UA-75479228-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Saint Willibrord

18 mars. Saint Cyrille de Jérusalem, évêque de Jérusalem, Docteur de l'Eglise. 386.

- Saint Cyrille de Jérusalem, évêque de Jérusalem, Docteur de l'Eglise. 386.

Papes : Saint Sylvestre Ier, saint Sirice. Empereurs : Constantin, Licinius, Valentinien II.
 
" Si jamais notre foi s'alarme, qu'il suffise de ces paroles de notre divin Maître pour calmer nos inquiétudes : " Le ciel et la terre passeront, mais ma parole ne passera pas "."
Matth., XXIV, 35.


Saint Jérôme apparaissant à saint Cyrille de Jérusalem.
(Détail). Sano di Pietro. Sienne. XVe.
 
Il était juste qu'en ces jours consacrés à l'instruction des catéchumènes, la sainte Eglise honorât le Pontife dont le nom rappelle, mieux qu'aucun autre, le zèle et la science que doivent déployer les pasteurs dans la préparation de ses futurs membres au baptême.

Longtemps cependant, la chrétienté latine borna ses hommages envers un si grand Docteur à la mention faite de lui, chaque année, en son martyrologe. Mais voici qu'à l'antique expression de sa reconnaissance pour des services rendus en des temps éloignés déjà de quinze siècles, se joint chez elle aujourd'hui, vis-à-vis de Cyrille, la demande d'une assistance rendue maintenant non moins nécessaire qu'aux premiers âges du christianisme Le baptême, il est vrai, se confère aujourd'hui dès l'enfance ; il met l'homme, par la foi infuse, en possession de la pleine vérité avant que son intelligence ait pu rencontrer le mensonge. Mais trop souvent, de nos jours, l'enfant ne trouve plus près de lui la défense dont ne peut se passer sa faiblesse ; la société moderne a renié Jésus-Christ, et son apostasie la pousse à étouffer, sous l'hypocrite neutralité de prétendues lois, le germe divin dans toute âme baptisée, avant qu'il ait pu fructifier et grandir.

En face de la société comme dans l'individu, le baptême a ses droits cependant ; et nous ne pouvons honorer mieux saint Cyrille, qu'en nous rappelant, au jour de sa fête, ces droits du premier Sacrement au point de vue de l'éducation qu'il réclame pour les baptisés. Durant quinze siècles les nations d'Occident, dont l'édifice social reposait sur la fermeté de la foi romaine, ont maintenu leurs membres dans l'heureuse ignorance de la difficulté qu'éprouve une âme pour s'élever des régions de l'erreur à la pure lumière. Baptisés comme nous à leur entrée dans la vie, et dès lors établis dans le vrai, nos pères avaient sur nous l'avantage de voir la puissance civile défendre en eux, d'accord avec l'Eglise, cette plénitude de la vérité qui formait leur plus grand trésor, en même temps qu'elle était la sauvegarde du monde.

La protection des particuliers est en effet le devoir du prince ou de quiconque, à n'importe quel titre, gouverne les hommes, et la gravité de ce devoir est en raison de l'importance des intérêts à garantir ; mais cette protection n'est-elle pas aussi d'autant plus glorieuse pour le pouvoir, qu'elle s'adresse aux faibles, aux petits de ce monde ? Jamais la majesté de la loi humaine n'apparut mieux que sur les berceaux, où elle garde à l'enfant né d'hier, à l'orphelin sans défense, sa vie, son nom, son patrimoine. Or, l'enfant sorti de la fontaine sacrée possède des avantages qui dépassent tout ce que la noblesse et la fortune des ancêtres, unies à la plus riche nature, auraient pu lui donner. La vie divine réside en lui ; son nom de chrétien le fait l'égal des anges ; son patrimoine est cette plénitude de la vérité dont nous parlions tout à l'heure, c'est-à-dire Dieu même, possédé par la foi ici-bas, en attendant qu'il se découvre à son amour dans le bonheur de l'éternelle vision.
 
Mort de saint Jérôme. Saint Jérôme apparaissant à
saint Cyrille de Jérusalem. Sano di Pietro. Sienne. XVe.
 
Saint Cyrille naquit à Jérusalem ou aux environs. Il s'adonna diligemment dès l'âge le plus tendre à l'étude des divines Ecritures, et il fit tant de progrès dans leur connaissance, qu'il devint pour la foi orthodoxe un vaillant défenseur. Formé à la discipline monastique, il s'astreignit à la continence perpétuelle et au plus sévère genre de vie. Il se rendit la sainte doctrine si familière, que ses discours, même ceux qu'il n'écrivait pas, n'étaient qu'un tissu de passages des Livres inspirés. Il joignit à cette étude celle des saints Pères et même celle des auteurs profanes, où il trouvait de puissantes armes contre l'erreur et pour la défense de la vérité.
 
Saint Maxime, Evêque de Jérusalem, l'ordonna prêtre et lui confia la charge de prêcher la parole de Dieu aux fidèles et d'instruire les catéchumènes. Ce fut avec la plus grande gloire qu'il s'en acquitta et composa ces Catéchèses vraiment admirables, dans lesquelles, embrassant avec abondance et clarté toute la doctrine de l'Eglise, il établit solidement tous les dogmes de la religion contre les ennemis de la foi. Il y parle avec tant d'évidence et de précision, que non seulement les hérésies déjà nées, mais celles encore à venir y sont réfutées comme par une sorte de présage, par exemple dans son affirmation de la présence réelle du Corps et du Sang de Jésus-Christ au merveilleux sacrement de l'Eucharistie.


Saint Cyrille de Jérusalem. Francesco Bartolozzi. XVIIIe.

Saint Maxime étant mort, il fut établi en sa place par les évêques de la province. Dans son épiscopat, non moins que saint Athanase, son contemporain, il subit pour la cause de la foi de nombreuses injustices et des persécutions de la part des Ariens. Souffrant impatiemment la véhémence de Cyrille contre l'hérésie, ils le poursuivirent de leurs calomnies, et, l'ayant déposé dans un conciliabule, le chassèrent de son siège. Pour se soustraire à leur fureur, il s'enfuit à Tarse de Cilicie et supporta la rigueur de l'exil tout le temps que vécut Constance. Après la mort de celui-ci, Julien l'Apostat étant devenu empereur, il put revenir à Jérusalem où il employa toute l'ardeur de son zèle à retirer son troupeau de l'erreur et du vice.

Mais sous l'empire de Valens, il dut de nouveau prendre la route de l'exil, jusqu'à ce que Théodose le Grand eût rendu la paix à l'Eglise et réprimé la cruauté et l'audace des Ariens. Cet empereur reçut Cyrille avec de grands honneurs, comme le très courageux athlète du Christ, et le rendit à son siège. Avec quelle force et quelle sainteté il accomplit les devoirs de son sublime office, c'est ce qui ressort nettement de l'état prospère alors de l'Eglise de Jérusalem, tel que le décrit saint Basile qui, étant venu vénérer les saints lieux, y demeura quelque temps.

Saint Cyrille de Jérusalem et la destruction du Temple
rebâti sur les ordres de Julien l'Apostat. Gravure. XVIIe.

Dieu fit ressortir la sainteté du vénérable Pontife par des signes célestes dont la mémoire est venue jusqu'à nous. On compte parmi eux la merveilleuse apparition d'une croix plus brillante que les rayons du soleil, qui illustra les commencements de son épiscopat. Ce prodige eut les païens et les chrétiens pour témoins oculaires avec Cyrille lui-même, qui, en ayant rendu grâces à Dieu dans l'église, le raconta ensuite par lettre à l'empereur Constance.

Non moins digne d'admiration est ce qui arriva aux Juifs, lorsque, par l'ordre impie de l'empereur Julien, ils voulurent relever le temple que Titus avait renversé. Car il se fit sentir un violent tremblement de terre, et, d'immenses tourbillons de flammes sortant de terre, le feu dévora tous les travaux, de telle sorte que les Juifs et Julien épouvantés durent renoncer à l'entreprise, selon que Cyrille l'avait prédit comme devant arriver infailliblement.
 
Enfin, peu de temps avant sa mort, il assista au concile œcuménique de Constantinople, dans lequel fut condamnée l'hérésie de Macédonius et, de nouveau, celle des Ariens. De retour à Jérusalem, il mourut saintement presque septuagénaire, la trente-cinquième année de son épiscopat.


Saint Athanase et saint Cyrille de Jérusalem.
Questions d'Athanase d'Alexandrie, réponses de Cyrille de Jérusalem.
Proche-Orient. XVIIe.

Il nous reste de lui vingt-trois instructions familières sur l'ensemble des vérités chrétiennes, le symbole de la foi et les sacrements. Ces instructions sont une de ses gloires les plus pures, car c'est un arsenal où l'apologiste chrétien trouve, même aujourd'hui, des armes puissantes et invincibles. Nous y voyons en particulier, que l'usage de faire le signe de la Croix était connu dès les premiers siècles :
" Ne rougissez pas, disait-il, de la Croix de Jésus-Christ ; imprimez-la sur votre front, afin que les démons, apercevant l'étendard du Roi, s'enfuient en tremblant. Faites ce signe, et quand vous mangez, et quand vous buvez, et quand vous êtes debout ou assis, quand vous vous couchez, quand vous vous levez et quand vous marchez ; en un mot, faites-le dans toutes vos actions."

La gloire de saint Cyrille est d'avoir été l'ami et le défenseur de saint Athanase et du dogme chrétien contre les hérétiques. Trois fois exilé de Jérusalem, dont il était devenu évêque, trois fois rétabli sur son siège, il restera comme l'un des beaux modèles de la fermeté pastorale.

Le Souverain Pontife Léon XIII a ordonné qu'on en célébrât l'Office et la Messe dans l'Eglise universelle.


Saint Augustin et saint Cyrille de Jérusalem.
Enluminure d'un manuscrit du XVIe.

PRIERE

" Vous avez été, Ô Cyrille, un vrai fils de la lumière (Eph. V, 8.). La Sagesse de Dieu avait dès l'enfance conquis votre amour ; elle vous établit comme le phare éclatant qui brille près du port, et sauve, en l'attirant au rivage, le malheureux ballotté dans la nuit de l'erreur. Au lieu même où s'étaient accomplis les mystères de la rédemption du monde, et dans ce IVe siècle si fécond en docteurs, l'Eglise vous confia la mission de préparer au baptême les heureux transfuges que la victoire récente du christianisme amenait à elle de tous les rangs de la société. Nourri ainsi que vous l'étiez des Ecritures et des enseignements de la Mère commune, la parole s'échappait de vos lèvres, abondante et pure, comme de sa source ; l'histoire nous apprend qu'empêché par les autres charges du saint ministère de consacrer vos soins exclusivement aux catéchumènes, vous dûtes improviser ces vingt-trois admirables discours, vos Catéchèses, où la science du salut se déroule avec une sûreté, une clarté, un ensemble inconnus jusque-là et, depuis lors, jamais surpassés. La science du salut, c'était pour vous, saint Pontife, la connaissance de Dieu et de son Fils Jésus-Christ, contenue dans le symbole de la sainte Eglise ; la préparation au baptême, à la vie, à l'amour, c'était pour vous l'acquisition de cette science unique, seule nécessaire, profonde d'autant plus et gouvernant tout l'homme, non par l'impression d'une vaine sentimentalité, mais sous l'empire de la parole de Dieu reçue comme elle a droit de l'être, méditée jour et nuit, pénétrant assez l'âme pour l'établir à elle seule dans la plénitude de la vérité, la rectitude morale et la haine de l'erreur.

Sûr ainsi de vos auditeurs, vous ne craigniez point de leur dévoiler les arguments et les abominations des sectes ennemies. Il est des temps, des circonstances dont l'appréciation reste aux chefs du troupeau, et où ils doivent passer par-dessus le dégoût qu'inspirent de telles expositions, pour dénoncer le danger et tenir leurs brebis en garde contre les scandales de l'esprit ou des mœurs. C'est pour cela, Ô Cyrille, que vos invectives indignées poursuivaient le manichéisme au fond même de ses antres impurs ; vous pressentiez en lui l'agent principal de ce mystère d'iniquité (II Thess. II, 7.) qui poursuit sa marche ténébreuse et dissolvante à travers les siècles, jusqu'à ce qu'enfin le monde succombe par lui de pourriture et d'orgueil. Manès en nos temps règne au grand jour ; les sociétés occultes qu'il a fondées sont devenues maîtresses. L'ombre des loges continue, il est vrai, de cacher aux profanes son symbolisme sacrilège et les dogmes qu'il apporta de Perse jadis ; mais l'habileté du prince du monde achève de concentrer dans les mains de ce fidèle allié toutes les forces sociales. Dès maintenant, le pouvoir est à lui ; et le premier, l'unique usage qu'il en fasse, est de poursuivre l'Eglise en haine du Christ. Voici qu'à cette heure il s'attaque à la fécondité de l'Epouse du Fils de Dieu, en lui déniant le droit d'enseigner qu'elle a reçu de son divin Chef ; les enfants mêmes qu'elle a engendrés, qui déjà sont à elle par le droit du baptême, on prétend les lui arracher de vive force et l'empêcher de présider à leur éducation.


Papyrus grec de saint Cyrille. IVe, Ve.

Ô saint Cyrille, vous qu'elle appelle à son secours en ces temps malheureux, ne faites pas défaut à sa confiance. Vous compreniez si pleinement les exigences du sacrement qui fait les chrétiens ! Protégez le saint baptême en tant d'âmes innocentes où l'on veut l'étouffer. Soutenez, réveillez au besoin, la foi des parents chrétiens ; qu'ils comprennent que si leur devoir est de couvrir leurs enfants de leur propre corps plutôt que de les laisser livrer aux bêtes, l'âme de ces chers enfants est plus précieuse encore. Déjà plusieurs, et c'est la grande consolation de l'Eglise en même temps que l'espoir de la société battue en brèche de toutes parts, plusieurs ont compris la conduite qui s'imposait a mute âme généreuse en de telles circonstances : s'inspirant de leur seule conscience, et forts de leur droit de pères de famille, ils subiront la violence de nos gouvernements de force brutale, plutôt que de céder d'un pas aux caprices d'une réglementation d'Etat païen aussi absurde qu'odieuse. Bénissez-les, Ô Cyrille ; augmentez leur nombre. Bénissez également, multipliez, soutenez, éclairez les fidèles qui se dévouent à la tâche d'instruire et de sauver les pauvres enfants que trahit le pouvoir ; est-il une mission plus urgente que celle des catéchistes, en nos jours ? En est-il qui puisse vous aller plus au cœur ?

La sainte Eglise nous rappelait, tout à l'heure, l'apparition de la Croix qui vînt marquer les débuts de votre épiscopat glorieux. Notre siècle incrédule a été, lui aussi, favorisé d'un prodige semblable, lorsque, à Migné, au diocèse d'Hilaire, votre contemporain et votre émule dans la lutte pour le Fils de Dieu, le signe du salut parut au ciel, resplendissant de lumière, à la vue de milliers de personnes. Mais l'apparition du 7 mai 351 annonçait le triomphe : ce triomphe que vous aviez prévu sans nul doute pour la sainte Croix, lorsque sous vos yeux, quelques années plus tôt, Hélène retrouvait le bois rédempteur; ce triomphe qu'en mourant vous laissiez affermi par le dernier accomplissement des prophéties sur le temple juif. L'apparition du 17 décembre 1826 n'aurait-elle, hélas ! Annonce que défaites et ruines ? Confiants dans votre secours si opportun, nous voulons espérer mieux, saint Pontife ; nous nous souvenons que ce triomphe de la Croix dont vous fûtes le témoin heureux, a été le fruit des souffrances de l'Eglise, et que vous dûtes l'acheter pour votre part au prix de trois dépositions de votre siège et de vingt ans d'exil. La Croix, dont le Cycle sacré nous ramène les grands anniversaires, la Croix n'est point vaincue, mais grandement triomphante au contraire, dans le martyre de ses fidèles et leurs épreuves patiemment supportées ; c'est victorieuse à jamais qu'elle apparaîtra sur les ruines du monde, au dernier jour."
 
Rq :
- On trouvera une notice très complète sur notre Saint dans les Petits Bollandistes : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k30733g
- On trouvera les Catéchèses

Lire la suite

mardi, 18 mars 2025 | Lien permanent | Commentaires (1)

19 mars. Saint Joseph, époux de la très sainte Vierge Marie, mère de Notre Seigneur Jésus-Christ. Ier siècle.

- Saint Joseph, époux de la très sainte Vierge Marie, mère de Notre Seigneur Jésus-Christ. Ier siècle.

Empereur romain : Tibère.

" Si vous cherchez Joseph, vous l'y trouverez avec Jésus et Marie."
Origène. Homil. XVIII in Luc.

" Le juste fleurira comme le lis ; sa fleur conservera son éclat et son parfum éternellement devant le Seigneur."
Brév. rom., 19 mars, office de saint Joseph.

" Vous pouvez conjecturer quel personnage fut saint Joseph d'après la seule interprétation de son nom, qui veut dire augmentation."
Saint Jean Chrysostome.


L’Apparition de l’Ange à saint Joseph. Georges de La Tour. XVIIe.

Saint Joseph descendait de la race royale de David. On croit généralement qu'en vue de la mission sublime que le Ciel lui destinait, il fut sanctifié avant sa naissance. Nul ne peut douter que Joseph ne fût préparé à son sublime ministère, quand la Providence, qui dirige tous les événements, unit son sort à celui de Marie.

L'Évangile est sobre de détails sur saint Joseph, et on y voit tout résumé en ces mots (Matth. I, 19.) : " Il était juste ".

En quoi consiste cette vertu de justice ? Donnons deux saints docteurs afin d'en appréhender l'essentiel :
" La justice n'est pas seulement cette vertu spéciale attribuant à chacun ce qui lui appartient, c'est encore cette rectitude générale de l'âme consistant dans la réunion de toutes les vertus."
Saint Thomas d'Aquin.
" Le nom de juste que l'Esprit-Saint accorde à saint Joseph, signifie accompli dans toutes les vertus."

Saint Jean Chrysostome.


Le repentir de saint Joseph. Alessandro Tiarini. XVIIe.

Mais que ces mots couvrent de merveilles, puisque les docteurs s'accordent à dire que saint Joseph tient le premier rang après Marie parmi tous les Saints !

Ainsi Suarez n'hésite-t-il pas à écrire (De Incarnat., part. III, quaest. 29, disp. 8, sect. 2.) :
" Il n'est pas téméraire, c'est même une opinion vraisemblable, et inspirée par la piété, que saint Joseph, entre tous les saints, a tenu le premier rang dans l'état de la grâce."

Et d'ailleurs dans la prière à saint Joseph - qui est aussi le patron des causes difficiles - ne récite-t-on pas :
" Ô Vous qui êtes si puissant auprès de Dieu qu'on a pu dire : " Au ciel, Joseph commande plutôt qu'il ne supplie ", etc. " ?


La Nativité. Le Carravage. XVIe siècle.

Son père l'éleva, d'après la tradition, dans l'état modeste de charpentier ; il pouvait avoir, selon de sérieux auteurs, une cinquantaine d'années, et il avait gardé une chasteté parfaite, lorsque la Volonté de Dieu lui confia la Très Sainte Vierge. Cette union, belle devant les anges, dit saint Jérôme, devait sauvegarder l'honneur de Marie devant les hommes.

Dieu voulut que le mystère de l'Annonciation demeurât quelques temps caché à saint Joseph, afin de nous donner, dans le trouble qui plus tard s'empara de lui, lorsqu'il s'aperçut de la grossesse de Marie, une preuve de la virginité de la Mère et de la conception miraculeuse du Fils. L'avertissement d'un ange dissipa toutes ses craintes.


La Nativité. Giorgio Martini Di Francesco. XVe.

Sur la virginité de saint Joseph, nous nous contenterons de citer l'un des ses plus dévots serviteurs, Isidore de Lille (Summa de beato Josepho, part. IV, chap. 1.) :
" Les Docteurs catholiques n'hésitent plus aujourd'hui à décerner à saint Joseph l'auréole de la virginité : d'abord, parce qu'ils regardent comme vérité démontrée que ce grand saint fut vierge d'esprit et de corps, par voeu et par état ; ensuite, parce qu'il fut le premier à suivre et à imiter le Reine des vierges ; enfin, parce que l'époux et l'épouse doivent être parés des mêmes ornements."


La fuite en Egypte. Cosimo di Domenico di Bonaventura Tura. XVe.

Qui dira ce que Joseph, depuis lors, montra de respect, de vénération, de tendresse pour Celle qui bientôt allait donner au monde le Sauveur ? Combien Joseph fut utile à Marie dans le voyage de Bethléem ! Combien plus encore il lui fut utile dans la fuite en Égypte ! Saint Joseph se montra pour la Mère de Dieu l'ami fidèle, le gardien vigilant, le protecteur dévoué.

Imaginons-nous les progrès en vertu que dut faire saint Joseph, vivant dans la compagnie de Jésus et de Marie. Quel délicieux intérieur ! Quelle sainte maison que cette modeste demeure ! Que de mystères dans cette vie cachée où un Dieu travaille sous la direction d'un homme, où un homme se sanctifie sous l'influence d'un Dieu visible à ses yeux et devenu son Fils adoptif ! Après la plus heureuse des vies, Joseph eut la plus heureuse des morts, car il rendit son dernier soupir entre les bras de Jésus et de Marie.


Notre Seigneur Jésus-Christ dans l'atelier de saint Joseph.
Eglise Saint-Paul Saint-Louis. Paris.

Il est permis de croire, après saint François de Sales qui l'affirme, que saint Joseph est dès maintenant au Ciel en corps et en âme, avec Jésus et Marie. C'est à bon droit que saint Joseph porte le titre glorieux de Patron de l'Église universelle, et que son nom, dans la dévotion chrétienne, est devenu inséparable des noms de Jésus et de Marie.

On l'invoque aussi comme Patron de la bonne mort, parce que, disent les hymnes en son honneur :
" Il s'endormit d'un doux sommeil, en présence de Jésus et de Marie."
(Hymne Quicumque).

Psautier cistercien. XIIIe.

C'est une pieuse croyance, adoptée par de pieux évrivains et souvent reproduite dans les ouvrages les plus savants (voir par ex. Suarez, t. XIX), que saint Joseph ressuscita et apparut à Jérusalem en même temps que Jésus-Christ sortit victorieux du tombeau, et qu'il fut du nombre de ceux que l'Evangile dit avoir été rappelés à la vie. Le saint Patriarche, sorti miraculeusement du tombeau, se serait montré plusieurs fois à Marie. Quarante jours après il aurait pris son essor vers les cieux, le jour de l'Ascension triomphante du Sauveur, et l'aurait accompagné lorsqu'Il alla prendre possession de son trône, à la droite du Père céleste.

Cependant, cette pieuse et consolante croyance n'est pas consignée dans la liturgie.


Saint Joseph et Notre Seigneur Jésus-Christ.
Georges de La Tour. XVIIe.

RELIQUES

Aucune église ne se glorifie de posséder les reliques proprement dites de saint Joseph.
- A Florence, les religieux du monastère des Anges conservent son bâton parmi les objets les plus précieux de leur trésor.
- A Rome, dans l'église de Sainte-Anastasie, on voit un de ses bâtons et son manteau.
- A Joinville-sur-Marne, dans le diocèse de Langres, on montre, avec un juste orgueil, " la vraye et véritable ceinture de saint Joseph, conservée chèrement dans l'église Notre-Dame ".

Cette ceinture consiste en un tissu plat, de fil ou d'écorce assez gros et de couleur grisâtre ; elle est longue d'un mètre et porte en largeur de 30 à 45 centimètres ; aux extrémités est attaché un fermoir en ivoire, jauni par le temps ; une boutonnièrese trouve aussi à l'un des bouts ? Confectionnée, suivant la tradition, par par les mains de la Sainte Vierge, on peut croire qu'elle lui resta, comme un souvenir bien cher, à la mort de son chaste époux, et que plus tardelle fut remise à saint Jean ou à quelque autre apôtre.

Au XIIIe siècle, elle fut rapportée de Palestine par l'historien de saint Louis, et placée dans son château de Joinville où elle resta jusqu'à la révolution : à cette époque néfaste, des mains pieuses la reccueillirent avec tous ses authentiques.

On voit toujours aujourd'hui cette noble et très-sainte ceinture dans un reliquaire dans l'église Notre-Dame de Joinville. Cette ceinture est dans un état de conservation remarquable.


Reliquaire et la ceinture de saint Joseph.
Eglise Notre-Dame de Joinville-Le-Pont. Champagne.

Saint Joseph est l'un des patrons de la Belgique, de l'Espagne, de Naples, de la Westphalie et de la ville de Verdun.
Les missions de Chine sont confiées à sa puissante tutèle.

Rappelons enfin que les corps des charpentiers, des menuisiers et des ébénistes sont placés sous son haut patronage.

PRIERE

" Nous vous louons, nous vous glorifions, heureux Joseph. Nous saluons en vous l'Epoux de la Reine du ciel, le Père nourricier de notre Rédempteur. Quel mortel obtint jamais de pareils titres ? et cependant ces titres sont les vôtres, et ils ne sont que la simple expression des grandeurs qu'il a plu à Dieu de vous conférer. L'Eglise du ciel admire en vous le dépositaire des plus sublimes faveurs ; l'Eglise de la terre se réjouit de vos honneurs, et vous bénit pour les bienfaits que vous ne cessez de répandre sur elle.

Royal fils de David, et en môme temps le plus humble des hommes, votre vie semblait devoir s'écouler dans cette obscurité qui faisait vos délices ; mais le Seigneur voulut vous associer au plus sublime de ses actes. Une noble Vierge, de même sang que vous, fait l'admiration du ciel, et deviendra la gloire et l'espérance de la terre ; cette Vierge vous est destinée pour épouse. L'Esprit-Saint doit se reposer en elle comme dans son tabernacle le plus pur ; c'est à vous, homme chaste et juste, qu'il a résolu de la confier comme un inestimable dépôt.Devenez donc l'Epoux de celle " dont le Seigneur lui-même a convoité la beauté " (Psalm. XLIV, 12.).

La mort de saint Joseph. Dessin. Jean André. XVIIe.

Le Fils de Dieu vient commencer ici-bas une vie d'homme ; il vient sanctifier la famille, ses liens et ses affections. Votre oreille mortelle l'entendra vous nommer son Père ; vos yeux le verront obéir à vos commandements. Quelles furent, Ô Joseph, les émotions de votre cœur, lorsque, pleinement instruit des grandeurs de votre Epouse et de la divinité de votre Fils adoptif, il vous fallut remplir le rôle de chef, dans cette famille au sein de laquelle le ciel et la terre se réunissaient ! Quel souverain et tendre respect pour Marie, votre Epouse ! Quelle reconnaissance et quelles adorations pour Jésus, votre enfant soumis ! Ô mystère de Nazareth ! Un Dieu habite parmi les hommes, et il souffre d'être appelé le Fils de Joseph !

Daignez, Ô sublime ministre du plus grand de tous les bienfaits, intercéder en notre laveur auprès du Dieu fait homme. Demandez-lui pour nous l'humilité qui vous a fait parvenir à tant de grandeur, et qui sera en nous la base d'une conversion sincère. C'est par l'orgueil que nous avons péché, que nous nous sommes préférés à Dieu ; il nous pardonnera cependant, si nous lui offrons " le sacrifice d'un cœur contrit et humilié " (Psalm. L, 19.). Obtenez-nous cette vertu, sans laquelle il n'est pas de véritable pénitence. Priez aussi, ô Joseph, afin que nous soyons chastes. Sans la pureté du cœur et des sens, nous ne pouvons approcher du Dieu de toute sainteté, qui ne souffre près de lui rien d'impur ni de souillé. Par sa grâce, il veut taire de nos corps des temples de son Saint-Esprit : aidez-nous à nous maintenir à cette élévation, à la rétablir en nous, si nous l'avions perdue.

Saint Joseph. Jean-Baptiste Bérangier. Chambéry. Savoie. XVIIIe.

Enfin, Ô fidèle Epoux de Marie, recommandez-nous à notre Mère. Si elle daigne seulement jeter un regard sur nous en ces jours de réconciliation, nous sommes sauvés : car elle est la Reine de la miséricorde, et Jésus son fils, Jésus qui vous appela son Père, n'attend, pour nous pardonner, pour convertir notre cœur, que le suffrage de sa Mère. Obtenez-le pour nous, Ô Joseph ! Rappelez à Marie Bethléhem, l'Egypte, Nazareth, où son courage s'appuya sur votre dévouement; dites-lui que nous vous aimons, que nous vous honorons aussi : et Marie daignera reconnaître par de nouvelles bontés envers nous les hommages que nous rendons à celui qui lui fut donné par le ciel pour être son protecteur et son appui."

Lire la suite

mercredi, 19 mars 2025 | Lien permanent | Commentaires (4)

20 mars. Saint Wulfran (ou Vulfran), archevêque de Sens, apôtre des Frisons, patron d'Abbeville. 720.

- Saint Wulfran (ou Vulfran), archevêque de Sens, apôtre des Frisons, patron d'Abbeville. 720.
 
Papes : Théodore, Grégoire II. Rois de France : Clovis II, Chilpéric II.

" Heureux celui qui a été trouvé sans tâche et qui n'a point courru après l'or."
Eccl. XXXI.


Saint Wulfran. Majus Chronicon Fontanellense. XIe.

Saint Wulfran était fils d'un officier du roi Dagobert ; il passa quelques années à la cour, mais il n'échoua point contre les écueils où la vertu des grands fait si souvent naufrage, et sut allier toujours les devoirs de son état avec la pratique des maximes de l'Évangile.


Cathédrale Saint-Etienne de Sens. Vue du Portail de Moïse (Sud).

Élevé sur le siège archiépiscopal de Sens, il se livra tout entier aux oeuvres de son saint ministère. Après avoir gouverné son diocèse pendant deux ans et demi à peine, il se sentit intérieurement sollicité d'aller prêcher l'Évangile aux Frisons. Il s'embarqua avec plusieurs religieux décidés à courir tous les dangers de son apostolat. Les Frisons se livraient à des pratiques horribles et en particulier faisaient de cruels et monstrueux sacrifices humains.


Collégiale Saint-Vulfran à Abbeville. XVe, XVIIe.
La construction de la collégiale commença par la façade. Les
Huchiers picards furent longtemps réputés pour la maîtrise de leur art.

Pendant la traversée, un fait miraculeux fit connaître le mérite de l'évêque missionnaire. Comme il disait la Messe sur le navire, celui qui faisait l'office de diacre laissa tomber la patène à la mer ; Wulfran lui commanda de mettre la main à l'endroit où la patène était tombée, et aussitôt elle remonta du fond des eaux jusque dans sa main, à l'admiration de tous.


Détail de la collégiale Saint-Vulfran à Abbeville.

A force de miracles, le courageux apôtre opéra chez les sauvages Frisons de nombreuses conversions. Wulfran, son oeuvre à peu près terminée, alla passer le reste de ses jours dans un monastère ; sa sainte mort arriva vers l'an 720. Saint Wulfran a toujours été très honoré en Picardie, et de nombreuses faveurs ont été obtenues de Dieu par son intercession.


Eglise Saint-Wulfran. Pays de Caux. Normandie.

RELIQUES

Ses reliques, après avoir été longtemps en Frise, furent transportées en 1058 dans l'église Notre-Dame d'Abbeville. A la demande de Louis XIII, on détacha deux ossement afin que la ville de Sens pût avoir une relique de son saint évêque.

Lire la suite

jeudi, 20 mars 2025 | Lien permanent

3 février. Saint Blaise, évêque de Sébaste et martyr. 316.

- Saint Blaise, évêque de Sébaste et martyr. 316.

Pape : Saint Sylvestre Ier. Empereur romain d'Orient : Licinius. Empereur romain d'Occident : Constantin Ier.

" Apprends, misérable, que je suis le serviteur de Notre Seigneur Jésus-Christ et que je n'adore pas les démons !"
Saint Blaise au gouverneur. Actes du Saint.


Saint Blaise. Hans Memling. Flandres XVe.

Maintenant que l'Eglise a clos pour nous la touchante Quarantaine de la Naissance du Sauveur, et qu'elle nous a ouvert la source des fortes et sérieuses méditations qui doivent nous préparer pour la pénitence, chaque Fête des Bienheureux doit nous apporter une impression propre à nourrir en nous l'esprit de ce saint Temps. Dans la période dont nous sortons, tous les amis de Dieu que nous avions à fêter, nous apparaissaient rayonnants des joies de la Naissance de l'Emmanuel ; ils formaient sa cour radieuse et triomphante. D'ici à la Résurrection du Fils de Dieu, nous aimerons à les considérer surtout dans les labeurs du pèlerinage de cette vie. Ce qui nous importe aujourd'hui, c'est de voir et d'étudier comment ils ont vaincu le monde et la chair.

" Ils allaient, dit le Psalmiste, et ils jetaient la semence sur le sillon, l'arrosant de leurs pleurs ; mais ils reviendront dans l'allégresse, chargés des gerbes que leurs sueurs auront produites." (Psalm. CXXV.).

Espérons qu'il en sera de même pour nous, à la fin de cette laborieuse carrière, et que le Christ ressuscité nous saluera comme ses membres vivants et renouvelés. Dans la période que nous avons présentement à traverser, les Martyrs abondent, et nous débutons aujourd'hui par un des plus célèbres. Sébaste, en Arménie, fut honorée par ses vertus pastorales et par sa glorieuse Passion ; bientôt la même ville nous fournira dans un seul jour quarante soldats Martyrs. La dévotion envers saint Biaise est demeurée très vive en Orient, surtout en Arménie, et son culte, introduit de bonne heure dans les Eglises de l'Occident, y a toujours été très populaire. Sa fête n'est néanmoins que du degré simple.


Saint Blaise et saint Pantaléon. Psautier cistercien. XIIIe.

Blaise pourrait venir de blandus, doux, ou de belasius, bela signifie habitude et syor, petit. En effet saint Blaise fut doux en ses discours ; il eut l’habitude des vertus et il se fit petit par l’humilité de sa conduite.

L'histoire de saint Blaise nous apprend qu'il parut dès son enfance d'un bon naturel, qu'il fut modeste en sa jeunesse. Arrivé à l'âge mûr, il s'appliqua particulièrement à la médecine, et fut toujours pénétré par la crainte de Dieu.

Blaise excellait en douceur et en sainteté, et avait gagné l'affection de tout le peuple, ce qui le fit élire évêque de Sébaste ; ville de Cappadoce. Après avoir reçu l’épiscopat, il se retira dans une caverne où il mena la vie érémitique, à cause de la persécution de Dioclétien (Bréviaire). Les oiseaux lui apportaient sa nourriture, et s'attroupaient véritablement ensemble autour de lui, et ne le quittaient que quand il avait levé les mains pour les bénir. Si quelqu'un d'eux avait du mal, il venait aussitôt à lui et retournait parfaitement guéri.


Saint Blaise fuyant la persécution.
Legenda aurea. Bx J. de Voragine. R. de Montbaston. XIVe.

Le gouverneur du pays, Agricola, sous l'empereur Licinius, avait envoyé des soldats pour chasser des bêtes féroces en vue de les ramener à Sébaste et de leurs livrer les Chrétiens au cirque. Après s'être fatigués longtemps en vain, ils vinrent par hasard à l’antre de saint Blaise, où ils trouvèrent une grande multitude de bêtes rangées devant lui. Or, n'ayant pu prendre aucune d'elles, ils furent remplis d'étonnement et rapportèrent cela à leur maître, qui aussitôt envoya plusieurs soldats avec ordre de lui amener Blaise avec tous les chrétiens.


Eglise Saint-Blaise. Peinture de MM. Maisonade & Lapierre.
Javerdat. Limousin. XVIIIe.

Mais cette nuit-là même, Notre Seigneur Jésus-Christ était apparu au saint par trois fois en lui disant :
" Lève-toi et offre-moi le sacrifice."
Voici que les soldats arrivèrent et lui dirent :
" Sors d'ici, le gouverner t'appelle."
Saint Blaise répondit :
" Soyez les bienvenus, mes enfants ; je vois à présent que Dieu ne m’a pas oublié."

Pendant le trajet, qu'il fit avec eux, il ne cessa de prêcher, et en leur présence il opéra beaucoup de miracles. Une femme apporta aux pieds du saint son fils qui était mourant d'un os de poisson arrêté dans la gorge ; elle lui demanda avec larmes la guérison de son enfant. Saint Blaise lui imposa les mains et fit une prière pour que cet enfant, aussi bien que tous ceux qui demanderaient quoi que ce fût en son nom, obtinssent le bienfait de la santé ; et sur-le-champ, il fut guéri (Bréviaire).

Les esprits dits forts ne diront point qu'il s'agit là d'une invention récente car Aetius d'Amida sur le Tigre, médecin grec de la fin du Ve siècle, auteur du Tetrabiblos, vaste compilation où il a mis à contribution tous les médecins antérieurs connus, parmi les remèdes qu'il enseigne pour ce mal et les maux qui affectent la gorge en général, mentionne particulièrement l'invocation à saint Blaise.


Saint Blaise guérissant l'enfant dans la gorge duquel s'était fichée
une arrête de poisson. Graduel à l'usage de l'abbaye
Notre-Dame de Fontevrault. XIIIe.

Une pauvre femme n'avait qu'un seul pourceau qu'un loup lui ravit ; et elle priait saint Blaise de lui faire rendre son pourceau. Il lui dit en souriant :
" Femme, ne te désole pas : ton pourceau te sera rendu."
Et aussitôt le loup vint et rendit la bête à cette veuve.

Or, saint Blaise ne fut pas plutôt entré dans la ville que, par ordre du prince ; il fut jeté en prison. Le jour suivant, le gouverneur le fit comparaître devant lui. En le voyant, il le salua en lui adressant ces paroles flatteuses :
" Blaise, l’ami des dieux, soyez le bienvenu."
Blaise lui répondit :
" Honneur et joie à vous, illustre gouverneur ; mais n'appelez pas dieux ceux qui sont des démons, parce qu'ils seront livrés au feu éternel avec ceux qui les honorent."

Le gouverneur irrité le fit meurtrir à coups de bâton, puis rejeter en prison.
Blaise lui dit :
" Insensé, tu espères donc par tes supplices enlever de mon coeur l’amour de mon Dieu qui me fortifie lui-même ?"


Scènes de la vie de saint Blaise.
Speculum historiale. V. de Beauvais. François. XVe.

Or, la veuve à laquelle il avait fait rendre son pourceau, entendit cela ; elle tua l’animal, et en porta la tête et les pieds, avec une chandelle et du pain, à saint Blaise. Il l’en remercia, mangea, et lui dit :
" Tous les ans, offre une chandelle à une église qui porte mon nom, et tu en retireras bonheur, toi, et ceux qui t'imiteront."
Ce qu'elle ne manqua pas de faire ; et il en résulta en sa faveur une grande prospérité. Après quoi, le gouverneur fit tirer Blaise de sa prison ; et comme il ne le pouvait amener à honorer les dieux, il ordonna de le suspendre à un, arbre et de déchirer sa chair avec des peignes de fer ; ensuite il le fit reporter en prison.

Or, sept femmes qui le suivirent dans le trajet ramassaient les gouttes de son sang. On se saisit d'elles aussitôt et on les força de sacrifier aux dieux. Elles dirent :
" Si tu veux que nous adorions tes dieux, fais-les porter avec révérence à l’étang afin qu'après avoir été lavés, ils soient plus propres quand nous les adorerons."
Le gouverneur devint joyeux et fit exécuter au plus vite ce qu'elles avaient demandé. Mais elles prirent les dieux et les jetèrent au milieu de l’étang, en disant :
" Si ce sont des dieux, nous le verrons."
A ces mots le gouverneur devint fou de colère et se frappant lui-même, il dit à ses gardes :
" Pourquoi n'avez-vous pas tenu nos dieux afin qu'ils ne fussent pas jetés au fond du lac ?"
Ils répondirent :
" Vous vous êtes laissé mystifier par les paroles trompeuses de ces femmes et elles les ont jetés dans l’étang.
- Le vrai Dieu n'autorise pas les tromperies, reprirent-elles ; mais s'ils étaient des dieux, ils auraient certainement prévu ce que nous leur voulions faire."


Une des saintes martyres et son enfant, martyr lui aussi.
Vitrail. Soissonnais. XIIIe.

Le gouverneur irrité fit préparer du plomb fondu, des peignes de fer de plus, il fit préparer d'un- côté sept cuirasses rougies au feu, et il fit placer d'un autre côté sept chemises de lin. Il leur dit de choisir ce qu'elles préféraient ; alors une d'entre elles, qui avait deux jeunes enfants, accourut avec audace, prit les chemises et les jeta dans le foyer, ces enfants dirent à leur mère :
" Ô mère chérie, ne nous laisses pas vivre après toi ; mais de même que tu nous as rassasiés de la douceur de ton lait, rassasie-nous encore de la douceur du royaume du ciel."

Alors le gouverneur commanda de les suspendre et de réduire leurs chairs en lanières avec des peignes de fer. Or, leur chair avait la blancheur éclatante de la neige et, au lieu de sang, il en coulait du lait. Comme elles enduraient les supplices avec répugnance, un ange du Seigneur vint vers elles et leur communiqua une force virile en disant :
" Ne craignez point : un bon ouvrier qui commence bien et qui mène son œuvre à bien, mérite la bénédiction de celui qui le fait travailler ; pour ce qu'il a fait, il reçoit le prix de son labeur, et il est joyeux de posséder son salaire."
Alors le gouverneur les fit détacher et jeter dans le foyer ; mais Dieu permit que le feu s'éteignit et qu'elles sortissent sans avoir éprouvé aucune douleur. Le gouverneur leur dit :
" Cessez donc d'employer la magie et adorez nos dieux."
Elles répondirent :
" Achève ce que tu as commencé, parce que déjà nous sommes appelées au royaume céleste."


Martyre de saint Blaise. Sculpture en calcaire.
Agentan. Normandie. XVe.
 
Alors il porta une sentence par laquelle elles devaient avoir la tête tranchée. Au moment où elles allaient être décapitées, elles se mirent à genoux et adorèrent Dieu en disant :
" Ô Dieu qui nous avez ôtées des ténèbres et qui nous, avez amenées à cette très douce lumière, qui nous avez choisies pour vous être sacrifiées, recevez nos âmes et faites-nous parvenir à la vie éternelle."
Elles eurent donc la tête tranchée et passèrent au Seigneur.

Après cela, le gouverneur se fit présenter saint Blaise et lui dit :
" Adore à l’instant nos dieux, ou ne les adore pas."
Blaise lui répondit :
" Impie, je ne crains pas tes menaces ; fais ce que tu veux ; je te livre mon corps tout entier."

Alors il le fit jeter dans l’étang. Mais saint Blaise fit le signe. de la croix sur l’eau qui s'endurcit immédiatement comme une terre sèche ; et il dit :
" Si vos dieux sont de vrais dieux, faites-nous voir leur puissance et entrez ici."
Et soixante-cinq qui s'avancèrent furent aussitôt engloutis dans l’étang.
Mais il descendit un ange du Seigneur qui dit au saint :
" Sors, Blaise, et reçois la couronne que Dieu t'a préparée."


Saint Blaise et saint Guérin. Imagerie populaire.
Imagerie Pellerin. XIXe.

Quand il fut sorti, le gouverneur lui dit :
" Tu es donc bien déterminé à ne pas adorer les dieux ?
- Apprends, misérable, répondit Blaise, que je suis le serviteur de Notre Seigneur Jésus-Christ et que je n'adore pas les démons."
Et à l’instant l’ordre fut donné de le décapiter.

Quant à Blaise, il pria le Seigneur que si quelqu'un réclamait son patronage pour le mal 'de gorge, ou pour toute autre infirmité, il méritât aussitôt d'être exaucé. Et voici qu'une voix du ciel se fit entendre à lui, qu'il serait fait comme il avait demandé.

Ainsi fut décapité ce saint avec deux petits enfants des saintes femmes qui les avaient précédés, le 3 février de l'an 316.


Martyre de saint Blaise. Heures à l'usage du Mans. XVe.

CULTE

On met dans la main de saint Blaise une carde ou peigne de fer, ou bien une bougie roulée ; un peigne de fer parce qu'il endura, entre autres supplices, celui des ongles de fer, ce qui l'a fait choisir pour patron par les cardeurs de laine et même par les tailleurs de pierre, à cause d'un outil, appelé ripe, dont se servent ces derniers et qui ressemble à une carde ; un cierge, pour la raison que nous avons vue précédemment.

Les tisserands et les ouvriers en bâtiments de Paris l'ont pris pour saint patron.

Dans certains pays, comme on le sait, on fait bénir deux cierges le jour de la Chandeleur (jour où l'on fête la purification de notre Dame). Ceux qui veulent être délivrés de leurs maux de gorge pour lesquels on invoque spécialement saint Blaise, s'approchent du prêtre qui tient à la main les deux cierges bénits, les approche du cou des malades et prie sur eux en invoquant notre Saint.

On représente aussi saint Blaise avec un enfant, qu'il délivra de la strangulation qu'il risquait à cause de l'arrête de poisson fichée dans sa gorge, avec un cochon, qu'il força le loup à rendre à la pauvre femme dont il était toute la richesse, et en ermite entouré de bêtes féroces qui lui tenaient compagnie dans la caverne qu'il occupait.


Saint Blaise. Imagerie populaire. Imagerie Pellerin. XIXe.

En Orient, sa fête est d'obligation et se célèbre le 11 février.

Saint Blaise fait partie du groupe des quatorze saints dits secourables ; on appelle ainsi ceux d'entre eux qui sont plus particulièrement célèbres pour l'efficacité de leur invocation. Ces quatorze saints sont distribués deux à deux : saint Georges et saint Eustache ; saint Vit et saint Christophe ; saint Gilles et saint Cyriaque ; saint Erasme et saint Blaise ; saint Pantaléon et saint Achace ; saint Denis et sainte Marguerite ; sainte Catherine et sainte Barbe.

En Allemagne, la fête de saint Blaise se nomme messe de Blaise ou messe du vent, car le mot blas, en langue allemande, signifie également Blaise et vent. Autrefois, les marins scandinaves évitaient de prononcer le nom de cette fête, et les paysans danois regardent les vents qui soufflent ce jour-là comme présages de tempêtes tout au long de l'année.


Saint Blaise. Autel portatif à tablette de porphyre vert.
Abbaye de Fulda. Allemagne. XIe.

Saint Blaise est le saint patron, entres autres, de Comiso en Sicile, de Civitta di Penne et de Naples dans le royaume de Naples, de Raguse, de Mulhausen en Thuringe.

On invoque donc saint Blaise contre les affections de la gorge (dévotion particulière qui était chère à saint François de Sales) ; à cause du miracle du pourceau, on lui recommande aussi particulièrement l'espèce porcine et on l'invoque contre les bêtes farouches. En Russie, on l'invoque pour tout le bétail.

RELIQUES

Le corps de saint Blaise et celui des deux petits enfants furent pris par une femme pieuse nommée Hélisée, qui les

Lire la suite

lundi, 03 février 2025 | Lien permanent | Commentaires (2)

17 février. Saint Polychrone, évêque de Babylone, et ses compagnons, martyrs. 251.

- Saint Polychrone, évêque de Babylone, et ses compagnons, martyrs. 251.

Pape : Saint Corneille. Empereur romain : Trajan Dèce.

" Je vous donnerai des paroles et une sagesse à laquelle vos ennemis ne pourront résister et à laquelle il leur sera impossible de contredire."
Saint Luc ; XXI, 25.


Martyre de saint Polychrone et de saint Parménius.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Saint Polychrone, dont le martyrologe fait aujourd'hui mémoire, fut évêque de Babylone, en Chaldée, au IIIe siècle sous l'empire de Dèce. Cet empereur, s'étant rendu maître de ce pays par la force des armes, persécuta cruellement les Chrétiens, et, sachant que Polychrone en était le père, et comme le chef, il le fit prendre avec Parménius, Elymas et Chrysotèle, prêtres, Luc et Muce, diacres.

Tous ces siants furent conduits au temple des idoles pour leur offrir de l'encens et pour reconnaître leur divinité ; mais Polychrone, prenant la parole pour tous les autres, répondit :
" Pour nous, nous nous offrons nous-mêmes en sacrifice à Notre Seigneur Jésus-Christ, et nous ne nous inclinerons jamais devant le démon, ni devant ces idoles, qui sont travaillées par les mains des hommes."
L'empereur, transporté de colère, les fit jeter en prison et remit leur affaire au jugement d'un de ses prêteurs, appelé Appolo Valérien.

Celui-ci, faisant comparaître les Martyrs devant son tribunal, s'adressa au saint évêque et lui parla en ces termes :
" Es-tu ce Polychrone sacrilège qui méprise les dieux et les commandements des princes ?"
Le saint prélat ne lui répondit rien ; l'empereur, qui assitait à cet interrogatoire, dit au clergé de Polychrone :
" Quoi ! Votre prince se tait ?"
Alors le prêtre Parménius répondit :
" Notre Père ne s'est pas tu sans raison, mais il l'a fait pour obéir au commandement de Notre Seigneur Jésus-Christ qui a dit à ses Apôtres ; " Gardez-vous de jeter des perles devant les pourceaux, de crainte que, les foulant aux pieds, ils ne se jettent sur vous-mêmes " (Matth., VII, 6.)."

Le tyran, entendant cela, fut vivement irrité ; il commanda qu'on arrachât la langue à celui qui avait parlé de la sorte : ce qui fut exécuté, et néanmoins le prêtre, quoiqu'il eût la langue coupée, ne laissa pas de crier au saint prélat :
" Mon bienheureux Père Polychrone, priez pour moi, parce que je vois le Saint-Esprit qui règne en vous et qui, scellant votre bouche sacrée, répand dans la mienne une douceur de miel."

Dèce commanda à Polychrone de sacrifier aux dieux, afin de jouir par ce moyen, de son amitié et de se rendre digne de ses faveurs ; mais comme le saint évêque ne lui répondait pas un mot, il le fit frapper si cruellement sur la bouche que ce bienheureux martyr, élevant les yeux au ciel, rendit l'âme à Dieu dans les douleurs de ce supplice. Dèce fit jeter son corps devant le temple de Saturne. La nuit suivante, deux illustres seigneurs persans, saint Abdon et saint Sennen, qui étaient secrètement chrétiens, l'enlevèrent et l'ensevelirent avec honneur auprès de la ville de Babylone.


Saint Abdon et saint Sennen. Bréviaire à l'usage de Paris. XVe.

Pour les autres Saints, prêtres et diacres, l'empereur les fit traîner après lui, chargés de fers et de chaînes ; mais comme elles se brisèrent toutes d'elles-mêmes, ce prince, attribuant ce miracle aux prestiges de l'art magique, les fit tourmenter sur le chevalet. Tandis que l'on étendait leurs membres, ils criaient à Parménius qu'il priât Notre Seigneur Jésus-Christ de leur donner la patience. Alors ce saint prêtre, bien que privé de sa langue, répondit :
" Que Dieu, le Père de Notre Seigneur Jésus-Christ, vous donne la consolation de son divin Esprit, qui règne par tous les siècles."
Et ils répondirent :
" Ainsi soit-il."
Dèce, entendant cela, s'irrita plus que jamais, et commanda qu'on les jetât dans le feu ; mais ce fut sans effet, et l'on entendit une voix du ciel qui disait :
" Venez à moi, humbles de coeur."

Enfin, il furent décapités, et leurs corps jetés à la voierie ; on les fit garder par des soldats, et défense très expresse fut faote de leur donner la sépulture. Mais cela n'empêcha pas les courageux seigneurs Abdon et Sennen de leur rendre les mêmes devoirs qu'ils avaient rendus au saint évêque Polychrone ; ce qui leur mérita eux-mêmes quelques temps plus tard la couronne du martyre.


Martyre de saint Abdon et de saint Sennen.
Dessin. Etienne Parrocel. XVIIIe.

Rq : Le martyre de saint Polychrone et de ses compagnons est rapporté par Surius, en son quatrième tome, au 10 août. Le cardinal Baronius en fait une mémoire en ses Remarques sur le martyrologe, le 17 février, jour auquel saint Polychrone endura la mort pour Notre Seigneur Jésus-Christ. Le vénérable Bède, Usuard et Adon ne l'ont pas oublié en leurs Catalogues des Saints. Il y a diverses opinions touchant l'année de son triomphe ; Baronius le marque en l'année 253, Bollandus veut que ce soit 251.

Lire la suite

lundi, 17 février 2025 | Lien permanent

18 février. Saint Siméon, évêque de Jérusalem et martyr. 106.

- Saint Siméon, évêque de Jérusalem et martyr. 106.
 
Pape : Saint Alexandre Ier. Empereur romain : Trajan.

" La plus vénérable de toutes les vieillesses n'est pas celle qui compte le plus d'années ; mais celle qui, à ses cheveux blancs, joint l'honneur d'une vie sans reproche et sans faiblesse ; car, dit encore le Seigneur, il est trois choses que je déteste par-dessus toutes : un pauvre orgueilleux, un riche vaniteux et un vieillard fat et insensé."
Sap., IV, 8 ; Eccli., XXV, 4.
 

Vincenzo Camucci. XVIIIe.

Le Cycle nous amène aujourd'hui un vieillard de cent vingt ans, un Evêque, un Martyr. Siméon est l'Evêque de Jérusalem, le successeur de l'Apôtre tint Jacques sur ce siège ; il a connu le Christ, il a été son disciple ; il est son parent selon la chair, de la même maison de David ; fils de Cléophas, et de cette Marie que les liens du sang unissaient de si près à la Mère de Dieu qu'on l'a appelée sa sœur. Que de titres de gloire dans cet auguste vieillard qui vient augmenter le nombre des Martyrs dont la protection encourage l'Eglise, dans cette partie de l'année où nous sommes ! Un tel athlète, contemporain de la vie mortelle du Christ, un pasteur qui a répété aux fidèles les leçons reçues par lui de la propre bouche du Sauveur, ne devait remonter vers son Maître que par la plus noble de toutes les voies. Comme Jésus, il a été attaché à une croix ; et à sa mort, arrivée en l'an 106, finit la première période de l'Histoire Chrétienne, ce que l'on appelle les Temps Apostoliques.

Honorons ce majestueux Pontife en qui se réunissent tant de souvenirs, et prions-le d'étendre sur nous cette paternité dont les fidèles de Jérusalem se glorifièrent si longtemps. Du haut du trône éclatant où il est arrivé par la Croix, qu'il jette un regard sur nous, et qu'il nous obtienne les grâces de conversion dont nos âmes ont tant besoin.


Martyr de saint Siméon. Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Siméon, fils ou petit-fils de Cléopas, et cousin du Sauveur, était àgé de cent vingt ans. Depuis quelques mois on avait provoqué dans diverses villes de Judée des mouvements populaires dirigés contre les chrétiens. A Jérusalem, la haine des Juifs fit cause commune avec celle des hérétiques ébionites, esséens, elkasaïtes, dont plusieurs étaient à peine chrétiens.

Ces malheureux dénoncèrent l'évêque au double titre de chrétien et de descendant de David. Déjà, sous Domitien, l'autorité romaine avait poursuivi quelques pauvres gens apparentés à l'ancienne famille royale, mais ces poursuites s'étaient vite arrêtées devant l'inanité de l'accusation; sous Trajan, on reprit l'affaire, et la double accusation intentée contre le vieil évêque fut accueillie par le légat consulaire de la Palestine Tiberius Claudius Atticus.

Parmi ces hérétiques, il s'en trouva qui accusèrent Siméon, fils de Cléophas, d'appartenir à la famille de David et d'être chrétien. Siméon subit le martyre à l'âge de cent vingt ans, sous le règne de Trajan Auguste et l'administration d'Atticus, légat consulaire pour la Syrie. Siméon fut donc appelé à comparaître devant Atticus, et torturé pendant plusieurs jours de la façon la plus cruelle, Il ne laissa pas un instant de confesser sa foi, à ce point qu'Atticus lui-même et tous les assistants admirèrent grandement son courage. étonnés qu'un homme âgé de cent vingt ans pût supporter de si nombreuses tortures. On finit par le mettre en croix.


Martyr de saint Siméon. Gravure de Jacques Callot. XVIIe.
 
PRIERE
 
" Recevez l'humble hommage de la Chrétienté, sublime vieillard, qui surpassez en grandeur toutes les illustrations humaines. Votre sang est celui même du Christ ; votre doctrine, vous l'avez reçue de sa bouche ; votre charité pour les fidèles, vous l'avez allumée à son cœur ; votre mort n'est que le renouvellement de la sienne. Nous n'avons point l'honneur de pouvoir nous dire, comme vous, les frères du Seigneur ; mais rendez-nous, Ô Siméon , attentifs à cette parole qu'il a dite lui-même :
" Celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les deux, est pour moi un frère, une sœur, une mère." (Matth.XII, 50.).

Nous n'avons point reçu immédiatement, comme vous, de la bouche de Jésus, la doctrine du salut ; mais nous ne la possédons pas moins pure, au moyen de cette tradition sainte dont vous êtes l'un des premiers anneaux ; obtenez que nous y soyons toujours dociles, et que nos infractions nous soient pardonnées. Une croix n'a pas été dressée pour que nous y soyons cloués par nos membres ; mais ce monde est semé d'épreuves auxquelles le Seigneur a donné lui-même le nom de Croix. Il nous faut les subir avec constance, si nous voulons avoir part avec Jésus dans sa gloire. Demandez, Ô Siméon, que nous nous montrions plus fidèles, que notre cœur ne se révolte pas, que nous réparions les fautes que souvent nous avons commises, en voulant nous soustraire à l'ordre de Dieu."

Lire la suite

mardi, 18 février 2025 | Lien permanent

8 mars. Saint Jean de Dieu, fondateurs des religieux hospitaliers dits de la Charité. 1550.

- Saint Jean de Dieu, fondateurs des religieux hospitaliers dits de la Charité. 1550.
 
Papes : Alexandre VI, Jules III. Roi d'Espagne : Charles-Quint (Charles Ier en Espagne).

" L'aumône est une fleur dont les fruits se récolte au Ciel."


Statue de saint Jean de Dieu vénérée à l'hôpital
Saint-Jean-de-Dieu de Barcelone. XVIIe.

Le même esprit qui avait inspire Jean de Matha se reposa sur Jean de Dieu, et le porta à se faire le serviteur de ses frères les plus délaissés. Tous deux, dans ce saint temps, se montrent à nous comme les apôtres de la charité fraternelle. Ils nous enseignent, par leurs exemples, que c'est en vain que nous nous flatterions d'aimer Dieu, si la miséricorde envers le prochain ne règne pas dans notre coeur, selon l'oracle du disciple bien-aimé qui nous dit :
" Celui qui aura reçu en partage les biens de ce monde, et qui, voyant son frère dans la nécessité, tiendra pour lui ses entrailles fermées, comment la charité de Dieu demeurerait-elle en lui ?" (I Johan. III, 17.).

Mais, s'il n'est point d'amour de Dieu sans l'amour du prochain, l'amour des hommes, quand il ne se rattache pas à l'amour du Créateur et du Rédempteur, n'est aussi lui-même qu'une déception. La philanthropie, au nom de laquelle un homme prétend s'isoler du Père commun, et ne secourir son semblable qu'au nom de l'humanité, cette prétendue vertu n'est qu'une illusion de l'orgueil, incapable de créer un lien entre les hommes, stérile dans ses résultats. Il n'est qu'un seul lien qui unisse les hommes : c'est Dieu, Dieu qui les a tous produits, et qui veut les réunir à lui. Servir l'humanité pour l'humanité même, c'est en faire un Dieu ; et les résultats ont montré si les ennemis de la charité ont su mieux adoucir les misères auxquelles l'homme est sujet en cette vie, que les humbles disciples de Jésus-Christ qui puisent en lui les motifs et le courage de se vouer à l'assistance de leurs frères.


Le héros que nous honorons aujourd'hui fut appelé Jean de Dieu, parce que le saint nom de Dieu était toujours dans sa bouche. Ses oeuvres sublimes n'eurent pas d'autre mobile que celui de plaire à Dieu, en appliquant à ses frères les effets de cette tendresse que Dieu lui avait inspirée pour eux. Imitons cet exemple ; et le Christ nous assure qu'il réputera fait à lui-même tout ce que nous aurons fait en faveur du dernier de nos semblables.

Le patronage des hôpitaux a été dévolu par l'Eglise à Jean de Dieu, de concert avec Camille de Lellis que nous retrouverons au Temps après la Pentecôte.


Moulage de cire du visage de saint Jean de Dieu d'après nature. XVIe.

Le 8 mars 1495, à Monte-Mayor-El-Nuovo au diocèse d'Evora en Portugal, naissait Jean Ciudad. Il fut élevé dans la foi par ses parents, André et Thérèse Ciudad, qui n'avaient pour seule grande richesse leur piété et leurs vertus.

Jeune encore, notre saint s'enfuya de la maison et commença une vie aventureuse faite hélas de toutes sortes de vices.

Lorsque André, qui l'avait cherché longtemps, revint chez lui, il découvrit son épouse à l'article de la mort. Elle venait d'avoir la visite de l'anbge gardien de notre saint qui l'avait rassuré quant au sort de leur fils en lui signifiant qu'il vivrait de terribles épreuves avant que de devenir un grand saint. Elle demanda à son époux, qui la chérissait et se lamentait d'avoir presque perdu son fils et d'être sur le point de perdre son épouse, d'entrer dans le Tiers-Ordre de Saint-François après sa mort.

Notre saint encore enfant se retrouva un jour affamé et pleurant sur un chemin de Castille non loin de la ville d'Oropeza. Un Mayoral (berger en chef) s'approcha de lui et, après avoir écouter l'histoire de saint Jean de Dieu, le prit à son service.


Saint Jean de Dieu. Détail. Murillo. XVIIe.

Quelques années plus tard, satisfait de son dévouement, il lui fit la proposition d'épouser sa fille. Après une nuit passé en prière devant une image de la Sainte Vierge, saint Jean de Dieu, décida de s'enfuir, se jugeant indigne de cette marque de bienveillance.

Arrivé dans la ville d'Oropeza, il aperçu une troupe de milicien qui vaquait à des exercices militaires, et il s'engagea. La vie militaire qu'il mena fut troublée et dissipée. Il finit même par avoir honte d'être vertueux et s'adonna à toutes sortes de passions et de vices.

Un jour que la troupe se trouvait aux alentours de Fontarabie, à la frontière française, une chute de cheval - qu'il avait volé - lui fit perdre connaissance. A son réveil, il reçu une effusion de grâces qui lui fit ressentir la protection divine et lui permit de regagner la troupe. Il fut bientôt accusé injustement d'avoir dérobé un butin et fut contraint de quiter le service militaire.


Saint Jean de Dieu apportant des soins à un pauvre malade.
Mosaïque anonyme. Résidence de saint Jean de Dieu à Séville. XVIIe.

Ses pas le ramenèrent alors chez le bon mayoral qui le reçut avec force affection malgré son ancienne défection. Saint Jean de Dieu s'en expliqua en présentant à son bienfaiteur, toujours disposé à lui donner sa fille :
" Pourquoi me tentez-vous ainsi par tant de générosité ? Ne comprenez-vous pas que je ne suis point appelé ici-bas à jouir du repos que donne la richesse ? Quelle que soit ma destinée, je sens qu'elle n'est point accomplie. Il y a en moi des pressentiments vagues qui s'agitent et dont je ne me rends pas bien compte. Ô mon cher maître ! Si je suis revenu ici c'est pour vous voir et non pour devenir votre héritier."

Il raconta au mayoral les circonstances qui avaient présidé à son départ du service militaire et ajouta que le roi d'Espagne voulant se croisé contre les Turcs, il voulait y combattre pour la sainte foi lui-même. S'il revenait vivant de ces combats, alors il retournerait à Monte-Mayor-El-Nuovo, embrassé les êtres chers qu'il avait follement abandonnés.

Quelques années plus tard, notre saint rentra enfin pour découvrir que ses parents avaient trépassé.
Résolu d'expier ce qu'il considérait comme un crime - avoir tué ses parents de chagrin -, il passa en Andalousie et s'engagea bientôt au service d'un gentilhomme portugais que le roi Jean III avait banni avec sa famille et faisait conduire sur les côtes africaines à Ceuta.

Saint Jean de Dieu secourant de pauvres malades.

Là-bas, il se multiplia pour subvenir aux besoins de son maître. Dieu avait en effet laissé à Jean Ciudad une solide santé. Il trouvait encore le temps de visiter les prisons afin de faire entendre des paroles consolantes aux prisonniers, et ne manquait jamais à ses devoirs de piété.

Bientôt, le gentilhomme fut à l'extrémité. Il remercia Jean de ses soins constants et dévoués et lui proposa de rejoindre l'Espagne avec le reste de sa famille car le roi venait d'accepter leur retour et leur réintagration dans une partie de leurs biens confisqué à la faveur du bannissement dont ils avait été l'objet.

Jean ne céda point à cette perspective de confort et repassa seul en Espagne. Quelques temps après, notre saint se retrouva à nouveau affamé, quoiqu'il eut trouvé pour subsister l'activité de vendre des images pieuses et des cathéchismes par les routes.


Saint Jean de Dieu. Pedro de Raxis. Grenade. XVIe siècle.

Il croisa un jour un petit enfant miséreux et exténué qu'il prit sur son dos pour le conduire au village le plus proche. Il faisait tellement chaud que Jean s'arrêta à une fontaine et demanda au petit enfant de descendre. Cet enfant n'était autre que Notre Seigneur ! Ceuillant une grenade sur un arbre alentour, Notre Seigneur montra à notre nouveau saint Christophe le fruit ouvert et au milieu duquel se voit une croix et lui dit :
" Jean de Dieu, Grenade sera ta croix !"

Notre saint comprit la volonté du Seigneur et se rendit bien vite à Grenade où il loua une petite boutique depuis laquelle il continua son commerce d'images et de livres pieux.

Le docteur Jean d'Avila, célèbre par sa science et par ses vertus, prêcha un jour de la saint Sébastien et toucha le coeur de saint Jean de Dieu.
Il résolu de supporter toute sorte d'injures comme saint Sébastien et partit dans les rues en criant sans cesse :
" Miséricorde ! Miséricorde !"
Il fut prit pour fou et on l'enferma bientôt dans un hospice où il reçut pendant des semaines plus de cinq mille coups de bâtons.

Bientôt, on se rendit compte qu'il n'était pas fou et, à la faveur du dévouement qu'il montrait pour les pauvres, on lui fit des aumônes conséquentes. Il ne les accepta que pour fonder un hôpital destiné à soulager les misères des pauvres.


Le panier ou capacha du Saint pour le soin des pauvres.
Maison Pisa. Grenade.

Pour procurer des aliments à ses nombreux malades, Jean, une hotte sur le dos et une marmite à chaque bras, parcourait les rues de Grenade en criant :
" Mes frères, pour l'amour de Dieu, faites-vous du bien à vous-mêmes."
Sa sollicitude s'étendait à tous les malheureux qu'il rencontrait ; il se dépouillait de tout pour les couvrir et leur abandonnait tout ce qu'il avait, confiant en la Providence, qui ne lui manqua jamais.

Mais Jean, appelé par la voix populaire Jean de Dieu, ne suffisait pas à son oeuvre ; les disciples affluèrent ; un nouvel Ordre se fondait, qui prit le nom de Frères Hospitaliers de Saint-Jean-de-Dieu, et s'est répandu en l'Europe entière. Peu de Saints ont atteint un pareil esprit de mortification, d'humilité et de mépris de soi-même.

Le bâton de saint Jean de Dieu. Quand on entendait son bruit sur
le pavé, on préparait ses aumônes pour les remettre à notre saint.
Maison Pisa. Grenade.

Un jour, la Mère de Dieu lui apparut, tenant en mains une couronne d'épines, et lui dit :
" Jean, c'est par les épines que tu dois mériter la couronne du Ciel.
- Je ne veux, répondit-il, cueillir d'autres fleurs que les épines de la Croix ; ces épines sont mes roses."

Aux derniers jours de sa vie (il faut absolument lire la notice que les petits bollandistes lui consacrent), une pieuse dame de la famille Pisa, le persuada de prendre une chambre dans sa maison. Il accepta et y mourrut très saintement. Après avoir demandé à tous de sortir de la chambre, il se leva, se mit à genoux, et dit :
" Jésus ! Jésus ! Je recommande mon âme entre vos mains !"
Il embrassa le crucifix et expira ainsi, le samedi 8 mars 1550, peu avant minuit.


Chambre et lit où saint Jean de Dieu passa les dermiers jours
de son pélerinage ici-bas et où il mourut. Maison Pisa. Grenade.

Saint Jean de Dieu est un des patrons des pauvres et des affligés, il l'est aussi des libraires.
Ses reliques sont vénérées dans la basilique Saint-Jean-de-Dieu à Grenade. La maison Pisa, où il mourut, est aujourd'hui un musée dédié à notre grand saint.
PRIERE
 
" Qu'elle est belle, Ô Jean de Dieu ! Votre vie consacrée au soulagement de vos frères ! Qu'elle est grande en vous, la puissance de la charité ! Sorti, comme Vincent de Paul, de la condition la plus obscure, ayant comme lui passé vos premières années dans la garde des troupeaux, la charité qui consume votre cœur arrive à vous faire produire des oeuvres qui dépassent de beaucoup l'influence et les moyens des puissants selon le monde. Votre mémoire est chère à l'Eglise ; elle doit l'être à l'humanité tout entière, puisque vous l'avez servie au nom de Dieu, avec un dévouement personnel dont n'approchèrent jamais ces économistes qui savent disserter, sans doute, mais pour qui le pauvre ne saurait être une chose sacrée, tant qu'ils ne veulent pas voir en lui Dieu lui-même.

Basilique Saint-Jean-de-Dieu à Grenade.

Homme de charité, ouvrez les yeux de ces aveugles, et daignez guérir la société des maux qu'ils lui ont faits. Longtemps on a conspiré pour effacer du pauvre la ressemblance du Christ ; mais c'est le Christ lui-même qui l'a établie et déclarée, cette ressemblance ; il faut que le siècle la reconnaisse, ou il périra sous la vengeance du pauvre qu'il a dégradé. Votre zèle, Ô Jean de Dieu, s'exerça, avec une particulière prédilection, sur les infirmes ; protégez-les contre les odieux attentats d'une laïcisation qui poursuit leurs âmes jusque dans les asiles que leur avait préparés la charité chrétienne. Prenez pitié des nations modernes qui, sous prétexte d'arriver à ce qu'elles appelaient la sécularisation, ont chassé Dieu de leurs mœurs et de leurs institutions : la société, elle aussi, est malade, et ne sent pas encore assez distinctement son mal; assistez-la, éclairez-la, et obtenez pour elle la santé et la vie. Mais comme la société se compose des individus, et qu'elle ne reviendra à Dieu que par le retour personnel des membres qui la composent, réchauffez la sainte charité dans le cœur des chrétiens : afin que, dans ces jours où nous voulons obtenir miséricorde, nous nous efforcions d'être miséricordieux, comme vous l'avez été, à l'exemple de celui qui, étant notre Dieu offensé, s'est donné lui-même pour nous, en qui il a daigné voir ses frères.

Protégez aussi du haut du ciel le précieux institut que vous avez fondé, et auquel vous avez donné votre esprit, afin qu'il s'accroisse et puisse répandre en tous lieux la bonne odeur de cette charité de laquelle il emprunte son beau nom."

Lire la suite

samedi, 08 mars 2025 | Lien permanent | Commentaires (1)

7 mars. Saint Thomas d'Aquin, Dominicain, docteur de l'Eglise. 1274.

- Saint Thomas d'Aquin, Dominicain, docteur de l'Eglise. 1274.

Pape : Saint Grégoire X. Roi de France : Saint Louis. Roi de Naples : Charles Ier.

" Ange de l'école... c'est-à-dire vierge et docteur."


Saint Thomas d'Aquin. Effigie. XVIe.

Saluons aujourd'hui l'un des plus sublimes et des plus lumineux interprètes de la Vérité divine. L'Eglise l'a produit bien des siècles après l'âge des Apôtres, longtemps après que la parole des Ambroise, des Augustin, des Jérôme et des Grégoire, avait cessé de retentir ; mais Thomas a prouvé que le sein de la Mère commune était toujours fécond ; et celle-ci, dans sa joie de l'avoir mis au jour, l'a nommé le Docteur Angélique. C'est donc parmi les chœurs des Anges que nos yeux doivent chercher Thomas; homme par nature, sa noble et pure intelligence l'associe aux Chérubins du ciel ; de même que la tendresse ineffable de Bonaventure, son émule et son ami, a introduit ce merveilleux disciple de François dans les rangs des Séraphins.


Glorification de saint Thomas d'Aquin. Détail.
Maître des effigies dominicaines. XIVe.

La gloire de Thomas d'Aquin est celle de l'humanité, dont il est un des plus grands génies ; celle de l'Eglise, dont ses écrits ont exposé la doctrine avec une lucidité et une précision qu'aucun Docteur n'avait encore atteintes ; celle du Christ lui-même, qui daigna de sa bouche divine féliciter cet homme si profond et si simple d'avoir expliqué dignement ses mystères aux hommes. En ces jours qui doivent nous ramener à Dieu, le plus grand besoin de nos âmes est de le connaître, comme notre plus grand malheur a été de ne l'avoir pas assez connu. Demandons à saint Thomas " cette lumière sans tache qui convertit les âmes, cette doctrine qui donne la sagesse même aux enfants, qui réjouit le cœur et éclaire les yeux " (Psalm. XVIII.). Nous verrons alors la vanité de tout ce qui est hors de Dieu, la justice de ses préceptes, la malice de nos infractions, la bonté infinie qui accueillera notre repentir.


Bernardo Daddi. XIVe.

Admirable ornement du monde chrétien et lumière de l'Eglise, le bienheureux Thomas naquit de Landolphe, comte d'Aquin, et de Théodora de Naples, tous deux de noble extraction. Il montra, encore au berceau, quelle devait être l'ardeur de sa dévotion envers la Mère de Dieu ; car ayant trouvé un papier sur lequel on avait écrit la Salutation angélique, il le retint dans sa main fermée malgré les efforts de sa nourrice, et sa mère l'ayant arraché de force, il le redemanda par pleurs et par gestes, jusqu'à ce qu'on le lui rendît, ce qui étant fait, il l'avala.


Apothéose de saint Thomas d'Aquin. F. de Zurbaran. XVIIe.

Il fut confié à l'âge de cinq ans aux soins des moines Bénédictins du Mont-Cassin. De là, il fut envoyé à Naples pour faire ses études ; il y découvre sans doute Aristote avec des traductions à partir de l'arabe fournies par Frédéric II. Etant encore adolescent, il entra dans l'Ordre des Frères-Prêcheurs en 1244 - l'ordre fondé par saint Dominique était alors jeune et suscitait l'enthousiasme religieux et intellectuel de notre Saint.

Cette résolution ayant excité le mécontentement de sa mère et de ses frères, on le fit partir pour Paris. Durant le voyage, il fut enlevé par ses frères qui l'entraînèrent dans le château-fort de Saint-Jean. On s'y prit de diverses manières pour le détourner de sa sainte résolution, jusqu'à envoyer près de lui une femme de mauvaise vie, afin d'ébranler sa constance. Thomas la mit en fuite avec un tison. Après cette victoire le saint jeune homme, s'étant mis à genoux devant une croix, fut saisi d'un sommeil durant lequel il sentit ceindre ses reins par les Anges ; et, depuis ce temps, il fut exempt des révoltes de la chair. Ses sœurs étaient venues aussi au château dans l'intention de le détourner de son pieux dessein ; il leur persuada de mépriser les embarras du siècle, et d'embrasser les exercices d'une vie toute céleste.


La tentation de saint Thomas d'Aquin et le secours des anges.
Diego Velasquez. XVIIe.

On l'aida à s'échapper du château par une fenêtre, et on le ramena à Naples. Ce fut de là que Frère Jean le Teutonique, Maître général de l'Ordre des Frères-Prêcheurs, le conduisit à Rome, puis à Paris, où il étudia la philosophie et la théologie. Il suit un temps son maître Albert le Grand à Cologne jusqu'en 1252. De retour à Paris, il fut bientôtt bachelier biblique (lectures commentées des Écritures) de 1252 à 1254, puis bachelier sententiaire (commentateur du Livre des Sentences de Lombard) de 1254 à 1256. Il enseigna l'Écriture sainte, rédiga le de Ente et Essentia, reçut sa maîtrise en théologie, fut nommé Maître-Régent, défendit et rédigea les Questions Disputées : de Veritate, les Quodlibet (7 à 11) ; commenta le de Trinitate de Boèce, etc.

Après d'âpres luttes avec les séculiers de l'Université, il fut enfin admis, avec saint Bonaventure, dans le Consortium Magistrorum, non sans quelque pression pontificale en leur faveur, et de 1256 à 1259, il fut maître en théologie (choisi avant l’âge requis). En 1259, saint Thomas avait trente-quatre ans lorsqu'il partit pour l'Italie, où il resta dix ans. Il y enseigna la théologie jusqu'en 1268.


Saint Thomas d'Aquin débattant contre un hérétique.
Bartolomeo degli Erri. XVe.

Rappelons-le, élevé au degré de Docteur dès l'âge de vingt-cinq ans, il expliquait publiquement, et avec une grande réputation, les écrits des philosophes et des théologiens. Jamais il ne se livra à la lecture ou à la composition sans avoir prié. Pour obtenir l'intelligence des passages difficiles de l'Ecriture sainte, il joignait le jeûne à la prière. Il avait même coutume de dire à Frère Réginald, son compagnon, que ce qu'il savait, il l'avait moins acquis par son étude et son travail qu'il ne l'avait reçu du Ciel.


Saint Thomas d'Aquin inspiré par saint Pierre et saint Paul.
Bartolomeo degli Erri. XVe.

Saint Thomas revint à Paris de 1269 à 1272. Il avait quarante-quatre ans lorsqu'il rédigea la seconde partie (IIa Pars) de la Somme théologique et la plus grande partie des Commentaires des oeuvres d'Aristote. Il dut faire face à des attaques des Ordres Mendiants, dont des rivalités avec les franciscains et à des disputes avec certains maîtres ès arts (en particulier Siger de Brabant).

Le travail incroyable accompli à la fois pour l'enseignement et la rédaction de son oeuvre, les luttes continuelles qu'il dut mener au sein même de l'Université, le départ de quelques-uns de ses amis (Robert de Sorbon, Eudes de Saint-Denys, etc.), tout cela contribua à miner la santé de saint Thomas, qui, à quarante-sept ans (1272) repartit à Naples, où il fut nommé maître Régent en théologie de l’école dominicaine. Il y termina la troisième partie (IIIa Pars) de la Somme, la lectio de l’Épître aux Romains, les commentaires des Psaumes, du Credo, du Pater, de l'Ave Maria.

Sa santé déclina encore et, aphasique, en se rendant au concile de Lyon, convoqué par le pape Grégoire X, qui devait se tenir en mai, il mourut le 7 mars 1274, au monastère cistercien de Fossa Nova, où il reposa jusqu'à la translation de sa dépouille mortelle en 1369 à Toulouse, aux Jacobins, où il repose toujours aujourd'hui.


Saint Thomas d'Aquin prêchant en présence de Grégoire X.
Bartolomeo degli Erri. XVe.

Le 6 décembre 1273, à Naples, alors qu'il priait avec ardeur devant le crucifix du tabernacle, à l'issue de la sainte messe, il entendit cette voix :
" Tu as bien écrit de moi, Thomas : quelle récompense en désires-tu recevoir ?"
A quoi il répondit :
" Point d'autre que vous-même, Seigneur."
A la suite de cet épisode, lors duquel il avait vu Notre Seigneur face à face, il lui parut toute la vanité de son oeuvre et arrêta ses écrits.

Comme il se rendait au Concile de Lyon par ordre du Bienheureux Grégoire X, nous l'avons vu, il tomba malade dans l'abbaye de Fosse-Neuve, où, malgré son infirmité, il donna l'explication du Cantique des cantiques. Ce fut là qu'il mourut, âgé de cinquante ans, l'an du salut 1274, aux nones de mars. Il éclata, même après sa mort, par des miracles, lesquels étant prouvés, Jean XXII le mit au nombre des Saints, en 1323 ; son corps fut ensuite transporté à Toulouse par l'ordre du Bienheureux Urbain V.

Le plus grand des miracles de sa courte vie de quarante-huit ans, ce sont les ouvrages incomparables et immenses qu'il trouva le temps d'écrire au milieu d'accablantes occupations. Les admirables hymnes de la fête du Très Saint-Sacrement sont l'oeuvre de ce grand Docteur, dont la piété égalait la science.


Tombeau de Saint Thomas d'Aquin.
Couvent des Jacobins (Dominicains). Toulouse.

Comparé aux esprits angéliques non moins pour son innocence que pour son génie, il a mérité le titre de Docteur Angélique, qui lui fut confirmé par l'autorité de saint Pie V. Enfin Léon XIII, agréant avec grande joie les prières et les voeux de presque tous les évêques du monde catholique : pour éloigner le fléau de tant de systèmes, philosophiques principalement, qui s'écartent de la vérité, pour le progrès des sciences et la commune utilité du genre humain, de l'avis de la Congrégation des Rites Sacrés, l'a par Lettres Apostoliques déclaré et institué céleste Patron de toutes les Ecoles Catholiques et donc " Docteur commun ".

Ce grand docteur fut l'ami de saint Louis et le bras droit des Papes.

HYMNE

" Célèbre, Ô Eglise Mère, l'heureuse mort de Thomas, lorsqu'il fut admis à l'éternel bonheur par les mérites du Verbe de vie.

Fosse-Neuve reçut la dépouille mortelle de celui qui était un trésor de grâces, au jour où le Christ appela Thomas à l'héritage du royaume de gloire.

Sa doctrine de vérité nous reste avec son corps précieux, le parfum merveilleux qu'il exhale, et la santé qu'il rend aux infirmes.

Ses prodiges le rendent digne des louanges de la terre, des mens et des cieux ; qu'il daigne nous aider par ses prières, nous recommander à Dieu par ses mérites.

Louange au Père, au Fils et au Saint-Esprit ; daigne la Trinité Sainte, par les mérites de Thomas, nous réunir aux chœurs célestes !

Amen."


Saint Thomas entre saint Marc et saint Louis de Toulouse.
Vittore Carpaccio. XVIe.

PRIERE

" Gloire à vous, Thomas, lumière du monde ! Vous avez reçu les rayons du Soleil de justice, et vous les avez rendus à la terre. Votre oeil limpide a contemplé la vérité, et en vous s'est accomplie cette parole : " Heureux ceux dont le coeur est pur ; car ils verront Dieu " (Matth. V, 8.). Vainqueur dans la lutte contre la chair, vous avez obtenu les délices de l'esprit ; et le Sauveur, ravi des charmes de votre âme angélique, vous a choisi pour célébrer dans l'Eglise le divin Sacrement de son amour. La science n'a point tari en vous la source de l'humilité ; la prière fut toujours votre secours dans la recherche de la vérité ; et après tant de travaux vous n'aspiriez qu'à une seule récompense, celle de posséder le Dieu que votre coeur aimait.

Votre carrière mortelle fut promptement interrompue, et vous laissâtes inachevé le chef-d'oeuvre de votre angélique doctrine ; mais, Ô Thomas, Docteur de vérité, vous pouvez luire encore sur l'Eglise de Dieu. Assistez-la dans les combats contre l'erreur. Elle aime à s'appuyer sur vos enseignements, parce qu'elle sait que nul ne connut plus intimement que vous les secrets de son Epoux. En ces jours où " les vérités sont diminuées parmi les enfants des hommes " (Psalm. XI.), fortifiez, éclairez la foi des croyants. Confondez l'audace de ces vains esprits qui croient savoir quelque chose, et qui profitent de l'affaissement général des intelligences, pour usurper dans la nullité de leur savoir le rôle de docteurs. Les ténèbres s'épaississent autour de nous ; la confusion règne partout ; ramenez-nous à ces notions qui dans leur divine simplicité sont la vie de l'esprit et la joie du coeur.


Saint Thomas d'Aquin, fontaine de la sagesse. Antoine Nicolas. XVIIe.

Protégez l'Ordre illustre qui se glorifie de vous avoir produit ; fécondez-le de plus en plus ; car il est un des premiers auxiliaires de l'Eglise de Dieu. N'oubliez pas que la France a eu l'honneur de vous posséder dans son sein, et que votre chaire s'est élevée dans sa capitale : obtenez pour elle des jours meilleurs. Sauvez-la de l'anarchie des doctrines, qui a enfanté pour elle cette désolante situation où elle périra, si la véritable science, celle de Dieu et de sa Vérité, ne lui est rendue.

La sainte Quarantaine doit voir les enfants de l'Eglise se disposer à rentrer en grâce avec le Seigneur leur Dieu ; révélez-nous, Ô Thomas, cette souveraine Sainteté que nos péchés ont offensée ; faites-nous comprendre l'état d'une âme qui n'est plus en rapport avec la justice éternelle. Saisis d'une sainte horreur à la vue des taches qui nous couvrent, nous aspirerons à purifier nos cœurs dans le sang de l'Agneau immaculé, et à réparer nos fautes par les œuvres de la pénitence.
"


Le triomphe de saint Thomas d'Aquin. Gozzoli. XVe.

Rq : On lira et téléchargera avec fruit la vie et les oeuvres complètes de saint Thomas d'Aquin : http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/thomas/index.htm

Lire la suite

vendredi, 07 mars 2025 | Lien permanent | Commentaires (1)

25 mars 2023. L’Annonciation de la sainte Vierge Marie et l’Incarnation de Notre Seigneur Jésus-Christ.

- L’Annonciation de la sainte Vierge Marie et l’Incarnation de Notre Seigneur Jésus-Christ.

 
" Ipsa tenente, non corruis ; protogente, non metuis ; propitia pervenis."
" Soutenu par Marie, on ne tombe pas ; protégé par Marie, on ne craint pas ; aidé par Marie, on arrive au port."

Saint Bernard de Clairvaux.


Maître du retable des Rois Catholiques. Flandres. XVe.

Cette journée est grande dans les annales de l’humanité ; elles est grande aux yeux même de Dieu : car elle est l'anniversaire du plus solennel événement qui se soit accompli dans le temps. Aujourd'hui, le Verbe divin, par lequel le Père a créé le monde, " s'est fait chair au sein d'une Vierge, et il a habité parmi nous " (Johan.  I, 14.). Suspendons en ce jour nos saintes tristesses ; et en adorant les grandeurs du Fils de Dieu qui s'abaisse, rendons grâces au Père " qui a aimé le monde jusqu'à lui donner son Fils unique " (Ibid.  III, 16.), et au Saint-Esprit dont la vertu toute-puissante opère un si profond mystère Au sein même de l'austère Quarantaine, voici que nous préludons aux joies ineffables de la fête de Noël ; encore neuf mois, et notre Emmanuel conçu en ce jour naîtra dans Bethléhem, et les concerts des Anges nous convieront à venir saluer sa naissance fortunée.


Albrecht Bouts. Flandres. XVIe.

Dans la semaine de la Septuagésime, nous avons contemplé avec terreur la chute de nos premiers parents ; nous avons entendu la voix de Dieu dénonçant la triple sentence, contre le serpent, contre la femme, et enfin contre l'homme. Nos cœurs ont été glacés d'effroi au bruit de cette malédiction dont les effets sont arrives sur nous, et doivent se taire sentir jusqu'au dernier jour du monde. Cependant, une espérance s'est fait jour dans notre aine ; du milieu des anathèmes, une promesse divine a brillé (August. De Trinit. Lib. IV, cap. V.) tout à coup comme une lueur de salut. Notre oreille a entendu le Seigneur irrite dire au serpent infernal qu'un jour sa tête altière serait brisée, et que le pied d'une femme lui porterait ce coup terrible.
 

Fra Angelico. XIVe.
 
Le moment est venu où le Seigneur va remplir l'antique promesse. Durant quatre mille ans, le monde en attendit l'effet ; malgré ses ténèbres et ses crimes, cette espérance ne s'éteignit pas dans son sein. Dans le cours des siècles, la divine miséricorde a multiplié les miracles, les prophéties, les figures, pour rappeler l'engagement qu'elle daigna prendre avec l'homme. Le sang du Messie a passé d'Adam à Noé ; de Sem à Abraham, Isaac et Jacob ; de David et Salomon à Joachim ; il coule maintenant dans les veines de Marie, tille de Joachim. Marie est cette femme par qui doit être levée la malédiction qui pèse sur notre race. Le Seigneur, en la décrétant immaculée, a constitué une irréconciliable inimitié entre elle et le serpent ; et c'est aujourd'hui que cette tille d'Eve va réparer la chute de sa mère, relever son sexe de l'abaissement dans lequel il était plongé, et coopérer directement et efficacement à la victoire que le Fils de Dieu vient remporter en personne sur l'ennemi de sa gloire et du genre humain.


Annonciation avec Louis XII et Anne de Bretagne.

Maître du tryptique de Louis XII. XVIe.

La tradition apostolique a signalé à la sainte Eglise le vingt-cinq mars, comme le jour qui vit s'accomplir l'auguste mystère. Ce fut à l'heure de minuit que la très pure Marie, seule, et dans le recueillement de la prière, vit apparaître devant elle le radieux Archange descendu du ciel pour venir recevoir son consentement, au nom de la glorieuse Trinité. Assistons à l'entrevue de l'Ange et de la Vierge, et reportons en même temps notre pensée aux premiers jours du monde. Un saint Evêque martyr du IIe siècle, fidèle écho de l'enseignement des Apôtres, saint Irenée, nous a appris à rapprocher cette grande scène de celle qui eut lieu sous les ombrages d'Eden (Adv. haeres. Lib. V, cap XIX.).


Gérard David. XVIe

Dans le jardin des délices, c'est une vierge qui se trouve en présence d'un ange, et un colloque s'établit entre l'ange et la vierge. A Nazareth, une vierge est aussi interpellée par un ange, et un dialogue s'établit entre eux; mais l'ange du Paradis terrestre est un esprit de ténèbres, et celui de Nazareth est un esprit de lumière Dans les deux rencontres, c'est l'ange qui prend le premier la parole :

" Pourquoi, dit l'esprit maudit à la première femme, pourquoi Dieu vous a-t-il commandé de ne pas manger du fruit de tous les arbres de ce jardin ?"
On sent déjà dans cette demande impatiente la provocation au mal, le mépris, la haine envers la faible créature dans laquelle Satan poursuit l'image de Dieu.
Voyez au contraire l'ange de lumière avec quelle douceur, quelle paix, il approche de la nouvelle Eve ! Avec quel respect il s'incline devant cette fille des hommes !
" Salut, Ô pleine de grâce ! Le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie entre les femmes."
Qui ne reconnaît l'accent céleste dans ces paroles où tout respire la dignité et la paix !


Giovanni di Paolo di Grazia. XVe.

Mais continuons de suivre le mystérieux parallèle.

La femme d'Eden, dans son imprudence, écoute la voix du séducteur ; elle s'empresse de répondre. Sa curiosité l'engage dans une conversation avec celui qui l'invite à scruter les décrets de Dieu. Elle n'a pas de défiance à l'égard du serpent qui lui parle, tout à l'heure, elle se défiera de Dieu même.

Marie a entendu les paroles de Gabriel ; mais cette Vierge très prudente, comme parle l'Eglise, demeure dans le silence. Elle se demande d'où peuvent venir ces éloges dont elle est l'objet. La plus pure, la plus humble des vierges craint la flatterie; et l'envoyé céleste n'obtiendra pas d'elle une parole qu'il n'ait éclairci sa mission par la suite de son discours :
" Ne craignez pas, Ô Marie, dit-il à la nouvelle Eve : car vous avez trouvé grâce devant le Seigneur. Voici que vous concevrez et enfanterez un fils, et vous l'appellerez Jésus. Il sera grand, et il sera appelé le Fils du Très-Haut ; et le Seigneur lui donnera le trône de David son père ; il régnera sur la maison de Jacob à jamais, et son règne n'aura pas de fin."

Quelles magnifiques promesses descendues du ciel, de la part de Dieu ! Quel objet plus digne de la noble ambition d'une fille de Juda, qui sait de quelle gloire doit être entourée l'heureuse mère du Messie ? Cependant, Marie n'est pas tentée par tant d'honneur. Elle a pour jamais consacré sa virginité au Seigneur, afin de lui être plus étroitement unie par l'amour ; la destinée la plus glorieuse qu'elle ne pourrait obtenir qu'en violant ce pacte sacré, ne saurait émouvoir son âme. " Comment cela pourrait-il se faire, répond-elle à l'Ange, puisque je ne connais pas d'homme ?"


Johann Koerbecke. XVe.
 
La première Eve ne montre pas ce calme, ce désintéressement. A peine l'ange pervers lui a-t-il assuré qu'elle peut violer, sans crainte de mourir, le commandement de son divin bienfaiteur, que le prix de sa désobéissance sera d'entrer par la science en participation delà divinité même : tout aussitôt, elle est subjuguée. L'amour d'elle-même lui a fait oublier en un instant le devoir et la reconnaissance ; elle est heureuse de se voir affranchie au plus tôt de ce double lien qui lui pèse.

Telle se montre cette femme qui nous a perdus ; mais combien différente nous apparaît cette autre femme qui devait nous sauver ! La première, cruelle à sa postérité, se préoccupe uniquement d'elle-même; la seconde s'oublie, pour ne songer qu'aux droits de Dieu sur elle. L'Ange, ravi de cette sublime fidélité, achève de lui dévoiler le plan divin :
" L'Esprit-Saint, lui dit-il, surviendra en vous ; la Vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre ; et c'est pour cela que ce qui naîtra de vous sera appelé le Fils de Dieu. Elisabeth votre cousine a conçu un fils, malgré sa vieillesse ; celle qui fut stérile est arrivée déjà à son sixième mois : car rien n'est impossible à Dieu."

L'Ange arrête ici son discours, et il attend dans le silence la résolution de la vierge de Nazareth.


Lorenzo d'Andrea d'Oderigo. XVe.

Reportons nos regards sur la vierge d'Eden. A peine l'esprit infernal a-t-il cessé de parler, qu'elle jette un œil de convoitise sur le fruit défendu ; elle aspire à l'indépendance dont ce fruit si délectable va la mettre en possession. Sa main désobéissante s'avance pour le cueillir ; elle le saisit, elle le porte avidement à sa bouche, et au même instant la mort prend possession d'elle : mort de l'âme par le péché qui éteint la lumière de vie; mort du corps qui séparé du principe d'immortalité, devient désormais un objet de honte  et de confusion, en attendant qu'il tombe en poussière.

Mais détournons nos yeux de ce triste spectacle, et revenons à Nazareth. Marie a recueilli les dernières paroles de l'Ange ; la volonté du ciel est manifeste pour elle. Cette volonté lui est glorieuse et fortunée : elle l'assure que l'ineffable bonheur de se sentir Mère d'un Dieu lui est réservé, à elle humble tille de l'homme, et que la fleur de virginité lui sera conservée. En présence de cette volonté souveraine, Marie s'incline dans une parfaite obéissance, et dit au céleste envoyé : " Voici  la servante du Seigneur ; qu'il me soit fait selon votre parole ".


Maître de la Vie de Marie. Allemagne. XVe.

Ainsi, selon la remarque de notre grand saint Irenée, répétée par toute la tradition chrétienne, l'obéissance de la seconde femme répare la désobéissance de la première ; car la Vierge de Nazareth n'a pas plus tôt dit : " Qu'il me soit fait ", Fiat, que le Fils éternel de Dieu qui, selon le décret divin, attendait cette parole, se rend présent, par l'opération de l'Esprit-Saint, dans le chaste sein de Marie, et vient y commencer une vie humaine. Une Vierge devient Mère, et la Mère d'un Dieu ; et c'est l'acquiescement de cette Vierge à la souveraine volonté qui la rend féconde, par l'ineffable vertu de l'Esprit-Saint. Mystère sublime qui établit des relations de fils et de mère entre le Verbe éternel et une simple femme ; qui fournit au Tout-Puissant un moyen digne de lui d'assurer son triomphe contre L'esprit infernal, dont l'audace et la perfidie semblaient avoir prévalu jusqu'alors contre le plan divin !

Jamais défaite ne fut plus humiliante et plus complète que celle de Satan, en ce jour Le pied de la femme, de cette humble créature qui lui offrit une victoire si facile, ce pied vainqueur, il le sent maintenant peser de tout son poids sur sa tête orgueilleuse qui en est brisée. Eve se relève dans son heureuse fille pour écraser le serpent. Dieu n'a pas choisi l'homme pour cette vengeance : l'humiliation de Satan n'eût pas été assez profonde. C'est la première proie de l'enfer, sa victime la plus faible, la plus désarmée, que le Seigneur dirige contre cet ennemi. Pour prix d'un si haut triomphe, une femme dominera désormais non seulement sur les anges rebelles, mais sur toute la race humaine ; bien plus, sur toutes les hiérarchies des Esprits célestes. Du haut de son trône sublime, Marie Mère de Dieu plane au-dessus de toute la création. Au fond des abîmes infernaux Satan rugira d'un désespoir éternel, en songeant au malheur qu'il eut de diriger ses premières attaques contre un être fragile et crédule que Dieu a si magnifiquement vengé ; et dans les hauteurs du ciel, les Chérubins et les Séraphins lèveront timidement leurs regards éblouis vers Marie, ambitionneront son sourire, et se feront gloire d'exécuter les moindres désirs de cette femme, la Mère du grand Dieu et la sœur des hommes.


Maître de Moulins. XVe.

C'est pourquoi nous, enfants de la race humaine, arrachés à la dent du serpent infernal par l'obéissance de Marie, nous saluons aujourd'hui l'aurore de notre délivrance. Empruntant les paroles du cantique de Debbora, où cette femme, type de Marie victorieuse, chante son triomphe sur les ennemis du peuple saint, nous disons :

" La race des forts avait disparu d'Israël, jusqu'au jour où s'éleva Debbora, où parut celle qui est la mère dans Israël. Le Seigneur a inauguré un nouveau genre de combat ; il a forcé les portes de son ennemi." (Judic. V, 7, 8.).
Prêtons l'oreille, et entendons encore, à travers les siècles, cette autre femme victorieuse, Judith. Elle chante à son tour :
" Célébrez le Seigneur notre Dieu, qui n'abandonne pas ceux qui espèrent en lui. C'est en moi, sa servante, qu'il a accompli la miséricorde promise à la maison d'Israël ; c'est par ma main qu'il a immolé, cette nuit même, l'ennemi de son peuple. Le Seigneur tout-puissant a  frappé cet ennemi ; il l'a livré aux mains d'une femme, et il l'a percé de son glaive." (Judith, XIII, 17, 18, XVI, 7.).


L'Incarnation. Gérard David. XVIe.

A LA MESSE

La sainte Eglise emprunte la plus grande partie des chants du Sacrifice au sublime épithalame dans lequel le Roi-Prophète célèbre l'union de l'Epoux et de l'Epouse.

EPÎTRE

Lecture du Prophète Isaïe. Chap. VII.


Petrus Christus. XVe.

" En

Lire la suite

mardi, 25 mars 2025 | Lien permanent | Commentaires (1)

26 mars. Saint Ludger, premier évêque de Münster. 809.

- Saint Ludger, premier évêque de Münster. 809.

Pape : Saint Léon III. Empereur : Saint Charlemagne.

" Quis te docuit ? Respondens, ait : Deus me docuit."
" Qui t'a instruit ? Il répondait : Dieu m'a instruit."

Saint Ludger enfant. Vita, apud Bolland. et Pertz, II, 407.


Statue reliquaire de saint Ludger. Cathédrale Saint-Paul de Münster.

Dans un canton de Frise, où la foi commençait à s'introduire, la femme d'un chef crétien avait mit au monde une fille. L'aïeule encore païenne, irritée contre sa bru, qui ne lui donnait pas de petit-fils, ordonna que l'nfant fût étouffée, comme le permettait les lois, avant qu'elle eût goûté le lait de sa mère, ou la nourriture des hommes. Un esclave l'emporta pour la noyer, et la plongea dans un grand vase plein d'eau. Mais l'enfant étendant ses petites mains, se retenait aux bords. Les cris attirèrent une femme qui l'arracha des bras de l'esclave, l'emporta dans sa maison et lui mouilla les lèvres d'un peu de miel ; dès lors, les lois ne permettait pas qu'elle mourût : ce fut la mère de saint Ludger.

Le signe de Dieu était sur cette maison, et l'on vit de bonne heure ce que Ludger serait un jour. Ses parents le mirent donc au monastère d'Utrecht, et il y fit tant de progrès dans les lettres sacrées, qu'on l'envoya aux écoles d'York, où les leçons d'Alcuin attiraient un grand concours de jeunes gens des contrées étrangères.

Il y passa quatre ans et revint en Frise avec un grand savoir et beaucoup de livres. Alors on l'appliqua à la prédication de l'Evangile dans le canton d'Ostracha. Mais au milieu des païens, il n'oubliait pas ses amis d'Angleterre. Pendant qu'il bâtissait un oratoire, Alcuin lui adressait des vers pour les inscrire au porche de l'édifice. Vers le même temps, il recevait de l'un de ses condisciples d'York une épître qui commençait ainsi :
" Frère, frère chéri de cet amour divin plus fort que le sang, Ludger que j'aime, puisse la grâce du Christ vous sauver. Prêtre honoré aux rivages occidentaux du monde, vous êtes savant, puissant par la parole, profond par la pensée. Tandis que vou sgrandissez dans le bien, ministre de Dieu, souvenez-vous de moi, et que vos prières recommandent au ciel celui qui vous célébra dans ses chants trop courts !"

Et le poëte finissait, demandant à son ami un bâton de bois blanc, humble don pour humble vers.


Saint Ludger. Münster. XIVe.

Ludger travailla sept ans, au bout desquels Witikind ayand soulevé les Saxons, les païens se jetèrent dans la Frise et chassèrent les prédicateurs de la foi. Alors Ludger se rendit à Rome, puis au mont Cassin, où il s'arrêta pour étudier la règle de saint Benoît et la rapporter parmi les moines de sa province. A son retour, le bienheurex roi Charlemagne, qui venait de vaincre les Barbares, le chargea d'évangéliser les cinq cantons de la Frise orientale. Ludger les parcourut, renversant les idoles et annonçant le vrai Dieu. Ensuite, ayant passé dans l'île de Fositeland, il détruisit les temples qui en faisait un lieu vénéré des nations du Nord et baptisa les habitants dans les eaux d'une fontaine qu'ils avaient adorée.

Vers ce temps-là, comme il voyageait de village en village, et qu'un jour il avait reçu l'hospitalité d'une noble dame, pendant qu'il mangeait avec ses disciples, on lui présenta un aveugle nommé Bernlef, que les gens du pays aimaient, parce qu'il savait bien chanter les récits des anciens temps et les combats des rois ; le serviteur de Dieu le pria de se trouver le lendemain en un lieu qu'il lui marqua. Le lendemain, quand il aperçut Bernlef, il descendit de cheval, l'emmena à l'écart, entendit sa confession, et, faisant le signe de la Croix sur ses yeux, lui demanda s'il voyait. L'aveugle vit d'abord les mains du prêtre, puis les arbres et les toits du hameau voisin. Mais Ludger exigea qu'il cachât ce miracle. Plus tard, il le prit à sa suite pour baptiser les païens, et il lui enseigna les psaumes pour les chanter au peuple.


Saint Ludger rendant la vue à l'aveugle Bernlef. Rotterdam.

Cependant le roi Charles, apprenant le grand bien que saint Ludger avait fait, l'établit à Mimigerford, qui fut depuis Münster, au canton de Suthergau, en Westphalie, et o, l'ordonna évêque malgré lui. Alors il éleva des églises et dans chacune il mit un prêtre du nombre de ses disciples. Lui-même instruisait tous les jours ceux qu'il destinait aux saints autels, et dont il avait choisi plusieurs parmi les enfants des Barbares. Il ne cessait pas non plus d'exhorter le peuple, invitant même les pauvres à sa table, afin de les entretenir plus longtemps.

Ses grandes aumônes vidaient les trésors de l'église, jusqu'au jour où il fut accusé auprès du bienheureux Charles comme dissipateur des biens du clergé. Il se rendit donc à la cour, et, comme il s'était mis à prier et à réciter son bréviaire en attendant l'heure de l'audience, un officier l'appela. Le Saint voulut achever sa prière et se fit attendre :
" Pourquoi, lui dit Charles, n'être pas venu tout d'abord ?
- Prince, répond l'évêque, je priais Dieu ; quand vous m'avez choisi pour évêque, vous m'avez recommandé de préférer toujours le service de ce Roi des rois à celui des hommes, à celui même de l'empereur."

 
L'empereur, charmé de cette réponse n'en voulut pas entendre davantage. Il renvoya avec honneur le pasteur vers ses ouailles, l'exhortant à montrer toujours la même ardeur dans le service du Seigneur et celui de Son Église.
 
Alors, toute la Westphalie était devenue chrétienne, et le serviteur de Dieu méditait de porter l'Evangile aux Scandinaves, quand il mourut à Münster, le 26 mars 809.
 
Le dernier jour de sa vie, il prêcha daux sermons, l'un à Coesfeld, l'autre à Billerbult (ou Billerbeck) et célébra la sainte messe. La nuit suivante, il rendit sa sainte âme à Dieu. Selon ce qu'il avait prescrit, il fut enseveli à Werden, monastère qu'il avait fondé dans le diocèse de Cologne ; et il s'y opéra beaucoup de miracles.
 

Couverture d'un livre exécuté pour le bienheureux Rodolphe,
abbé du monastère Saint-Ludger de Werden.
Bronze, or et ivoire. XIe.

Signalons que c'est d'un monastère de chanoines réguliers que saint Ludger avait établi dans sa ville épiscopale, que celle-ci prit le nom de Münster.

Saint Ludger est le patron de Münster, de Werden, de la Frise orientale, de Helmstadt, de Deventer, de Kaiserwerth, etc.

L'essentiel de ses saintes reliques se trouvent toujours à Werden, même si Münster et Billerbeck en possèdent des fragments.

On représente saint Ludger :
1. soutenant une église ou s'appuyant dessus : ce symbole rappelant toujours les fondateurs d'églises ;
2. tenant un livre ou l'ayant à ses côtés : ce livre rappelant son amour rare pour l'étude dans sa jeunesse ou, mieux encore, la circonstance du bréviaire qu'il était en train de lire lorsqu'on vint le demander de la part de saint Charlemagne.


Cathédrale Saint-Ludger de Billerbeck. Wesphalie. Allemagne.

Lire la suite

mercredi, 26 mars 2025 | Lien permanent

Page : 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18