommes coupables ; aimez-nous cependant d'un amour de frères. Vous fûtes moissonnés à l'aurore de la Loi de Grâce ; nous sommes les fils de ces derniers temps dans lesquels le monde envieilli a laissé refroidir la Charité. Tendez vers nous vos palmes victorieuses, souriez à nos combats; demandez que bientôt notre repentir obtienne cette couronne qui vous fut octroyée par une si divine largesse.

Enfants Martyrs ! Souvenez-vous des jeunes générations qui s'élèvent aujourd'hui sur la terre. Dans cette gloire où vous êtes arrivés avant l'âge d'homme, vous ne sauriez oublier les petits enfants. Ces tendres rejetons de la race humaine dorment aussi dans leur innocence. La grâce du Baptême est entière en eux ; et leurs âmes pures réfléchissent comme un miroir la sainteté du Dieu qui les habite par sa grâce. Hélas ! De terribles périls les attendent, ces nouveau-nés ; beaucoup d'entre eux seront souillés ; leurs robes sans tache perdront bientôt, peut-être, cette blancheur dont elle resplendit. La corruption du cœur et de l'esprit les infectera ; et qui pourra les soustraire à d'affreuses influences ? La voix des mères retentit encore dans Rama ; Rachel chrétienne pleure ses fils immolés ; et rien ne peut la consoler de la perte de leurs âmes. Innocentes victimes du Christ ! priez pour les enfants. Obtenez-leur des temps meilleurs : qu'ils puissent un jour entrer dans la vie, sans avoir à redouter d'y rencontrer la mort dès le premier pas."

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jeudi, 04 janvier 2024 | Lien permanent | Commentaires (1)

5 février. Sainte Agathe, vierge et martyre. 251.

- Sainte Agathe, vierge et martyre. 251.

Pape : Saint Corneille. Empereurs romains (période de l'anarchie militaire) : Trajan Dèce ; Herennius Etruscus ; Trébonien Galle ; Hostulien ; Volusien.

" A la messe, immédiatement après l'élévation, le prêtre récite une oraison où il prie Dieu de nous faire participer à la gloire des Apôtres et des Martyrs... Dans cette prière sont nommés plusieurs saints, entre autres sainte Agathe. Pour être jugée digne de l'honneur que lui fait l'Eglise de répéter son nom à tant de messes, depuis tant de siècles, il faut que sa sainteté ait été bien grande et bien extraordinaire.
Le doigt de Dieu est ici ! Cette gloire vient de Dieu ! Glorifions Dieu dans les saints !"


Francisco de Zurbaran. XVIIe.

Déjà deux de ces quatre illustres Vierges dont le souvenir est associé aux mérites de l'Agneau, dans la célébration du Sacrifice, ont passé devant nous dans leur marche triomphale sur le Cycle de la sainte Eglise ; la troisième se lève aujourd'hui sur nous, comme un astre aux plus doux rayons. Après Lucie et Agnès, Agathe vient nous consoler par sa gracieuse visite. La quatrième, l'immortelle Cécile, se lèvera en son temps, lorsque l'année inclinant à sa fin, le ciel de l'Eglise paraîtra tout à coup resplendissant de la plus magnifique constellation. Aujourd'hui fêtons Agathe, la Vierge de Sicile, la sœur de Lucie. Que les saintes tristesses du temps où nous sommes n'enlèvent rien à la plénitude des hommages qui sont dus à Agathe. En chantant sa gloire, nous contemplerons ses exemples ; du haut du ciel elle daignera nous sourire, et nous encourager dans la voie qui seule peut nous ramener à celui qu'elle a suivi noblement jusqu'à la fin, et auquel elle est réunie pour jamais.


Sainte Agathe. Tableau processionnel. Jacopo del Casentino. XIVe.

Agathe tire son nom de agios, qui veut dire saint, et de Theos, Dieu, Sainte de Dieu.
Trois qualités font les saints, comme dit saint Jean Chrysostome, et elles furent toutes réunies en elle. Elles sont : la pureté du coeur, la présence de l’Esprit-Saint et l’abondance des bonnes oeuvres.

Ou bien Agathe vient encore de a privatif, sans, de geos terre, et Theos, Dieu, comme on dirait une divinité sans terre, c'est-à-dire, sans amour des biens de la terre.

Ce mot viendrait encore, de aga, qui signifie parlant et thau, consommation, comme ayant parlé d'une manière consommée et parfaite, ainsi qu'on peut s'en assurer par ses réponses.
Ou bien il viendrait d'agath, esclavage et thaas, souverain, ce qui voudrait dire servitude souveraine, par rapport à ces paroles qu'elle prononça :
" C'est une souveraine noblesse que celle par laquelle on prouve qu'on est au service de Notre Seigneur Jésus-Christ."

Agathe viendrait encore d'aga, solennel, et thau, consommé, comme si on disait consommée ; ensevelie solennellement ; puisque les anges lui rendirent ce bon office.

Deux villes de Sicile, Palerme et Catane, se disputent l'honneur d'avoir donné naissance à sainte Agathe ; ce qui est certain, c'est qu'elle fut martyrisée à Catane, sous l'empereur Dèce.

Sainte Agathe, vierge de race noble et très belle de corps, honorait sans cesse Dieu en toute sainteté dans la ville de Catane. Or, Quintien, consulaire en Sicile, homme ignoble, voluptueux, avare et adonné à l’idolâtrie, faisait tous ses efforts pour se rendre maître d'Agathe.
Comme il était de basse extraction, il espérait en imposer en s'unissant à une personne noble ; étant voluptueux, il aurait joui de sa beauté ; en s'emparant de ses biens, il satisfaisait son avarice ; puisqu'il était idolâtre, il la contraindrait d'immoler aux dieux.
Il se la fit donc amener. Arrivée en sa présence, et avant connu son inébranlable résolution, il la livra entre les mains d'une femme de mauvaise vie nommée Aphrodisie, et à ses neuf filles débauchées comme leur mère, afin que, dans l’espace de trente jours, elles la fissent changer de résolution.


Eglise Sainte Agathe. Catane, Sicile.

Elles espéraient ; soit par de belles promesses, soit par des menaces violentes, qu'elles la détourneraient de son bon propos. La bienheureuse Agathe leur dit :
" Ma volonté est assise sur la pierre et à Notre Seigneur Jésus-Christ pour base ; vos paroles sont comme le vent, vos promesses comme la pluie, les terreurs que vous m’inspirez comme les fleuves. Quels que soient leurs efforts, les fondements de ma maison restent solides, rien ne pourra l’abattre."
En s'exprimant de la sorte, elle ne cessait de pleurer et chaque jour elle priait avec le désir de parvenir à la palme du martyre. Aphrodisie voyant Agathe rester inébranlable dit à Quintien :
" Amollir les pierres, et donner au fer, la flexibilité du plomb serait plus facile que de détourner l’âme de cette jeune fille des pratiques chrétiennes et de la,faire changer."

Le juge alors fit comparaître la servante du Seigneur devant son tribunal :
" Qui es-tu ?
- Je suis noble et d'une illustre famille, toute ma parenté le fait assez connaître.
- Pourquoi donc suis-tu la chétive condition des chrétiens ?
- Parce que la véritable noblesse s'acquiert avec Jésus-Christ dont je me dis la servante.
- Quoi donc ! sommes-nous dégradés de noblesse pour mépriser ton Crucifié ?
- Oui, tu perds la véritable liberté en te faisant esclave du démon jusqu'au point d'adorer des pierres pour lui faire honneur."


Sainte Agathe en prison. Martyre de sainte Agathe.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Afin d'apprendre à la jeune fille à mieux parler, Quintianus la fit frapper sur la joue, et commanda qu'on la conduisit en prison, lui disant qu'elle eût à se préparer à renier Jésus-Christ ou à mourir dans les tourments. Le lendemain, le juge essaya de gagner Agathe par des promesses, mais il la trouva inébranlable, et ses réponses excitèrent tellement la rage du persécuteur, que, sur son ordre, on tordit et on arracha une mamelle à la Sainte. Elle dit à Quintianus :
" N'as-tu pas honte, Ô cruel tyran, de me faire souffrir de cette façon, toi qui as sucé ta première nourriture du sein d'une femme ?"

Quand elle fut rentrée dans la prison où le préfet avait défendu de lui rien donner, saint Pierre lui apparut et la guérit au nom du Sauveur ; la Sainte s'écria :
" Je Vous rends grâces, Ô mon Seigneur Jésus-Christ, de ce qu'il Vous a plu de m'envoyer Votre Apôtre afin de guérir mes plaies et de me rendre ce que le bourreau m'avait arraché."
La prison fut remplie d'une si éclatante lumière que les gardiens s'enfuirent épouvantés, laissant les portes ouvertes.

Les autres prisonniers conseillaient à Agathe de prendre la fuite, mais elle répondit :
" Dieu me garde de quitter le champ de bataille et de m'enfuir en voyant une si belle occasion de remporter la victoire sur mes ennemis."


Martyre de sainte Agathe.
Livre d'images de Madame Marie. Hainaut. XIIIe.

Quatre jours après, Agathe fut ramenée devant le juge qui, la voyant saine et sauve, fut rempli d'étonnement ; sa rage n'en devint que plus grande. Par son ordre, on roula la Sainte sur des têts de pots cassés et sur des charbons, en même temps que l'on perçait son corps de pointes aiguës.

Tout à coup au même moment un grand tremblement de terre ébranla toute la ville, et deux murailles en s'écroulant écrasèrent Silvin et Falconius, amis intimes du gouverneur. La ville étant en proie à une vive émotion, Quintianus, qui craignait quelque sédition dans le peuple, fait ramener secrètement Agathe demi-morte dans sa prison. Elle y fit ces prières a Dieu :
" Seigneur, qui m'avez gardée dès mon enfance, qui avez enlevé de mon cœur l'amour du monde, et qui m'avez fait surmonter la rigueur des tourments, recevez mon âme."
" Ouvrez, Seigneur, les bras de Votre miséricorde, et recevez mon esprit qui désire Vous posséder avec tous les transports d'amour dont il est capable."
En finissant cette prière, elle passa de la terre au ciel, le jour des nones de février ; son corps fut enseveli par les chrétiens.


Martyre de sainte Agathe. Giambattista Tiepolo. XVIe.

Aussitôt que la nouvelle de cette mort se fut répandue, toute la ville accourut pour honorer les restes de sainte Agathe, et au moment où on voulut la mettre dans le tombeau, cent Anges, sous la figure de jeunes hommes, apparurent, et au front d'Agathe inscrivirent ces mots :
" C'est une âme sainte ; elle a rendu un honneur volontaire à Dieu et elle est la rédemption de sa patrie."
Quintianus, de son côté, était parti pour se mettre en possession des biens de la servante de Dieu, mais au passage d'une rivière, un cheval le mordit au visage et un autre, à coups de pieds, le précipita dans l'eau où il se noya.

Un an exactement après sa mort l'Etna entra à en éruption. Voyant la lave arriver sur la ville, les habitants placèrent le voile qui recouvrait le corps de Ste Agathe devant le feu, ce qui le stoppa sur le champ.

La dévotion à sainte Agathe ne tarda pas de se répandre partout, mais nulle part elle ne fut plus honorée qu'à Catane. Plusieurs fois sa protection a sauvé cette ville des éruptions de l'Etna, et pour cela il suffisait aux habitants de donner, comme barrière aux torrents de lave qui descendaient de la montagne, un objet qui avait touché le corps de la Sainte.


Le martyre de sainte Agathe. Psautier à l'usage de Reims. XIIIe.

Voici ce que dit saint Ambroise en parlant de cette vierge, en sa préface :
" Ô heureuse et illustre vierge qui mérita de purifier son sang par, un généreux martyre pour la gloire du Seigneur ! Ô glorieuse et noble vierge, illustrée d'une double gloire, pour avoir fait toutes sortes de miracles au milieu des plus cruels tourments, et qui, forte d'un secours mystérieux, a mérité d'être guérie par la visite de l’apôtre ! Les cieux reçurent cette épouse du Christ ; ses restes mortels sont l’objet d'un glorieux respect. Le chœur des anges y proclame la sainteté de son âme et lui attribue la délivrance de sa patrie."

Il se fait chaque année à Catane, et encore aujourd'hui, une procession qui dure deux jours.


HYMNE

Les anciens Livres liturgiques sont remplis de compositions poétiques en l'honneur de sainte Agathe ; mais elles sont généralement assez faibles. Nous nous bornerons donc à donner ici la belle Hymne que lui a consacrée le Pape saint Damase :


Saint Marin, sainte Agathe et saint Barnabé. Anonyme italien. XVIIIe.

" Voici le jour de la Martyre Agathe, le jour illuminé par cette illustre Vierge ; c'est aujourd'hui qu'elle s'unit au Christ, et qu'un double diadème orne son front.

Noble de race et remarquable en beauté, elle brillait plus encore par ses œuvres et par sa foi ; le bonheur de la terre ne fut rien à ses yeux ; elle fixa sur son cœur les préceptes de Dieu.

Plus indomptable que le bras des bourreaux, elle livre à leurs fouets ses membres délicats ; sa mamelle arrachée de sa poitrine montre combien invincible est son courage.

Le cachot est pour elle un séjour de délices ; c'est là que Pierre le Pasteur vient guérir sa brebis ; pleine de joie et toujours plus enflammée, elle court avec une nouvelle ardeur au-devant des tourments.

Une cité païenne en proie à l'incendie l'implore et obtient son secours ; qu'elle daigne bien plus encore éteindre les feux impurs en ceux qu'honore le titre de chrétien.

Ô toi qui resplendis au ciel comme l'Epouse, supplie le Seigneur pour les pauvres pécheurs ; que leur zèle à célébrer ta fête attire sur eux tes faveurs.

Gloire soit au Père, au Fils et à l'Esprit divin ; daigne le Dieu unique et tout-puissant nous accorder l’intercession d'Agathe.

Amen."


Sainte Agathe. Tableau processionnel.
Jacopo di Marcovaldo. XIIIe siècle.

PRIERE

" Que vos palmes sont belles, Ô Agathe ! Mais que les combats dans lesquels vous les avez obtenues furent longs et cruels ! Vous avez vaincu; vous avez sauvé en vous la foi et la virginité ; mais votre sang a rougi l'arène, et vos glorieuses blessures témoignent, aux yeux des Anges, du courage indomptable avec lequel vous avez gardé fidélité à l'Epoux immortel. Après les labeurs des combats, vous vous tournez vers lui, et bientôt votre âme bénie s'élance dans son sein, pour aller jouir de ses embrassements éternels. Toute l'Eglise vous salue aujourd'hui, Ô Vierge, Ô Martyre ! Elle sait que vous ne l'oubliez jamais, et que votre inénarrable félicité ne vous rend point indifférente à ses besoins. Vous êtes notre sœur ; soyez aussi pour nous une mère. De longs siècles se sont écoulés depuis le jour où votre âme brisa son enveloppe mortelle, après l'avoir sanctifiée par la pureté et la souffrance ; mais, hélas ! Jusqu'aujourd'hui et toujours, sur cette terre, la guerre existe entre l'esprit et la chair. Assistez vos frères dans leurs combats ; ranimez dans leurs cœurs l'étincelle du feu sacré que le monde et les passions voudraient éteindre.


Buste reliquaire de Sainte Agathe porté en procession.
Catane. Sicile.

En ces jours, où tout chrétien doit songer à se retremper dans les eaux salutaires de la componction, ranimez partout la crainte de Dieu qui veille sur les envahissements d'une nature corrompue, l'esprit de pénitence qui répare les faiblesses coupables, l'amour qui adoucit le joug et assure la persévérance. Plus d'une fois, votre voile virginal, présenté aux torrents enflammés des laves qui descendaient des flancs de l'Etna, les arrêta dans leur cours, aux yeux d'un peuple tout entier : opposez, il en est temps, la puissante influence de vos innocentes prières à ce torrent de corruption qui déborde de plus en plus sur nous, et menace d'abaisser nos mœurs au niveau de celles du paganisme. Le temps presse, Ô Agathe ! Secourez les nations infectées des poisons d'une littérature infâme ; détournez cette coupe vénéneuse des lèvres de ceux qui n'y ont pas goûté encore ; arrachez-la des mains de ceux qui déjà y ont puisé la mort. Epargnez-nous la honte de voir le triomphe de l'odieux sensualisme qui s'apprête à dévorer l'Europe, et déjouez les projets que l'enfer a conçus."

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lundi, 05 février 2024 | Lien permanent | Commentaires (1)

27 décembre. Saint Jean, Apôtre et Evangéliste. 101.

- Saint Jean, Apôtre et Evangéliste. 101.

Pape : Saint Evariste. Empereur romain : Trajan.

" Mes petits enfants, aimez-vous les uns les autres."

Précepte favori de saint Jean.

" Comme évangéliste, saint Jean a été un oracle de vérité ; comme apôtre, il a été un modèle de fidélité ; comme disciple de Jésus, il a été un modèle de charité."
Du Jarry. Essais de panégyriques.


Notre Seigneur Jésus-Christ entouré de Notre Dame et de saint Jean.
Rogier van der Weyden. XVe.

Après Etienne, le premier des Martyrs, Jean, l'Apôtre et l'Evangéliste, assiste le plus près à la crèche du Seigneur. Il était juste que la première place fût réservée à celui qui a aimé l'Emmanuel jusqu'à verser son sang pour son service ; car, comme le dit le Sauveur lui-même, il n'est point de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime (Johan. XV, 13.) ; et le Martyre a toujours été considéré par l'Eglise comme le dernier effort de la charité, ayant même la vertu de justifier le pécheur dans un second Baptême. Mais après le sacrifice du sang, le plus noble, le plus courageux, celui qui gagne par-dessus tout le cœur de l'Epoux des âmes, c'est le sacrifice de la virginité. Or, de même que saint Etienne est reconnu pour le type des Martyrs, saint Jean nous apparaît comme le Prince des Vierges. Le Martyre a valu à Etienne la couronne et la palme ; la Virginité a mérité à Jean des prérogatives sublimes, qui, en même temps qu'elles démontrent le prix de la chasteté, placent aussi ce Disciple parmi les principaux membres de l'humanité.

Jean eut l'honneur de naître du sang de David, dans la famille même de la très pure Marie ; il fut donc parent de notre Seigneur, selon la chair. Un tel honneur lui fut commun avec saint Jacques le Majeur, son frère, fils de Zébédée comme lui ; avec saint Jacques le Mineur et saint Jude, fils d'Alphée ; mais, dans la fleur de sa jeunesse, Jean laissa, non seulement sa barque et ses filets, non seulement son père, mais sa fiancée, au moment de célébrer de chastes noces. Il suivit le Christ et ne regarda pas en arrière ; c'est pourquoi la tendresse particulière du cœur de Jésus lui fut acquise ; et tandis que les autres étaient Disciples et Apôtres, il fut l'Ami du Fils de Dieu. La raison de cette rare prédilection fut donc, ainsi que le proclame l'Eglise, le sacrifice de virginité que Jean offrit à l'Homme-Dieu. Or, il convient de relever ici, au jour de sa fête, les grâces et les prérogatives qui ont découlé pour lui de l'heureux avantage de cette amitié céleste.


Saint Jean. Simone Martini. XIVe.

Ce seul mot du saint Evangile : " le Disciple que Jésus aimait ", en dit plus, dans son admirable concision, que tous les commentaires. Pierre, sans doute, a été choisi pour être le Chef des autres Apôtres et le fondement de l'Eglise ; il a été plus honoré ; mais Jean a été plus aimé. Pierre a reçu l'ordre d'aimer plus que les autres ; il a pu répondre au Christ, par trois fois, qu'il en était ainsi ; cependant, Jean a été plus aimé du Christ que Pierre lui-même, parce qu'il convenait que la virginité fût honorée.

La chasteté des sens et du cœur a la vertu d'approcher de Dieu l'homme qui la conserve, et d'attirer Dieu vers lui ; c'est pourquoi, dans le moment solennel de la dernière Cène, de cette Cène féconde qui devait se renouveler sur l'autel jusqu'à la fin des temps, pour ranimer la vie dans les âmes et guérir leurs blessures, Jean fut placé auprès de Jésus lui-même, et non seulement il eut cet honneur insigne, mais dans ces derniers épanchements de l'amour du Rédempteur, ce fils de sa tendresse osa reposer sa tête sur la poitrine de l'Homme-Dieu. Ce fut alors qu'il puisa, à leur source divine, la lumière et l'amour ; et cette faveur, qui était déjà une récompense, devint le principe de deux grâces signalées qui recommandent spécialement saint Jean à l'admiration de toute l'Eglise.


Déposition avec Notre Dame et saint Jean - Panneau central.
Quentin Massys. Anvers. Flandres. XVe.

En effet, la Sagesse divine ayant voulu manifester le mystère du Verbe, et confier à l'écriture des secrets que jusqu'alors aucune plume humaine n'avait été appelée à raconter, Jean fut choisi pour ce grand œuvre. Pierre était mort sur la croix, Paul avait livré sa tête au glaive, les autres Apôtres avaient successivement scellé leur témoignage de leur sang ; Jean restait seul debout, au milieu de l'Eglise ; et déjà l'hérésie, blasphémant l'enseignement apostolique, cherchait à anéantir le Verbe divin, et ne voulait plus le reconnaître pour le Fils de Dieu, consubstantiel au Père.

Jean fut invité par les Eglises à parler, et il le fit dans un langage tout du ciel. Son divin Maître lui avait réservé, à lui, pur de toute souillure, d'écrire de sa main mortelle des mystères que ses frères n'avaient été appelés qu'à enseigner : le Verbe, Dieu éternel, et ce même Verbe fait chair pour le salut de l'homme. Par là il s'éleva, comme l'Aigle, jusqu'au divin Soleil ; il le contempla sans en être ébloui, parce que la pureté de son âme et de ses sens l'avait rendu digne d'entrer en rapport avec la Lumière incréée. Si Moïse, après avoir conversé avec le Seigneur dans la nuée, se retira de ces divins entretiens le font orné de merveilleux rayons, combien radieuse devait être la face vénérable de Jean, qui s'était appuyée sur le Cœur même de Jésus, où, comme parle l'Apôtre, sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science (Col. II, 3.) ! combien lumineux ses écrits ! combien divin son enseignement ! Aussi, ce type sublime de l'Aigle montré par Ezéchiel, et confirmé par saint Jean lui-même dans sa Révélation, lui a-t-il été appliqué par l'Eglise, avec le beau nom de Théologien que lui donne toute la tradition.


Saint Jean. Alessandro Algardi. XVIIe.

A cette première récompense qui consiste dans la pénétration des mystères, le Sauveur joignit pour son bien-aimé Disciple une effusion d'amour inaccoutumée, parce que la chasteté, en désintéressant l'homme des affections grossières et égoïstes, l'élève à un amour plus pur et plus généreux. Jean avait recueilli dans son cœur les discours de Jésus : il en fit part à l'Eglise, et surtout il révéla le divin Sermon de la Cène, où s'épanche l'âme du Rédempteur, qui, ayant aimé les siens, les aima jusqu'à la fin (Johan. XIII, 1.). Il écrivit des Epîtres, et ce fut pour dire aux hommes que Dieu est amour (I Johan. IV, 8.) ; que celui qui n'aime pas ne connaît pas Dieu (Ibid.) ; que la charité bannit la crainte (Ibid. 18.). Jusqu'à la fin de sa vie, jusque dans les jours de son extrême vieillesse, il insista sur l'amour que les hommes se doivent les uns aux autres, à l'exemple du Dieu qui les a aimés ; et de même qu'il avait annoncé plus clairement que les autres la divinité et la splendeur du Verbe, ainsi plus que les autres se montra-t-il l'Apôtre de cette infinie charité que l'Emmanuel est venu allumer sur la terre.

Mais le Seigneur lui réservait un don véritablement digne du Disciple vierge et bien-aimé. En mourant sur la croix, Jésus laissait Marie sur la terre ; déjà, depuis plusieurs années, Joseph avait rendu son âme au Seigneur. Qui veillerait donc sur un si sacré dépôt ? qui serait digne de le recevoir ? Jésus enverrait-il ses Anges pour garder et consoler sa Mère : Car quel homme sur la terre mériterait un tel honneur ? Du haut de sa croix, le Sauveur aperçut le disciple vierge ; tout est fixé : Jean sera un fils pour Marie, Marie sera une mère pour Jean ; la chasteté du disciple l'a rendu digne de recevoir un legs si glorieux. Ainsi, suivant la belle remarque de saint Pierre Damien, " Pierre recevra en dépôt l'Eglise, Mère des hommes ; mais Jean recevra Marie, Mère de Dieu ". Il la gardera comme son bien, il remplacera auprès d'elle son divin Ami ; il l'aimera comme sa propre mère ; il en sera aimé comme un fils.

Retable de saint Jean. Panneau central. Notre Dame et son divin
Enfant avec saint Jean-Baptiste et saint Jean. Hans Memling. XVe.

Environné de tant de lumière, réchauffé par tant d'amour, nous étonnerons-nous que Jean soit devenu l'ornement de la terre, la gloire de l'Eglise ? Aussi, comptez, si vous pouvez, ses titres ; énumérez ses qualités. Parent du Christ par Marie, Apôtre, Vierge, Ami de l'Epoux, Aigle divin, Théologien sacré, Docteur de la Charité, fils de Marie, il est encore Evangéliste par le récit qu'il nous a laissé de la vie de son Maître et Ami ; Ecrivain sacré par ses trois Epîtres inspirées de l'Esprit-Saint ; Prophète par sa mystérieuse Apocalypse, qui renferme les secrets du temps et de l'éternité. Que lui a-t-il donc manqué ? La palme du Martyre ? On ne le saurait dire ; car, s'il n'a pas consommé son sacrifice, il a néanmoins bu le calice de son Maître lorsque, après une cruelle flagellation, il fut plongé dans l'huile bouillante, devant la Porte-Latine, à Rome. Jean fut donc Martyr de désir et d'intention, sinon d'effet ; et si le Seigneur, qui le voulait conserver dans son Eglise comme un monument de son estime pour la chasteté et des honneurs qu'il réserve à cette vertu arrêta miraculeusement l'effet d'un affreux supplice, le cœur de Jean n'en avait pas moins accepté le Martyre dans toute son étendue.

Tel est le compagnon d'Etienne, près du berceau dans lequel nous honorons l'Enfant divin. Si le Proto-martyr éclate par la pourpre de son sang, la blancheur virginale du fils adoptif de Marie n'est-elle pas éblouissante au-dessus de celle de la neige ? Les lis de Jean ne peuvent-ils pas marier leur innocent éclat à la vermeille splendeur des roses de la couronne d'Etienne ? Chantons donc gloire au Roi nouveau-né, dont la cour brille de si riantes et de si fraîches couleurs. Cette céleste compagnie s'est formée sous nos yeux. D'abord nous avons vu Marie et Joseph seuls dans l'étable auprès de la crèche ; l'armée des Anges a bientôt paru avec ses mélodieuses cohortes ; les bergers sont venus ensuite avec leurs cœurs humbles et simples ; puis, voici Etienne le Couronné, Jean le Disciple chéri ; et en attendant les Mages, d'autres viendront bientôt accroître l'éclat de la pompe, et réjouir de plus en plus nos cœurs. Quelle Naissance que celle de notre Dieu ! Si humble qu'elle paraisse, combien elle est divine ! Et quel Roi de la terre, quel Empereur a jamais eu autour de son splendide berceau des honneurs pareils à ceux de l'Enfant de Bethléhem ?


Saint Jean. Diego Velasquez. XVIIe.

Unissons nos hommages à ceux qu'il reçoit de tous ces heureux membres de sa cour ; et si nous avons hier ranimé notre foi, à la vue des palmes sanglantes d'Etienne, aujourd'hui réveillons en nous l'amour de la chasteté, à l'odeur des célestes parfums que nous envoient les fleurs de la virginale couronne de l'Ami du Christ.

Jean, dernier survivant de la première génération chrétienne, se trouvait à Rome au temps où la persécution de Domitien était dans son fort. Le fait paraît incontestable, seules les circonstances qui l'accompagnèrent demeurent dans le vague. Il faut donc s'en tenir à ce que nous savons et laisser dans l'oubli qu'elles méritent les fantaisies légendaires dora on a entouré le martyre du vieil apôtre. Il paraît avoir souffert vers l'endroit où exista plus tard la porte Latine, laquelle ne reçut ce nom que dans l'enceinte d'Aurélien commencée en 271. A la suite de cet événement miraculeux, l'administration romaine déporta Jean dans l'île de Patmos.


Ebouillantement de saint Jean. Bartolommeo Di Giovanni. XVe.

Jean veut dire grâce de Dieu, ou en qui est la grâce, ou auquel la grâce a été donnée, ou auquel un don a été fait de la part de Dieu.

De là quatre privilèges de saint Jean :

- Le premier fut l’amitié particulière de Notre Seigneur Jésus-Christ. En effet, le Sauveur aima saint Jean plus que les autres apôtres et lui donna de plus grandes marques d'affection et de familiarité. Il veut donc dire grâce de Dieu parce qu'il fut gracieux à Dieu. Il paraît même qu'il a été aimé plus que Pierre. Mais il y a amour de coeur et démonstration de cet amour. On trouve deux sortes de démonstrations d'amour : l’une qui consiste dans la démonstration de la familiarité, et l’autre dans les bienfaits accordés. Il aima Jean et Pierre également. Mais quant à l’amour de démonstration, il aima mieux saint Jean, et quant aux bienfaits donnés, il préféra Pierre.

- Le second privilège est la parole de la chair ; en effet, saint Jean a été choisi vierge par le Seigneur ; alors en lui est la grâce, c'est-à-dire la grâce de la pureté virginale, puisqu'il voulait se marier quand Notre Seigneur Jésus-Christ l’appela
(c'est l’opinion de Bède, Sermon des Jean ; de Rupert, Sur Saint Jean, ch. I ; de saint Thomas d'Aquin, t. II, p. 186 ; de sainte Gertrude en ses Révélations, liv. IV, c. IV.).

- Le troisième privilège, c'est la révélation des mystères : en effet, il lui a été donné de connaître beaucoup de mystères, par exemple, ce qui concerne la divinité du Verbe et la fin du monde.

- Le quatrième privilège, c'est d'avoir été chargé du soin de la mère de Dieu : alors on, peut dire qu'il a reçu un don de Dieu. Et c'était le plus grand présent que le Seigneur put faire que de lui,confier le soin de sa mère. Sa vie a été écrite par Miletus
(le livre de Miletus a été publié en dernier lieu à Leipsig, par Heine, 1848. Il est reproduit ici en majeure partie), évêque de Laodicée, et abrégée par Isidore dans son livre De la naissance, de la vie et de la mort des Saints Pères.


L'Immaculée Conception et saint Jean. El Greco. XVIe.

Jean, apôtre et évangéliste, le bien-aimé du Seigneur, avait été élu alors qu'il était encore vierge. Après la Pentecôte, et quand les apôtres se furent séparés, il partit pour l’Asie, où il fonda un grand nombre d'églises. L'empereur Domitien, qui entendit parler de lui, le fit venir et jeter dans une cuve d'huile bouillante, à la porte Latine. Il en sortit sain et entier, parce qu'il avait vécu affranchi de la corruption de la chair (Tertullien, Prescriptions, ch. XXXVI).

L'empereur ayant su que Jean n'en continuait pas moins à prêcher, le relégua en exil dans l’île inhabitée de Pathmos et où le saint écrivit l’Apocalypse. Cette année-là, l’empereur fut tué en haine de sa grande cruauté et tous ses actes furent annulés par le sénat ; en sorte que saint Jean, qui avait été bien injustement déporté dans cette île, revint à Ephèse, où il fut reçu avec grand honneur par tous les fidèles qui se pressèrent au-devant de lui en disant :
" Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur."
Il entrait dans la ville, comme on portait en terre Drusiane qui l’aimait beaucoup et qui aspirait ardemment son arrivée. Les parents, les veuves et les orphelins lui dirent :
" Saint Jean, c'est Drusiane que nous allons inhumer ; toujours elle souscrivait à vos avis, et nous nourrissait tous ; elle souhaitait vivement votre arrivée, en disant " Ô si j'avais le bonheur de voir l’apôtre de Dieu avant de mourir !" Voici que vous arrivez et elle n'a pu vous voir."
Alors Jean ordonna de déposer le brancard et de délier le cadavre :
" Drusiane, dit-il, que mon Seigneur Jésus-Christ te ressuscite, lève-toi, va dans ta maison et me prépare de la nourriture."
Elle se leva aussitôt, et s'empressa d'exécuter l’ordre de l’apôtre, tellement qu'il. lui semblait qu'il l’avait réveillée et non pas ressuscitée.


Saint Jean et la coupe de Poison. Alonso Cano. XVIIe.

Le lendemain, Craton le philosophe convoqua le peuple sur la place

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mercredi, 27 décembre 2023 | Lien permanent | Commentaires (4)

20 janvier. Saint Fabien, pape et martyr. 250.

- Saint Fabien, pape et martyr. 250.

Papes : Saint Antère (prédécesseur, 236+) ; Saint Corneille (successeur). Empereur romain (période de l'anarchie militaire) : Trajan Dèce.

" Il est digne ! Il est digne !"
Acclamation des électeurs à l'élection de saint Fabien.


Election de saint Fabien. Jacques Huguet l'Ancien. XVe.

L'un des deux grands Martyrs qui partagent, sur le Cycle, les honneurs de cette journée, saint Fabien (l'autre étant saint Sébastien), fut Pontife de l'Eglise de Rome. Saint Fabien reçut la couronne du martyre l'an 250, sous la persécution de Trajan Dèce. Considérons les mérites de cet deux athlètes du Christ.

A l'exemple de ses prédécesseurs, saint Clément et saint Anthéros, le saint Pape Fabien prit un soin particulier de faire rédiger les Actes des Martyrs ; mais la persécution de Dioclétien, qui nous a privés d'un si grand nombre de ces précieux monuments condamnés aux flammes par les édits impériaux, nous a ravi le récit des souffrances et du martyre de notre saint Pontife. Quelques traits seulement de sa vie pastorale sont arrivés jusqu'à nous ; mais nous pouvons prendre une idée de ses vertus, par l'éloge que fait de lui saint Cyprien, qui l'appelle un homme incomparable, dans une Lettre qu'il écrit au Pape saint Corneille, successeur de Fabien.

L'évêque de Carthage célèbre aussi la pureté et la sainteté de la vie du saint Pontife, qui domina d'un front tranquille les orages dont l'Eglise fut agitée de son temps. On aime à contempler cette tête calme et vénérable sur laquelle une colombe alla se reposer, pour désigner dans Fabien le successeur de Pierre, le jour où le peuple et le clergé de Rome étaient réunis pour l'élection d'un Pontife, après le martyre d'Anthéros. Ce rapport avec le Christ désigné pour le Fils de Dieu, dans les eaux du Jourdain, par la divine colombe, rend plus sacré encore le touchant caractère de Fabien. Dépositaire de la puissance de régénération qui réside dans les eaux depuis le baptême du Christ, il eut à cœur la propagation du Christianisme ; et parmi les Evêques qu'il sacra pour annoncer la foi en divers lieux, l'Eglise des Gaules en reconnaît plusieurs pour ses principaux fondateurs.


Saint Fabien et saint Sébastien. Paolo di Giovanni. XIVe.

Fabien, comme on dirait fabriquant la béatitude suprême, c'est-à-dire se l’acquérant à un triple droit, d'adoption, d'achat et de combat.

Saint Fabien, romain d'origine, était fils de Fabius. Le pontificat de saint Antère, dit saint Eusèbe de Césarée, n'avait duré qu'un mois. On rapporte qu'après le martyr de ce pape, Fabien revenait de la campagne avec quelques amis, lorsqu'il fut soudain et par une merveilleuse disposition de la grâce divine, appelé inopinément à la tête du clergé. Fabien entra dans l'Eglise au moment où tous les frères étaient réunis pour procéder à l'élection. Nul ne songeait à l'élire.

Plusieurs se préoccupaient de donner leurs suffrages à quelque nobles et illustres personnages. En effet, Gordien (le père), procclamé empereur par les légions campées en Afrique, était entré, par son mariage avec Fabia Orestia, dans cette grande famille des Fabii, dont le pape saint Fabien était lui-même un mùembre. On conçoit dès lors comment l'élection pontificale des catacombes, coïncidant avec l'acclamation de l'armée, du Sénat et du peuple en faveur des deux empereurs Gordien, pouvait être, au point de vue humain, d'une humilité immense pour l'Eglise.


Saint Fabien et saint Sébastien. Graduel à l'usage de
l'abbaye Notre-Dame de Fontevrault. XIIIe.

Tout à coup, une colombe, descendue par un des lucernaires de la catacombe, vint se reposer sur sa tête. Elle semblait rappeler celle dont l'Esprit-Saint avait revêtu la forme pour descendre sur le Sauveur, aux rives du Jourdain. L'assemblée, émue à ce spectacle et manifestement inspirée de l'Esprit de Dieu, poussa dans un transport d'allégresse l'acclamation unanime :
" Il est digne ! Il est digne !"
Malgré la résistance de Fabien, on l'entera et on le fit asseoir sur le trône pontifical.

Saint Fabien fut le premier pape élu simple laïque, pour être élevé au sommet de la hiérarchie sacrée. Il justifia par toute sa vie ce choix miraculeux. Il assigna un diacre à chacune des sept régions de la Rome chrétienne, et y plaça aussi un sous-diacre pour diriger les notaires chargés de reccueillir intégralement les Actes des Martyrs.

Saint Fabien défendit que les juges séculiers se mêlassent des causes ecclésiastiques. Il interdit aussi le mariage par affinité aux personnes alliées jusqu'au cinquième degré ; n'entendant néanmoins pas que les mariages dans le quatrième degré, faits et consommés, fussent rompus.

Il ordonna que les fidèles communiassent au moins aux trois fêtes principales fêtes de l'année.

Il statua également que, tous les ans, au jour de la Cène du Seigneur, on renouvellerait le saint Chrême, après avoir brûlé l'ancien.

Par ses ordres, de nombreuses constructions furent exécutées dans les cimetières et les galeries des catacombes.


Saint Fabien et Philippe l'Arabe. Legenda aurea.
Bx J. de Voragine. R. de Montbaston. XIVe.

La fin du pontificat de saint Fabien correspondait au règne de Philippe l'Arabe, qui était chrétien ainsi que sa femme, l'impératrice Severa. Mais le César eut peur d'agir en chrétien. Dieu ne voulait pas qu'un homicide arborât le premier le drapeau pacifique de la Croix sur le monde. Philippe, en arrivant au trône avait mis à mort le fils de son ancien maître ; c'est pourquoi la veille de Pâques, quand il se présenta à l'Eglise d'Antioche, le patriarche saint Babylas refusa de lui en ouvrir les portes. L'empreur se soumit. Pourtant il ne rendit de services à l'Eglise qu'en ce sens qu'il ne la persécuta point, et même, lors de la célébration du premier millésime romain, il ne permit ni les combats de gladiateurs, ni les massacres du cirques ; le souffle chrétien avait visiblement inspiré l'empereur.

Saint Fabien profita de la paix qui régnait alors pour répandre de plus en plus les lumières de l'Evangile. Allié par la naissance à la famille impériale des Gordiens et à presque toutes celles de l'ancien patriarcat de Rome, il dut étendre les conquêtes de la foi dans les plus hauts rangs de la société, où l'on voyait, à la fin du IIIe siècle, un si grand nombre d'illustres Chrétiens. Les églises, ruinées pendant les persécutions précédentes, furent réparées et ornées avec le plus de décence possible.

Haymon rapporte que l’empereur Philippe, voulant assister aux vigiles de Pâques et participer aux mystères, il lui résista et ne lui permit d'y assister qu'après avoir confessé ses péchés et être resté parmi les pénitents.


Décollation de saint Fabien.
Benvenuto di Giovanni di Meo del Guasta. XVe.

Enfin, Dèce ayant usurpé l'empire, et désirant mettre la main sur les trésors qu'on lui fit entendre avoir été laissé par son prédecesseur à l'Eglise, renouvela les persécutions qui avaient cessé et arrosa la terre du sang des fidèles. Alors, dit saint Cyprien, commença une suite interminable de tortures de la part des bourreaux.

Les poursuites n'avaient plus seulement pour fin la condamnation, et pour consolation la mort. On graduait la cruauté par une série de raffinements, de façon que la victime survécût aux supplices. On ne voulai pas lui accorder trop tôt la couronne. On la fatiguait dans l'espoir de fléchir son courage, et s'il lui arrivait, grâce à la miséricorde de Dieu, de mourir avant l'heure prévue, les bourreaux se croyaient trompés.

Telle fut la septième persécution générale. Sa première victime fut le pape saint Fabien qui eut la tête tranchée le treize des calendes de février (le 20 janvier). Il fut enseveli au cimetière de Calliste, sur la voie Appienne.

Ce martyre, qui rouvrait avec éclat l'ère des luttes sanglantes, eut un grand retentissement dans la chrétienté. Le clergé de Rome en informa les autres églises ; le fait est certain ; nous connaissons même un des messagers. Le sous-diacre Crementius fut envoyé à Carthage avec une lettre authentique des prêtres et des diacres romains, dans laquelle la mort glorieuse du pontife était, pour l'édification générale, relatée dans tous ses détails ( nous n'avons plus ce récit hélas, mais une épître de saint Cyprien en fait foi).

Saint Fabien siégea quinze ans et quatre jours. Il fit cinq ordinations au mois de décembre, et il créa vingt-deux Prêtres, sept Diacres, et onze Evêques pour divers lieux.

On lui donne pour attribut l'épée, instrument de son martyre et la colombe qui le désigna au choix du peuple chrétien.

L'Eglise a toujours solennisé la fête de saint Fabien avec celle de saint Sébastien, comme il paraît dès le temps de saint Grégoire le Grand. Son office n'était autrefois que semi-double ; mais le pape Pie V, en la réformation du bréviaire, en 1550, l'a ordonné double, ainsi qu'il se célèbre.

Des reliques de notre saint pape étaient encore conservées au début du XXe siècle à l'Hôtel-Dieu d'Amiens.


Décollation de saint Fabien. Jacques Huguet l'Ancien. XVe.

PRIERE

" Ainsi se sont écoulés les jours de votre Pontificat, longs et orageux, Ô Fabien ! Mais, pressentant l'avenir de paix que Dieu réservait à son Eglise, vous ne vouliez pas que les grands exemples de l'âge des Martyrs fussent perdus pour les siècles futurs, et votre sollicitude veillait à leur conservation. Les flammes nous ont ravi une grande partie des trésors que vous aviez amassés pour nous ; à peine pouvons-nous formuler quelques détails de votre propre vie ; mais nous en savons assez pour louer Dieu de vous avoir choisi dans ces temps difficiles, et pour célébrer aujourd'hui le glorieux triomphe que remporta votre constance. La colombe qui vous désignait comme l'élu du ciel, se reposant sur votre tête, vous marquait comme le Christ visible de la terre ; elle vous dévouait aux sollicitudes et au martyre ; elle avertissait l'Eglise entière de vous reconnaître et de vous écouter.

Vous donc, Ô saint Pontife, qui avez eu ce trait de ressemblance avec l'Emmanuel dans le mystère de l'Epiphanie, priez-le pour nous afin qu'il daigne se manifester de plus en plus à nos esprits et à nos cœurs. Obtenez-nous de lui cette docilité à sa grâce, cette dépendance d'amour à l'égard de ses moindres volontés, ce détachement de toutes choses, qui furent l'élément continuel de votre vie, au milieu de cette tourmente qui menaça, durant quinze années, de vous engloutir. Enfin un dernier tourbillon vous enleva, calme et préparé, pour vous porter, par le martyre, jusque dans le sein de Celui qui avait déjà accueilli un si grand nombre de vos brebis. Nous aussi, nous attendons la vague qui doit nous détacher de la grève, et nous pousser jusqu'au ciel ; demandez, Ô Pasteur, qu'elle nous trouve prêts. Si l'amour du divin Enfant vit en nous, si nous imitons, comme vous, Ô Fabien, la simplicité de la colombe, notre voie est sûre. Nous offrons nos cœurs ; hâtez-vous de les préparer."

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samedi, 20 janvier 2024 | Lien permanent

2 février. La Purification de la très sainte Vierge Marie.

- La Purification de la très sainte Vierge Marie.

" Délivrez les captifs,
Eclairez les aveugles,
Chassez loin tous nos maux,
Demandez tous les biens."
Hymne.


La présentation de Notre Seigneur Jésus-Christ au Temple.
Andrea Mantegna. XVe.

Enfin les quarante jours de la Purification de Marie sont écoulés, et le moment est venu où elle doit monter au Temple du Seigneur pour y présenter Jésus. Avant de suivre le Fils et la Mère dans ce voyage mystérieux à Jérusalem, arrêtons-nous encore un instant à Bethléhem, et pénétrons avec amour et docilité les mystères qui vont s'accomplir.

La Loi du Seigneur ordonnait aux femmes d'Israël, après leur enfantement, de demeurer quarante jours sans approcher du tabernacle ; après l'expiration de ce terme, elles devaient, pour être purifiées, offrir un sacrifice. Ce sacrifice consistait en un agneau, pour être consumé en holocauste; on devait y joindre une tourterelle ou une colombe, destinées à être offertes selon le rite du sacrifice pour le péché. Que si la mère était trop pauvre pour fournir l'agneau, le Seigneur avait permis de le remplacer par une autre tourterelle, ou une autre colombe.

Un second commandement divin déclarait tous les premiers-nés propriété du Seigneur, et prescrivait la manière de les racheter. Le prix de ce rachat était de cinq sicles, qui, au poids du sanctuaire, représentaient chacun vingt oboles. Marie, fille d'Israël, avait enfanté ; Jésus était son premier-né. Le respect dû à un tel enfantement, à un tel premier-né, permettait-il l'accomplissement de la loi ?


Antiphonaire. Clermont-Ferrand. XVe.

Si Marie considérait les raisons qui avaient porté le Seigneur à obliger les mères à la purification, elle voyait clairement que cette loi n'avait point été faite pour elle. Quel rapport pouvait avoir avec les épouses des hommes, celle qui était le très pur sanctuaire de l'Esprit-Saint, Vierge dans la conception de son Fils, Vierge dans son ineffable enfantement ; toujours chaste, mais plus chaste encore après avoir porté dans son sein et mis au monde le Dieu de toute sainteté ? Si elle considérait la qualité sublime de son Fils, cette majesté du Créateur et du souverain Seigneur de toutes choses, qui avait daigné prendre naissance en elle, comment aurait-elle pu penser qu'un tel Fils était soumis à l'humiliation du rachat, comme un esclave qui ne s'appartient pas à lui-même ?

Cependant, l'Esprit qui résidait en Marie lui révèle qu'elle doit accomplir cette double loi. Malgré son auguste qualité de Mère de Dieu, il faut qu'elle se mêle à la foule des mères des hommes, qui se rendent de toutes parts au Temple, pour y recouvrer, par un sacrifice, la pureté qu'elles ont perdue. En outre, ce Fils de Dieu et Fils de l'Homme doit être considéré en toutes choses comme un serviteur ; il faut qu'il soit racheté en cette humble qualité comme le dernier des enfants d'Israël. Marie adore profondément cette volonté suprême, et s'y soumet de toute la plénitude de son cœur.

Les conseils du Très-Haut avaient arrêté que le Fils de Dieu ne serait déclaré à son peuple que par degrés. Après trente années de vie cachée à Nazareth, où, comme le dit l'Evangéliste, il était réputé le fils de Joseph, un grand Prophète devait l'annoncer mystérieusement aux Juifs accourus au Jourdain, pour y recevoir le baptême de la pénitence. Bientôt ses propres œuvres, ses éclatants miracles, rendraient témoignage de lui. Après les ignominies de sa Passion, il ressusciterait glorieux, confirmant ainsi la vérité de ses prophéties, l'efficacité de son Sacrifice, enfin sa divinité.


Bréviaire à l'usage de Besançon. XVe.

Jusque-là presque tous les hommes ignoreraient que la terre possédait son Sauveur et son Dieu. Les bergers de Bethléhem n'avaient point reçu l'ordre, comme plus tard les pêcheurs de Génésareth, d'aller porter la Parole jusqu'aux extrémités du monde ; les Mages, qui avaient paru tout à coup au milieu de Jérusalem, étaient retournés dans l'Orient, sans revoir cette ville qui s'était émue un instant de leur arrivée. Ces prodiges, d'une si sublime portée aux yeux de l'Eglise, depuis l'accomplissement de la mission de son divin Roi, n'avaient trouvé d'écho et de mémoire fidèle que dans le cœur de quelques vrais Israélites qui attendaient le salut d'un Messie humble et pauvre ; la naissance même de Jésus à Bethléhem devait demeurer ignorée du plus grand nombre des Juifs ; car les Prophètes avaient prédit qu'il serait appelé Nazaréen.

Le même plan divin qui avait exigé que Marie fût l'épouse de Joseph, pour protéger, aux yeux du peuple, sa virginité féconde, demandait donc que cette très chaste Mère vînt comme les autres femmes d'Israël offrir le sacrifice de purification, pour la naissance du Fils qu'elle avait conçu par l'opération de l'Esprit-Saint, mais qui devait être présenté au temple comme le fils de Marie, épouse de Joseph. Ainsi, la souveraine Sagesse aime à montrer que ses pensées ne sont point nos pensées, à déconcerter nos faibles conceptions, en attendant le jour où elle déchire les voiles et se montre à découvert à nos yeux éblouis.

La volonté divine fut chère à Marie, en cette circonstance comme en toutes les autres. La Vierge ne pensa point agir contre l'honneur de son fils, ni contre le mérite glorieux de sa propre intégrité, en venant chercher une purification extérieure dont elle n'avait nul besoin. Elle fut, au Temple, la servante du Seigneur, comme elle l'avait été dans la maison de Nazareth, lors de la visite de l'Ange. Elle obéit à la loi, parce que les apparences la déclaraient sujette à la loi. Son Dieu et son Fils se soumettait au rachat comme le dernier des hommes ; il avait obéi à l'édit d'Auguste pour le dénombrement universel ; il devait " être obéissant jusqu'à la mort, et à la mort de la croix " : la Mère et l'Enfant s'humilièrent ensemble ; et l'orgueil de l'homme reçut en ce jour une des plus grandes leçons qui lui aient jamais été données.


Sandro di Benozzo di Lese. XVe.

Quel admirable voyage que celui de Marie et de Joseph allant de Bethléhem à Jérusalem ! L'Enfant divin est dans les bras de sa mère ; elle le tient sur son cœur durant tout le cours de cette route fortunée. Le ciel, la terre, la nature tout entière, sont sanctifiés par la douce présence de leur miséricordieux créateur. Les hommes au milieu desquels passe cette mère chargée de son tendre fruit la considèrent, les uns avec indifférence, les autres avec intérêt ; mais nul d'entre eux ne pénètre encore le mystère qui doit les sauver tous.

Joseph est porteur de l'humble offrande que la mère doit présenter au prêtre. Leur pauvreté ne leur permet pas d'acheter un agneau ; et d'ailleurs n'est-il pas l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde, ce céleste Enfant que Marie tient dans ses bras ? La loi a désigné la tourterelle ou la colombe pour suppléer l'offrande qu'une mère indigente ne pourrait présenter : innocents oiseaux, dont le premier figure la chasteté et la fidélité, et dont le second est le symbole de la simplicité et de l'innocence. Joseph porte aussi les cinq sicles, prix du rachat du premier-né ; car il est vraiment le Premier-né, cet unique fils de Marie, qui a daigné faire de nous ses frères, et nous rendre participants de la nature divine, en adoptant la nôtre.

Enfin, cette sainte et sublime famille est entrée dans Jérusalem. Le nom de cette ville sacrée signifie vision de paix ; et le Sauveur vient par sa présence lui offrir la paix. Admirons une magnifique progression dans les noms des trois villes auxquelles se rattache la vie mortelle du Rédempteur. Il est conçu à Nazareth, qui signifie la fleur ; car il est, comme il le dit au Cantique, " la fleur des champs et le lis des vallons ; et sa divine odeur nous réjouit ". Il naît à Bethléhem, la maison du pain, afin d'être la nourriture de nos âmes. Il est offert en sacrifice sur la croix à Jérusalem, et par son sang, il rétablit la paix entre le ciel et la terre, la paix entre les hommes, la paix dans nos âmes. Dans cette journée, comme nous le verrons bientôt, il va donner les arrhes de cette paix.


Graduel à l'usage de l'abbaye Notre-Dame de Fontevrault. XIIIe.

Pendant que Marie portant son divin fardeau monte, Arche vivante, les degrés du Temple, soyons attentifs ; car une des plus fameuses prophéties s'accomplit, un des principaux caractères du Messie se déclare. Conçu d'une Vierge, né en Bethléhem, ainsi qu'il était prédit, Jésus, en franchissant le seuil du Temple, acquiert un nouveau titre à nos adorations.

Cet édifice n'est plus le célèbre Temple de Salomon, qui devint la proie des flammes aux jours de la captivité de Juda. C'est le second Temple bâti au retour de Babylone, et dont la splendeur n'a point atteint la magnificence de l'ancien. Avant la fin du siècle, il doit être renversé pour la seconde fois ; et la parole du Seigneur sera engagée à ce qu'il n'y demeure pas pierre sur pierre. Or, le Prophète Aggée, pour consoler les Juifs revenus de l'exil, qui se lamentaient sur leur impuissance à élever au Seigneur une maison comparable à celle qu'avait édifiée Salomon, leur a dit ces paroles, et elles doivent servir à fixer l'époque de la venue du Messie :
" Prends courage, Zorobabel, dit le Seigneur ; prends courage, Jésus, fils de Josedec, souverain Prêtre ; prends courage, peuple de cette contrée ; car voici ce que dit le Seigneur : " Encore un peu de temps et j'ébranlerai le ciel et la terre, et j’ébranlerai toutes les nations ; et le Désiré de toutes les nations viendra ; et je remplirai de gloire cette maison. La gloire de cette seconde maison sera plus grande que ne le fut celle de la première ; et dans ce lieu je donnerai la paix, dit le Seigneur des armées "."

L'heure est arrivée de l'accomplissement de cet oracle. L'Emmanuel est sorti de son repos de Bethléhem, il s'est produit au grand jour, il est venu prendre possession de sa maison terrestre ; et par sa seule présence dans l'enceinte du second Temple, il en élève tout d'un coup la gloire au-dessus de la gloire dont avait paru environné celui de Salomon. Il doit le visiter plusieurs fois encore ; mais cette entrée qu'il y fait aujourd'hui, porté sur les bras de sa mère, suffit à accomplir la prophétie ; dès maintenant, les ombres et les figures que renfermait ce Temple commencent à s'évanouir aux rayons du Soleil de la vérité et de la justice. Le sang des victimes teindra encore, quelques années, les cornes de l'autel ; mais au milieu de toutes ces victimes égorgées, hosties impuissantes, s'avance déjà l'Enfant qui porte dans ses veines le sang de la Rédemption du monde. Parmi ce concours de sacrificateurs, au sein de cette foule d'enfants d'Israël qui se presse dans les diverses enceintes du Temple, plusieurs attendent le Libérateur, et savent que l'heure de sa manifestation approche; mais aucun d'eux ne sait encore qu'en ce moment même le Messie attendu vient d'entrer dans la maison de Dieu.


Heures à l'usage d'Angers. XVe.

Cependant un si grand événement ne devait pas s'accomplir sans que l'Eternel opérât une nouvelle merveille. Les bergers avaient été appelés par l'Ange, l'étoile avait attiré les Mages d'Orient en Bethléhem ; l'Esprit-Saint suscite lui-même à l'Enfant divin un témoignage nouveau et inattendu.

Un vieillard vivait à Jérusalem, et sa vie touchait au dernier terme ; mais cet homme de désirs, nommé Siméon, n'avait point laissé languir dans son cœur l'attente du Messie. Il sentait que les temps étaient accomplis ; et pour prix de son espérance, l'Esprit-Saint lui avait fait connaître que ses yeux ne se fermeraient pas avant qu'ils eussent vu la Lumière divine se lever sur le monde. Au moment où Marie et Joseph montaient les degrés du Temple, portant vers l'autel l'Enfant de la promesse, Siméon se sent poussé intérieurement par la force irrésistible de l'Esprit divin ; il sort de sa maison, il dirige vers la demeure sacrée ses pas chancelants, mais soutenus par l'ardeur de ses désirs. Sur le seuil de la maison de Dieu, parmi les mères qui s'y pressent chargées de leurs enfants, ses yeux inspirés ont bientôt reconnu la Vierge féconde prophétisée par Isaïe ; et son cœur vole vers l'Enfant qu'elle tient dans ses bras.

Marie, instruite par le même Esprit, laisse approcher le vieillard ; elle dépose dans ses bras tremblants le cher objet de son amour, l'espoir du salut de la terre. Heureux Siméon, figure de l'ancien monde vieilli dans l'attente et près de succomber ! A peine a-t-il reçu le doux fruit de la vie, que sa jeunesse se renouvelle comme celle de l'aigle ; en lui s'accomplit la transformation qui doit se réaliser dans la race humaine. Sa bouche s'ouvre, sa voix retentit, il rend témoignage comme les bergers dans la région de Bethléhem, comme les Mages au sein de l'Orient.
" Ô Dieu ! dit-il, mes yeux ont donc vu le Sauveur que vous prépariez ! Elle luit enfin, cette Lumière qui doit éclairer les Gentils, et faire la gloire de votre peuple d'Israël."

Tout à coup survient, attirée aussi par le mouvement du divin Esprit, la pieuse Anne, fille de Phanuel, illustre par sa piété et vénérable à tout le peuple par son grand âge. Les deux vieillards, représentants de la société antique, unissent leurs voix, et célèbrent l'avènement fortuné de l'Enfant qui vient renouveler la face de la terre, et la miséricorde de Jéhovah qui, selon la prophétie d'Aggée, dans ce lieu, au sein même du second Temple, donne enfin la paix au monde.


Giovanni di Paolo di Grazia. XVe.

C'est dans cette paix tant désirée que va s'endormir Siméon. " Vous laisserez donc partir dans la paix votre serviteur, selon votre parole, Seigneur !" dit le vieillard ; et bientôt son âme, dégagée des liens du corps, va porter aux élus qui reposent dans le sein d'Abraham la nouvelle de la paix qui apparaît sur la terre, et leur ouvrira bientôt les cieux. Anne survivra quelques jours encore à cette grande scène ; elle doit, comme nous l'apprend l'Evangéliste, annoncer l'accomplissement des promesses aux Juifs spirituels qui attendaient la Rédemption d'Israël. Une semence devait être confiée à la terre ; les bergers, les Mages, Siméon, Anne, l'ont jetée ; elle lèvera en son temps : et quand les années d'obscurité que le Messie doit passer dans Nazareth seront écoulées, quand il viendra pour la moisson, il dira à ses disciples : " Voyez comme le froment blanchit à maturité sur les guérets : priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour la récolte ".

Le fortuné vieillard rend donc aux bras de la très pure Mère le Fils qu'elle va offrir au Seigneur. Les oiseaux mystérieux sont présentés au prêtre qui les sacrifie sur l'autel, le prix du rachat est versé, l'obéissance parfaite est accomplie ; et après avoir rendu ses hommages au Seigneur dans cet asile sacré à l'ombre duquel s'écoulèrent ses premières années, Marie toujours Vierge, pressant sur son cœur le divin Emmanuel, et accompagnée de son fidèle époux, descend les degrés du Temple.

Tel est le mystère du quarantième jour, qui ferme la série des jours du Temps de Noël, par cette admirable fête de la Purification de la très sainte Vierge. De savants hommes, au nombre desquels on compte le docte Henschenius, dont Benoît XIV partage le sentiment, inclinent à donner une origine apostolique à cette solennité ; il est certain du moins qu'elle était déjà ancienne au cinquième siècle.

L'Eglise Grecque et l'Eglise de Milan mettent cette fête au nombre des solennités de Notre-Seigneur ; mais l'Eglise Romaine Fa toujours comptée entre les fêtes de la sainte Vierge. Sans doute, l'Enfant Jésus est offert aujourd'hui dans le Temple et racheté ; mais c'est à l'occasion de la Purification de Marie, dont cette offrande et ce rachat sont comme la conséquence. Les plus anciens Martyrologes et Calendriers de l'Occident donnent cette fête sous le titre qu'elle conserve aujourd'hui ; et la gloire du Fils, loin d'être obscurcie par les honneurs que l'Eglise rend à la Mère, en reçoit un nouvel accroissement, puisque lui seul est le principe de toutes les grandeurs que nous révérons en elle.


Heures à l'usage d'Avignon. XVe.

HYMNE

" Salut, astre des mers,
Mère de Dieu féconde,
Salut, Ô toujours Vierge,
Porte heureuse du ciel !

Vous qui de Gabriel
Avez reçu l’Ave,
Fondez-nous dans la paix,
Changeant le nom d'Eva.

Délivrez les captifs,
Eclairez les aveugles,
Chassez loin tous nos maux,
Demandez tous les biens.

Montrez en vous la Mère,
Vous-même offrez nos vœux
Au Dieu qui, né pour nous,
Voulut naître de vous.

Ô Vierge incomparable,
Vierge douce entre toutes !
Affranchis du péché,
Rendez-nous doux et chastes.

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vendredi, 02 février 2024 | Lien permanent | Commentaires (1)

31 décembre. Saint Sylvestre, Pape et confesseur. 335.

- Saint Sylvestre, Pape et confesseur. 335.
 
Papes : Saint Melchiade (prédécesseur) ; saint Marc (successeur). Empereur romain : Constantin I.

" A la voie énergique de cet illustre pontife, l'idolâtrie, le judaïsme, et le hideux cortège de toutes les erreurs naissantes se sont honteusement abîmés dans l'ombre."
Eccli. XLV, 2.


Saint Sylvestre. Codex grec. XIIIe.

Jusqu'ici, nous avons contemplé les Martyrs au berceau de l'Emmanuel. Etienne, qui a succombé sous les cailloux du torrent ; Jean, Martyr de désir, qui a passé par le feu ; les Innocents immolés par le glaive ; Thomas, égorgé sur le pavé de sa cathédrale : tels sont les champions qui font la garde auprès du nouveau Roi. Cependant, si nombreuse que soit la troupe des Martyrs, tous les fidèles du Christ ne sont pas appelés à faire partie de ce bataillon d'élite ; le corps de l'armée céleste se compose aussi des Confesseurs qui ont vaincu le monde, mais dans une victoire non sanglante. Si la place d'honneur n'est pas pour eux, ils ne doivent pas cependant être déshérités de l'avantage de servir leur Roi. La palme, il est vrai, n'est pas dans leurs mains ; mais la couronne de justice ceint leurs têtes. Celui qui les a couronnés se glorifie aussi de les voir à ses côtés.

Il était donc juste que la sainte Eglise, pour réunir, dans cette triomphante Octave, toutes les gloires du ciel et de la terre, inscrivît en ces jours, sur le Cycle, le nom d'un saint Confesseur qui dût représenter tous les autres. Ce Confesseur est Silvestre, Epoux de la sainte Eglise Romaine, et par elle de l'Eglise universelle, un Pontife au règne long et pacifique, un serviteur du Christ orné de toutes les vertus, et donné au monde le lendemain de ces combats furieux qui avaient duré trois siècles, dans lesquels avaient triomphé, par le martyre, des millions de chrétiens, sous la conduite de nombreux Papes Martyrs, prédécesseurs de Silvestre.

Sylvestre annonce aussi la Paix que le Christ est venu apporter au monde, et que les Anges ont chantée en Bethléhem. Il est l'ami de Constantin, il confirme le Concile de Nicée, il organise la discipline ecclésiastique pour l'ère de la Paix. Ses prédécesseurs ont représenté le Christ souffrant : il figure le Christ dans son triomphe. Il complète, dans cette Octave, le caractère du divin Enfant qui vient dans l'humilité des langes, exposé à la persécution d'Hérode, et cependant Prince de la Paix, et Père du siècle futur (Isai. IX, 6.).


Le pape Melchiade et saint Sylvestre qui lui succédera.
Legenda aurea. Bx J. de Voragine. R. de Monbaston. XIVe.

Lisons l'histoire de son tranquille Pontificat, dans le récit de la sainte Eglise. La nature de cet ouvrage exclut les discussions critiques ; c'est pourquoi nous ne dirons rien des difficultés qu'on a élevées sur le fait du Baptême de Constantin, à Rome, par saint Sylvestre. Il suffira de rappeler que la tradition romaine, à ce sujet, est adoptée par de savants hommes, tels que Baronius, Schelestrate, Bianchini, Marangoni, Vignoli, etc.

Sylvestre vient de sile qui veut dire lumière, et de terra terre, comme lumière de la terre, c'est-à-dire de l’Église qui, semblable à une bonne terre, contient la graine des bonnes oeuvres, la noirceur de l’humilité et la douceur de la dévotion. C'est, à ces trois qualités, dit Pallade, qu'on distingue la bonne terre.
 
Ou bien Sylvestre viendrait de silva, forêt et Theos, Dieu, parce qu'il attira à la foi des hommes sylvestres, incultes et durs.
 
Ou comme il est dit dans le Glossaire : Sylvestre signifie vert, agreste, ombreux, couvert de bois. Vert dans la contemplation dés choses célestes, agreste par la culture de soi-même, ombreux, en refroidissant en lui toute concupiscence, couvert de bois, c'est-à-dire planté au milieu des arbres du ciel.
 
Sa légende fut compilée par Eusèbe de Césarée ; le bienheureux Gélase rappelle qu'elle a du être lue par les catholiques dans un comité de soixante-dix évêques, ce qui est relaté aussi dans le décret.

Sylvestre, Romain, fils de Rufin, fut placé, dès son bas âge, sous la discipline du prêtre Cyrinus, dont il imita parfaitement la doctrine et les mœurs. Pendant que sévissait la persécution, il vécut caché sur le mont Soracte. Agé de trente ans, il fut créé prêtre de la sainte Eglise Romaine par le Pape Marcellin. S'étant acquitté de cet emploi d'une manière digne de louange, et surpassant en mérite les autres clercs, il succéda au Pape Melchiade, sous l'empire de Constantin.
 

Conversion de Constantin. Saint Sylvestre et l'empereur.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Cet empereur avait auparavant, par une loi publique, donné la paix à l'Eglise de Jésus-Christ. Déjà marqué par le ciel du signe de la Croix, et vainqueur de Maxence, il se fit le défenseur et le propagateur de la religion chrétienne ; l'encourager dans cette voie fut la grande œuvre à laquelle s'adonna le nouveau Pontife. Selon que le porte l'antique tradition de l'Eglise Romaine, il fit reconnaître les portraits des Apôtres à l'empereur, le lava dans le bain du saint baptême, et le guérit de la lèpre de l'infidélité.

Un jour, les prêtres des idoles vinrent dire à l’empereur :
" Très saint empereur, depuis l’époque où vous avez reçu la foi du Christ, le dragon qui est dans le fossé tue de son souffle plus de trois cents hommes par jour."
Constantin consulta là-dessus Sylvestre, qui répondit :
" Par la vertu de Notre Seigneur Jésus-Christ, je ferai cesser tout ce mal."
Les prêtres promettent que, s'il fait ce miracle, ils croiront. Pendant sa prière, saint Pierre apparut à Silvestre et lui dit :
" N'aie pas peur de descendre vers le dragon, toi et deux des prêtres qui t'accompagnent ; arrivé auprès de lui, tu lui adresseras ces paroles :
" Notre Seigneur Jésus-Christ, né de la Vierge, qui a été crucifié et enseveli, qui est ressuscité et est assis à la droite du Père, doit venir pour juger les vivants et les morts. Or, toi, Satan, attends-le dans cette fosse tant qu'il viendra. Puis tu lieras sa gueule avec un fil et tu apposeras dessus un sceau où sera gravé le signe de la croix ; ensuite revenus à moi sains et saufs, vous mangerez le pain que je vous aurai préparé."


Le pape saint Silvestre enfermant le dragon.
Dessin. Ecole des Carracci. XVIIe.

Sylvestre descendit donc avec les deux prêtres les quarante marches de la fosse, portant avec lui deux lanternes. Alors il adressa au dragon les paroles susdites, et, comme il en avait reçu l’ordre, lia sa gueule, malgré ses cris et ses sifflements. En remontant, il trouva deux magiciens qui les avaient suivis, pour voir s'ils descendraient jusqu'au dragon : ils étaient à demi morts de la puanteur du monstre.
 
Il les ramena avec lui aussi sains et saufs. Aussitôt ils se convertirent avec une multitude infinie. Le peuple romain fut ainsi délivré d'une double mort, savoir de l’adoration des idoles et du venin du dragon.

D'après les conseils de Sylvestre, le pieux empereur confirma par son exemple le droit qu'il avait accordé aux chrétiens de bâtir publiquement leurs temples ; car il éleva un grand nombre de Basiliques, à savoir celle du Latran au Christ Sauveur, celle du Vatican à saint Pierre, celle de la voie d'Ostie à saint Paul, celles de saint Laurent dans l'Agro Verano, de Sainte-Croix au palais de Sessorius, des saints Pierre et Marcellin et de sainte Agnès sur les voies Lavicane et Nomentane, d'autres encore, qu'il orna splendidement d'images saintes et dota magnifiquement en possessions et privilèges.

Ce fut pendant son pontificat que se tint le premier Concile de Nicée, dans lequel, sous la présidence de ses légats, en présence de Constantin et de trois cent dix-huit Evêques, la sainte et catholique Foi fut expliquée, Arius et ses sectateurs condamnés ; et ce Concile fut confirmé par Sylvestre, à la demande des Pères, dans un Synode tenu à Rome, où Arius fut condamné de nouveau. Sylvestre fit aussi plusieurs décrets avantageux à l'Eglise de Dieu qui sont rapportés sous son nom ; savoir :
- que le Chrême serait fait par l'Evêque seul ;
- que le prêtre oindrait du Chrême le sommet de la tête du baptisé ;
- que les diacres se serviraient de la dalmatique dans l'Eglise, et porteraient sur le bras gauche un ornement de lin ;
- que le Sacrifice de l'autel se célébrerait sur un voile de lin.
 

Saint Sylvestre rescussitant un taureau.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Il prescrivit également, dit-on, à tous ceux qui seraient initiés aux Ordres, le temps durant lequel ils doivent exercer, chacun, les fonctions de leur Ordre dans l'Eglise, avant de monter à un degré plus élevé. Il interdit aux laïques la fonction d'accusateur public contre les clercs, et défendit aux clercs de plaider devant les juges séculiers. Retenant seulement le nom de Samedi et de Dimanche, il voulut que les autres jours de la semaine fussent appelés du nom de Fériés, comme il était déjà d'usage dans l'Eglise, pour signifier que les clercs doivent, chaque jour, vaquer uniquement au service de Dieu, et se dégager de tout autre soin.

L'admirable sainteté de sa vie, et sa bonté envers les pauvres, répondirent toujours à cette prudence céleste avec laquelle il gouvernait l'Eglise. Il veilla à ce que les clercs pauvres vécussent en commun avec les autres clercs plus riches, et que les vierges sacrées ne manquassent pas des choses nécessaires à la vie. Il vécut dans le pontificat vingt-un ans, dix mois et un jour. Enfin le bienheureux Sylvestre, à l’approche de la mort, donna ces trois avis à ses clercs :
- conserver entre eux la charité ;
- gouverner leurs églises avec plus de soin ;
- préserver leur troupeau contre la morsure des loups.
Après quoi il s'endormit heureusement dans le Seigneur, environ l’an 330. Il fut enseveli au cimetière de Priscille, sur la voie Salaria.
Il célébra sept ordinations au mois de décembre, dans lesquelles il créa quarante-deux prêtres, vingt-cinq diacres, et soixante-cinq Evêques pour divers lieux.

ORAISON

" Pontife suprême de l'Eglise de Jésus-Christ, vous avez donc été choisi entre tous vos frères pour décorer de vos glorieux mérites la sainte Octave de la Naissance de l'Emmanuel. Vous y représentez dignement le chœur immense des Confesseurs, vous qui avez tenu, avec tant de vigueur et de fidélité, le gouvernail de l'Eglise après la tempête. Le diadème pontifical orne votre front ; et la splendeur du ciel se réfléchit sur les pierres précieuses dont il est semé. Les clefs du Royaume des cieux sont entre vos mains : et vous l'ouvrez pour y faire entrer les restes de la gentilité qui passent à la foi du Christ ; et vous le fermez aux Ariens, dans cet auguste Concile de Nicée, où vous présidez par vos Légats, et auquel vous donnez autorité, en le confirmant de votre suffrage apostolique. Bientôt des tempêtes furieuses se déchaîneront de nouveau contre l'Eglise ; les vagues de l'hérésie viendront battre la barque de Pierre ; vous serez déjà rendu au sein de Dieu ; mais vous veillerez, avec Pierre, sur la pureté de la Foi Romaine. Vous soutiendrez Jules, vous sauverez Libère ; et, par vos prières, l'Eglise Romaine sera le port où Athanase trouvera enfin quelques heures de paix.


Saint Sylvestre au chevet de Constantin.
Chronique de Baudouin d'Avesnes. XIVe.

Sous votre règne pacifique, Rome chrétienne reçoit le prix de son long martyre. Elle est reconnue Reine de l'humanité chrétienne, et son empire le seul empire universel. Le fils de votre zèle, Constantin, s'éloigne de cette ville de Romulus, aujourd'hui la cité de Pierre ; la seconde majesté ne veut pas être éclipsée par la première ; et, Byzance fondée, Rome demeure eux mains de son Pontife. Les temples des faux dieux croulent, et font place aux basiliques chrétiennes qui reçoivent la dépouille triomphale des saints Apôtres et des Martyrs. Enfin, la victoire de l'Eglise sur le Prince de ce monde est marquée, Ô Sylvestre, par la défaite de ce dragon qui infectait les hommes de son haleine empoisonnée, et que votre bras enchaîna pour jamais.

Etant honoré de dons si merveilleux, Ô Vicaire du Christ, souvenez-vous de ce peuple chrétien qui a été le vôtre. Dans ces jours, il vous demande de l'initier au divin mystère du Christ Enfant. Par le sublime symbole qui contient la foi de Nicée, et que vous avez confirmé et promulgué dans toute l'Eglise, vous nous apprenez à le reconnaître Dieu de Dieu, Lumière de Lumière, engendré et non fait, consubstantiel au Père. Vous nous conviez à venir adorer cet Enfant, comme Celui par qui toutes choses ont été faites. Confesseur du Christ, daignez nous présenter à lui, comme l'ont daigné faire les Martyrs qui vous ont précédé. Demandez-lui de bénir nos désirs de vertu, de nous conserver dans son amour, de nous donner la victoire sur le monde et nos passions, de nous garder cette couronne de justice à laquelle nous osons aspirer, pour prix de notre Confession.

Pontife de la Paix, du séjour tranquille où vous vous reposez, considérez l'Eglise de Dieu agitée par les plus affreuses tourmentes, et sollicitez Jésus, le Prince de la Paix, de mettre fin à de si cruelles agitations. Abaissez vos regards sur cette Rome que vous aimez et qui garde si chèrement votre mémoire ; protégez[-a], dirigez[-la] [...]. Qu'elle triomphe de l'astuce des politiques, de la violence des tyrans, des embûches des hérétiques, de la perfidie des schismatiques, de l'indifférence des mondains, de la mollesse des chrétiens. Qu'elle soit honorée, qu'elle soit aimée, qu'elle soit obéie. Que la majesté du sacerdoce se relève ; que la puissance spirituelle s'affranchisse, que la force et la charité se donnent la main ; que le règne de Dieu commence enfin sur la terre, et qu'il n'y ait plus qu'un troupeau et qu'un Pasteur.


Saint Sylvestre et saint Servais.
Livre d'images de Madame Marie. XIIIe.

Veillez, Ô Silvestre, sur le sacré dépôt de la foi que vous avez conservé avec tant d'intégrité ; que sa lumière triomphe de tous ces faux et audacieux systèmes qui s'élèvent de toutes parts, comme les rêves de l'homme dans son orgueil. Que toute intelligence créée s'abaisse sous le joug des mystères, sans lesquels la sagesse humaine n'est que ténèbres ; que Jésus, Fils de Dieu, Fils de Marie, règne enfin, par son Eglise, sur les esprits et sur les coeurs.

Priez pour Byzance, autrefois appelée la nouvelle Rome, et devenue sitôt la capitale des hérésies, le triste théâtre de la dégradation du Christianisme. Obtenez que les temps de son humiliation soient abrégés. Qu'elle revoie les jours de l'unité ; qu'elle consente enfin à honorer le Christ dans son Vicaire ; qu'elle obéisse, afin d'être sauvée. Que les races égarées et perdues par son influence, recouvrent cette dignité humaine que la pureté de la foi seule maintient, que seule elle peut régénérer.

Enfin, Ô vainqueur de Satan, retenez le Dragon infernal dans la prison où vous l'avez enfermé ; brisez son orgueil, déjouez ses plans ; veillez à ce qu'il ne séduise plus les peuples ; mais que tous les enfants de l'Eglise, selon la parole de Pierre, votre prédécesseur, lui résistent par la force de leur foi (I Petr. V, 9.)."

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dimanche, 31 décembre 2023 | Lien permanent | Commentaires (4)

2 janvier 2023. Saint Nom de Jésus.

- Le Saint Nom de Jésus.


Gérard David. XVe.

Le troisième Mystère de l'Epiphanie nous montre la consommation des plans de la divine miséricorde sur le monde, en même temps qu'il nous manifeste une troisième fois la gloire de l'Emmanuel. L'Etoile a conduit l'âme à la foi, l'Eau sanctifiée du Jourdain lui a conféré la pureté, le Festin Nuptial l'unit à son Dieu. Nous avons chanté l'Epoux sortant radieux au-devant de l'Epouse ; nous l'avons entendu l'appeler des sommets du Liban ; maintenant qu'il l'a éclairée et purifiée, il veut l'enivrer du vin de son amour.

Un festin est préparé, un festin nuptial ; la Mère de Jésus y assiste ; car, après avoir coopéré au mystère de l'Incarnation du Verbe, il convient qu'elle soit associée à toutes les œuvres de son Fils, à toutes les faveurs qu'il prodigue à ses élus. Mais, au milieu de ce festin, le vin vient à manquer. Jusqu'alors la Gentilité n'avait point connu le doux vin de la Charité ; la Synagogue n'avait produit que des raisins sauvages. Le Christ est la vraie Vigne, comme il le dit lui-même. Lui seul pouvait donner ce vin qui réjouit le cœur de l'homme (Psalm. CIII.), et nous présenter à boire de ce calice enivrant qu'avait chanté David. (Psalm. XXII.).

Marie dit au Sauveur : " Ils n'ont point de vin ". C'est à la Mère de Dieu de lui représenter les besoins des hommes, dont elle est aussi la mère. Cependant, Jésus lui répond avec une apparente sécheresse :
" Femme, qu'importe à moi et à vous ? Mon heure n'est pas encore venue."
C'est que, dans ce grand Mystère, il allait agir, non plus comme Fils de Marie, mais comme Fils de Dieu. Plus tard, à une heure qui doit venir, il apparaîtra aux yeux de cette même Mère, expirant sur la croix, selon cette humanité qu'il avait reçue d'elle. Marie a compris tout d'abord l'intention divine de son Fils, et elle profère ces paroles qu'elle répète sans cesse à tous ses enfants :
" Faites ce qu'il vous dira."


Les noces de Cana. Benvenuto Tisi da Garofalo. XVIe.

Or, il y avait là six grands vases de pierre, et ils étaient vides. Le monde, en effet, était parvenu à son sixième âge, comme l'enseignent saint Augustin et les autres docteurs après lui. Durant ces six âges, la terre attendait son Sauveur, qui devait l'instruire et la sauver. Jésus commande de remplir d'eau ces vases ; mais l'eau ne convient pas pour le festin de l'Epoux. Les figures, les prophéties de l'ancien monde étaient cette eau ; et nul homme, jusqu'à l'ouverture du septième âge, où le Christ, qui est la Vigne, devait se communiquer, n'avait contracté l'alliance avec le Verbe divin.

Mais lorsque l'Emmanuel est venu, il n'a qu'une parole à dire : « Puisez maintenant. Le vin de la nouvelle Alliance, ce vin qui avait été réservé pour la fin, remplit seul maintenant les vases. En prenant notre nature humaine, nature faible comme l'eau, il en a ménagé la transformation ; il l'a élevée jusqu'à lui, nous rendant participants de la nature divine (II Petr. IV, 1) ; il nous a rendus capables de contracter l'union avec lui, de former ce seul corps dont il est le Chef, cette Eglise dont il est l'Epoux, et qu'il aimait de toute éternité d'un si ardent amour, qu'il est descendu du ciel pour célébrer ces noces avec elle.

" Ô sort admirable que le nôtre ! Dieu a daigné, comme dit l'Apôtre, montrer les richesses de sa gloire sur des vases de miséricorde " (Rom. IX,23). Les urnes de Cana, figures de nos âmes, étaient insensibles, et nullement destinées à tant d'honneur. Jésus ordonne à ses ministres d'y verser l'eau ; et déjà, par cette eau, il les purifie ; mais il pense n'avoir rien fait encore tant qu'il ne les a pas remplies jusqu'au haut de ce vin céleste et nouveau, qui ne devait se boire qu'au royaume de son Père. Ainsi la divine charité, qui réside dans le Sacrement d'amour, nous est-elle communiquée ; et pour ne pas déroger à sa gloire, l'Emmanuel, qui veut épouser nos âmes, les élève jusqu'à lui. Préparons-les donc pour cette union ; et, selon le conseil de l'Apôtre, rendons-les semblables à cette Vierge pure qui est destinée à un Epoux sans tache. (II Cor. XI.).


Alessandro Boticelli. XVIe.

Saint Matthieu, Evangéliste de l'humanité du Sauveur, a reçu de l'Esprit-Saint la charge de nous annoncer le mystère de la foi par l'Etoile ; saint Luc, Evangéliste du Sacerdoce, a été choisi pour nous instruire du mystère delà Purification par les Eaux ; il appartenait au Disciple bien-aimé de nous révéler le mystère des Noces divines. C'est pourquoi, suggérant à la sainte Eglise l'intention de ce troisième mystère, il se sert de cette expression : Ce fut le premier des miracles de Jésus, et il y manifesta sa gloire. A Bethléhem, l'Or et l'Encens des Mages prophétisèrent la divinité et la royauté cachées de l'Enfant ; sur le Jourdain, la descente de l'Esprit-Saint, la voix du Père, proclamèrent Fils de Dieu l'artisan de Nazareth ; à Cana, Jésus agit lui-même et il agit en Dieu : " car, dit saint Augustin, Celui qui transforma l'eau en vin dans les vases ne pouvait être que Celui-là même qui, chaque année, opère un prodige semblable dans la vigne ". Aussi, de ce moment, comme le remarque saint Jean, " ses Disciples crurent en lui ", et le collège apostolique commença à se former.

Nous ne devons donc pas nous étonner que, dans ces derniers temps, l'Eglise, enivrée des douceurs du festin de l'Emmanuel, et voulant accroître la joie et la solennité de ce jour, l'ait choisi de préférence à tout autre pour recevoir la glorieuse mémoire du très saint Nom de Jésus. C'est au jour nuptial que le nom de l'Epoux devient propre à l'Epouse : ce nom désormais témoignera qu'elle est à lui. Elle a donc voulu l'honorer d'un culte spécial, et unir ce cher souvenir à celui des Noces divines.

L'ancienne alliance avait environné le Nom de Dieu d'une terreur profonde : ce nom était pour elle aussi formidable que saint, et l'honneur de le proférer n'appartenait pas à tous les enfants d'Israël. Dieu n'avait pas encore été vu sur la terre, conversant avec les hommes ; il ne s'était pas encore fait homme lui-même pour s'unir à notre faible nature : nous ne pouvions donc lui donner ce Nom d'amour et de tendresse que l'Epouse donne à l'Epoux.


Diego Velasquez. XVIIe.

Mais quand la plénitude des temps est arrivée, quand le mystère d'amour est sur le point d'apparaître, le Nom de Jésus descend d'abord du ciel, comme un avant-goût de la présence du Seigneur qui doit le porter. L'Archange dit à Marie : " Vous lui donnerez le Nom de Jésus " ; or, Jésus veut dire Sauveur. Que ce Nom sera doux à prononcer à l'homme qui était perdu ! Combien ce seul Nom rapproche déjà le ciel de la terre ! En est-il un plus aimable, un plus puissant ? Si, à ce Nom divin, tout genou doit fléchir au ciel, sur la terre et dans les enfers, est-il un cœur qui ne s'émeuve d'amour à l'entendre prononcer ? Mais laissons raconter à saint Bernard la puissance et la douceur de ce Nom béni. Voici comme il s'exprime, à ce sujet, dans son XVe Sermon sur les Cantiques :

" Le Nom de l'Epoux est une lumière, une nourriture, un remède. Il éclaire, quand on le publie ; il nourrit, quand on y pense à part soi ; et quand on l'invoque dedans la tribulation, il procure l'adoucissement et l'onction. Parcourons, s'il vous plaît, chacune de ces qualités. D'où pensez-vous qu'ait pu se répandre, par tout l'univers, cette si grande et si soudaine lumière de la Foi, si ce n'est de la prédication du Nom de Jésus ? N'est-ce pas par la lumière de ce Nom béni, que Dieu nous a appelés en son admirable lumière ? De laquelle étant illuminés, et voyant en cette lumière une autre lumière, nous oyons saint Paul nous dire à bon droit : Vous avez été jadis ténèbres ; mais maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur.


Bramanti. XVe.

Or, le Nom de Jésus n'est pas seulement lumière ; mais encore, il est nourriture. N'êtes-vous donc pas confortés, toutes fois et quantes que vous rappelez à votre cœur ce doux Nom ? Qu'est-il au monde qui nourrisse autant l'esprit de celui qui pense à lui ? Qu'est-ce qui, de la même sorte, répare les sens affaiblis, donne de l'énergie aux vertus, fait florir les bonnes mœurs, et entretient les honnêtes et chastes affections ? Toute nourriture de l'âme est sèche, si elle n'est détrempée de cette huile ; elle est insipide, si elle n'est assaisonnée de ce sel.

Quand vous m'écrivez, votre récit n'a pour moi nulle saveur, si je n'y lis le Nom de Jésus. Lorsque vous disputez ou conférez avec moi, le conteste n'a pour moi aucun intérêt, si je n'y entends résonner le Nom de Jésus. Jésus est un miel à ma bouche, une mélodie à mon oreille, une jubilation à mon cœur ; oui même, outre ce, une médecine bienfaisante. L'un de vous est-il triste ? Que Jésus vienne en son cœur ; que de là il passe en sa bouche, et incontinent, à la venue de ce divin Nom qui est une vraie lumière, tout nuage s'enfuit, la sérénité revient. Quelqu'un tombe-t-il dans le crime ; voire même, court-il, en se désespérant, au lacs de la mort ? S'il invoque le Nom de Jésus, ne recommencera-t-il pas de suite à respirer et à vivre ? Qui jamais oncques demeura dedans l'endurcissement du cœur, comme font tant d'autres, ou bien dedans la torpeur de la fétardie, la rancune, ou la langueur de l'ennui ? Quel est celui qui, par aventure, ayant à sec la source des larmes, ne l'ait sentie soudainement couler plus abondante et plus suave, sitôt que Jésus a été invoqué ? Quel est l'homme qui, palpitant et s'alarmant, au fort des périls, puis venant à invoquer ce Nom de vaillance, n'a pas senti tout aussitôt naître en soi la confiance et fuir la crainte ? Quel est celui, je vous le demande, qui, ballotté et flottant à la merci des doutes, n'a pas, sur-le-champ, je le dis sans balancer, vu reluire la certitude, à l'invocation d'un Nom si éclatant ? Qui est-ce qui, durant l'adversité, écoutant la méfiance, n'a pas repris courage, au seul son de ce Nom de bon secours ? Par effet, ce sont là les maladies et langueurs de l'âme, et il en est le remède.


Fabriano da Gentile. XIVe.

Certes, et je puis vous le prouver par ces paroles : Invoque-moi, dit le Seigneur, au jour de la tribulation, et je t'en tirerai, et tu m’honoreras. Rien au monde n'arrête si bien l'impétuosité de la colère, et n'accoise pareillement l'enflure de la superbe. Rien aussi parfaitement ne guarit les plaies de la tristesse, comprime les débordements de la paillardise, éteint la flamme de la convoitise, étanche la soif de l'avarice, et bannit toutes les démangeaisons des passions déshonnêtes. De vrai, quand je nomme Jésus, je me propose un homme débonnaire et humble de cœur, bénin, sobre, chaste, miséricordieux, et, en un mot, brillant de toute pureté et sainteté. C'est Dieu lui-même tout-puissant qui me guérit par son exemple, et me renforce par son assistance. Toutes ces choses retentissent à mon cœur, lorsque j'entends sonner le Nom de Jésus. Ainsi, en tant qu'il est homme, j'en tire des exemples, pour les imiter ; et en tant qu'il est le Tout-Puissant, j'en tire un secours assuré. Je me sers desdits exemples comme d'herbes médicinales, et du secours comme d'un instrument pour les broyer, et j'en fais une mixtion telle que nul médecin n'en saurait faire de semblable.

Ô mon âme ! Tu as un antidote excellent, caché comme en un vase, dans ce Nom de Jésus ! Jésus, pour le certain, est un Nom salutaire et un remède qui jamais oneques ne se trouvera inefficace pour aucune maladie. Qu'il soit toujours en votre sein, toujours à votre main : si bien que tous vos sentiments et vos actes soient dirigés vers Jésus."

Telle est donc la force et la suavité du très saint Nom de Jésus, qui fut imposé à l'Emmanuel le jour de sa Circoncision ; mais, comme le jour de l'Octave de Noël est déjà consacré à célébrer la divine Maternité, et que le mystère du Nom de l'Agneau demandait à lui seul une solennité propre, la fête d'aujourd'hui a été instituée. Son premier promoteur fut, au XVe siècle, saint Bernardin de Sienne, qui établit et propagea l'usage de représenter, entouré de rayons, le saint Nom de Jésus, réduit à ses trois premières lettres IHS, réunies en monogramme. Cette dévotion se répandit rapidement en Italie, et fut encouragée par l'illustre saint Jean de Capistran, de l'Ordre des Frères Mineurs, comme saint Bernardin de Sienne. Le Siège Apostolique approuva solennellement cet hommage au Nom du Sauveur des hommes ; et, dans les premières années du XVIe siècle, Clément VII, après de longues instances, accorda à tout l'Ordre de saint François le privilège de célébrer une fête spéciale en l'honneur du très saint Nom de Jésus.


Eugenio Cajes. XVIe.

Rome étendit successivement cette faveur à diverses Eglises ; mais le moment devait venir où le Cycle universel en serait enrichi lui-même. Ce fut en 1721, sur la demande de Charles VI, Empereur d'Allemagne, que le Pape Innocent XIII décréta que la Fête du très saint Nom de Jésus serait célébrée dans l'Eglise entière, et il la fixa au deuxième Dimanche après l'Epiphanie, dont elle complète si merveilleusement les mystères.

A LA MESSE

Dès l'Introït, l'Eglise annonce la gloire du Nom de son Epoux. Ciel, terre, abîme, tressaillez au bruit de ce Nom adorable ; car le Fils de l'Homme qui le porte est aussi le Fils de Dieu.

" Au Nom de Jésus, que tout genou fléchisse, au ciel, sur la terre et dans les enfers ; et que toute langue confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu le Père."

Ps. " Seigneur, notre Seigneur, que votre Nom est admirable par toute la terre ! Gloire au Père. Au Nom de Jésus."

EPÎTRE

Lecture des Actes des Apôtres. Chap. IV.


Dieric Bouts. XVe.

" En ces jours-là, Pierre, rempli du Saint-Esprit, dit : Princes du peuple et anciens, écoutez : puisque aujourd'hui nous sommes appelés en jugement pour un bienfait à l'égard d'un homme infirme, qui a été guéri par nous, sachez, vous tous, et tout le peuple d'Israël, que c'est au Nom de notre Seigneur Jésus-Christ, le Nazaréen, crucifié par vous, et ressuscité par Dieu d'entre les morts, que cet homme est devant vous en santé. Jésus est la pierre rejetée par vous qui bâtissez, laquelle est devenue la principale pierre de l'angle; et il n'y a pas de salut dans un autre que lui. Car il n'a point été donné aux hommes, sous le ciel, un autre nom dans lequel nous puissions être sauvés."

Nous le savons, Ô Jésus ! Nul autre nom que le vôtre ne pouvait nous donner le salut : ce Nom, en effet, signifie Sauveur. Soyez béni d'avoir daigné l'accepter; soyez béni de nous avoir sauvés ! Cette alliance ineffable que vous nous annoncez aujourd'hui dans les Noces mystérieuses, est tout entière exprimée dans votre doux et admirable Nom. Vous êtes du ciel, et vous prenez un nom de la terre, un nom qu'une bouche mortelle peut prononcer; vous unissez donc pour jamais la divine et l'humaine nature. Oh! rendez-nous dignes d'une si sublime alliance, et ne permettez pas qu'il nous arrivé jamais de la rompre.

EVANGILE

La suite du saint Evangile selon saint Luc. Chap. II. :


Alessandro Boticelli. XVIe.

" En ce temps-là, le huitième jour étant venu, auquel l'Enfant devait être circoncis, on lui donna le Nom de Jésus, qui était le Nom que l'Ange lui avait donné, avant qu'il fût conçu

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jeudi, 02 février 2023 | Lien permanent

17 avril. Saint Anicet, pape et martyr. 161.

- Saint Anicet, pape et martyr. 166.

Papes : saint Pie Ier (prédécesseur) ; saint Soter (successeur). Empereurs romains : Antonin le Pieux ; Lucius Verus ; Marc-Aurèle.

" La vie des clercs tout entière doit se distinguer de celle des laïques."
Saint Anicet aux évêques des Gaules.

Un Pape martyr du deuxième siècle se montre aujourd'hui sur le Cycle. Les martyrs se sont donnés rendez-vous auprès de Jésus ressuscité. Ils sont ces aigles dont il nous parle dans son Evangile, et qui volent de concert vers l'objet de leurs désirs (Matth. XXIV, 28.). Anicet n'est pas le seul pape honoré de la palme que nous aurons à fêter en ces jours ; d'autres réclameront bientôt nos hommages.

Quant à lui, ses actions nous sont peu connues, tant il plonge avant dans les fondements même de l'Eglise. Sur la chaîne des Pontifes, il est le onzième anneau après saint Pierre ; mais sa sainteté et son courage ont rendu sa mémoire immortelle. On sait que le grand saint Polycarpe, dont nous avons honoré la mémoire au vingt-six janvier, vint de Smyrne à Rome pour visiter Anicet et conférer avec lui. Il est resté aussi quelques traces du zèle que le saint pape fît paraître pour défendre son troupeau contre les atteintes des deux hérésiarques Valentin et Marcion ; enfin nous savons qu'il fut martyr, et c'est assez pour sa gloire.

Saint Anicet était originaire du bourg d'Amisa, en Syrie. Son père se nommait Jean et était habitant du bourg d'Omise ; il gouverna l'Église sous Marc-Aurèle, et succéda, sur le trône pontifical, à Pie Ier. Il était le onzième sucesseur de saint Pierre.

Il arrivait à la tête de l'Église en des temps difficiles. Il eut à combattre le Gnosticisme, qui était alors à son apogée et dont le siège était à Rome, avec ses chefs, Valentin, Marcion et Apelles parmis les plus tristement fameux.

Ces hérétiques, qui avaient la prétention de prendre dans chaque religion, dans chaque système philosophique, ce qu'il y avait de " meilleur ", enseignaient erreur sur erreur, altérant toutes les vérités dans tous les dogmes, et se disant volontiers Chrétiens avec les Chrétiens, Païens avec les Paîens, etc.

Outre les pernicieuses doctrines qu'ils enseignaient, se donnant donc pour chrétiens, ils rendirent la religion odieuse par leur vie désordonnée et leurs actions infâmes. Saint Anicet s'opposa aux progrès de l'hérésie de toute la force de son autorité et de sa doctrine et Dieu, en même temps, le consolait par l'arrivée de plusieurs saints personnages.

C'est sous son pontificat que saint Justin le Philosophe (que nous fêtons le 13 avril) vint passer quelque temps à Rome et y composa cette seconde apologie de la religion chrétienne qui lui valut le martyre.

En 157, Hégésippe, Juif converti, vint à Rome et composa, à la demande de notre saint Pape, une histoire de l'Eglise, qui s'étendait depuis la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ jusqu'au pontificat de saint Anicet, et dont nous ne conservons hélas que les fragments qu'Eusèbe de Césarée à gardé dans son Commentaires sur les Actes des Apôtres.

La cinquième année du règne de Marc-Aurèle, Anicet reçut la visite de saint Polycarpe, évêque de Smyrne, en Asie, et ancien disciple de saint Jean l'Évangéliste. C'est lui, rappelons-le au passage, qui avait coutume de répéter, en se bouchant les oreilles et s'enfuyant du mauvais lieu où il lui arrivait de pouvoir se trouver :
"Dans quel siècle, mon Dieu ! M'avez-vous fait naître !"


Saint Polycarpe prêchant. Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Il s'agit entre autre d'une illustration, sinon de l'obligation, du moins de l'usage, dès le commencement de l'Eglise, de la visite Ad limina Apostolorum.

On voit en effet, et l'on peut citer une foule d'exemples, dès les premiers temps de l'Eglise, des évêques allant visiter les Papes, même ceux des catacombes ; mais on ne voit pas un seul Pape usant de réciprocité et allant visiter ou consulter un autre siège.

Et cela est tellement éloquent que la notoriété allait à l'époque pour saint Polycarpe, qui avait vécu dans l'intimité de saint Jean, tandis qu'Anicet n'était qu'un simple prêtre issu d'une ancienne colonie d'Athènes : c'est bien saint Polycarpe qui alla au Pape.

Saint Polycarpe vin aussi pour consulter saint Anicet sur la question de la célébration de la fête de Pâques, question qui ne fut décidée que sous le pape Victor.

Saint Anicet et saint Polycarpe ne purent s'entendre, mais cela ne troubla en rien leur bonne harmonie. Pour preuve, nous avons le témoignage de saint Irénée de Lyon qui rapporte que " Anicet voulut, pour rendre hommage à Polycarpe, que ce dernier célébrât les saints mystères dans l'église de Rome, en sa présence ".
Saint Polycarpe avait parlé au peuple assemblé, et sa parole avait converti grand nombre d'hérétiques ; l'insolence de Marcion avait été confondue par cette parole si connue du Saint :
" Je te connais pour le fils aîné de Satan."

Se séparant enfin et à regret, ils ne devaient plus se revoir qu'au ciel où le martyre les conduisit tous deux.

On attribue à ce pape un décret adressé aux évêques des Gaules qui " défendait aux clercs de laisser croître et d'entretenir leur chevelure ", et " leur ordonnait de couper leurs cheveux en forme de couronne sur le sommet de la tête ", ce qui est la tonsure.

Cette recommandation n'était ni vaine ni anecdotique. En effet, ce rappel de la première épître de saint Paul aux Corinthiens (XI, 14.), où l'Apôtre disait que " la nature elle-même nous apprend que c'est une honte, pour un homme, de laisser croître sa chevelure ", s'adressait opportunément aux évêques des Gaules, pays où il était une mode, un honneur, voire un besoin de porter les cheveux très longs.

Et encore, saint Germain de Constantinople rapporte à ce sujet une tradition qui a son importance :
" La couronne ou tonsure du prêtre, outre sa signification de renoncement aux frivolités du monde, rappelle un fait de l'histoire évangélique. Quand saint Pierre fut envoyé par le Sauveur pour annoncer l'avénement du Messie aux bourgades de Palestine, les Juifs, incrédules à sa prédication, se saisirent de sa personne, et par dérision lui coupèrent les cheveux en rond sur le haut de la tête. Au retour de cette première mission, le Christ bénit son apôtre, et cette bénédiction changea en couronne de gloire, plus précieuse que l'or et les perles, la couronne d'ignominies infligée à saint Pierre."

Enfin, la mention expresse de cette coutume se trouve dans le livre de la hiérarchie ecclésiastique de saint Denys l'Aréopagite.

Saint Anicet ordonna aussi qu'un prêtre ne pourrait être sacré évêque que par trois autres prélats, comme le Concile de Nicée l'a aussi défini plus tard, et que, pour le Métropolitain, tous les évêques de sa province assisteraient au sacre.

Saint Anicet fit cinq fois les ordres au mois de décembre, et ordonna dix-sept prêtres, quatre diacres et neuf évêques pour divers lieux. Il vécut dans le pontificat huit ans, huit mois et vingt-quatre jours. Il reçut la couronne du martyre pour la foi du Christ, et fut enseveli sur la voie Appienne, dans le cimetière qui fut depuis appelé de Calliste.

RELIQUES

Le corps de saint Anicet fut exhumé en 1604, par la permission de Clément VIII, et donné à Jean Ange, duc d'Altemps (qui était parent avec l'illustre famille des Borromée), qui le mit dans une chapelle de son palais, bâtie tout exprès et très richement ornée.

Le chef de saint Anicet fut donnée au duc de Bavière, et il existe une relique de notre saint Pape à Saint-Vulfran d'Abbeville.

Dans les représentation artistiques, on place près de saint Anicet une roue qui aurait été l'instrument de son supplice.

PRIERE

" Saint Pontife, admis depuis tant de siècles dans la gloire du Christ dont vous fûtes le vicaire et le martyr, nous célébrons aujourd'hui d'un cœur filial votre mémoire bénie. Nous vénérons en vous l'une des glorieuses assises de la maison de Dieu ; et si votre nom est venu jusqu'à nous sans être accompagné du récit des oeuvres par lesquelles vous avez mérité la palme, nous savons du moins qu'il fut cher aux fidèles de votre temps. Au ciel, vous conservez le zèle pastoral qui vous anima sur la terre pour la gloire de votre Maître : soyez-y propice, Ô Anicet, à l'Eglise de nos temps.

Plus de deux cents Pontifes se sont succédé après vous sur la Chaire de Pierre, et le juge du dernier jour n'est pas descendu encore. Assistez votre successeur qui est notre Père, et secourez son troupeau, au milieu des dangers inouïs, qui l'assiègent. Vous avez gouverné l'Eglise durant la tempête ; priez Jésus ressuscité, afin qu'il se lève et commande à l'orage ; mais demandez-lui pour nous la constance. Elevez nos pensées vers la patrie céleste, afin qu'à votre exemple nous soyons toujours prêts à obéir au signal divin. Nous sommes les fils des martyrs ; leur foi est la nôtre, notre espérance doit être commune."

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mercredi, 17 avril 2024 | Lien permanent | Commentaires (1)

2 mars. Saint Simplicius, ou Simplice, pape. 483.

- Saint Simplicius, ou Simplice, pape. 483.

Empereur : Zénon. Roi de France : Clovis Ier.

" La règle de la doctrine catholique demeure toujours la même dans les successeurs de celui à qui le Seigneur a confié le soin de son bercail et à qui il a promis son immortelle assistance jusqu'à la consommation des siècles."
Lettre de saint Simplicius à l'empereur Zénon.


Saint Simplicius. Frise de la basilique Saint-Pierre. Rome.

Saint Simplicius, ou Simplice, fils de Castinus, était natif de Tibur, dans le pays de l'ancien Latium, aujourd'hui Tivoli, dans la campagne de Rome. Il passa sa première jeunesse dans une grande simplicité ou droiture de cœur, vivant dans l'innocence et dans la crainte du Seigneur.

Ayant été reçu dans le clergé de Rome, il s'y comporta d'une manière si irréprochable, que, lorsque le Saint-Siège vint à vaquer par la mort de saint Hilaire, il y fut élevé d'une commune voix, comme le plus digne de le remplir. Il fut ordonné le 5 mars de l'an 467, qui était le second dimanche de Carême, la première année du règne de l'empereur Anthème, en Occident, et la onzième de celui de Léon en Orient.

A son avènement, il trouva que les hérétiques, surtout ceux qu'on appelait Macédoniens, que l'empereur Anthème avait amenés à Rome l'année précédente, tâchaient de se prévaloir de la mort de saint Hilaire, son prédécesseur, qui s'était généreusement opposé à leurs entreprises. C'est ce le fit veiller particulièrement sur eux, pour empêcher qu'ils ne fissent du progrès ; et, par sa fermeté, il rendit inutile la protection qu'Anthème leur accordait.


Anthème, empereur d'Occident. Monnaie du Ve.

L'empereur Léon, ayant appris son élection, lui écrivit pour s'en réjouir avec lui, et fit en même temps tous ses efforts pour obtenir de lui la confirmation du décret du concile de Chalcédoine, fait en faveur du patriarche de Constantinople, qu'il était question d'élever au second rang de l'Eglise, au-dessus de ceux d'Alexandrie et d'Antioche. Saint Simplicius, marchant hardiment sur les pas de saint Léon le Grand et de saint Hilaire, qui s'étaient fortement opposés à ces nouvelles prétentions, résista aux désirs de cet empereur avec une constance égale à la leur? Il députa, pour cette affaire, un évêque nommé Probe, à Constantinople, et ce prince, jugeant par le discours de ce légat que saint Simplicius ne rabattrait rien de sa résolution, se vit obligé de renoncer à la sienne.

Saint Simplicius gouverna l'Eglise assez tranquillement pendant le règne d'Anthème, qui, bien que favorable à diverses hérésies, n'osa néanmoins pas troubler ce vigilant pasteur dans les précautions qu'il prenait pour garantir le troupeau de Notre Seigneur Jésus-Christ de l'invasion des loups.


Léon, empereur d'Orient. Statue de marbre du Ve.

Il y avait cinq ans qu'il était sur le siège de saint Pierre, lorsque cet empereur fut assassiné par les sicaires de son gendre Ricimer, barbare de naissance, arien de religion, chef des armées de l'empire d'Occident, qui avait déjà fait mourir deux empereurs de suite, Marjorien et Sévère. Comme il disposait de l'empire en maître absolu, il mit Olybrius en la place de son beau-père, et, s'étant contenté jusque là de de prendre sur les Catholiques une église de Sainte-Agathe, dans Rome, pour la mettre à la disposition des Ariens, il se promettait de les mettre encore plus au large et de les maintenir dans l'Italie, contre les lois des empereurs orthodoxes. Mais Dieu ne permit point que ce scélérat causât une telle affliction à son Eglise, et, pour mettre fin à tant de crimes, il l'ôta du monde quarante jours après la mort d'Anthème.


Le fameux Olybrius, empereur postiche d'Occident, établi par le chef
des armées de l'empire, Ricimer. Déjà meurtrier de deux empereurs,
il fit assassiner l'empereur Anthème. Monnaie du Ve.

Saint Simplicius, délivré des appréhensions et des peines que ce méchant homme lui avait données, semblait devoir respirer et avoir plus de libertés pour pourvoir à tous les besoins de l'Eglise ; mais comme la situation des affaires ecclésiastiques ne pouvait le laisser indifférent aux intérêts de l'empire, il ne put être insensible aux malheurs publics de sa décadence et de son renversement qui suivirent.

Quatre empereurs depuis Anthème, détrônés successivement dans l'Occident en moins de trois ans, donnèrent lieu aux barbares, conduits par Odoacre, d'envahir le reste de l'empire en Italie, après les démembrements qu'en avait déjà faits les Francs, les Burgondes, les Goths et les Vandales, qui s'étaient rendus maîtres des Gaules, de l'Espagne et de l'Afrique. Des temps si difficiles et si pleins de troubles ne contribuèrent pas peu à faire éclater la prudence et la sagesse avec lesquelles saint Simplicius sut conduire l'Eglise, comme un pilote très expérimenté, sur une mer orageuse. On vit surtout, et on admira son application infatigable et sa vigilance dans cette sollicitude pastorale qu'il fit paraître, pour écarter tous les dangers qui menaçaient l'Eglise en un temps où pas un prince n'était catholique.


Combat entre Odoacre et Théodoric. Manuscrit du IXe.

Odoacre, qui s'était rendu maître de l'Italie en dernier lieu, après avoir renversé l'empire d'Occident, était arien, aussi bien que tous les rois des Goths, des Burgondes et des Vandales qui régnaient alors. Ceux des Francs étaient encore dans les ténèbres du paganisme ; l'empereur Zénon et le tyran Basiliscus, en Orient, favorisaient les Eutychiens. Ainsi le Pape, loin de pouvoir espérer du secours d'aucune puissance séculière, avait sujet de regarder tous ces princes comme autant d'ennemis qu'il avait à combattre, pour délivrer de l'oppression et soutenir l'Eglise catholique qui était répandue dans leurs Etats et qui gémissait sous leur domination.

Il y avait deux ans que Zénon régnait en Orient, lorsqu'on vit finir l'empire romain en Occident ; et comme ce prince affectait dans les commencements de prendre quelque soin des affaire de l'Eglise, par un esprit de dissimulation, Acace, patriarche de Constantinople crut pouvoir se servir de cette conjoncture, pour renouveler, auprès de saint Simplicius, les sollicitations qu'il avait déjà faites en vain du temps de l'empereur Léon, touchant les prétention de son siège. Mais l'évêque de Rome se montra toujours égal dans la fermeté qu'il apporta pour réprimer la passion de cet ambitieux prélat.

Cependant, Zénon fut chassé de son trône par Basiliscus, qui, s'étant emparé de l'empire d'Orient, rétablit les prélats eutychiens qui avaient été bannis par pour leurs hérésies et pour d'autres crimes du temps de l'empereur Léon. Par ce moyen, l'on vit retourner à Alexandrie Timothée Elure, auteur de la mort du patriarche saint Protère, et usurpateur de son siège ; et Pierre le Foulon, autre hérétique, remonta sur le siège d'Antioche, où il s'était autrefois installé, après en avoir chassé le légitime évêque Martyrius.


Saint Simplicius, pape.

Timothée Elure, ayant chassé d'Alexandrie l'évêque catholique Timothée Solofaciole, et commis des violences sur le clergé et les fidèles, semblables à celles exercées du temps de saint Protère, revint à Constantinople pour y établir son hérésie avec l'aide du tyran Basiliscus. Il le porta à donner une espèce d'édit pour abroger le concile de Chalcédoine, et l'on prétend qu'il y eut près de cinq cents prélats qui y souscrivirent tant fut grande la désertion des pasteurs de l'Eglise, qui, beaucoup moins attaché s à la religion de l'Evangile qu'à celle de la cour, source ordinaire des craintes et des espérances des mercenaires, ne firent point difficulté de trahir la foi orthodoxe qu'ils avaient suivies sous l'empereur Léon.

Acace de Constantinople commençait à se laisser emporter au torrent qui entraînait les autres , lorsque le clergé de son église et les moines de sa ville se liguèrent pour la défense du concile de Chalcédoine. Ils écrivirent à saint Simplicius pour l'informer de ce qui se passait et lui demander du secours. Il firent en même temps de si fortes remontrances à Acace, leur patriarche, que, l'ayant intimidé par leur résolution, ils lui firent reprendre des sentiments conformes à ses devoirs, l'empêchèrent de recevoir et de publier l'édit de Basiliscus, et l'obligèrent même de parler en chaire pour la défense du dit Concile.

Saint Simplicius, cherchant à remédier aux maux qui menaçaient ainsi toute l'église d'Orient, écrivit d'abord au clergé de Constantinople, puis à Acace, dont il voulut bien prendre le silence pour un effet de prudence et de discrétion, afin de l'exciter, par ces témoignages de sa confiance, à la vigueur épiscopale qui lui était nécessaire pour s'opposer aux efforts de Basiliscus, et fit un parti si considérable des clercs, des moines, du sénat et des laïques orthodoxes dans Constantinople, que ce tyran fut contraint de révoquer son édit et d'en publier un autre où Eutychès se trouvait condamné avec Nestorius. Ce qui l'obligea principalement à cette rétractation, ce fut la crainte de l'empereur Zénon, qui revenait à lui avec une armée et du parti duquel il voulait détacher les Catholiques. Mais ce moyen lui devint inutile : il fut abandonné de tout le monde, lorsqu'on vit approcher Zénon, à qui il fut livré par Acace même, qui le fit prendre dans le baptistère de l'église où il s'était réfugié.


Zénon, empereur d'Orient. Monnaie du Ve.

Dès que Zénon se vit rétablir sur son trône, il crut que ses intérêts demandaient qu'il contrefît le catholique, et il écrivit aussitôt à saint Simplicius pour l'assurer de l'intégrité de sa foi. Notre Saint lui fit une excellente réponse, où il marqua qu'il lui était glorieux d'avoir eu pour ennemis ceux qui l'étaient de Dieu et de voir l'Eglise rétablie en même temps que son ennemi était abattu ; de sorte que, sa cause étant commune avec celle du Seigneur, il devait employer son autorité pour chasser de l'Eglise les tyrans qui l'opprimaient, comme le Seigneur l'avait assisté pour vaincre les siens. Il l'exhortait ensuite à délivrer Alexandrie des cruauté du parricide Timothée Elure, qui y avait répandu tant de sang innocent et exercé un brigandage honteux, et à y rétablir l'évêque légitime. Il le conjurait en même temps de chasser tous les prélats hérétiques de leurs sièges, et d'appuyer de tout son pouvoir les décisions du concile de Chalcédoine.

Cependant, saint Simplicius assembla un concile dans Rome, où il prononça anathème contre Eutychès l'hérésiarque, Dioscore d'Alexandrie, et Timothée Elure. Zénon, qui s'était engagé de lui-même par sa propre hypocrisie, ne put pas, honnêtement, se refuser aux avis du Pape. Il cassa donc tous les édits faits par Basilisque, chassa Pierre de Foulon d'Antioche, et sept ou huit autres prélats eutychiens de leur siège. Les évêques de l'Asie-Mineure, craignant le même sort, envoyèrent au patriarche Acace une humble déclaration par laquelle ils protestaient qu'ils avaient souscrit par force à l'édit de Basilisque contre le concile de Chalcédoine, dont ils faisaient profession d'embrasser les décisions.

Thimothée Elure y fuit trompé comme les autres, et, croyant que c'était tout de bon que Zénon était catholique, ne voulut pas attendre qu'on le chassât de son siège, et il s'empoisonna par la crainte de mourir d'une autre main que la sienne. Les Alexandrins, à cette nouvelle, lui substituèrent Pierre Monge, de sa faction, qui s'était autrefois joint à lui contre saint Protère. Zénon, irrité de cette élection, fit mourir ceux qui en étaient les auteurs et qui l'avait sacré, chassa Pierre Monge et rétablit Timothée Solofaciole, pour satisfaire au désir de saint Simplicius.


Saint Simplice. Gravure. Jacques Callot. XVIIe.

Cependant, Acace de Constantinople, prélat artificieux et inconstant (dont on rappelle qu'il fut à l'origine d'un schisme de plus de vingt ans et qu'il mourut dans cet état), qui savait mieux que personne faire servir la religion à ses intérêts particuliers, favorisait secrètement Pierre Monge, qui s'était caché dans Alexandrie, au lieu d'exécuter son ban. C'est ce qui lui fit éluder adroitement les instances que saint Simplicius lui fit dans trois de ses lettres, de faire auprès de l'empereur que ce Pierre Monge, qu'il lui avait lui-même décrit autrefois comme un scélérat, sortît absolument de la ville d'Alexandrie, où il cabalait sourdement contre l'évêque catholique Solofaciole.

Saint Simplicius eut la même sollicitude pour l'église d'Antioche, où l'on avait substitué Etienne, évêque catholique, à Pierre le Foulon, qui e usait dans cette ville comme faisait Pierre Monge dans Alexandrie. Etienne, étant mort, eut pour successeur un autre Etienne, à qui les Eutychiens, instruits et animés par les pratiques secrètes de Pierre le Foulon, dressèrent de continuelles embûches. Le Pape, informé de ce qui se passait, sollicita fortement l'empereur Zénon de chasser Pierre le Foulon de la ville d'Antioche ; mais celui-ci trouva encore un protecteur dans la personne d'Acace de Constantinople. Peu de jour après, les Eutychiens allèrent assassiner Etienne dans le baptistère de l'église Saint-Barlaam. Zénon et Acace firent réflexion trop tard des avertissements de saint Simplicius ; mais, sans inquiéter Pierre le Foulon, on se contenta de rechercher les ministres du meurtre de l'évêque Etienne pour les punir.

L'empereur, voyant toute la ville d'Antioche en trouble par les remuements des Eutychiens, fit faire l'élection de l'évêque d'Antioche à Constantinople, par Acace, parce qu'on pouvait observer les règles ordinaires de l'Eglise sans danger. Calendion fut élu de la sorte ; l'empereur et le patriarche mandèrent alors séparément son élection au Pape pour la lui faire approuver. Le Pape, croyant que, pour le bien de la paix de l'Eglise, on pouvait, dans cette conjoncture, relâcher quelque chose de sa discipline, récrivit à l'un et à l'autre qu'il approuvait cette élection, pourvu qu'elle n'eût point de suite et que, quand le siège de l'église d'Antioche viendrait à vaquer de nouveau, on se remît dans l'observation des décrets du concile de Nicée pour procéder à l'ordination de l'évêque. Il avertit Acace, en particulier, de prendre garde qu'il n'arrivât plus à aller contre les Canons.

Les soins de notre saint Pape s'étendirent ensuite sur l'église d'Alexandrie, qui vint à vaquer la même année par la mort du patriarche Timothée Solofaciole. Les Catholiques élurent en sa place Jean de Tabennes, surnommé Talaïde, homme très orthodoxe et très éclairé, à qui saint Simplicius promit sa communion ainsi qu'à Calendion. Mais cet homme déplu à Zénon, qu'on avait prévenu contre lui, de sorte que ce prince, à l'instigation d'Acace, qui n'aimait pas Talaïde, voulut rétablir Pierre Monge, et le renvoya à Alexandrie, en lui recommandant simplement d'entretenir la communion de l'église de Rome avec Simplicius et celle de l'église de Constantinople avec Acace. Saint Simplicius se plaignit hautement de cette conduite dans une lettre qu'il écrivit à Acace, et il lui marqua combien il était éloigné de recevoir à sa communion un excommunié qui se mettait à la tête des hérétiques.


Zénon, empereur d'Orient. Monnaie du Ve.

Il se disposait, au contraire, à confirmer l'élection de Jean de Tabennes, lorsque vint un exprès de Zénon avec une lettre qui accusait le nouveau prélat de parjure, sur le prétexte que Jean de Tabennes lui aurait promis qu'il n'accepterait pas l'évêché d'Alexandrie si l'on venait à le lui offrir. Sur cet incident, saint Simplicius suspendit la confirmation de Talaïde ; et, pour lever ce nouvel obstacle, il écrivit de nouveau à Acace, qui, par l'affectation de son silence, fit enfin ouvrir les yeux à ce saint Pape sur ses mauvaises dispositions. Quelques mois après, l'on vit arriver à Rome le nouveau patriarche d'Alexandrie, Jean de Tabennes, qui fut reçu par le Pape avec toutes les marques d'honneur et d'estime qui étaient dus à sa vertu. Il y trouva l'asile qu'il était venu chercher auprès du Saint-Siège ; et il se préparait à se purger, dans les formes, de l'accusation de parjure dont il était chargé par l'empereur Zénon, qui l'avait fait chasser de son église par provision, pour y faire rentrer Pierre Monge, comme il avait chasser Calendion d'Antioche pour rétablir Pierre le Foulon.

Mais saint Simplicius tomba malade dans cet intervalle, et mourut le 10 février de l'an 483, après avoir saintement g

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