mardi, 21 mai 2024
21 mai. Saint Hospice de Villefranche, vulgairement saint Sospis, ermite et confesseur. 581.
- Saint Hospice de Villefranche, vulgairement saint Sospis, ermite et confesseur. 581.
Pape : Pélage II. Roi de Bourgogne : Gontran.
" Soyez dans l'allégresse, vous dont les noms sont écrits au ciel."
Luc, X, 20.
Saint Hospice face aux Lombards. Bois polychrome du XVIe.
Saint Hospice est un ermite du VIe siècle, dont le nom demeure célèbre aujourd'hui encore dans la région de Nice où il vécut. Sa vie nous a été racontée par saint Grégoire de Tours, au livre VI de son " Histoire des Francs ". C'est ce récit que nous allons résumer ici.
Hospice s'était enfermé dans une vieille tour située près de Villefranche, à une lieue de la ville de Nice, sur une petite presqu'île qui, en souvenir de lui, est appelée aujourd'hui encore San Sospis. Là se livrait aux exercices de la pénitence la plus rigoureuse. Il avait enserré son corps dans des chaînes de fer qu'il portait à même la chair, avec un cilice par-dessus. Il ne mangeait que du pain sec et quelques dattes. Les jours de Carême, il faisait son repas avec des herbes utilisées par les solitaires d'Égypte, et qu'il achetait à des marchands. (Une tradition locale veut qu'il ait été originaire d'Égypte, et qu'il ait fait là l'apprentissage de la vie monastique.) Il prenait d'abord le jus dans lequel elles avaient cuit, et plus tard, les herbes elles-mêmes.
Mais Dieu récompensait son zèle par le don des miracles et l'esprit de prophétie. C'est ainsi qu'il prédit aux habitants du pays la prochaine invasion des Lombards :
" Les Lombards, dit-il, viendront dans les Gaules et dévasteront sept provinces, parce que la malice de ce pays s'est accrue devant les yeux du Seigneur car il n'y a plus personne qui comprenne, personne qui recherche Dieu ; personne qui fasse le bien, pour que la colère de Dieu s'apaise. Tout le monde est sans Foi, adonné aux parjures, accoutumé à voler, prompt à tuer ; aucun fruit de justice ne mûrit en eux. On ne paye pas les dîmes, on ne nourrit pas les pauvres, on ne couvre pas ceux qui sont nus, on ne recueille pas les pèlerins, on ne leur donne pas une nourriture suffisante. C'est pour cela que ce fléau va venir.
Je vous dis donc maintenant : ramassez tout votre avoir derrière des murailles, pour que les Lombards ne vous l'enlèvent pas ; et retranchez-vous vous-mêmes derrière les enceintes les mieux fortifiées."
Il prévint également les moines de se hâter de se mettre en sûreté, avec ce qu'ils pourraient prendre, car les Barbares approchaient. La même tradition prétend que saint Hospice était abbé d'un monastère établi sur la même presqu'île, et qu'il le gouvernait de sa tour. Ces traditions sont rapportées dans un ouvrage publié à Turin en 1658, " Nice illustrée ", par Gioffredi. Et comme les religieux protestaient à l'envi qu'ils ne voulaient pas l'abandonner, il répartit :
" Ne craignez rien pour moi. Peut-être me feront-ils subir quelques outrages, mais ils n'iront pas jusqu'à me tuer."
Les moines s'étaient à peine éloignés que les Lombards arrivèrent. Dévastant tout sur leur passage, ils atteignirent la tour où le saint vivait, enfermé, et d'où il se montrait à eux par la fenêtre. Ayant vainement cherché une entrée pour pénétrer dans la tour et monter jusqu'à lui, ils grimpèrent sur la toiture et, enlevant les tuiles, réussirent à l'approcher. Voyant alors cet homme chargé de chaînes, dans cette sévère prison, ils pensèrent qu'ils avaient affaire à quelque grand criminel et, faisant venir un interprète, ils lui demandèrent de quoi il était coupable pour avoir mérité un tel châtiment. Hospice déclara qu'il était un homicide et qu'il avait commis les pires méfaits.
Un des Barbares alors tira son épée et la brandit au-dessus de sa tête mais, au moment où il allait frapper, son bras droit se raidit sans qu'il pût le ramener à lui, et il lâcha son arme qui tomba à terre. Les autres, voyant cela, poussèrent un grand cri vers le ciel, en suppliant le saint de leur dire ce qu'il fallait faire. Lui fit le signe de la croix sur le bras raidi et lui rendit aussitôt sa souplesse. L'homme se convertit sur l'heure ; plus tard, il embrassa l'état monastique et donna l'exemple d'une grande ferveur. Il vivait encore lorsque Grégoire de Tours écrivait sa chronique. Beaucoup d'autres Barbares écoutèrent les conseils du saint, et ceux-là rentrèrent sains et saufs dans leur pays ; ceux au contraire qui les méprisèrent périrent misérablement en terre étrangère.
Parmi les nombreux miracles imputés à saint Hospice, on rapporte la guérison d'un homme originaire d'Angers, qui était sourd et muet, et qu'un diacre conduisait à Rome pour que les saints Apôtres lui rendissent l'usage de ses sens. Comme il passait près du lieu où vivait le solitaire, celui-ci le fit appeler. Il lui versa de l'huile bénite dans la bouche et sur la tête, en disant :
" Au Nom de mon Seigneur Jésus-Christ, que tes oreilles s'ouvrent et que ta bouche se desserre, par cette vertu qui autrefois chassa d'un homme sourd et muet un démon malfaisant."
En même temps, il lui demanda son nom. L'infirme répondit à haute voix et se nomma. A ce spectacle, le diacre qui le conduisait éclata en cris d'admiration :
" Je te rends des grâces infinies, Ô Jésus-Christ, qui daignes opérer de tels prodiges par ton serviteur ; j'allais chercher Pierre, j'allais chercher Paul, ou d'autres qui de leur sang illustrèrent Rome, mais ici je les vois tous, ici je les ai tous trouvés !
- Tais-toi, tais-toi, très cher frère, reprit le saint qui redoutait les blessures de la vaine gloire. Ce n'est pas moi qui fais cela, mais Celui qui de rien a créé le monde ; qui, se faisant homme pour nous, fit voir les aveugles, entendre les sourds, parler les muets ; qui rendit aux lépreux leur première peau, aux morts la vie, et qui accorde à tous les malades une foule de soulagements."
Notre saint guérit de même un aveugle de naissance et délivra un grand nombre de possédés. Lorsqu'il sentit approcher le jour de sa mort, il fit venir l'économe du monastère et lui dit :
" Faites faire une ouverture avec la pioche, dans le mur de cette tour, et envoyez des messages à l'évêque de Nice, afin qu'il vienne m'ensevelir : car, dans trois jours, je quitterai ce monde pour aller jouir du repos que le Seigneur m'a promis."
Tandis qu'on s'acquittait en diligence de la commission, un nommé Crescent vint à la fenêtre, et voyant le solitaire ainsi chargé de chaînes et plein de vermine, il lui dit :
" Ô mon maître, comment peux-tu supporter de si durs tourments avec tant de courage ?
- Celui pour le nom duquel je supporte cela, répondit le saint, m'en donne la force. Mais je te le dis je suis déjà délivré de ces chaînes, et je vais à mon repos."
Le troisième jour qu'il avait annoncé comme devant être celui de son trépas étant arrivé, il ôta les chaînes qu'il portait et se prosterna en oraison. Après avoir prié fort longtemps, en répandant d'abondantes larmes, il s'étendit sur un banc, leva ses mains vers le ciel en rendant grâces à Dieu et rendit l'esprit. Aussitôt tous les vers qui rongeaient ses saints membres disparurent.
Cependant l'évêque de Nice, Austadius, étant arrivé sur ces entrefaites, fit ensevelir le corps du bienheureux avec le plus grand soin. Son tombeau devint aussitôt un lieu de pèlerinage extrêmement fréquenté. On disait que la poussière même que l'on en emportait avait le pouvoir de faire des miracles.
Le même saint Grégoire de Tours rapporte, dans un autre ouvrage (De gloria confes., ch. 97.), qu'un chrétien, qui portait sur lui un peu de cette poussière, était monté un jour sur un vaisseau appartenant à des Juifs qui faisaient voile vers Marseille. Mais son désir à lui était de descendre au monastère des îles de Lérins. Lorsqu'on arriva à hauteur de celles-ci, le navire s'arrêta de lui-même et il fut impossible de le faire avancer. L'homme alors avoua aux Juifs son dessein, et leur fit connaître la puissante protection qu'il avait sur lui : les Juifs, comprenant qu'il était inutile de lutter, le déposèrent à terre et continuèrent leur route sans encombre.
La cathédrale de Nice ne possède comme reliques de saint Hospice qu'un os de sa main. Il en existe d'autres dans plusieurs églises du diocèse, notamment à Villefranche, à La Turbie, et dans le sanctuaire de la presqu'île San-Sospis. Celui-ci continue à être un lieu de pèlerinage très fréquenté des populations de la région. La fête figure au propre de Nice.
00:05 Publié dans H | Lien permanent | Commentaires (0)
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