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4 novembre 2007. XXIIIe dimanche après la Pentecôte.

- XXIIIe dimanche après la Pentecôte.

Extraits de l'Année liturgique de dom Prosper Guéranger.


Résurrection de la fille de Jaïre. Véronèse. XVIIe.

A LA MESSE

L'Antiphonaire se termine aujourd'hui ; l'Introït, le Graduel, l'Offertoire et la Communion ci-après, devront être repris en chacun des Dimanches qui peuvent se succéder encore plus ou moins nombreux, suivant les années, jusqu'à l'Avent. On se rappelle qu'au temps de saint Grégoire, l'Avent étant plus long que de nos jours (Avent, Historique.), ses semaines avançaient dans la partie du Cycle occupée maintenant par les derniers Dimanches après la Pentecôte. C'est une des raisons qui expliquent la pénurie de composition des Messes dominicales après la vingt-troisième.

En celle-ci même autrefois, l'Eglise, sans perdre de vue le dénouement final de l'histoire du monde, tournait déjà sa pensée vers l'approche du temps consacré à préparer pour ses enfants la grande fête de Noël. On lisait pour Epître le passage suivant de Jérémie, qui servit plus tard, en divers lieux, à la Messe du premier Dimanche de l'Avent :
" Voici que le jour arrive, dit le Seigneur, et je susciterai à David une race juste. Un roi régnera, qui sera sage et qui accomplira la justice et le jugement sur la terre. En ces jours-là Juda sera sauvé, et Israël habitera dans la paix ; et voici le nom qu'ils donneront à ce roi : Le Seigneur notre juste ! C'est pourquoi le temps " vient, dit le Seigneur, où l'on ne dira plus :
" Vive le Seigneur qui a tiré les enfants d'Israël de la terre d'Egypte ! mais : Vive le Seigneur qui a tiré et ramené la postérité de la maison d'Israël de la terre d'aquilon et de tous les pays » dans lesquels je les avais dispersés et chassés ! Et ils habiteront dans leur terre
(Jerem. XXIII, 5-8.)."


Le saint prophète Jérémie (détail). Rembrandt. XVIIe.

Comme on le voit, ce passage s'applique également très bien à la conversion des Juifs et à la restauration d'Israël annoncée pour les derniers temps. C'est le point de vue auquel se sont placés les plus illustres liturgistes du moyen âge, pour expliquer toute la Messe du vingt-troisième Dimanche après la Pentecôte. Mais pour bien les comprendre, il faut observer aussi que, primitivement, l'Evangile du vingt-troisième Dimanche était l'Evangile de la multiplication des cinq pains. Cédons la parole au pieux et profond Abbé Rupert qui, mieux que personne, nous apprendra le mystère de ce jour où prennent fin les accents, si variés jusqu'ici, des mélodies grégoriennes.

" La sainte Eglise, dit-il, met tant de zèle à s'acquitter des supplications, des prières et des actions de grâces pour tous les hommes demandées par l'Apôtre (I Tim. II, 1.), qu'on la voit rendre grâces aussi pour le salut à venir des fils d'Israël, qu'elle sait devoir être un jour unis à son corps. Comme, en effet, à la fin du monde leurs restes seront sauvés (Rom. IX, 27.), dans ce dernier Office de l'année elle se félicite en eux comme en ses futurs membres.
Dans l'Introït, elle chante tous les ans, rappelant ainsi sans fin les prophéties qui les concernent : Le Seigneur dit : Mes pensées sont des pensées de paix et non d'affliction. Ses pensées sont toutes de paix en effet, puisqu'il promet d'admettre au banquet de sa grâce les Juifs ses frères selon la chair, réalisant ce qui avait été figuré dans l'histoire du patriarche Joseph. Les frères de ce dernier, qui l'avaient vendu, vinrent à lui poussés par la faim, lorsqu'il étendait sa domination sur toute la terre d'Egypte ; ils furent reconnus, reçus par lui, et lui-même fit avec eux un grand festin : ainsi notre Seigneur, régnant sur tout le monde et nourrissant abondamment du pain de vie les Egyptiens, c'est-à-dire les Gentils, verra revenir à lui les restes des fils d'Israël ; reçus en la grâce de celui qu'ils ont renié et mis à mort, il leur donnera place à sa table, et le vrai Joseph s'abreuvera délicieusement avec ses frères.


Le bienfait de cette table divine est signifié, dans l'Office du Dimanche, par l'Evangile, où l'on raconte du Seigneur qu'il nourrit avec cinq pains la multitude. Alors, en effet, Jésus ouvrira pour les Juifs les cinq livres de Moïse, portés maintenant comme des pains entiers et non rompus encore, par un enfant, à savoir ce même peuple resté jusqu'ici dans l'étroitesse d'esprit de l'enfance.

Alors sera accompli l'oracle de Jérémie, si bien placé avant cet Evangile; on ne dira plus : Vive le Seigneur qui a tiré les enfants d'Israël de la terre d'Egypte ! mais : Vive le Seigneur qui les a ramenés de la terre d'aquilon et de toutes celles où ils étaient dispersés !



Le saint prophète Jérémie. Plaque de reliquaire. XIIe.

Délivrés donc de la captivité spirituelle qui les retient maintenant, ils chanteront du fond de l'âme l'action de grâces indiquée au Graduel : Vous nous avez délivrés, Seigneur, de ceux qui nous persécutaient.

La supplication par laquelle nous disons, dans l'Offertoire : Du fond de l'abîmej'aicrié vers vous, Seigneur, répond manifestement, elle aussi, aux mêmes circonstances. Car en ce jour-là, ses frères diront au grand et véritable Joseph : " Nous vous conjurons d'oublier le crime de vos frères "
[/b] (Gen L, 17.).

La Communion : En vérité, je vous le dis, tout ce que vous demanderez dans vos prières, et le reste, est la réponse de ce même Joseph disant, comme autrefois le premier (Ibid. 19-21.) : " Ne craignez point. Vous aviez formé contre moi un dessein mauvais ; mais Dieu l'a fait tourner au bien, afin de m'élever comme vous voyez maintenant " et de sauver beaucoup de peuples. Ne craignez donc point : je vous nourrirai, vous et vos a enfants "." (Rup. De div. Off. XII, 23).

EPITRE


Saint Paul écrivant. Valentin de Bourgogne. XVIIe.

Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Philippiens. Chap. III.

" Mes Frères, soyez mes imitateurs, et observez ceux qui se conduisent suivant le modèle que vous avez en nous. Car il y en a plusieurs dont je vous ai parlé souvent, dont je vous parle encore avec larmes, qui sont les ennemis de la croix du Christ. Ils ont pour fin la mort, pour dieu leur ventre ; ils placent la gloire pour eux dans leur honte, n'ayant de goût que pour les choses de la terre. Mais pour nous, déjà nous vivons dans les cieux ; c'est de là aussi que nous attendons pour Sauveur notre Seigneur Jésus-Christ, qui reformera le corps de notre bassesse et le rendra conforme à son corps glorieux, par la puissance qui lui permet de s'assujettir aussi toutes choses. C'est pourquoi, mes frères très chers et très désirés, ma joie et ma couronne, demeurez ainsi fermes dans le Seigneur, Ô mes bien-aimés. Je prie Evodia et je conjure Syntychès de s'unir et d'avoir les mêmes sentiments dans le Seigneur.
Je vous prie aussi, vous mon fidèle compagnon, d'aider celles qui ont travaillé avec moi pour l'Evangile, ainsi que Clément et les autres qui ont été mes aides, dont les noms sont au livre de vie."


Le nom de Clément, qui vient d'être prononcé par l'Apôtre, est celui du second successeur de saint Pierre. Assez souvent, le vingt-troisième Dimanche après la Pentecôte ne précède que de fort peu la solennité de ce grand pontife et martyr du premier siècle. Disciple de Paul, attaché depuis à la personne de Pierre, et désigné par le vicaire de l'Homme-Dieu comme le plus digne de monter après lui sur la chaire apostolique, Clément, nous le verrons au 23 novembre, était l'un des saints de cette époque primitive les plus vénérés des fidèles. La mention faite de lui à l'Office du Temps, dans les jours qui précédaient son apparition directe au cycle de la sainte Eglise, excitait la joie du peuple chrétien et ranimait sa ferveur, à la pensée de l'approche d'un de ses plus illustres protecteurs et amis.

Au moment où saint Paul écrivait aux Philippiens, Clément, qui devait longtemps encore survivre aux Apôtres, était bien des hommes dont parle notre Epître, imitateurs de ces illustres modèles, appelés à perpétuer dans le troupeau confié à leurs soins (I Petr. V, 3.) la règle des mœurs, moins encore par la fidélité de l'enseignement que par la force de l'exemple. L'unique Epouse du Verbe divin se reconnaît à l'incommunicable privilège d'avoir en elle, par la sainteté, la vérité toujours vivante et non point seulement lettre morte. L'Esprit-Saint n'a point empoché les livres sacrés des Ecritures de passer aux mains des sectes séparées ; mais il a réservé à l'Eglise le trésor de la tradition qui seule transmet pleinement, d'une génération à l'autre, le Verbe lumière et vie (Johan. I, 4.), par la vérité et la sainteté de l'Homme-Dieu toujours présentes en ses membres, toujours tangibles et visibles en l'Eglise (I Johan. I, 1.).

La sainteté inhérente à l'Eglise est la tradition à sa plus haute expression, parce qu'elle est la vérité non seulement proférée, mais agissante (I Thess. II, 13.), comme elle l'était en Jésus-Christ, comme elle l'est en Dieu (Johan. V, 17.). C'est là le dépôt (I Tim. VI, 20.) que les disciples des Apôtres recevaient la mission de transmettre à leurs successeurs, comme les Apôtres eux-mêmes l'avaient reçu du Verbe descendu en terre.

Aussi saint Paul ne se bornait point à confier l'enseignement dogmatique à son disciple Timothée (II Tim. III, 2.) ; il lui disait : " Sois l'exemple des fidèles dans la parole et la conduite " (I Tim. IV, 12.). Il redisait à Tite : " Montre-toi un modèle, en fait de doctrine et d'intégrité de vie " (Tit. II, 7.). Il répétait à tous : " Soyez mes imitateurs, comme je le suis de Jésus-Christ " (I Cor. II, 16.).

Il envoyait aux Corinthiens Timothée, pour leur rappeler, pour leur apprendre au besoin, non les dogmes seulement de son Evangile, mais ses voies en Jésus-Christ, sa manière de vivre ; car cette manière de vivre de l'Apôtre était, pour une part, son enseignement même en toutes les Eglises (Ibid. 17.) ; et il louait les fidèles de Corinthe de ce qu'en effet ils se souvenaient de lui pour l'imiter en toutes choses, gardant ainsi la tradition de Jésus-Christ (I Cor. XI, 1-2.).

Les Thessaloniciens étaient si bien entrés dans cet enseignement tiré de la vie de leur Apôtre, que, devenus ses imitateurs, et par là même ceux de Jésus-Christ, ils étaient, dit saint Paul, la forme de tous les croyants ; cet enseignement muet de la révélation chrétienne, qu'ils donnaient en leurs mœurs, rendait comme inutile la parole même des messagers de l'Evangile (I Thess. I, 5-8.).

L'Eglise est un temple admirable qui s'élève à la gloire du Très-Haut par le concours des pierres vivantes appelées à entrer dans ses murs (Eph. II,20-22.). La construction de ces murailles sacrées sur le plan arrêté par l'Homme-Dieu est l'œuvre de tous. Ce que l'un fait par la parole (I Cor. XIV, 3.), l'autre le fait par l'exemple (Rom. XIV, 19.) ; mais tous deux construisent, tous deux édifient la cité sainte ; et, comme au temps des Apôtres, l'édification par l'exemple l'emporte sur l'autre en efficacité, quand la parole n'est pas soutenue de l'autorité d'une vie conforme à l'Evangile.

Mais de même que l'édification de ceux qui l'entourent est, pour le chrétien, une obligation fondée à la fois sur la charité envers le prochain et sur le zèle de la maison de Dieu, il doit, sous peine de présomption, chercher dans autrui cette même édification pour lui-même. La lecture des bons livres, l'étude de la vie des saints, l'observation, selon l'expression de notre Epître, l'observation respectueuse des bons chrétiens qui vivent à ses côtés, lui seront d'un immense secours pour l'œuvre de sa sanctification personnelle et l'accomplissement des vues de Dieu en lui.

Cette fréquentation de pensées avec les élus de la terre et du ciel nous éloignera des mauvais, qui repoussent la croix de Jésus-Christ et ne rêvent que les honteuses satisfactions des sens. Elle placera véritablement notre conversation dans les cieux. Attendant pour un jour qui n'est plus éloigné l'avènement du Seigneur, nous demeurerons fermes en lui, malgré la défection de tant de malheureux entraînés par le courant qui emporte le monde à sa perte.
L'angoisse et les souffrances des derniers temps ne feront qu'accroître en nous la sainte espérance ; car elles exciteront toujours plus notre désir du moment solennel où le Seigneur apparaîtra pour achever l'œuvre du salut des siens, en revêtant notre chair même de l'éclat de son divin corps. Soyons unis, comme le demande l'Apôtre, et, pour le reste : " Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ", écrit-il à ses chers Philippiens ; " je le dis de nouveau, réjouissez-vous : le Seigneur est proche " (Philip, IV, 4-5.).

ÉVANGILE


Résurrection de la fille de Jaïre. Gustave Doré. XIXe.

La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap. IX.

" En ce temps-là, comme Jésus parlait au peuple, voici qu'un prince de la synagogue s'approcha, et l'adorant, il lui disait :
" Seigneur, ma fille vient de mourir ; mais venez, imposez votre main sur elle, et elle vivra."
Et Jésus, se levant, le suivait avec ses disciples. Or voici qu'une femme qui souffrait d'un flux de sang depuis douze années s'approcha par derrière, et toucha la frange de son vêtement. Car elle disait en elle-même : " Si je touche seulement son vêtement, je serai sauvée ".
Jésus se retournant alors, et la voyant, lui dit :
" Aie confiance, ma fille ; ta foi t'a sauvée."
Et de cette heure même, la femme fut guérie. Jésus venant ensuite à la maison du prince, et voyant les joueurs de flûte et une foule qui faisait grand bruit, leur dit :
" Retirez-vous, car la jeune fille n'est pas morte, elle n'est qu'endormie."
Et ils se moquaient de lui. Mais lorsqu'on eut mis tout ce monde à la porte, il entra, prit la main de la jeune fille, et elle se leva. Et le bruit s'en répandit dans tout le pays."


Quoique le choix de cet Evangile pour aujourd'hui ne remonte pas partout à la plus haute antiquité, il entre bien dans l'économie générale de la sainte Liturgie, et confirme ce que nous avons dit du caractère de cette partie de l'année. Saint Jérôme nous apprend, dans l'Homélie du jour, que l'hémorroïsse guérie par le Sauveur figure la gentilité, tandis que la nation juive est représentée par la fille du prince de la synagogue (Matth. IX.). Celle-ci ne devait retrouver la vie qu'après le rétablissement de la première ; et tel est précisément le mystère que nous célébrons en ces jours, où, la plénitude des nations avant reconnu le médecin céleste, l'aveuglement dont Israël avait été frappé cesse enfin lui-même (Rom. XI, 25.).

De cette hauteur où nous sommes parvenus, de ce point où le monde, ayant achevé ses destinées, ne va sembler sombrer un instant que pour se dégager des impies et s'épanouir de nouveau, transformé dans la lumière et l'amour : combien mystérieuses et à la fois fortes et suaves nous apparaissent les voies de l'éternelle Sagesse (Sap. VIII, 1.) !

Le péché, dès le début, avait rompu l'harmonie du monde, en jetant l'homme hors de sa voie. Si, entre toutes, une famille avait attiré sur elle la miséricorde, la lumière, en se levant sur cette privilégiée, n'avait fait que manifester plus profonde la nuit où végétait le genre humain. Les nations, abandonnées à leur misère épuisante, voyaient les attentions divines aller à Israël, et l'oubli s'appesantir sur elles au contraire. Lors même que les temps où la faute première devait être réparée se trouvèrent accomplis, il sembla que la réprobation des gentils dût être consommée du même coup ; car on vit le salut, venu du ciel en la personne de l'Homme-Dieu, se diriger exclusivement vers les Juifs et les brebis perdues de la maison d'Israël (Matth. XV, 24.).


Résurrection de la fille de Jaïre. Gravure de Schnorr. XIXe.

Cependant la race gratuitement fortunée, dont les pères et les premiers princes avaient si ardemment sollicité l'arrivée du Messie, ne se trouvait plus à la hauteur où l'avaient placée les patriarches et les saints prophètes. Sa religion si belle, fondée sur le désir et l'espérance, n'était plus qu'une attente stérile qui la tenait dans l'impuissance de faire un pas au-devant du Sauveur ; sa loi incomprise , après l'avoir immobilisée , achevait de l'étouffer dans les liens d'un formalisme sectaire. Or, pendant qu'en dépit de ce coupable engourdissement, elle comptait, dans son orgueil jaloux, garder l'apanage exclusif des faveurs d'en haut, la gentilité que son mal, toujours grandissant lui aussi, portait au-devant d'un libérateur, la gentilité reconnaissait en Jésus le Sauveur du monde, et sa confiante initiative lui méritait d'être guérie la première. Le dédain apparent du Seigneur n'avait servi qu'à l'affermir dans l'humilité, dont la puissance pénètre les cieux (Eccli. XXXV, 21.).

Israël devait donc attendre à son tour. Selon qu'il le chantait dans le psaume, l'Ethiopie l’avait prévenu en tendant ses mains vers Dieu la première (Psalm. LXVII, 32.). Désormais ce fut à lui de retrouver, dans les souffrances d'un long abandon, l'humilité qui avait valu à ses pères les promesses divines et pouvait seule lui en mériter l'accomplissement. Mais aujourd'hui la parole de salut a retenti dans toutes les nations, sauvant tous ceux qui devaient l'être. Jésus, retardé sur sa route, arrive enfin à la maison vers laquelle se dirigeaient ses pas dès l'abord, à cette maison de Juda où dure toujours l'assoupissement de la fille de Sion.

Sa toute-puissance compatissante écarte de la pauvre abandonnée la foule confuse des faux docteurs, et ces prophètes de mensonge qui l'avaient endormie aux accents de leurs paroles vaines ; il chasse loin d'elle pour jamais ces insulteurs du Christ, qui prétendaient la garder dans la mort. Prenant la main de la malade, il la rend à la vie dans tout l'éclat de sa première jeunesse; prouvant bien que sa mort apparente n'était qu'un sommeil, et que l'accumulation des siècles ne pouvait prévaloir contre la parole donnée par Dieu à Abraham son serviteur (Luc. 1, 54-55.).

Au monde maintenant de se tenir prêt pour la transformation dernière. Car la nouvelle du rétablissement de la fille de Sion met le dernier sceau à l'accomplissement des prophéties. Il ne reste plus aux tombeaux qu'à rendre leurs morts (Dan. XII, 1-2.). La vallée de Josaphat se prépare pour le grand rassemblement des nations (Joël, III, 1.) ; le mont des Oliviers va de nouveau (Act. I, 11.) porter l'Homme-Dieu, mais cette fois comme Seigneur et comme juge (Zach. XIV, 4.).

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dimanche, 04 novembre 2007 | Lien permanent

8 janvier. IIIe jour de l'Octave de l'Epiphanie.

- IIIe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.


Bartolo di Fredi. XIVe.

Le grand Mystère de l'Alliance du Fils de Dieu avec son Eglise universelle, représentée dans l'Epiphanie par les trois Mages, fut pressenti dans tous les siècles qui précédèrent la venue de l'Emmanuel. La voix des Patriarches et des Prophètes le fit retentir par avance ; et la Gentilité elle-même y répondit souvent par un écho fidèle.

Dès le jardin des délices, Adam innocent s'écriait, à l'aspect de la Mère des vivants sortie de son côté :
" C'est ici l'os de mes os, la chair de ma chair ; l'homme quittera son père et sa mère, et s'attachera à son épouse ; et ils seront deux dans une même chair."
La lumière de l'Esprit-Saint pénétrait alors l'âme de notre premier père; et, selon les plus profonds interprètes des mystères de l'Ecriture, Tertullien, saint Augustin, saint Jérôme, il célébrait l'Alliance du Fils de Dieu avec l'Eglise, sortie par l'eau et le sang de son côté ouvert sur la croix ; avec l'Eglise, pour l'amour de laquelle il descendit de la droite de son Père, et s'anéantissant jusqu'à la forme de serviteur, semblait avoir quitté la Jérusalem céleste, pour habiter parmi nous dans ce séjour terrestre.

Le second père du genre humain, Noé, après avoir vu l'arc de la miséricorde annonçant au ciel le retour des faveurs de Jéhovah, prophétisa sur ses trois fils l'avenir du monde. Cham avait mérité la disgrâce de son père ; Sem parut un moment le préféré : il était destiné à l'honneur de voir sortir de sa race le Sauveur de la terre ; cependant, le Patriarche, lisant dans l'avenir, s'écria :
" Dieu dilatera l'héritage de Japhet ; et il habitera sous les tentes de Sem !"
Et nous voyons peu à peu dans le cours des siècles l'ancienne alliance avec le peuple d'Israël s'affaiblir, puis se rompre; les races sémitiques chanceler, et bientôt tomber dans l'infidélité ; enfin le Seigneur embrasser toujours plus étroitement la famille de Japhet, la gentilité occidentale, si longtemps délaissée, placer à jamais dans son sein le Siège de la religion, l'établir à la tête de l'espèce humaine tout entière.

Plus tard, c'est Jéhovah lui-même qui s'adresse à Abraham, et lui prédit l'innombrable génération qui doit sortir de lui.
" Regarde le ciel, lui dit-il ; compte les étoiles, si tu peux : tel sera le nombre de tes enfants."
En effet, comme nous l'enseigne l'Apôtre, plus nombreuse devait être la famille issue de la foi du Père des croyants, que celle dont il était la source par Sara ; et tous ceux qui ont reçu la foi du Médiateur, tous ceux qui, avertis par l'Etoile, sont venus à lui comme à leur Seigneur, tous ceux-là sont les enfants d'Abraham.


Bernardino da Parenzo. XVe.

Le Mystère reparaît de nouveau dans le sein même de l'épouse d'Isaac. Elle sent avec effroi deux fils se combattre dans ses entrailles. Rébecca s'adresse au Seigneur, et il lui est répondu :
" Deux peuples sont dans ton sein ; ils s'attaqueront l'un l'autre ; le second surmontera le premier, et l'aîné servira le plus jeune."
Or, ce plus jeune, cet enfant indompté, quel est-il, selon l'enseignement de saint Léon et de l'Evêque d'Hippone, sinon ce peuple gentil qui lutte avec Juda pour avoir la lumière, et qui, simple fils de la promesse, finit par l'emporter sur le fils selon la chair ?

C'est maintenant Jacob, sur sa couche funèbre, ayant autour de lui ses douze fils, pères des douze tribus d'Israël, assignant d'une manière prophétique le rôle à chacun dans l'avenir. Le préféré est Juda ; car il sera le roi de ses frères, et de son sang glorieux sortira le Messie. Mais l'oracle finit par être aussi effrayant pour Israël, qu'il est consolant pour le genre humain tout entier.
" Juda, tu garderas le sceptre ; ta race sera une race de rois, mais seulement jusqu'au jour où viendra Celui qui doit être envoyé, Celui qui sera l'attente des Nations."

Après la sortie d'Egypte, quand le peuple d'Israël entra en possession de la terre promise, Balaam s'écriait, la face tournée vers le désert tout couvert des tentes et des pavillons de Jacob :
" Je le verrai, mais non encore ; je le contemplerai, mais plus tard. Une Etoile sortira de Jacob ; une royauté s'élèvera au milieu d'Israël." Interrogé encore par le roi infidèle, Balaam ajouta :
" Oh ! qui vivra encore quand Dieu fera ces choses ? Ils viendront d'Italie sur des galères ; ils soumettront les Assyriens ; ils dévasteront les Hébreux, et enfin ils périront eux-mêmes."
Mais quel empire remplacera cet empire de fer et de carnage ? Celui du Christ qui est l’Etoile, et qui seul est Roi à jamais.

David est inondé des pressentiments de ce grand jour. A chaque page, il célèbre la royauté de son fils selon la chair ; il nous le montre armé du sceptre, ceint de l'épée, sacré par le Père des siècles, étendant sa domination d'une mer à l'autre ; puis il amène à ses pieds les Rois de Tharsis et des îles lointaines, les Rois d'Arabie et de Saba, les Princes d'Ethiopie. Il célèbre leurs offrandes d'or et leurs adorations.

Dans son merveilleux épithalame, Salomon vient ensuite décrire les délices de l'union céleste de l'Epoux divin avec l'Eglise ; et cette Epouse fortunée n'est point la Synagogue. Le Christ l'appelle avec tendresse pour la couronner; mais sa voix s'adresse à celle qui habitait au delà des confins delà terre du peuple de Dieu.
" Viens, dit-il, ma fiancée, viens du Liban ; descends des sommets d'Amana, des hauteurs de Sanir et d'Hermon ; sors des retraites impures des dragons, quitte les montagnes qu'habitent les léopards."
Et cette fille de Pharaon ne se trouble pas de dire : " Je suis noire !" ; car elle peut ajouter qu'elle a été rendue belle par la grâce de son Epoux.

Le Prophète Osée se lève ensuite, et il dit au nom du Seigneur :
" J'ai choisi un homme, et il ne m'appellera plus Baal désormais. J'ôterai de sa bouche ce nom de Baal, et il ne s'en souviendra plus. Je m'unirai à toi pour jamais, homme nouveau ! Je sèmerai ta race par toute la terre ; j'aurai pitié de celui qui n'avait point connu la miséricorde ; à celui qui n'était pas mon peuple, je dirai : mon peuple ! Et il me répondra : mon Dieu !"


Anonyme italien. XVe.

A son tour, le vieux Tobie, du sein de la captivité, prophétisa avec magnificence ; mais la Jérusalem qui doit recevoir les Juifs délivrés par Cyrus, disparaît à ses yeux, à l'aspect d'une autre Jérusalem plus brillante et plus belle.
" Nos frères qui sont dispersés, dit-il, reviendront dans la terre d'Israël ; la maison de Dieu se rebâtira. Tous ceux qui craignent Dieu viendront s'y retirer ; les Gentils même laisseront leurs idoles, et viendront en Jérusalem, et ils y habiteront, et tous les rois de la terre y fixeront leur séjour avec joie, accourus pour adorer le Roi d'Israël."

Et si les nations doivent être broyées, dans la justice de Dieu, pour leurs crimes, c'est pour arriver ensuite au bonheur d'une alliance éternelle avec Jéhovah. Car voici ce qu'il dit lui-même, par son Prophète Sophonie :
" Ma justice est de rassembler les nations, de réunir en faisceau les royaumes, et je répandrai sur elles mon indignation, et tout le feu de ma colère; la terre entière en sera dévorée. Mais ensuite je donnerai aux peuples une langue choisie, afin qu'ils invoquent tous le Nom du Seigneur, et qu'ils portent tous ensemble mon joug. Jusqu'au delà des fleuves de l'Ethiopie, ils m'invoqueront ; les fils de mes races dispersées viendront m'apporter des présents."

Le Seigneur avait déjà dénoncé ses oracles de miséricorde par la bouche d'Ezéchiel :
" Un seul Roi commandera à tous, dit Jéhovah ; il n'y aura plus deux nations, ni deux royaumes. Ils ne se souilleront plus avec leurs idoles ; dans les lieux mêmes où ils ont péché, je les sauverai ; ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu. Il n'y aura qu'un Pasteur pour eux tous. Je ferai avec eux une alliance de paix, un pacte éternel ; je les multiplierai, et mon sanctuaire sera au milieu d'eux à jamais."

C'est pourquoi Daniel, après avoir prédit les Empires que devait remplacer l'Empire Romain, ajoute :
" Mais le Dieu du ciel suscitera à son tour un Empire qui jamais ne sera détruit, et dont le sceptre ne passera point à un autre peuple. Cet Empire envahira tous ceux qui l’ont précédé ; et lui, il durera éternellement."

Quant aux ébranlements qui doivent précéder rétablissement du Pasteur unique, et de ce sanctuaire éternel qui doit s'élever au centre de la Gentilité, Aggée les prédit en ces termes :
" Encore un peu de temps, et j'ébranlerai le ciel, la terre et la mer ; je mêlerai toutes les nations ; et alors viendra le Désiré de toutes les nations."


Giotto. XIVe.

Il faudrait citer tous les Prophètes pour donner tous les traits du grand spectacle promis au monde par le Seigneur au jour où, se ressouvenant des peuples, il devait les appeler aux pieds de son Emmanuel. L'Eglise nous a fait entendre Isaïe dans l'Epître de la Fête, et le fils d'Amos a surpassé ses frères.

Si maintenant nous prêtons l'oreille aux voix qui montent vers nous du sein de la Gentilité, nous entendons ce cri d'attente, l'expression de ce désir universel qu'avaient annoncé les Prophètes hébreux. La voix des Sibylles réveilla l'espérance au cœur des peuples ; jusqu'au sein de Rome même, le Cygne de Mantoue consacre ses plus beaux vers à reproduire leurs consolants oracles :
" Le dernier âge, dit-il, l'âge prédit par la Vierge de Cumes est arrivé ; une nouvelle série des temps va s'ouvrir ; une race nouvelle descend a du ciel. A la naissance de cet Enfant, l'âge de fer suspend son cours ; un peuple d'or s'apprête à couvrir la terre. Les traces de nos crimes seront effacées ; et les terreurs qui assiégeaient le monde se dissiperont."

Et comme pour répondre aux vains scrupules de ceux qui craignent de reconnaître, avec saint Augustin et tant d'autres saints Docteurs, la voix des traditions antiques s'énonçant par la bouche des Sibylles : Cicéron, Tacite, Suétone, philosophes et historiens gentils, viennent nous attester que le genre humain, dans leurs temps, attendait un Libérateur ; que ce Libérateur devait sortir, non seulement de l'Orient, mais de la Judée ; que les destinées d'un Empire qui devait renfermer le monde entier étaient sur le point de se déclarer.


Giovanni di Paolo di Grazia. XVe.

PRIERE

" Ils partageaient cette universelle attente de votre arrivée, Ô Emmanuel, ces Mages aux yeux desquels vous fîtes apparaître l'Etoile ; et c'est pour cela qu'ils ne perdirent pas un instant, et se mirent tout aussitôt en route vers le Roi des Juifs dont la naissance leur était annoncée. Tant d'oracles s'accomplissaient en eux ; mais s'ils en recevaient les prémices, nous en possédons le plein effet. L'alliance est conclue, et nos âmes, pour l'amour desquelles vous êtes descendu du ciel, sont à vous ; l'Eglise est sortie de votre flanc divin, avec le sang et l'eau ; et tout ce que vous faites pour cette Epouse prédestinée, vous l'accomplissez en chacun de ses enfants fidèles.

Fils de Japhet, nous avons dépossédé la race de Sem qui nous fermait ses tentes ; le droit d'aînesse dont jouissait Juda nous a été déféré. Notre nombre, de siècle en siècle, tend à égaler le nombre des étoiles. Nous ne sommes plus dans les anxiétés de l'attente ; l'astre s'est levé, et la Royauté qu'il annonçait ne cessera jamais de répandre sur nous ses bienfaits. Les Rois de Tharsis et des îles, les Rois d'Arabie et de Saba, les Princes de l'Ethiopie sont venus, portant des présents ; mais toutes les générations les ont suivis. L'Epouse, établie dans tous ses honneurs, ne se souvient plus des sommets d'Amana, ni des hauteurs de Sanir et d'Hermon, où elle gémissait dans la compagnie des léopards ; elle n'est plus noire, mais elle est belle, sans taches, ni rides, et digne de l'Epoux divin. Elle a oublié Baal pour jamais ; elle parle avec amour la langue que Jéhovah lui a donnée. L'unique Pasteur paît l'unique troupeau ; le dernier Empire poursuit ses destinées jusqu'à l'éternité.

C'est vous, Ô divin Enfant, qui venez nous apporter tous ces biens et recevoir tous ces hommages. Croissez, Roi des rois, sortez bientôt de votre silence. Quand nous aurons goûté les leçons de votre humilité, parlez en maître ; César-Auguste règne depuis assez longtemps ; assez longtemps Rome païenne s'est crue éternelle. Il est temps que le trône de la force cède la place au trône de la charité, que la Rome nouvelle s'élève sur l'ancienne. Les nations frappent à la porte et demandent leur Roi ; hâtez le jour où elles n'auront plus à venir vers vous, mais où votre miséricorde doit les aller chercher par la prédication apostolique. Montrez-leur Celui à qui toute puissance a été donnée au ciel et sur la terre ; montrez-leur la Reine que vous leur avez choisie. De l'humble demeure de Nazareth, du pauvre réduit de Bethléhem, que l'auguste Marie s'élève bientôt, sur les ailes des Anges, jusqu'au trône de miséricorde, du haut duquel elle protégera tous les peuples et toutes les générations.

HYMNE

Le Prince des poètes de la Liturgie latine, Prudence, va chanter le voyage des Mages à Bethléhem :


Jans Geertgen Tot Sint. XVe.

" Au sein de l'Empire persan, de cette contrée où se lève le soleil, des Mages, investigateurs habiles, aperçoivent l'étendard du Roi.

A peine a-t-il brillé aux cieux que les autres sphères pâlissent : l'étoile du matin, malgré sa beauté, n'ose se montrer auprès de lui.

" Quel est, disent les Mages, ce Roi qui commande aux astres, qui émeut les globes célestes, à qui la lumière et l'air obéissent ?

Ce que nous voyons est le signe de Celui qui ne connaît pas de terme, le Dieu sublime, immense, sans limites, dont la durée précède celle du ciel et du chaos.

Il est le Roi des nations, le Roi du peuple judaïque ; il fut promis au Patriarche Abraham et à sa race, dans les siècles.

Ce premier Père des croyants, qui sacrifia son fils unique, connut que sa race serait un jour nombreuse comme les étoiles.

Voici que la fleur de David s'élève sur la tige de Jessé ; la branche fleurit et devient un sceptre qui commande à l'univers."

L'œil fixé au ciel, les Mages suivent en hâte le sillon de lumière que l'étoile leur traçait à l'horizon, pour régler sur la terre la voie qu'ils devaient suivre.

Le signe s'arrêta au-dessus de la tête de l'Enfant qu'ils cherchaient ; il abaissa son flambeau, et leur découvrit cette tête sacrée.

Les Mages le voient ; aussitôt ils ouvrent les trésors de l'Orient, et, prosternés, lui offrent i'encens, la myrrhe et l'or des rois.

Reconnais les illustres symboles de ta puissance et de ta royauté, Enfant, à qui le Père a conféré par avance une triple destinée.

L'or annonce le Roi, l'odeur suave de l'encens de Saba proclame le Dieu, la myrrhe présage le tombeau :

Tombeau par lequel ce Dieu, laissant périr son corps, et le ressuscitant après la sépulture, brisera la mort et ses cachots."

HYMNE

L'Hymnographe sublime de l'Eglise de Syrie, saint Ephrem, continue de chanter les doux mystères de la Naissance du Sauveur :


Quentin Massys. Flandres. XVIe.

" Les laboureurs des campagnes de Bethléhem vinrent à leur tour ; ils vénérèrent Celui qui venait sauver leur vie, et, dans leur allégresse, ils prophétisaient ainsi : " Salut, Ô toi qui es appelé à cultiver nos champs ; toi fertiliseras les guérets de nos cœurs, et tu en ramasseras le froment dans le grenier de la vie."

Les vignerons se présentèrent ensuite ; ils célébrèrent la Vigne sortie du tronc de Jessé, la Vigne qui de son cep sacré a produit la grappe virginale : " Divin vigneron, chantaient-ils, rends-nous notre arôme, en nous versant dans des vases dignes de ton vin nouveau qui régénère toutes choses ; viens rétablir ta vigne ; jusqu'ici elle n'a produit que d'amers raisins ; greffe tes propres rameaux sur ces ceps sauvages."

Les charpentiers vinrent à leur tour au fils de Joseph, à cause de Joseph leur frère : " Nous saluons ton heureuse naissance, Ô Prince des artisans ! C'est toi qui te donnas à Noé le plan de son arche ; tu fus l'architecte de ce tabernacle qui fut fait à la hâte, et qui ne devait durer qu'un temps ; nos travaux célèbrent tes louanges. Sois notre gloire ; daigne faire toi-même le joug que nous voulons porter, doux et léger fardeau."

Les nouveaux mariés saluèrent de concert le nouveau-né ; ils disaient : " Salut, Ô Enfant dont la Mère a été l'épouse du Dieu de sainteté ! Heureuses les noces auxquelles tu assisteras ! Heureux les époux qui, manquant de vin, le n verront tout à coup abonder sur un signe de ta puissance !"

Les petits enfants crièrent à leur tour : " Heureux sommes-nous de t'avoir pour frère, pour compagnon dans nos ébats ! Heureux Ô jour ! Heureux enfants, auxquels il est donné de dire tes louanges, arbre de vie, qui as daigné mettre ta cime en rapport avec notre taille enfantine."

L'oracle était parvenu jusqu'aux oreilles des femmes, qu'une Vierge devait enfanter un jour ; chacune espérait pour elle-même l'honneur d'un tel enfantement : " Les plus nobles, les plus belles se flattaient de devenir ta mère. Ô Très-Haut ! Nous te bénissons d'avoir choisi une mère pauvre."

Les jeunes filles qui lui furent présentées, prophétisaient aussi ; elles disaient : " Que je sois belle, que je sois difforme, que je sois pauvre, je n'en serai pas moins à toi : à toi je m’attacherai. Le lit d'un mortel jamais ne sera pour moi préférable à ta couche "."

SEQUENCE

A la gloire de Marie, nous chanterons cette gracieuse Séquence de nos antiques Eglises du moyen âge :


Rodrigo de Osona, le Vieux. Flandres. XVe.

" Faisons retentir ce Salut, parole heureuse et douce, Salut par lequel devient le sanctuaire du Christ la Vierge qui est à la fois sa mère et sa fille.

A peine entend-elle ce Salut, qu'elle conçoit son divin Fils, la Vierge issue de David, le lis entre les épines.

Salut ! Mère du vrai Salomon,toison de Gédéon,vous dont les Mages honorent l'enfantement par une triple offrande.

Salut ! vous qui avez enfanté le soleil. Salut ! Vous qui, en donnant votre fruit, avez rendu à l'homme tombé la vie et la puissance.

Salut ! Epouse du Verbe souverain, port du navigateur, buisson mystérieux, nuage de parfums, Reine des Anges.

Nous vous en supplions, amendez-nous et nous recommandez à votre Fils, qui daigne nous donner l'éternelle joie !

Amen."

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samedi, 08 janvier 2011 | Lien permanent

9 janvier. IVe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.

- IVe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.


Maître du retable de saint Bartholomée. Flandres. XVe.

L'Etoile annoncée par Balaam s'étant levée sur l'Orient, les trois Mages, dont le cœur était ouvert à l'attente du Messie libérateur, ont senti tout d'abord l'impression d'amour qui les porte vers lui. Ils reçoivent la nouvelle du joyeux avènement du Roi des Juifs d'une manière mystique et silencieuse, à la différence des bergers de Bethléhem, que la voix d'un Ange convia vers la crèche. Mais le langage muet de l'Etoile était expliqué dans leurs cœurs par l'action même du Père céleste, qui leur révélait son Fils. En cela, leur vocation l'emporta en dignité sur celle des bergers qui, selon la disposition divine dans l'ancienne Loi, ne connurent rien que par le ministère des Anges.

Mais, si la grâce céleste s'adressa directement à leurs cœurs, on peut dire aussi qu'elle les trouva fidèles. Les bergers vinrent en hâte à Bethléhem, nous dit saint Luc. Les Mages parlant à Hérode expriment avec non moins de bonheur la simplicité de leur empressement :
" Nous avons vu, disent-ils, son Etoile, et nous sommes venus pour l'adorer."

Abraham, par sa fidélité à suivre l'ordre que Dieu lui donnait de sortir de la Chaldée, terre de ses aïeux, et de se rendre dans une contrée inconnue pour lui, mérita de devenir le Père des Croyants ; les Mages, par leur foi docile et non moins admirable, ont été jugés dignes d'être les ancêtres de l'Eglise des Gentils.

Eux aussi sortaient de la Chaldée, au rapport de saint Justin et de Tertullien ; du moins quelqu'un d'entre eux avait-il cette terre pour patrie. Les mêmes auteurs, dont le témoignage est fortifié par d'autres Pères, donnent l'Arabie pour lieu de naissance à l'un ou l'autre de ces pieux voyageurs. Une tradition populaire, admise depuis quelques siècles dans l'iconographie chrétienne, assigne l'Ethiopie pour patrie au troisième. On ne peut nier du moins que David et les Prophètes n'aient signalé les noirs habitants de l'Afrique parmi ceux qui devaient, de bonne heure, devenir l'objet de la prédilection divine.

Par la qualité des Mages, il faut entendre la profession que faisaient ces trois hommes d'étudier le cours des astres, et l'attention qu'ils avaient de chercher au ciel l'indice du lever prochain de l'Etoile prophétique vers laquelle ils soupiraient ; car ils étaient du nombre de ces Gentils craignant Dieu, comme le centurion Corneille, qui ne s'étaient pas souillés par le contact des idoles, et conservaient, au milieu de tant de ténèbres, les pures traditions d'Abraham et des Patriarches.


Retable des sept Joies. Maître de la Sainte Parenté. Flandres. XVe.

L'Evangile ne dit pas qu'ils aient été rois ; mais l'Eglise ne leur applique pas sans raison les versets où David parle des Rois d'Arabie et de Saba, arrivant aux pieds du Messie avec des offrandes d'or. Cette tradition s'appuie sur le témoignage de saint Hilaire de Poitiers, de saint Jérôme, du poète Juvencus, de saint Léon et de plusieurs autres; et il serait impossible de l'attaquer par des arguments d'une valeur sérieuse. Sans doute, nous ne devons pas nous figurer les Mages comme des potentats dont l'empire pût entrer en comparaison, par l'étendue et l'importance, avec la puissance romaine ; mais nous savons que l'Ecriture attribue fréquemment le nom de roi à de petits princes, à de simples gouverneurs de provinces. Il suffit donc que les Mages aient exercé l'autorité sur les peuples ; et d'ailleurs, les ménagements qu'Hérode se croit obligé de garder envers des étrangers qui viennent, jusque dans sa cour, annoncer la naissance d'un Roi des Juifs, auquel ils se montrent si empressés de rendre hommage, témoignent suffisamment de l'importance de ces personnages, de même que le trouble dans lequel leur arrivée jette la ville de Jérusalem démontre jusqu'à l'évidence que leur présence avait été accompagnée d'un extérieur imposant.

Ces rois dociles quittent donc tout d'un coup leur patrie, leurs richesses, leur repos, pour marcher à la suite de l'Etoile ; la puissance de Dieu qui les avait appelés les réunit dans un même voyage comme dans une même foi. L'astre qui les invitait se met en marche devant eux et leur fraie le chemin ; les périls du voyage, les fatigues d'une route dont ils ignorent le terme, la crainte d'éveiller contre eux les soupçons de l'Empire romain, rien ne les fait reculer.

Leur premier repos est à Jérusalem, parce que l'Etoile s'y arrête. C'est dans cette ville sainte, qui bientôt sera maudite, qu'ils viennent, eux Gentils, annoncer Jésus-Christ, déclarer sa venue. Avec toute l'assurance, tout le calme des Apôtres et des Martyrs, ils professent leur désir ferme d'aller l'adorer. Ils contraignent Israël, dépositaire des oracles divins, à confesser un des principaux caractères du Messie, sa naissance à Bethléhem. Le Sacerdoce Poldève remplit, sans en avoir l'intelligence, son sacré ministère ; Hérode s'agite sur sa couche, et médite déjà des projets de carnage. Mais il est temps pour les Mages de quitter la cité infidèle qui a déjà reçu, par leur présence, l'annonce de sa répudiation. L'Etoile reparaît au ciel, et les sollicite de reprendre leur marche ; encore quelques pas, et ils seront à Bethléhem, aux pieds du Roi qu'ils sont venus chercher.

Nous aussi, Ô Emmanuel ! nous vous suivons, nous marchons à votre lumière ; car vous avez dit dans la Prophétie du Disciple bien-aimé : " Je suis l'étoile étincelante et matinale " (XXII, 16). L'astre qui conduit les Mages n'est que le symbole de cette Etoile immortelle. Vous êtes l’Etoile du matin ; car votre naissance annonce la fin des ténèbres, de l'erreur et du péché. Vous êtes l’Etoile du matin ; car, après avoir subi l'épreuve de la mort et du sépulcre, vous sortirez tout à coup des ombres, à l'aube matinale du jour de votre glorieuse Résurrection.

Vous êtes l’Etoile du matin ; car vous nous annoncez, par votre Naissance et par les mystères qui vont la suivre, le jour sans nuage de l'éternité. Oh ! Que votre lumière soit toujours sur nous ! Que nous soyons toujours dociles à tout quitter, comme les Mages, pour la suivre ! Au sein de quelles ombres ne l'avez-vous pas fait luire, en ce jour où vous nous avez appelés à votre grâce ! Nous aimions les ténèbres, et vous nous avez fait aimer la lumière.

Conservez en nous cet amour de la lumière, Ô Christ ! Que le péché, qui n'est que ténèbres, n'approche pas de nous. Que les perfides lueurs de la fausse conscience ne viennent pas nous séduire. Eloignez de nous l'aveuglement de Jérusalem et de son roi, pour qui l'Etoile ne luit pas ; mais qu'elle nous guide toujours, qu'elle nous conduise à vous, notre Roi, notre paix et notre amour.

Nous vous saluons aussi, Marie, Etoile de la mer, qui luisez sur les vagues de ce monde pour les calmer, et pour protéger ceux qui crient vers vous dans la tempête. Vous fûtes favorable aux Mages à travers le désert ; guidez aussi nos pas, et dirigez-nous jusqu'à Celui qui repose entre vos bras et vous illumine de sa lumière éternelle.


HYMNE

Empruntons à saint Ephrem une partie des chants si mélodieux qu'il a consacrés à la divine Naissance :


Ivoire. Anonyme. Bourgogne. XVe.

" Que tu es doux, Ô Enfant ; mais que la force de tes jugements est entraînante et invincible ! Qu'il est suave, qu'il est doux ton amour ! Qui pourra te résister ?

Ton Père habite les cieux ; ta mère rampe sur la terre ; qui jamais pourra te comprendre ? Si l'homme terrestre cherche ta nature élevée au-dessus de la portée humaine, c'est au vaste sein de la divinité qu'il la trouve, au plus haut des cieux.

S'il veut connaître ta nature sensible, la voici sur la terre ; issue de l'étroite demeure du sein de Marie, elle est visible à tous les yeux. L'intelligence confondue est flottante ; elle se perd à supputer les divers modes de ton être plein de richesses.

Ta divinité, qu'on croirait inaccessible sous des verrous redoublés, n'en est pas moins une mer immense, un océan qu'on ne saurait sonder, depuis même que tu as réduit ta grandeur à la mesure de notre petitesse.

Si nous cherchons à te voir, c'est un homme que nous apercevons, nous qui espérions voir un Dieu ; si en toi nous voulons contempler l'homme, tout aussitôt une éclatante splendeur de divinité vient éblouir nos regards.

Qui te prendrait pour l'héritier du trône de David, toi qui, au lieu du riche ameublement de ce grand roi, n'as qu'une crèche; au lieu de ses vastes palais, qu'une caverne ; qu'un âne en place de ses nombreux coursiers ?

Mais, Ô Enfant ! Que tu es aimable, accessible, et gracieux pour tous ceux qui t'approchent ! Ton amour est vraiment l'amour de Celui qui désire les hommes, comme celui qui a faim désire le pain.

Tu ne fais point de distinction entre tes parents et les étrangers, entre ta mère et de vils esclaves, accueillant l'impure prostituée comme la vierge qui te nourrit de son lait. Quoi donc ? Est-ce l'extrême facilité de ton cœur, qui te porte à cet excès d'indulgence, ou plutôt cette charité qui fait que tu ne hais rien de ce que tu as fait ?

Quel motif te porte à descendre ainsi vers le riche comme vers le pauvre, à courir à eux, même lorsqu'ils ne t'appellent pas ? D'où te vient ce si grand amour de la nature humaine ?

Quelle est cette charité que tu as si grande, que si l'on te blasphème, tu ne t'enflammes pas ; si Fonte menace, tu n éclates pas ; si l'on agit cruellement avec toi, ton front ne s'empreint pas de colère ? C'est que ta charité est au-dessus de cette loi, en vertu de laquelle l'homme poursuivait son ennemi et vengeait son injure."


IV DIE JANUARII

Honorons la Vierge-Mère, en lui présentant ces strophes consacrées à sa gloire par saint Joseph l'Hymnographe, dans les Menées de l'Eglise Grecque :


Bas-relief. Anonyme. Frise. XIVe.

" Honorons le divin palais du Roi, dans lequel il a habité selon son désir ; célébrons la Mère de Dieu, la Vierge, l'unique, par qui nous sommes élevés jusqu'à Dieu.

Pure avant l'enfantement, dans l'enfantement, après l'enfantement : ainsi tu as paru à nos regards, Ô Vierge-Mère ! C'est toi qui as enfanté le Dieu qu'annonce le Collège Apostolique.

Le très heureux chœur des Prophètes, inspiré de l'Esprit-Saint, t'appela divinement, dans ses sacrés oracles, la Porte et la Montagne ombragée, Ô très chaste !

Illumine, Ô Vierge ! Les yeux de mon cœur, brille sur moi par un rayon de componction; délivre-moi des ténèbres éternelles, Porte de la lumière, Refuge de tous les chrétiens qui chantent ta louange avec fidélité.

Je te loue, Ô toi la seule digne de toute louange ; je te rends gloire, Ô toi que Dieu lui-même glorifie; je te proclame heureuse, Ô Vierge, de cette félicité divine que proclament les générations qui célèbrent ta béatitude.

Ô très pure ! Tu es le propitiatoire de ceux qui pèchent souvent; dépassant toutes les lois de la nature, tu as enfanté le Christ, qui ôte les péchés du monde, et vers qui nous prions : " Tu es béni, Seigneur, Dieu de nos pères !"

Ô prodige qui surpasse tous les prodiges ! Tu enfantes et tu demeures vierge, très chaste épouse de Dieu ! Tu a mis au jour le Verbe coéternel au Père, Celui que nous célébrons dans ce cantique : " Œuvres du Seigneur, louez et exaltez le Seigneur dans tous les siècles ".

La splendeur de ton enfantement a éclaté avec gloire ; elle a inondé l'univers d'une joyeuse lumière; elle a terrassé le prince des ténèbres, Ô Mère de Dieu très pure, la gloire des Anges, le salut de tous les hommes qui te célèbrent, sans se lasser, par leurs concerts."

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mercredi, 09 janvier 2008 | Lien permanent

10 janvier. Ve jour dans l'Octave de l'Epiphanie.

- Ve jour dans l'Octave de l'Epiphanie.


Bréviaire à l'usage de Besançon. XVe.

Les Mages sont arrivés à Bethléhem ; l'humble retraite du Roi des Juifs s'est ouverte pour eux. Ils y trouvent, dit saint Luc, l'Enfant et Marie sa Mère. Ils se prosternent, et adorent le divin Roi qu'ils ont tant cherché, et que la terre désire.

En ce moment, l'Eglise chrétienne commence à apparaître. Dans cet humble réduit, le Fils de Dieu fait homme préside comme le Chef de son corps mystique ; Marie assiste comme la coopératrice du salut, et la Mère de grâce ; Juda est représenté par elle et par Joseph son époux ; la Gentilité adore, en la personne des Mages ; car leur foi a tout compris à la vue de cet Enfant. Ce n'est point un Prophète qu'ils honorent, ni un Roi terrestre à qui ils ouvrent leurs trésors ; c'est un Dieu devant qui ils s'abaissent et s'anéantissent.


Heures à l'usage d'Angers. XVe.

" Voyez, dit saint Bernard, dans son deuxième Sermon sur l'Epiphanie, voyez quelle est la pénétration des yeux de la foi ! La foi reconnaît le Fils de Dieu à la mamelle, elle le reconnaît attaché au bois, elle le reconnaît jusque dans la mort. Le larron le reconnaît sur le gibet, les Mages dans l'étable: celui-là, malgré les clous qui l'attachent ; ceux-ci, à travers les langes qui l'enveloppent."

Tout est donc consommé. Bethléhem n'est plus seulement le lieu delà naissance du Rédempteur, elle est encore le berceau de l'Eglise ; et combien le Prophète avait raison de s'écrier :
" Ô Bethléhem ! Tu n'es pas la moindre entre les villes de Juda !"
Comme il nous est aisé de comprendre l'attrait qui porta saint Jérôme à dérober sa vie aux honneurs et aux délices de Rome, aux applaudissements du monde et de l'Eglise, pour venir s'ensevelir dans cette grotte, témoin de tant et de si sublimes merveilles ! Qui ne désirerait aussi vivre et mourir dans cette retraite bénie du ciel, toute sanctifiée encore de la présence de l'Emmanuel, tout embaumée des parfums de la Reine des Anges, toute retentissante de l'écho des concerts célestes, toute remplie du souvenir des Mages, nos pieux ancêtres !


Heures à l'usage de Paris. XVe.

Rien n'étonne ces heureux Princes en entrant dans l'humble séjour. Ni la faiblesse de l'Enfant, ni la pauvreté de la Mère, ni le dénûment de l'habitation, rien ne les émeut. Loin de là, ils comprennent tout d'abord que le Dieu éternel, voulant visiter les hommes, et leur montrer son amour, devait descendre jusqu'à eux, et si bas, qu'il n'y eût aucun degré de la misère humaine qu'il n'eût sondé et connu par lui-même. Instruits par leur propre cœur de la profondeur de cette plaie d'orgueil qui nous ronge, ils ont senti que le remède devait être aussi extrême que le mal ; et dans cet abaissement inouï, ils ont reconnu tout d'abord la pensée et l'action d'un Dieu. Israël attend un Messie glorieux et tout éclatant de gloire mondaine ; les Mages, au contraire, reconnaissent ce Messie à l'humilité, à la pauvreté qui l'entourent ; subjugués par la force de Dieu, ils se prosternent et adorent, dans l'admiration et l'amour.

Qui saurait rendre la douceur des conversations qu'ils eurent avec la très pure Marie ? Car le Roi qu'ils étaient venus chercher ne sortit pas pour eux du silence de son enfance volontaire. Il accepta leurs hommages, il leur sourit avec tendresse, il les bénit ; mais Marie seule pouvait satisfaire, par ses célestes entretiens, la sainte curiosité des trois pèlerins de l'humanité. Comme elle récompensa leur foi et leur amour en leur manifestant le mystère de ce virginal enfantement qui allait sauver le monde, les joies de son cœur maternel, les charmes du divin Enfant ! Eux-mêmes, avec quel tendre respect ils la considéraient et l'écoutaient ! Avec quelles délices la grâce pénétrait dans leurs coeurs, à la parole de celle que Dieu même a choisie pour nous initier maternellement à sa vérité et à son amour !


Heures à l'usage de Rome. XVIe.

L'étoile qui naguère brillait pour eux au ciel avait fait place à une autre Etoile, d'une lumière plus douce, et d'une force plus victorieuse encore ; cet astre si pur préparait leurs regards à contempler sans nuage Celui qui s'appelle lui-même l’Etoile étincelante et matinale. Le monde entier n'était plus rien pour eux ; l'étable de Bethléhem contenait toutes les richesses du ciel et delà terre. Les nombreux siècles de l'attente qu'ils avaient partagée avec le genre humain, leur semblaient à peine un moment : tant était pleine et parfaite la joie d'avoir enfin trouvé le Dieu qui apaise, par sa seule présence, tous les désirs de sa créature.

Ils s'associaient aux desseins miséricordieux de l'Emmanuel ; ils acceptaient avec une humilité profonde l'alliance qu'il contractait par eux avec l'humanité ; ils adoraient la justice redoutable qui bientôt allait rejeter un peuple incrédule ; ils saluaient les destinées de l'Eglise Chrétienne, qui prenait en eux son commencement ; ils priaient pour leur innombrable postérité.


Heures à l'usage de Rome. XVe.

C'est à nous, Gentils régénérés, de nous joindre à ces chrétiens choisis les premiers, et de vous adorer, Ô divin Enfant, après tant de siècles, durant lesquels nous avons vu la marche des nations vers Bethléhem, et l'Etoile les conduisant toujours. C'est à nous de vous adorer avec les Mages ! Mais plus heureux que ces premiers-nés de l'Eglise, nous avons entendu vos paroles, nous avons contemplé vos souffrances et votre croix, nous avons été témoins de votre Résurrection ; et si nous vous saluons comme le Roi de l'univers, l'univers est là devant nous qui répète votre Nom devenu grand et glorieux, du lever du soleil à son couchant. Le Sacrifice qui renouvelle tous vos mystères s'offre aujourd'hui en tous lieux du monde ; la voix de votre Eglise retentit à toute oreille mortelle ; et nous sentons avec bonheur que toute cette lumière luit pour nous, que toutes ces grâces sont notre partage. C'est pourquoi nous vous adorons, ô Christ! nous qui vous goûtons dans l'Eglise, la Bethléhem éternelle, la Maison du Pain de vie.

Instruisez-nous, Ô Marie, comme vous avez instruit les Mages. Révélez-nous de plus en plus le doux Mystère de votre Fils ; soumettez notre cœur tout entier à son empire adorable. Veillez, dans votre attention maternelle, à ce que nous ne perdions pas une seule des leçons qu'il nous donne ; et que ce séjour de Bethléhem, où nous sommes entrés à la suite des pèlerins de l'Orient, opère en nous un complet renouvellement de notre vie tout entière.


HYMNE

Finissons cette journée par nos chants accoutumés en l'honneur du divin Mystère de notre Roi nouveau-né. Nous les ouvrirons par ces strophes d'une Hymne qu'on a attribuée à saint Ambroise :


Heures à l'usage de Rouen. XVe.

" Le Christ a franchi la porte virginale, la porte pleine de grâce ; le Roi a passé, et cette porte demeure fermée à jamais, comme elle le fut toujours.

Le Fils du Dieu suprême est sorti du sanctuaire de la Vierge ; il est l'Epoux, le Rédempteur, le fondateur, le géant de son Eglise.

Gloire et joie de sa Mère, espoir immense des croyants, en épuisant le noir breuvage de la mort, il guérira nos crimes.

Il est cette pierre détachée delà montagne qui couvre de grâce le monde entier ; cette pierre que la main de l'homme n'a pas taillée, qu'avaient annoncée les anciens Prophètes.

Le Verbe fait chair à la parole de l'Ange, naissant vierge, s'est élancé de la retraite sacrée d'un sein virginal.

Les cieux ont versé leur rosée, les nuées ont répandu le Juste ; la terre altérée, enfantant son salut, a reçu Celui qui est son Seigneur.

Ô merveilleuse conception ! Elle a produit le Christ ; et la Vierge dans l'enfantement, est demeurée vierge après l'enfantement.

Que toute âme tressaille de joie ; le Rédempteur des nations, le Seigneur du monde, est venu racheter ceux qu'il a formés.

Le créateur de la race humaine, Celui que l'univers ne saurait contenir, Mère sainte, il s'est renfermé dans vos entrailles.

Celui que le Dieu Père a engendré Dieu avant tous les temps, la virginité d'une mère féconde l'a mis au jour dans le temps.

Il ôtera tous les péchés, il apportera les trésors de la grâce ; par lui la lumière recevra son accroissement, l'empire des ténèbres sera ruiné."


ORATIO

La prière qui suit est tirée du Bréviaire de l’Eglise Gothique d’Espagne :


Homiliae in Testamentum Vetus. Ardennes. XIIe.

" Seigneur Jésus-Christ, qui, au moment où Hérode les interroge, illuminez la réponse des Mages par une confession de votre vérité, en vous manifestant comme le Roi des rois qu'ils annoncent, en déclarant le prodige de cette brillante étoile qui verse sa lumière sur le monde entier; donnez, nous vous en prions, à votre Eglise, la lumière désirée de votre vision : apparaissez en elle comme l'astre cher à tous vos fidèles, afin que, n'étant jamais effrayés des interrogations de l'adversaire, nous annoncions à pleine bouche vos merveilles, et méritions de resplendir dans l'asile de la lumière éternelle.
Amen."


SEQUENCE

Nous empruntons cette Séquence au Missel Parisien du XVIe siècle :


Missel à l'usage d'Aix-en-Provence. XVe.

" A l'enfantement de la Vierge, les cieux racontent la gloire de Dieu.

La lumière céleste descend sur les bergeries, l'étoile se lève pour les Mages, brillante d'un éclat nouveau.

Le Christ naît, et les oracles se taisent ; et les Anges chantent autour de son berceau pour réjouir son enfance.

Les bergers entendent des voix dans les airs : un astre le révèle aux Rois de la Chaldée.

Le ciel daigne parler à tous ; mais la voix est pour les Juifs, la langue pour les Gentils.

Les cieux daignent parler à tous ; mais la nation infidèle au lieu de voix n'obtient qu'un prodige.

C'est le jour fécond en miracles, le jour qui manifeste le Christ, à divers instants de sa vie :

Il manifeste le Christ, quand le Père déclare qu'il a mis en lui ses complaisances ;

Il le manifeste, quand le Christ lui-même commande au vase d'eau de verser le vin au festin nuptial ;

Il le manifeste encore, sous le mystère de la triple offrande des Mages.

L'or déclare sa royauté, l'encens sa divinité, là myrrhe sa sépulture.

Ô Vierge toujours vierge, vous êtes l'étoile merveilleuse qui conduisez au Seigneur :

Glorieuse Dame, douce Vierge des vierges, illuminez nos esprits.

Amen."


HYMNE

L'Eglise Syriaque doit cette Hymne des Mages à son admirable poète, saint Ephrem :


Missel à l'usage d'Autun. XVe.

" Les Princes de Perse, pleins de joie, quittant leur pays, se munirent de présents, et apportèrent au Fils de la Vierge l'or, l'encens et la myrrhe.

Etant entrés, ils trouvèrent l'enfant couché dans un berceau, dans la maison d'une mère pauvre ; prosternés, ils l'adorèrent d'un cœur joyeux et lui offrirent leurs présents.

Marie leur dit : " Pour qui ces présents ? Dans quel but ? Quel motif vous a appelés de votre région, vous a fait venir vers cet enfant avec vos trésors ?"

Ils répondirent : " Votre fils est Roi ; il réunit tous les diadèmes, car il est Roi universel ; son royaume est plus grand que le monde, et tout cède à son empire."

" Comment serait-il possible qu'une femme pauvre eût enfanté un Roi ? Je suis humble et manquant de toutes choses ; comment serais-je la mère d'un Prince ?"

" Vous seule cependant avez l'honneur d'avoir mis au jour le grand Roi ; par vous la pauvreté est glorifiée, et toutes les couronnes sont soumises à votre fils."

" Les trésors des rois ne sont point pour moi ; jamais les richesses n'ont été mon partage. Cette demeure est ce qu'il y a de plus pauvre ; cette retraite est dénuée de tout : pourquoi donc dites-vous que mon fils est un Roi ?"

" Votre fils est lui-même un grand trésor : ses richesses suffisent à enrichir tous les hommes. Les trésors des rois s'épuisent : lui ne saurait ni s'épuiser, ni se mesurer."

" Ce Roi qui vous est né est peut-être un autre que cet enfant : examinez celui-ci ; ce n'est que le fils d'une pauvre mère qui ne saurait même être admise en présence d'un Roi."

" La lumière, quand elle descend du ciel, pourrait-elle donc s'égarer dans sa route ? Les ténèbres ne nous ont ni appelés ni conduits ici ; c'est à la lumière que nous avons marché. Votre Fils est Roi."

" Vous n'avez devant vous qu'un enfant muet, que la maison nue et dépouillée de sa mère ; aucune trace de royauté n'y apparaît : comment pourrait être Roi l'habitant d'un tel séjour ?"

" Oui, nous le voyons dans son silence et dans son repos; il est pauvre, comme vous l'avez dit, mais il est Roi. N'avons-nous pas vu les astres du ciel s'ébranler à son commandement, afin d'annoncer sa naissance ?"

" Il n'y a ici qu'un petit enfant : vous le voyez ; il n'y a ici ni trône ni diadème royal ; qu'apercevez-vous donc qui vous engage à l'honorer de vos trésors comme un Roi ?"

" S'il est un petit enfant, c'est qu'il l'a voulu ; il aime la mansuétude et l'humilité, jusqu'au jour où il se manifestera ; mais il viendra un temps où les diadèmes s'abaisseront devant lui pour l'adorer."

" Mon fils n'a ni armées, ni légions, ni cohortes ; le voilà couché dans la pauvreté de sa mère : comment pouvez-vous l'appeler Roi ?"

" Les armées de votre fils sont en haut ; elles parcourent le ciel, et illuminent tout de leurs feux. Un seul de ses soldats est venu nous appeler, et toute notre contrée en a été dans la stupeur."


SÉQUENCE


Pour offrande à Marie, nous lui présenterons cette gracieuse Séquence des Eglises d'Angleterre, au moyen âge :


Psautier cistercien. XIIIe.

" Fleur de virginité,
Sanctuaire de pureté,
Mère de miséricorde.

Salut ! Vierge sereine,
Source de vie,
Lumière aimable,

Baignée de la rosée
De l'Esprit aux sept dons ;
De vertus ornée,
De mérites toute fleurie.

Rose chérie,
Lis de chasteté,
Mère féconde,

Tu enfantes le Fils de Dieu,
Et tu demeures vierge
Après l'enfantement.

Par une merveille,
Sans le secours de l'homme,
Tu deviens féconde ;

Du grand Roi,
De la vraie lumière
L'enfantement fait ta gloire.

La branche, la fleur,
Le buisson, la rosée,
Prophétisent ta virginité ;

Et aussi la toison
Humide de rosée,
Digne Mère du Seigneur.

Vierge , tu produis un Fils,
Etoile, un Soleil,
A jamais sans égale.

Pour ce prodige,
La Voie de la vie
Nous t'appelons.

Tu es l'espoir et le refuge
Des pauvres âmes tombées,
Le remède des péchés,

Le salut des pénitents.
Tu es la consolation des affligés,
Le soulagement des faibles,

Purifiant les souillures,
Affermissant les cœurs.
Tu es la gloire et le secours

De ceux qui en toi se confient,
La récompense pleine de vie
Pour ceux qui servent sous tes lois

Miséricordieuse Marie,
Avocate des criminels,
A tous les malheureux

Douce et gracieuse espérance ;
Elève et dirige
Les cœurs de tes esclaves

Vers les saintes joies
Du céleste royaume,
Où goûter la vraie joie

Par toi nous pourrons,
Et, avec ton Fils,
Régner à jamais.

Amen."

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jeudi, 10 janvier 2008 | Lien permanent

11 janvier. VIe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.

- VIe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.



Heures à l'usage de Bayeux. XVe.


Les Mages ne se contentèrent pas d'adorer le grand Roi que Marie présentait à leurs hommages. A l'exemple de la Reine de Saba qui vint honorer le Roi pacifique, en la personne du sage et opulent fils de David, les trois Rois de l'Orient ouvrirent leurs trésors et en tirèrent de riches offrandes. L'Emmanuel daigna agréer ces dons mystérieux ; mais, à l'exemple de Salomon son aïeul, il ne laissa point partir les Princes sans les combler lui-même de présents qui dépassaient infiniment en richesse ceux qu'il avait daigné agréer. Les Mages lui présentaient les offrandes de la terre ; et Jésus les comblait des dons célestes. Il confirmait en eux la foi, l'espérance et la charité ; il enrichissait, en leurs personnes, son Eglise tout entière qu'ils représentaient ; et les paroles du divin Cantique de Marie recevaient leur accomplissement sur eux, et aussi sur la Synagogue qui les avait laissés seuls marcher à la recherche du Roi d'Israël :
" Ceux qui avaient faim, il les a remplis de biens ; et ceux qui étaient opulents, il les a renvoyés dans la disette."

Mais considérons ces présents des Mages, et reconnaissons, avec l'Eglise et les Pères, les Mystères qu'ils exprimaient. Ces dons étaient au nombre de trois, afin d'honorer le nombre sacré des Personnes dans l'Essence divine ; mais le nombre inspiré trouvait une nouvelle application dans le triple caractère de l'Emmanuel. Ce Fils de Dieu venait régner sur le monde : il convenait de lui offrir l'Or qui marque la puissance suprême. Il venait exercer le souverain Sacerdoce, et réconcilier, par sa médiation, le ciel et la terre : il convenait de lui présenter l'Encens qui doit fumer dans les mains du Prêtre. Sa mort pouvait seule le mettre en possession du trône préparé à son humanité glorieuse ; cette mort devait inaugurer le Sacrifice éternel de l'Agneau divin : la Myrrhe était là pour attester la mort et la sépulture d'une victime immortelle.


Heures à l'usage de Rouen. XVe.

L'Esprit-Saint qui inspira les Prophètes avait donc dirigé les Mages dans le choix de ces mystérieuses offrandes; et c'est ce que nous dit éloquemment saint Léon, dans un de ses Sermons sur l'Epiphanie :
" Ô admirable foi qui mène à la science parfaite, et qui n'a point été instruite à l'école d'une sagesse terrestre, mais éclairée par l'Esprit-Saint lui-même ! Car où avaient-ils découvert la nature inspirée de ces présents, ces hommes qui sortaient de leur patrie, sans avoir encore vu Jésus, sans avoir puisé dans ses regards la lumière qui dirigea si sûrement le choix de leurs offrandes ! Tandis que l'Etoile frappait les yeux de leur corps, plus pénétrant encore, le rayon de la vérité instruisait leurs cœurs. Avant d'entreprendre les fatigues d'une longue route, ils avaient déjà connu Celui à qui étaient dus, par l'Or, les honneurs de Roi ; par l'Encens, le culte divin ; par la Myrrhe, la foi dans sa mortalité."

Si ces présents représentent merveilleusement les caractères de l'Homme-Dieu, ils ne sont pas moins remplis d'enseignements par les vertus qu'ils signifient, et que le divin Enfant reconnaissait et confirmait dans l'âme des Mages. L'Or signifie pour nous, comme pour eux, la charité qui unit à Dieu ; l'Encens, la prière qui appelle et conserve Dieu dans le cœur de l'homme ; la Myrrhe, le renoncement, la souffrance, la mortification, par lesquels nous sommes arrachés à l'esclavage de la nature corrompue. Trouvez un cœur qui aime Dieu, qui s'élève à lui par la prière, qui comprenne et goûte la vertu de la croix : vous aurez en ce cœur l'offrande la plus digne de Dieu, celle qu'il agréera toujours.


Heures à l'usage de Saintes. XVe.

Nous ouvrons donc aussi notre trésor, Ô Jésus ! et nous mettons à vos pieds nos présents. Après avoir confessé votre triple gloire de Dieu, de Prêtre et d'Homme, nous vous supplions d'agréer le désir que nous avons de répondre par l'amour à l'amour que vous nous témoignez ; nous osons môme vous dire que nous vous aimons, Ô Dieu ! Ô Prêtre ! Ô Homme ! Augmentez cet amour que votre grâce a fait naître. Recevez aussi notre prière, tiède et imparfaite, mais cependant unie à celle de votre Eglise. Enseignez-nous à la rendre digne de vous, et proportionnée aux effets que vous voulez qu'elle produise; formez-la en nous, et qu'elle s'élève sans cesse de notre cœur, comme un nuage de parfums. Recevez enfin l'hommage de nos cœurs contrits et pénitents, la volonté que nous avons d'imposer à nos sens le frein qui les règle, l'expiation qui les purifie.

Illuminés par les hauts mystères qui nous révèlent la profondeur de notre misère et l'immensité de votre amour, nous sentons qu'il nous faut, plus que jamais, nous éloigner du monde et de ses convoitises, et nous attacher à vous. L'Etoile n'aura pas lui en vain sur nous ; elle ne nous aura pas en vain conduits jusqu'à Bethléhem, où vous régnez sur les cœurs. Quand vous vous donnez vous-même, Ô Emmanuel ! Quels trésors pourrions-nous avoir que nous ne devions être prêts à déposer à vos pieds ?

Protégez notre offrande, Ô Marie ! Celle des Mages, accompagnée de votre médiation, fut agréable à votre Fils ; la nôtre, présentée par vous, trouvera grâce, malgré son imperfection. Aidez notre amour par le vôtre ; soutenez notre prière par l'intervention de votre Cœur maternel ; fortifiez-nous dans la lutte avec le monde et la chair. Pour assurer notre persévérance, obtenez-nous de ne jamais oublier les doux mystères qui nous occupent présentement ; qu'à votre exemple, nous les gardions toujours gravés dans notre cœur. Qui oserait offenser Jésus dans Bethléhem ? Qui pourrait refuser quelque chose à son amour, en ce moment où, sur vos genoux maternels, il attend notre offrande ? Ô Marie ! Ne nous laissez jamais oublier que nous sommes les enfants des Mages, et que Bethléhem nous est toujours ouverte.


HYMNE

Pour épancher les sentiments de joie et d'admiration que nous causent de si ineffables merveilles, empruntons la voix de la Liturgie ; et chantons d'abord cette Hymne de la Naissance que nous a laissée le saint Evêque de Poitiers, Venance Fortunat :


Missel à l'usage d'Autun. XVe.

" Que le monde entier se réjouisse en apprenant l'arrivée de Celui qui est la récompense de vie; après le joug d'un ennemi farouche , la rédemption nous apparaît.

Ce qu'avait chanté Isaïe, s'accomplit dans la Vierge : l'Ange lui a annoncé le mystère ; l'Esprit-Saint l'a remplie de sa vertu.

Marie conçoit dans ses entrailles ; sa foi dans la parole a été féconde ; Celui que le monde entier ne peut contenir est contenu au sein d'une Vierge.

La tige de Jessé a fleuri, la branche a porté son fruit ; la Mère féconde a mis au jour son Fils, et la Vierge a gardé son intégrité.

Il s'est laissé placer dans une crèche, Celui qui est l'auteur de la lumière ; avec son Père il a créé les cieux ; la main de sa Mère l'a enveloppé de langes.

Celui qui donna la Loi au monde, Celui qui promulgua les dix préceptes, a daigné, devenu homme, se placer sous le joug de la Loi.

La souillure du vieil Adam, le nouvel Adam l'a lavée ; ce que le premier, dans son orgueil, avait renversé, le second, dans son humilité, le relève.

La lumière et le salut viennent de naître, la nuit s'enfuit, la mort est vaincue ; venez, nations, visiter avec foi le Dieu que Marie nous enfante.

Amen."

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vendredi, 11 janvier 2008 | Lien permanent

12 janvier. VIIe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.

- VIIe jour dans l'Octave de l'Epiphanie.


Domenico Ghirlandaïo. XVe.

Ayant déposé leurs offrandes aux pieds de l'Emmanuel, comme le signe de Vaillance qu'ils contractent avec lui au nom du genre humain, combles de ses plus chères bénédictions, les Mages prennent congé de ce divin Enfant ; car telle est sa volonté. Ils s'éloignent enfin de Bethléhem ; mais désormais la terre entière leur paraît vide et déserte. Comme ils désireraient fixer leur séjour auprès du nouveau Roi, dans la compagnie de son ineffable Mère ! Mais le plan du salut du monde exige que tout ce qui sent l'éclat et la gloire humaine soit loin de Celui qui est venu chercher nos abaissements.

Il faut d'ailleurs qu'ils soient les premiers messagers de la parole évangélique ; qu'ils aillent annoncer dans la Gentilité que le Mystère du salut est commencé, que la terre possède son Sauveur, que le salut est à la porte. L'Etoile ne marche plus devant eux ; elle n'est plus nécessaire pour les conduire à Jésus ; ils le portent maintenant et à jamais dans leur cœur. Ces trois hommes prédestinés sont donc déposés au sein de la Gentilité, comme ce levain mystérieux de l'Evangile, qui, malgré son léger volume, procure la fermentation de la pâte tout entière. Dieu bénit à cause d'eux les nations de la terre ; à partir de ce jour, l'infidélité diminue, insensiblement la foi monte; et quand le sang de l'Agneau aura été versé, quand le baptême aura été promulgué, les Mages, initiés aux derniers mystères, ne seront plus seulement hommes de désirs, mais chrétiens parfaits.


Corregio. XVIe.

Une ancienne tradition chrétienne, que nous voyons déjà rappelée par l'auteur de l'Ouvrage imparfait sur saint Matthieu inséré dans toutes les éditions de saint Jean Chrysostome, et qui paraît avoir été écrit vers la fin du VIe siècle ; cette tradition, disons-nous, porte que les trois Mages furent baptisés par l'Apôtre saint Thomas, et qu'ils se livrèrent à la prédication de l'Evangile. Quand bien même cette tradition n'existerait pas, il est aisé de comprendre que la vocation de ces trois Princes ne devait pas se bornera visiter, eux premiers des Gentils, le Roi éternel manifesté sur la terre : une nouvelle mission, celle de l'apostolat, découlait tout naturellement de la première.

De nombreux détails sur la vie et les actions des Mages devenus chrétiens sont arrivés jusqu'à nous ; nous nous abstenons cependant de les relater ici, attendu qu'ils ne sont ni assez anciens, ni assez graves, pour que l'Eglise ait cru devoir en faire usage dans sa Liturgie. Il en est de même de leurs noms, Melchior, Gaspar, Bahhasar : l'usage en est trop récent ; et s'il nous paraît téméraire de les attaquer directement, il nous semblerait aussi trop difficile d'en soutenir la responsabilité.


Maître du Prado. XVIe.

Quant aux corps de ces illustres et saints adorateurs du Seigneur nouveau-né, ils furent transportés de Perse à Constantinople sous les premiers Empereurs Chrétiens, et reposèrent longtemps dans l'Eglise de Sainte-Sophie. Plus tard, sous l'Evêque Eustorge, Milan les vit transférer dans ses murs ; et ils y restèrent jusqu'au XIIe siècle, où, avec le concours de Frédéric Barberousse, Reinold, archevêque de Cologne, les plaça dans l'Eglise cathédrale de cette auguste Métropole. C'est là qu'ils reposent encore aujourd'hui dans une magnifique châsse, le plus beau monument, peut-être, de l'orfèvrerie du moyen âge, sous les voûtes de cette sublime Cathédrale qui, par sa vaste étendue, la hardiesse et le caractère de son architecture, est l'un des premiers temples de la chrétienté.

Ainsi, nous vous avons suivis, Ô Pères des nations, du fond de l'Orient jusqu'en Bethléhem ; et nous vous avons reconduits dans votre patrie, et amenés enfin au lieu sacré de votre repos, sous le ciel glacé de notre Occident. Un amour filial nous attachait à vos pas ; et d'ailleurs ne cherchions-nous pas nous-mêmes, sur vos traces, ce Roi de gloire auprès duquel vous aviez à nous représenter ? Bénie soit votre attente, bénie votre docilité à l'Etoile, bénie votre dévotion aux pieds du céleste Enfant, bénies vos pieuses offrandes qui nous donnent la mesure des nôtres ! Ô Prophètes ! Qui avez véritablement prophétisé les caractères du Messie par le choix de vos dons ; Ô Apôtres ! Qui avez prêché, jusque dans Jérusalem, la Naissance du Christ sous les langes de son humilité, du Christ que les Disciples n'annoncèrent qu'après le triomphe de sa Résurrection ; Ô fleurs de la Gentilité ! Qui avez produit de si nombreux et de si précieux fruits ; car vous avez produit pour le Roi de gloire des nations entières, des peuples innombrables : veillez sur nous, protégez les Eglises.


Maître du Prado. Détail. XVIe.

Souvenez-vous de cet Orient du sein duquel vous êtes venus, comme la lumière ; bénissez l'Occident plongé encore dans de si épaisses ténèbres, au jour où vous partiez à la suite de l'Etoile, et devenu depuis l'objet de la prédilection du divin Soleil. Réchauffez-y la foi qui languit ; obtenez de la divine miséricorde que toujours, et de plus en plus, l'Occident envoie des messagers du salut, et au midi, et au nord, et jusque dans cet Orient infidèle, jusque sous les tentes de Sem, qui a méconnu la lumière que vos mains lui apportèrent. Priez pour l'Eglise de Cologne, cette illustre sœur de nos plus saintes Eglises de l'Occident ; qu'elle garde la foi, qu'elle ne laisse point s'affaiblir la sainte liberté, qu'elle soit le boulevard de l'Allemagne catholique, toujours appuyée sur la protection de ses trois Rois, sur le patronage de la glorieuse Ursule et de sa légion virginale. Enfin, Ô favoris du grand Roi Jésus, mettez-nous à ses pieds, offrez-nous à Marie ; et donnez-nous d'achever dans l'amour du céleste Enfant, les quarante jours consacrés à sa Naissance, et notre vie tout entière.

HYMNE


Ce beau chant à la gloire de l'Enfant Jésus appartient à saint Ephrem, le chantre sublime de l'Eglise Syrienne :



Fra Angelico. XVe.

" Les filles juives, accoutumées jusqu'alors à répéter les Thrènes de Jérémie sur le mode lugubre de leurs Ecritures sacrées, aujourd'hui pleines de l'Esprit divin, éclatent en hymnes d'allégresse :

" Que du fond des demeures souterraines, Eve élève ses regards pour voir ce jour où l'un de ses fils, l'auteur de la vie, descend pour la réveiller du sommeil de la mort, elle l'aïeule de sa Mère. L'adorable enfant a brisé la tête du serpent, dont les poisons causèrent la mort de cette mère des humains.

Sara, mère du bel Isaac, contemplait votre enfance, Ô Christ ! Dans le berceau de son fils ; célébrant les mystères de votre enfance, exprimés dans cet enfant, elle songeait à vous quand elle l'endormait par la douceur de ses chants : " Fruit de mes désirs, Ô mon fils ! Chantait-elle, je vois le Seigneur qui en toi est voilé, lui qui reçoit les vœux et les prières de tous les cœurs pieux, et qui daigne les exaucer ".

Samson, le Nazaréen, dans sa vigoureuse adolescence, fut la figure de votre force ; il déchira le lion, symbole de la mort que vous avez écrasée. Cette mort, vous l'avez déchirée ; aussi de son ventre plein d'amertume,vous avez fait sortir la vie, si délicieuse à la bouche des mortels.

C'était vous que l’heureuse Anne pressait contre son cœur en la personne de Samuel, de ce Prophète qui deux fois figura votre ministère : la première, en faisant éclater votre juste sévérité, au jour où il mutila le roi Agag, figure du démon ; la seconde, en imitant votre miséricorde, quoique sous des traits imparfaits, lorsqu'on le vit déplorer sans relâche la réprobation de Saül, avec des larmes tendres et sincères."


XVI DIE JANUARII

Les Menées de l'Eglise Grecque nous offrent encore ces belles strophes à la gloire de la Mère de Dieu :



Bartolomeo di Giovanni. XVe.

" Comme une terre vierge, tu nous as produit sans culture le divin épi, auguste Marie, le Seigneur Jésus qui nourrit l'univers, et qui, devenu notre aliment, nous rappelle à la vie.

Contemplant le Dieu incarné en toi, Ô chaste Vierge ! nous te confessons véritablement Mère de Dieu, toi qui, sans aucun doute, es devenue la cause de la régénération de toutes choses.

Celui qui est au-dessus de toute substance, et qui n'avait rien de commun avec la chair, s'est incarné, et a été formé de ton sang digne de nos hommages, ô très pure ! Il s'est fait chair sans subir aucun changement, et il a conversé avec les hommes.

Chaste Vierge, les lois de la nature sont interverties en toi ; tu demeures vierge après l'enfantement, comme avant l'enfantement par lequel tu as mis au jour le Christ législateur.

Guéris les passions de ma pauvre âme, Mère de Dieu très pure ; rends la paix à mon âme agitée par les invasions de l'ennemi, comme par une tempête continuelle, et donne la sérénité à mon cœur, Ô Vierge !

Jésus, le jardinier de ce monde, t'a rencontrée comme une rose au milieu des épines, dans les vallons de cette terre, Ô Vierge sans tache ! et ayant daigné naître de ton sein, il nous a embaumés des suaves parfums de la doctrine qui fait connaître Dieu.

Nous te reconnaissons, Ô Vierge Marie, pour le candélabre spirituel qui a porté la lumière inaccessible ; c'est toi qui as illuminé les âmes de tous les fidèles et dissipé les ténèbres du péché.

Dans nos cantiques d'actions de grâces, nous réunissons nos voix pour te dire : Salut, Ô la très pure demeuré de la lumière immatérielle ! Salut, toi qui es l'auteur de la déification de tous ! Salut, toi qui abolis la malédiction ! Salut, toi qui rappelles de l'exil les habitants de la terre !"

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samedi, 12 janvier 2008 | Lien permanent

Dimanche 18 novembre 2007. XXVe dimanche ap. la Pentecôte.

- XXVe dimanche ap. la Pentecôte.
On prend aujourd'hui les pièces liturgiques du VIe dimanche après l'Epiphanie.

Extraits de L'année liturgique de dom Prosper Guéranger.


Retable de saint Barnabé - Sandro Botticelli - Alessandro di Mariano dei Filipepi. XVe.

EPÎTRE


Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Thessaloniciens. Chap. I.

" Mes Frères , nous rendons sans cesse grâces à Dieu pour vous tous, et nous faisons continuellement mémoire de vous dans nos prières. Nous nous souvenons devant notre Dieu et Père, des oeuvres de votre foi, de vos travaux, de votre charité , et de la fermeté d'espérance que vous avez en notre Seigneur Jésus-Christ. Nous savons, frères chéris de Dieu, quelle a été votre élection ; car notre Evangile au milieu de vous n'a pas été seulement en paroles, mais accompagné de prodiges, soutenu de l'Esprit-Saint, et favorisé d'une abondante plénitude. Vous savez aussi de quelle manière, étant parmi vous, nous avons été à votre égard. Et vous, vous êtes devenus nos imitateurs et ceux du Seigneur, ayant reçu la parole parmi de grandes tribulations , avec la joie de l'Esprit-Saint, en sorte que vous êtes devenus l'exemple de .tous ceux qui ont embrassé la foi dans la Macédoine et dans l'Achaïe. Et non seulement vous êtes cause que la parole du Seigneur s'est répandue avec éclat dans la Macédoine et dans l'Achaïe ; mais la foi que vous avez en Dieu est devenue si célèbre, qu'il n'est pas même nécessaiqe que nous en parlions. Eux-mêmes racontent, en parlant de nous, le succès de notre arrivée parmi vous, et comment, ayant quitté les idoles, vous vous êtes convertis à Dieu, pour servir ce Dieu vivant et véritable, et pour attendre du ciel son Fils, qu'il a ressuscité d'entre les morts, et qui nous a délivrés de la colère à venir."


Saint Paul. El Greco. XVIIe.

L'éloge que fait ici saint Paul de la fidélité des chrétiens de Thessalonique à la foi qu'ils avaient embrassée, éloge que l'Eglise nous remet aujourd'hui sous les yeux, semblerait plutôt un reproche pour les chrétiens de nos jours. Livrés encore la veille au culte des idoles, ces néophytes s'étaient élancés avec ardeur dans la carrière du christianisme, au point de mériter l'admiration de l'Apôtre.

De nombreuses générations chrétiennes nous ont précédés ; nous avons été régénérés dès notre entrée en cette vie ; nous avons sucé, pour ainsi dire, avec le lait, la doctrine de Jésus-Christ : et cependant notre foi est loin d'être aussi vive, nos mœurs aussi pures que l'étaient celles de ces premiers fidèles.

Toute leur occupation était de servir le Dieu vivant et véritable, et d'attendre l'avènement de Jésus-Christ ; notre espérance est la même que celle qui faisait battre leurs cœurs ; pourquoi n'imitons-nous pas la foi généreuse de nos ancêtres ? Le charme du présent nous séduit. L'incertitude de ce monde passager est-elle donc ignorée de nous, et ne craignons-nous pas de transmettre aux générations qui nous suivront un christianisme amoindri et stérile, tout différent de celui que Jésus-Christ a établi, que les Apôtres ont prêché, que les païens des premiers siècles embrassaient au prix de tous les sacrifices ?

ÉVANGILE


Notre Seigneur Jésus-Christ enseignant ses disciples. Bréviaire romain. Clermont-Ferrand. XVe.

La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap. XIII.

" En ce temps-là, Jésus dit à la foule cette parabole : Le royaume des cieux est semblable à un grain de sénevé qu'un homme prend et sème dans son champ : c'est la plus petite de toutes les graines ; mais, quand elle a poussé, c'est le plus grand de tous les légumes, et cette plante devient un arbre, en sorte que les oiseaux du ciel viennent se reposer sur ses rameaux.
Il leur dit encore cette autre parabole : Le royaume des cieux est semblable à un levain qu'une femme prend et qu'elle cache dans trois mesures de farine, jusqu'à ce que la pâte soit toute levée. Jésus dit toutes ces choses au peuple en paraboles, et il ne leur parlait point sans paraboles, afin que cette parole du Prophète fût accomplie : J'ouvrirai ma bouche pour dire des paraboles ; je publierai des choses qui ont été cachées depuis la création du monde."


Notre Seigneur nous donne ici deux symboles bien expressifs de son Eglise, qui est son Royaume, et qui commence sur la terre pour s'achever au ciel.
Quel est ce grain de sénevé, caché dans l'obscurité du sillon, inconnu à tous les regards, reparaissant ensuite comme un germe à peine perceptible, mais croissant toujours jusqu'à devenir un arbre : sinon cette Parole divine répandue obscurément dans la terre de Judée, étouffée un instant par la malice des hommes jusqu'à être ensevelie dans un sépulcre, puis s'échappant victorieuse et s'étendant bientôt sur le monde entier ?

Un siècle ne s'était pas écoulé depuis la mort du Sauveur, que déjà son Eglise comptait des membres fidèles, bien au delà des limites de l'Empire romain. Depuis lors, tous les genres d'efforts ont été tentés pour déraciner ce grand arbre : la violence, la politique, la fausse sagesse, y ont perdu leur temps. Tout ce qu'elles ont pu faire a été d'arracher quelques branches ; mais la sève vigoureuse de l'arbre les a aussitôt remplacées.
Les oiseaux du ciel qui viennent chercher asile et ombrage sous ses rameaux, sont, selon l'interprétation des Pères, les âmes qui, éprises des choses éternelles, aspirent vers un monde meilleur. Si nous sommes dignes du nom de chrétiens, nous aimerons cet arbre, et nous ne trouverons de repos et de sécurité que sous son ombre tutélaire.

La femme dont il est parlé dans la seconde parabole, est l'Eglise notre mère. C'est elle qui, au commencement du christianisme, a caché, comme un levain secret et salutaire, la divine doctrine dans la masse de l'humanité. Les trois mesures de farine qu'elle a fait lever pour en former un pain délectable sont les trois grandes familles de l'espèce. humaine, issues des trois enfants de Noé, et auxquelles remontent tous les hommes qui habitent la terre. Aimons cette mère, et bénissons ce levain céleste auquel nous devons d'être devenus enfants de Dieu, en devenant enfants de l'Eglise.

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dimanche, 18 novembre 2007 | Lien permanent

25 novembre 2007. XXVIe et dernier dimanche après la Pentecôte.

- XXVIe et dernier dimanche après la Pentecôte.

Extraits de l'Année liturgique de dom Prosper Guéranger.


Résurrection de la fille de Jaïre. Véronèse. XVIIe.

A LA MESSE

L'Antiphonaire se termine aujourd'hui ; l'Introït, le Graduel, l'Offertoire et la Communion ci-après, devront être repris en chacun des Dimanches qui peuvent se succéder encore plus ou moins nombreux, suivant les années, jusqu'à l'Avent. On se rappelle qu'au temps de saint Grégoire, l'Avent étant plus long que de nos jours (Avent, Historique.), ses semaines avançaient dans la partie du Cycle occupée maintenant par les derniers Dimanches après la Pentecôte. C'est une des raisons qui expliquent la pénurie de composition des Messes dominicales après la vingt-troisième.

En celle-ci même autrefois, l'Eglise, sans perdre de vue le dénouement final de l'histoire du monde, tournait déjà sa pensée vers l'approche du temps consacré à préparer pour ses enfants la grande fête de Noël. On lisait pour Epître le passage suivant de Jérémie, qui servit plus tard, en divers lieux, à la Messe du premier Dimanche de l'Avent :
" Voici que le jour arrive, dit le Seigneur, et je susciterai à David une race juste. Un roi régnera, qui sera sage et qui accomplira la justice et le jugement sur la terre. En ces jours-là Juda sera sauvé, et Israël habitera dans la paix ; et voici le nom qu'ils donneront à ce roi : Le Seigneur notre juste ! C'est pourquoi le temps " vient, dit le Seigneur, où l'on ne dira plus :
" Vive le Seigneur qui a tiré les enfants d'Israël de la terre d'Egypte ! mais : Vive le Seigneur qui a tiré et ramené la postérité de la maison d'Israël de la terre d'aquilon et de tous les pays » dans lesquels je les avais dispersés et chassés ! Et ils habiteront dans leur terre
(Jerem. XXIII, 5-8.)."


Le saint prophète Jérémie (détail). Rembrandt. XVIIe.

Comme on le voit, ce passage s'applique également très bien à la conversion des Juifs et à la restauration d'Israël annoncée pour les derniers temps. C'est le point de vue auquel se sont placés les plus illustres liturgistes du moyen âge, pour expliquer toute la Messe du vingt-troisième Dimanche après la Pentecôte. Mais pour bien les comprendre, il faut observer aussi que, primitivement, l'Evangile du vingt-troisième Dimanche était l'Evangile de la multiplication des cinq pains. Cédons la parole au pieux et profond Abbé Rupert qui, mieux que personne, nous apprendra le mystère de ce jour où prennent fin les accents, si variés jusqu'ici, des mélodies grégoriennes.

" La sainte Eglise, dit-il, met tant de zèle à s'acquitter des supplications, des prières et des actions de grâces pour tous les hommes demandées par l'Apôtre (I Tim. II, 1.), qu'on la voit rendre grâces aussi pour le salut à venir des fils d'Israël, qu'elle sait devoir être un jour unis à son corps. Comme, en effet, à la fin du monde leurs restes seront sauvés (Rom. IX, 27.), dans ce dernier Office de l'année elle se félicite en eux comme en ses futurs membres.
Dans l'Introït, elle chante tous les ans, rappelant ainsi sans fin les prophéties qui les concernent : Le Seigneur dit : Mes pensées sont des pensées de paix et non d'affliction. Ses pensées sont toutes de paix en effet, puisqu'il promet d'admettre au banquet de sa grâce les Juifs ses frères selon la chair, réalisant ce qui avait été figuré dans l'histoire du patriarche Joseph. Les frères de ce dernier, qui l'avaient vendu, vinrent à lui poussés par la faim, lorsqu'il étendait sa domination sur toute la terre d'Egypte ; ils furent reconnus, reçus par lui, et lui-même fit avec eux un grand festin : ainsi notre Seigneur, régnant sur tout le monde et nourrissant abondamment du pain de vie les Egyptiens, c'est-à-dire les Gentils, verra revenir à lui les restes des fils d'Israël ; reçus en la grâce de celui qu'ils ont renié et mis à mort, il leur donnera place à sa table, et le vrai Joseph s'abreuvera délicieusement avec ses frères.


Le bienfait de cette table divine est signifié, dans l'Office du Dimanche, par l'Evangile, où l'on raconte du Seigneur qu'il nourrit avec cinq pains la multitude. Alors, en effet, Jésus ouvrira pour les Juifs les cinq livres de Moïse, portés maintenant comme des pains entiers et non rompus encore, par un enfant, à savoir ce même peuple resté jusqu'ici dans l'étroitesse d'esprit de l'enfance.

Alors sera accompli l'oracle de Jérémie, si bien placé avant cet Evangile; on ne dira plus : Vive le Seigneur qui a tiré les enfants d'Israël de la terre d'Egypte ! mais : Vive le Seigneur qui les a ramenés de la terre d'aquilon et de toutes celles où ils étaient dispersés !



Le saint prophète Jérémie. Plaque de reliquaire. XIIe.

Délivrés donc de la captivité spirituelle qui les retient maintenant, ils chanteront du fond de l'âme l'action de grâces indiquée au Graduel : Vous nous avez délivrés, Seigneur, de ceux qui nous persécutaient.

La supplication par laquelle nous disons, dans l'Offertoire : Du fond de l'abîmej'aicrié vers vous, Seigneur, répond manifestement, elle aussi, aux mêmes circonstances. Car en ce jour-là, ses frères diront au grand et véritable Joseph : " Nous vous conjurons d'oublier le crime de vos frères "
[/b] (Gen L, 17.).

La Communion : En vérité, je vous le dis, tout ce que vous demanderez dans vos prières, et le reste, est la réponse de ce même Joseph disant, comme autrefois le premier (Ibid. 19-21.) : " Ne craignez point. Vous aviez formé contre moi un dessein mauvais ; mais Dieu l'a fait tourner au bien, afin de m'élever comme vous voyez maintenant " et de sauver beaucoup de peuples. Ne craignez donc point : je vous nourrirai, vous et vos a enfants "." (Rup. De div. Off. XII, 23).

EPITRE


Saint Paul écrivant. Valentin de Bourgogne. XVIIe.

Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Philippiens. Chap. III.

" Mes Frères, soyez mes imitateurs, et observez ceux qui se conduisent suivant le modèle que vous avez en nous. Car il y en a plusieurs dont je vous ai parlé souvent, dont je vous parle encore avec larmes, qui sont les ennemis de la croix du Christ. Ils ont pour fin la mort, pour dieu leur ventre ; ils placent la gloire pour eux dans leur honte, n'ayant de goût que pour les choses de la terre. Mais pour nous, déjà nous vivons dans les cieux ; c'est de là aussi que nous attendons pour Sauveur notre Seigneur Jésus-Christ, qui reformera le corps de notre bassesse et le rendra conforme à son corps glorieux, par la puissance qui lui permet de s'assujettir aussi toutes choses. C'est pourquoi, mes frères très chers et très désirés, ma joie et ma couronne, demeurez ainsi fermes dans le Seigneur, Ô mes bien-aimés. Je prie Evodia et je conjure Syntychès de s'unir et d'avoir les mêmes sentiments dans le Seigneur.
Je vous prie aussi, vous mon fidèle compagnon, d'aider celles qui ont travaillé avec moi pour l'Evangile, ainsi que Clément et les autres qui ont été mes aides, dont les noms sont au livre de vie."


Le nom de Clément, qui vient d'être prononcé par l'Apôtre, est celui du second successeur de saint Pierre. Assez souvent, le vingt-troisième Dimanche après la Pentecôte ne précède que de fort peu la solennité de ce grand pontife et martyr du premier siècle. Disciple de Paul, attaché depuis à la personne de Pierre, et désigné par le vicaire de l'Homme-Dieu comme le plus digne de monter après lui sur la chaire apostolique, Clément, nous le verrons au 23 novembre, était l'un des saints de cette époque primitive les plus vénérés des fidèles. La mention faite de lui à l'Office du Temps, dans les jours qui précédaient son apparition directe au cycle de la sainte Eglise, excitait la joie du peuple chrétien et ranimait sa ferveur, à la pensée de l'approche d'un de ses plus illustres protecteurs et amis.

Au moment où saint Paul écrivait aux Philippiens, Clément, qui devait longtemps encore survivre aux Apôtres, était bien des hommes dont parle notre Epître, imitateurs de ces illustres modèles, appelés à perpétuer dans le troupeau confié à leurs soins (I Petr. V, 3.) la règle des mœurs, moins encore par la fidélité de l'enseignement que par la force de l'exemple. L'unique Epouse du Verbe divin se reconnaît à l'incommunicable privilège d'avoir en elle, par la sainteté, la vérité toujours vivante et non point seulement lettre morte. L'Esprit-Saint n'a point empoché les livres sacrés des Ecritures de passer aux mains des sectes séparées ; mais il a réservé à l'Eglise le trésor de la tradition qui seule transmet pleinement, d'une génération à l'autre, le Verbe lumière et vie (Johan. I, 4.), par la vérité et la sainteté de l'Homme-Dieu toujours présentes en ses membres, toujours tangibles et visibles en l'Eglise (I Johan. I, 1.).

La sainteté inhérente à l'Eglise est la tradition à sa plus haute expression, parce qu'elle est la vérité non seulement proférée, mais agissante (I Thess. II, 13.), comme elle l'était en Jésus-Christ, comme elle l'est en Dieu (Johan. V, 17.). C'est là le dépôt (I Tim. VI, 20.) que les disciples des Apôtres recevaient la mission de transmettre à leurs successeurs, comme les Apôtres eux-mêmes l'avaient reçu du Verbe descendu en terre.

Aussi saint Paul ne se bornait point à confier l'enseignement dogmatique à son disciple Timothée (II Tim. III, 2.) ; il lui disait : " Sois l'exemple des fidèles dans la parole et la conduite " (I Tim. IV, 12.). Il redisait à Tite : " Montre-toi un modèle, en fait de doctrine et d'intégrité de vie " (Tit. II, 7.). Il répétait à tous : " Soyez mes imitateurs, comme je le suis de Jésus-Christ " (I Cor. II, 16.).

Il envoyait aux Corinthiens Timothée, pour leur rappeler, pour leur apprendre au besoin, non les dogmes seulement de son Evangile, mais ses voies en Jésus-Christ, sa manière de vivre ; car cette manière de vivre de l'Apôtre était, pour une part, son enseignement même en toutes les Eglises (Ibid. 17.) ; et il louait les fidèles de Corinthe de ce qu'en effet ils se souvenaient de lui pour l'imiter en toutes choses, gardant ainsi la tradition de Jésus-Christ (I Cor. XI, 1-2.).

Les Thessaloniciens étaient si bien entrés dans cet enseignement tiré de la vie de leur Apôtre, que, devenus ses imitateurs, et par là même ceux de Jésus-Christ, ils étaient, dit saint Paul, la forme de tous les croyants ; cet enseignement muet de la révélation chrétienne, qu'ils donnaient en leurs mœurs, rendait comme inutile la parole même des messagers de l'Evangile (I Thess. I, 5-8.).

L'Eglise est un temple admirable qui s'élève à la gloire du Très-Haut par le concours des pierres vivantes appelées à entrer dans ses murs (Eph. II,20-22.). La construction de ces murailles sacrées sur le plan arrêté par l'Homme-Dieu est l'œuvre de tous. Ce que l'un fait par la parole (I Cor. XIV, 3.), l'autre le fait par l'exemple (Rom. XIV, 19.) ; mais tous deux construisent, tous deux édifient la cité sainte ; et, comme au temps des Apôtres, l'édification par l'exemple l'emporte sur l'autre en efficacité, quand la parole n'est pas soutenue de l'autorité d'une vie conforme à l'Evangile.

Mais de même que l'édification de ceux qui l'entourent est, pour le chrétien, une obligation fondée à la fois sur la charité envers le prochain et sur le zèle de la maison de Dieu, il doit, sous peine de présomption, chercher dans autrui cette même édification pour lui-même. La lecture des bons livres, l'étude de la vie des saints, l'observation, selon l'expression de notre Epître, l'observation respectueuse des bons chrétiens qui vivent à ses côtés, lui seront d'un immense secours pour l'œuvre de sa sanctification personnelle et l'accomplissement des vues de Dieu en lui.

Cette fréquentation de pensées avec les élus de la terre et du ciel nous éloignera des mauvais, qui repoussent la croix de Jésus-Christ et ne rêvent que les honteuses satisfactions des sens. Elle placera véritablement notre conversation dans les cieux. Attendant pour un jour qui n'est plus éloigné l'avènement du Seigneur, nous demeurerons fermes en lui, malgré la défection de tant de malheureux entraînés par le courant qui emporte le monde à sa perte.
L'angoisse et les souffrances des derniers temps ne feront qu'accroître en nous la sainte espérance ; car elles exciteront toujours plus notre désir du moment solennel où le Seigneur apparaîtra pour achever l'œuvre du salut des siens, en revêtant notre chair même de l'éclat de son divin corps. Soyons unis, comme le demande l'Apôtre, et, pour le reste : " Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ", écrit-il à ses chers Philippiens ; " je le dis de nouveau, réjouissez-vous : le Seigneur est proche " (Philip, IV, 4-5.).

ÉVANGILE


Résurrection de la fille de Jaïre. Gustave Doré. XIXe.

La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap. IX.

" En ce temps-là, comme Jésus parlait au peuple, voici qu'un prince de la synagogue s'approcha, et l'adorant, il lui disait :
" Seigneur, ma fille vient de mourir ; mais venez, imposez votre main sur elle, et elle vivra."
Et Jésus, se levant, le suivait avec ses disciples. Or voici qu'une femme qui souffrait d'un flux de sang depuis douze années s'approcha par derrière, et toucha la frange de son vêtement. Car elle disait en elle-même : " Si je touche seulement son vêtement, je serai sauvée ".
Jésus se retournant alors, et la voyant, lui dit :
" Aie confiance, ma fille ; ta foi t'a sauvée."
Et de cette heure même, la femme fut guérie. Jésus venant ensuite à la maison du prince, et voyant les joueurs de flûte et une foule qui faisait grand bruit, leur dit :
" Retirez-vous, car la jeune fille n'est pas morte, elle n'est qu'endormie."
Et ils se moquaient de lui. Mais lorsqu'on eut mis tout ce monde à la porte, il entra, prit la main de la jeune fille, et elle se leva. Et le bruit s'en répandit dans tout le pays."


Quoique le choix de cet Evangile pour aujourd'hui ne remonte pas partout à la plus haute antiquité, il entre bien dans l'économie générale de la sainte Liturgie, et confirme ce que nous avons dit du caractère de cette partie de l'année. Saint Jérôme nous apprend, dans l'Homélie du jour, que l'hémorroïsse guérie par le Sauveur figure la gentilité, tandis que la nation juive est représentée par la fille du prince de la synagogue (Matth. IX.). Celle-ci ne devait retrouver la vie qu'après le rétablissement de la première ; et tel est précisément le mystère que nous célébrons en ces jours, où, la plénitude des nations avant reconnu le médecin céleste, l'aveuglement dont Israël avait été frappé cesse enfin lui-même (Rom. XI, 25.).

De cette hauteur où nous sommes parvenus, de ce point où le monde, ayant achevé ses destinées, ne va sembler sombrer un instant que pour se dégager des impies et s'épanouir de nouveau, transformé dans la lumière et l'amour : combien mystérieuses et à la fois fortes et suaves nous apparaissent les voies de l'éternelle Sagesse (Sap. VIII, 1.) !

Le péché, dès le début, avait rompu l'harmonie du monde, en jetant l'homme hors de sa voie. Si, entre toutes, une famille avait attiré sur elle la miséricorde, la lumière, en se levant sur cette privilégiée, n'avait fait que manifester plus profonde la nuit où végétait le genre humain. Les nations, abandonnées à leur misère épuisante, voyaient les attentions divines aller à Israël, et l'oubli s'appesantir sur elles au contraire. Lors même que les temps où la faute première devait être réparée se trouvèrent accomplis, il sembla que la réprobation des gentils dût être consommée du même coup ; car on vit le salut, venu du ciel en la personne de l'Homme-Dieu, se diriger exclusivement vers les Juifs et les brebis perdues de la maison d'Israël (Matth. XV, 24.).


Résurrection de la fille de Jaïre. Gravure de Schnorr. XIXe.

Cependant la race gratuitement fortunée, dont les pères et les premiers princes avaient si ardemment sollicité l'arrivée du Messie, ne se trouvait plus à la hauteur où l'avaient placée les patriarches et les saints prophètes. Sa religion si belle, fondée sur le désir et l'espérance, n'était plus qu'une attente stérile qui la tenait dans l'impuissance de faire un pas au-devant du Sauveur ; sa loi incomprise , après l'avoir immobilisée , achevait de l'étouffer dans les liens d'un formalisme sectaire. Or, pendant qu'en dépit de ce coupable engourdissement, elle comptait, dans son orgueil jaloux, garder l'apanage exclusif des faveurs d'en haut, la gentilité que son mal, toujours grandissant lui aussi, portait au-devant d'un libérateur, la gentilité reconnaissait en Jésus le Sauveur du monde, et sa confiante initiative lui méritait d'être guérie la première. Le dédain apparent du Seigneur n'avait servi qu'à l'affermir dans l'humilité, dont la puissance pénètre les cieux (Eccli. XXXV, 21.).

Israël devait donc attendre à son tour. Selon qu'il le chantait dans le psaume, l'Ethiopie l’avait prévenu en tendant ses mains vers Dieu la première (Psalm. LXVII, 32.). Désormais ce fut à lui de retrouver, dans les souffrances d'un long abandon, l'humilité qui avait valu à ses pères les promesses divines et pouvait seule lui en mériter l'accomplissement. Mais aujourd'hui la parole de salut a retenti dans toutes les nations, sauvant tous ceux qui devaient l'être. Jésus, retardé sur sa route, arrive enfin à la maison vers laquelle se dirigeaient ses pas dès l'abord, à cette maison de Juda où dure toujours l'assoupissement de la fille de Sion.

Sa toute-puissance compatissante écarte de la pauvre abandonnée la foule confuse des faux docteurs, et ces prophètes de mensonge qui l'avaient endormie aux accents de leurs paroles vaines ; il chasse loin d'elle pour jamais ces insulteurs du Christ, qui prétendaient la garder dans la mort. Prenant la main de la malade, il la rend à la vie dans tout l'éclat de sa première jeunesse; prouvant bien que sa mort apparente n'était qu'un sommeil, et que l'accumulation des siècles ne pouvait prévaloir contre la parole donnée par Dieu à Abraham son serviteur (Luc. 1, 54-55.).

Au monde maintenant de se tenir prêt pour la transformation dernière. Car la nouvelle du rétablissement de la fille de Sion met le dernier sceau à l'accomplissement des prophéties. Il ne reste plus aux tombeaux qu'à rendre leurs morts (Dan. XII, 1-2.). La vallée de Josaphat se prépare pour le grand rassemblement des nations (Joël, III, 1.) ; le mont des Oliviers va de nouveau (Act. I, 11.) porter l'Homme-Dieu, mais cette fois comme Seigneur et comme juge (Zach. XIV, 4.).

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dimanche, 25 novembre 2007 | Lien permanent

11 novembre. XXIVe dimanche après la Pentecôte.

- XXIVe dimanche après la Pentecôte.


Notre Seigneur Jésus-Christ enseignant à ses disciples. Calendrier des bergers. Angers. XVe.

Extraits de L'année liturgique de dom Prosper Guéranger.

Le nombre des Dimanches après la Pentecôte peut dépasser vingt-quatre et s'élever jusqu'à vingt-huit, selon que la Pâque s'est rapprochée plus ou moins, dans les diverses années, de l'équinoxe du printemps. Mais la Messe qui suit est toujours réservée pour la dernière ; on remplit l'intervalle avec celles, plus ou moins nombreuses, des Dimanches après l'Epiphanie, qui, dans ce cas, n'ont point eu leur emploi au commencement de l'année.
On trouvera plus tard ces Dimanches, qui sont les IIIe, IVe, Ve et VIe après l'Epiphanie. Dans les années où l'on compte vingt-cinq Dimanches après la Pentecôte, c'est ce dernier qui prend place après le vingt-troisième ; si le nombre de ces Dimanches est de vingt-six, le cinquième après l’Epiphanie devient le vingt-quatrième après la Pentecôte, Si ce nombre atteint le chiffre de vingt-sept, on commence à suppléer par le quatrième après l'Epiphanie, s'il s'élève à vingt-huit, par le troisième.

Ceci toutefois doit s'entendre exclusivement des Oraisons, Epîtres et Evangiles ; car, ainsi que nous l'avons dit, les Introït, Graduel, Offertoire et Communion restent jusqu'à la fin les mêmes qu'au vingt-troisième Dimanche.
On a vu que cette Messe du vingt-troisième Dimanche était véritablement considérée par nos pères comme la dernière du Cycle. L'Abbé Rupert nous a révélé le sens profond de ses diverses parties. Selon la doctrine que nous avions eu l'occasion de méditer précédemment (XIIIe Dim ap la Pentec.), la réconciliation de Juda nous y est apparue comme le terme, dans le temps, des intentions divines ; les dernières notes de la sainte Liturgie sont venues s'y confondre avec le dernier mot pour Dieu de l'histoire du monde.

Le but cherché dans la création par l'éternelle Sagesse, et miséricordieusement poursuivi dans la rédemption après la chute, est en effet pleinement atteint désormais ; car ce but n'était autre que l'union divine avec l'humanité rassemblée dans l'unité d'un seul corps (Eph. II, 16.) Maintenant que les deux peuples ennemis, gentil et Poldève, sont réunis en un seul homme nouveau dans J ésus-Christ leur chef (Ibid. 15.), les deux Testaments, qui marquèrent si profondément au milieu des siècles la distinction des temps anciens et nouveaux, s'effacent d'eux-mêmes pour faire place aux splendeurs de l'alliance éternelle.

L'Eglise arrêtait donc ici, autrefois, la marche de sa Liturgie. Elle était satisfaite d'avoir amené ses fils, non seulement à pénétrer en cette manière le développement complet de la pensée divine, mais encore et surtout à s'unir ainsi d'une union véritable au Seigneur, par une communauté réelle de vues, d'intérêts et d'amour. Aussi ne revenait-elle même pas sur l'annonce du second avènement de l'Homme-Dieu et du jugement final, qui avait fait, au temps de l'Avent, l'objet de leurs méditations dans les débuts de la vie purgative.

C'est depuis quelques siècles seulement que, dans la pensée de donner au Cycle une conclusion plus précise et plus appréhensible aux chrétiens de nos jours, elle le termine par le récit prophétique de la redoutable arrivée du Seigneur, qui clôt les temps et inaugure l'éternité. Saint Luc se trouvant de temps immémorial chargé d'annoncer dans les jours de l'Avent cet avènement terrible (Ier Dimanche de l’Avent.), l'Evangile de saint Matthieu fut choisi pour le décrire de nouveau, et plus longuement, au dernier Dimanche après la Pentecôte.

A LA MESSE

L'exercice des bonnes oeuvres avec l'aide de la grâce nous fait obtenir une grâce plus grande. Demandons avec l'Eglise, dans la Collecte, une action efficace de ce moteur divin sur nos volontés.

ÉPÎTRE

Lecture de l'Epître du bienheureux Paul, Apôtre, aux Colossiens. Chap. I.


Saint Paul aux Colossiens. Joseph-Benoît Suvée. XVIIIe.

" Mes Frères, nous ne cessons point de prier pour vous et de demander que vous soyez remplis de la connaissance de la volonté de Dieu en toute sagesse et intelligence spirituelle, afin que vous marchiez d'une manière digne de Dieu, lui plaisant en toutes choses,portant des fruits en toute sorte de bonnes œuvres, et croissant dans la science de Dieu, remplis de force en tout par la puissance de sa gloire, patients en toutes rencontres et d'une longanimité accompagnée de joie, rendant grâces à Dieu le Père qui nous a rendus dignes d'avoir part à l'héritage des saints en nous éclairant de sa lumière, qui nous a arrachés à la puissance des ténèbres et transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé par le sang duquel nous avons recula rédemption et la rémission des péchés."

Action de grâces et prière : c'est le résumé de notre Epître et la digne conclusion des instructions de l'Apôtre, comme du Cycle entier de la sainte Liturgie. Le Docteur des nations n'a point défailli dans la tâche que lui avait confiée la Mère commune ; il ne tient pas à lui que les âmes dont il avait pris la conduite au lendemain de la descente de l'Esprit d'amour, ne soient toutes parvenues aux sommets de perfection qu'il rêvait pour elles toutes. Et de fait, les chrétiens fidèles à marcher sans faiblir dans la voie ouverte, il y a un an, devant eux par la sainte Eglise, savent maintenant, pour en avoir acquis la bienheureuse expérience, que cette carrière de salut aboutissait sûrement à la vie d'union où règne en souveraine la divine charité !
En quel homme, du reste, pour peu que cet homme ait laissé prendre son intelligence et son cœur à l'intérêt que présente le développement des saisons liturgiques, en quel homme ne s'est pas développée du même coup la lumière ? Or la lumière est l'indispensable élément qui nous arrache à l’empire des ténèbres et nous transfère, par le secours du Dieu très-haut, dans le royaume de son Fils bien-aimé.

L'œuvre de la rédemption que ce Fils de son amour est venu accomplir ici-bas à sa gloire, n'a donc pu qu'avancer dans tous ceux qui se sont associés d'une façon quelconque aux pensées de l'Eglise, depuis les semaines de l'Avent jusqu'en ces derniers jours du Cycle. Tous dès lors, qui que nous soyons, nous devons rendre grâces à ce Père des lumières (Jac. i, 17.), qui nous a rendus dignes d'avoir une part, si minime soit-elle, à l'héritage des saints.

Mais tous aussi, quelle qu'en soit la mesure, nous avons à prier pour que le don excellent (Ibid.) déposé dans nos cœurs, se prête au développement que doit lui apporter le nouveau Cycle à la veille de s'ouvrir. Le juste ne peut rester stationnaire ici-bas : il faut qu'il descende ou qu'il monte ; et quelle que soit la hauteur où l'a déjà porté la grâce, il doit toujours, tant qu'il est en cette vie, monter davantage (Psalm. LXXXIII, 6.).

Les Colossiens, auxquels s'adressait l'Apôtre, avaient pleinement reçu l'Evangile ; la parole de vérité semée en eux y fructifiait merveilleusement dans la foi, l'espérance et l'amour (Col. 1, 4-6.) : or, loin d'en prendre occasion de relâcher sa sollicitude à leur égard, leurs progrès sont précisément la raison pour laquelle (Ibid 9.) saint Paul, qui priait déjà, ne cesse plus de le faire.

Prions donc nous aussi. Demandons à Dieu qu'il nous remplisse encore et toujours de sa divine Sagesse et de l'Esprit d'intelligence. Nous en avons besoin pour répondre à ses intentions miséricordieuses. L'année qui va commencer réserve à notre fidélité des ascensions nouvelles, laborieuses peut-être; mais elles seront récompensées par des aspects nouveaux dans les jardins de l'Epoux, et la production de fruits plus nombreux et plus suaves. Marchons donc d'une façon digne de Dieu, joyeux et forts sous le regard de son amour, dans la voie montante qui nous conduit au repos sans fin de la vision bienheureuse.

EVANGILE

La suite du saint Evangile selon saint Matthieu. Chap. XXIV.


Notre Seigneur Jésus-Christ enseignant ses disciples. Psautier. Avignon. XIVe.

" En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Lorsque vous verrez l'abomination de la désolation prédite par le prophète Daniel établie dans le lieu saint (que celui qui lit comprenne) : alors que ceux qui sont dans la Judée fuient aux montagnes ; que celui qui sera sur le toit n'en descende point pour prendre quelque chose en sa maison ; que celui qui sera dans le champ ne retourne point prendre sa tunique. Mais malheur aux femmes qui seront enceintes ou allaiteront en ces jours-là !
Priez pour que votre fuite n'arrive point en hiver ou le jour du Sabbat. Car la tribulation d'alors sera si grande, qu'il n'y en a point eu de pareille depuis le commencement du monde, et qu'il n'y en aura point. Et si ces jours n'étaient pas abrégés, aucune chair ne serait sauvée ; mais ces jours seront abrégés à cause des élus. Si alors quelqu'un vous dit : Voici que le Christ est ici, ou il est là, ne le croyez point.
Car il s'élèvera beaucoup de faux christs et de faux prophètes, et ils feront des choses étonnantes et de grands prodiges, au point de tromper, s'il était possible, les élus eux-mêmes. Je vous en préviens. Si donc ils vous disent : Le voici dans le désert, ne sortez point; Le voici dans le lieu le plus retiré de la maison, ne le croyez point. Comme l'éclair en effet sort de l'Orient et parait jusqu'en Occident, ainsi sera l'avènement du Fils de l'homme.
Partout où sera le corps, les aigles s'y rassembleront. Mais aussitôt après ces jours de tribulation, le soleil s'obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, les vertus des cieux seront ébranlées.
Et alors paraîtra dans le ciel le signe du Fils de l'homme, et alors se lamenteront toutes les tribus de la terre, et elles verront le Fils de l'homme venir sur les nuées du ciel avec une grande puissance et une grande majesté. Il enverra ses anges avec la trompette, et d'une voix éclatante ils rassembleront ses élus des quatre vents, d'une extrémité à l'autre du ciel.
Prenez une comparaison du figuier : quand ses branches sont déjà tendres et que ses feuilles poussent, vous savez que l'été est proche ; de même donc, quand vous verrez toutes ces choses, sachez que le Fils de l'homme est tout près et à la porte.
En vérité, je vous le dis, cette génération ne passera point que toutes ces choses ne s'accomplissent. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point."



Destruction de Jérusalem par Titus. Wilhelm von Kaulbach. XIXe.

Bien des fois, dans les semaines de l'Avent, les circonstances qui accompagneront le dernier avènement du Seigneur ont fait l'objet de nos méditations; sous peu de jours, les mêmes enseignements vont revenir pénétrer nos âmes d'une terreur salutaire. Qu'il nous soit permis aujourd'hui de nous retourner, dans le désir et la louange, vers le Chef adoré dont l'heure solennelle du jugement doit consommer l'œuvre et marquer le triomphe.

Ô Jésus, qui viendrez alors délivrer votre Eglise et venger Dieu d'insultes prolongées si longtemps, elle sera en effet terrible au pécheur cette heure de votre arrivée ! Il comprendra clairement alors que le Seigneur a tout fait pour lui-même, tout jusqu'à l'impie, réservé pour glorifier sa justice au jour mauvais (Prov. XVI, 4.). L'univers, conjuré pour la perte des méchants (Sap. V, 21.), se dédommagera enfin de la servitude de péché qui lui fut imposée (Rom. VIII, 21.). Vainement les insensés crieront aux montagnes de les écraser, afin d'échapper au regard de celui qui siégera sur le trône (Apoc. VI, 16.) : l'abîme refusera de les engloutir ; obéissant à celui qui tient les clefs de la mort et de l'enfer (Ibid. I, 18.), il vomira jusqu'au dernier ses tristes habitants au pied du redoutable tribunal.

Ô Jésus, Ô Fils de l'homme, combien grande apparaîtra votre puissance, entouré que vous serez d'autre part des célestes phalanges (Ibid. XIX, 14.) formant votre cour brillante, et rassemblant vos élus des quatre coins de l'univers ! Car nous aussi, nous vos rachetés, devenus vos membres en devenant ceux de votre Eglise bien-aimée, nous serons là en ce jour ; et notre place, ineffable mystère sera celle que l'Epoux réserve à l'Epouse : votre trône (Ibid. III, 21.), où, siégeant avec vous, nous jugerons les anges mêmes (I Cor. VI, 3.).

Dès maintenant tous les bénis du Père (Matth. XXV, 3.), ces élus dont la jeunesse s'est tant de fois renouvelée comme celle de l'aigle au contact de votre sang précieux (Ier Psalm. en, 5.), n'ont-ils pas leurs yeux préparés pour fixer sans faiblir, quand il se montrera au ciel, le Soleil de justice ? Dans leur faim accrue des lenteurs de l'exil, qui donc pourrait arrêter leur vol, quand paraîtra la proie sacrée de votre divin corps ? Quelle force romprait l'impétuosité de l'amour (Cant. VIII, 6.) qui les rassemblera au banquet de la Pâque éternelle ? Car c'est la vie et non la mort, la destruction de l'antique ennemie (I Cor. XV, 28.), la rédemption s'étendant jusqu'aux corps (Rom. VIII, 23.), le plein passage à la vraie terre promise, la Pâque en un mot, cette fois réelle pour tous et sans couchant, que proclamera la trompette de l'Ange sur les tombeaux des justes.

Quelle ne sera pas l'allégresse de ce vrai jour du Seigneur (Psalm. CXVII, 24.), pour tous ceux qui par la foi ont vécu du Christ, qui l'ont aimé sans le voir (I Petr. I, 8.) ! S'identifiant à Vous, Ô Jésus, malgré l'infirmité de leur chair fragile, ils ont continué ici-bas votre vie de souffrances et d'humiliations ; quel triomphe, quand, délivrés à jamais du péché, revêtus de leurs corps immortels, ils seront transportés au-devant de Vous pour être avec Vous toujours (I Thess IV, 6.) !

Mais leur joie immense sera surtout d'assister, en ce grand jour, à la glorification de leur Chef bien-aimépar la manifestation de la puissance qui lui fut donnée sur toute chair (Johan. XVII, 2.). C'est alors, ô notre Emmanuel, que, brisant la tête des rois et réduisant vos ennemis à vous servir de marchepied (Psalm. CIX.), vous apparaîtrez comme le seul prince des nations (Psalm. II.).

C'est alors que le ciel, la terre et l'enfer réunis, fléchiront les genoux (Philip. II, 10.) devant ce Fils de l'homme venu autrefois dans la forme d'esclave, jugé, condamné, mis à mort entre des scélérats ; alors vous jugerez, Ô Jésus, les juges iniques auxquels vous annonciez, du sein de vos humiliations, cette venue sur les nuées du ciel (Matth. XXVI, 64.). Et lorsque, la redoutable sentence une fois prononcée, les réprouvés iront au supplice éternel et les justes à la vie sans fin (Ibid. XXV, 46.), votre Apôtre nous apprend que, pleinement vainqueur de vos ennemis, roi sans conteste, vous remettrez au Père souverain ce royaume conquis sur la mort, comme l'hommage parfait du Chef et des membres (I Cor. XV, 24-28.).

Dieu sera tout en tous. Ce sera l'accomplissement de la prière sublime que vous apprîtes aux hommes (Matth. VI, 9.), et qui s'élève plus fervente chaque jour du cœur de vos fidèles, lorsque s'adressant à leur Père qui est aux cieux, ils lui demandent sans se lasser, au milieu de la défection générale, que son Nom soit sanctifié, que son règne arrive, que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Incomparable sérénité de ce jour où cessera le blasphème ; où, purifiée par le feu de la fange du péché, la terre sera un nouveau paradis !

Quel chrétien donc ne tressaillirait, dans l'attente de ce dernier des jours qui ouvrira l'éternité ? qui ne compterait pour bien peu les angoisses de la dernière heure, à la pensée que ces souffrances ne signifient rien autre chose sinon, comme le dit l'Evangile, que le Fils de l'homme est tout près et à la porte?

Ô Jésus, détachez-nous toujours plus de ce monde dont la figure passe (I Cor. VIII, 31.) avec ses vains travaux, ses gloires contrefaites et ses faux plaisirs. Ainsi que vous nous l'aviez annoncé, comme aux jours de Noé, comme à Sodome, les hommes continuent de manger et de boire, de s'absorber dans le trafic et la jouissance ; sans plus songer à la proximité de votre avènement que leurs devanciers ne se préoccupèrent du feu du. ciel et du déluge, jusqu'à l'instant qui les perdit tous (Luc. XVII, 16-30.).

Laissons-les se réjouir et s'envoyer des présents, comme le dit votre Apocalypse, à la pensée que c'en est fait du Christ et de son Eglise (Apoc. XI, 10.). Tandis qu'ils oppriment en mille manières votre cité sainte, et lui imposent des épreuves qu'elle n'avait point connues, ils ne se doutent pas que ce sont les noces de l'éternité qu'ils avancent; il ne manquait plus à l'Epouse que les joyaux de ces épreuves nouvelles, et la pourpre éclatante dont l'orneront ses derniers martyrs.

Pour nous, prêtant l'oreille aux échos de la patrie, nous entendons déjà sortir du trône la voix qui crie, au bruit des tonnerres qu'entendit le prophète de Pathmos :
" Louez notre Dieu, vous tous ses serviteurs, vous tous qui le craignez, petits et grands. Alléluia ! car Il règne Notre Seigneur tout-puissant. Réjouissons-nous et tressaillons, rendons-lui gloire ; car le temps des noces de l'Agneau est arrivé, et son Epouse s'est préparée (Ibid. XIX, 5-7.) !"
Encore un peu de temps, afin que se complète le nombre de nos frères (Ibid. VI, 11.) ; et, avec l'Esprit et l'Epouse, nous vous dirons dans l'ardeur de nos âmes trop longtemps altérées : " Venez, ô Jésus (Ibid, XXII, 17.) ! Venez nous consommer dans l'amour par l'union éternelle, à la gloire du Père, du Fils et du Saint-Esprit, dans les siècles sans fin !"

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dimanche, 11 novembre 2007 | Lien permanent

VIe jour dans l'Octave de la Toussaint.

- VIe jour dans l'Octave de la Toussaint.

" Vous êtes mon héritage, Seigneur, alleluia, dans la terre des vivants, alleluia, alleluia.
Tirez de cette prison mon âme ; elle louera votre nom dans la terre des vivants, alleluia, alleluia.
Gloire et honneur au Père, au Fils, au Saint-Esprit, dans les siècles des siècles, en la terre des vivants, alleluia, alleluia."



Paradis céleste. Legenda aurea. J. de Voragine. Anonyme. XVe.

Ainsi débutent les chants pour les morts au Missel mozarabe (In Missa defunctorum Officium (seu Introitus). Tu es portio mea, Domine, alleluia, in terra viventium, alleluia, alleluia.— V/. Educ de carcere animam meam ad comitendum nomini tuo : in terra viventium, alleluia, alleluia. — Gloria et honor Patri, et Filio, et Spiritui Sancto, in sa;cula saxulorum, amen : in terra viventium, alleluia, alleluia.). Les Grecs pareillement n'ont pas de mot qui revienne plus souvent que l'Alleluia dans l'Office des défunts (Goar, Nota 6a ad Officium Exsequiarum in Euchologio.). Or Grecs et Mozarabes ne font en cela qu'observer jusqu'à nos jours une coutume générale autrefois dans l'Eglise entière.

Saint Jérôme nous dit comment, à la mort de Fabiola, " tout le peuple romain rassemblé, les psaumes retentissaient éclatants, et le sublime Alléluia remplissant les temples ébranlait leurs toits d'or " (Hieron. ad Oceanum, de morte Fabiolae.).

Deux siècles plus tard, le récit des funérailles de sainte Radegonde par sa fille Baudonivie montre que, si des larmes soumises n'étaient pas interdites aux survivants et pouvaient parfois couler abondantes, l'usage des Gaules cependant ne différait pas en ce point de celui de Rome même (Baudonivia, Vita Radegundis, 28.).
C'est ce qu'atteste encore, pour les temps qui suivirent, le manuscrit de Reims cité par Dom Hugues Ménard en ses notes sur le Sacramentaire grégorien, et où l'on prescrit comme prélude aux prières de la sépulture le chant de l’In exitu Israël de Aegypto avec Alleluia pour Antienne.

Quand saint Antoine ensevelit au désert le corps de saint Paul ermite, le biographe de celui-ci nous raconte que, se conformant à la tradition chrétienne, Antoine chanta en la circonstance des hymnes aussi bien que des psaumes (Hieron. Vita S. Pauli primi eremitae, 16.). C'était bien la tradition chrétienne, en effet, universelle, identique sous tous les cieux.

Saint Jean Chrysostome constate lui aussi le fait, et il nous en donne l'explication :
" Dis moi ; ne sont-ce pas des vainqueurs que ces morts conduits par nous à la resplendissante lumière des flambeaux, au chant des hymnes ? Oui ; nous louons Dieu et lui rendons grâces : car, ce défunt, Il le couronne; Il a mis fin à son labeur ; Il le garde près de lui délivré de toute crainte. Ne cherche pas d'autre explication à ces hymnes, à ces psaumes : ils expriment la joie (Chrys. In epist. ad Hebr. Homil. IV.)."

Saint Denys ne parle pas autrement en son livre de la Hiérarchie ecclésiastique. Après avoir dit la joie du chrétien mourant qui voit approcher la fin de la lutte et l'éternelle sécurité (Dionys. De eccles. hierarch. Cap. VII, I, § 1, 2.) ; il ajoute :
" Les proches du défunt, ses proches en Dieu et dans la sainteté, le proclament bienheureux d'avoir vaincu enfin, et ils adressent des chants d'action de grâces au céleste auteur de la victoire. C'est en demandant pour eux-mêmes un sort semblable, qu'ils le conduisent à l'hiérarque, distributeur des saintes couronnes, auquel appartient d'accomplir les rites augustes ordonnés à l'égard de ceux qui se sont endormis dans le Seigneur (Ibid. § 3.)."

Suprêmes honneurs, autant que derniers devoirs rendus par l'Eglise à ses fils, et dont nous rappellerons demain quelques traits.


Paradis céleste. Bonaventura. Soliloquium de quattuor mentalibus exercitiis. XVe.

HYMNE

Nous emprunterons avec quelques Eglises les strophes suivantes au dixième Chant du Cathemerinon, qui déjà nous donnait hier l'Hymne mozarabe des morts.

" Cessez, lamentations ; mères, arrêtez vos larmes ; vous qui pleurez sur des enfants chéris, ne vous désolez pas : cette mort, c'est le renouvellement de la vie.

Que nous veulent dire ces marbres sculptés, ces splendides monuments, sinon que ce qu'ils gardent est, non pas mort, mais endormi ?

Ce corps que nous voyons gisant inanimé, encore un peu de temps, et il redeviendra le compagnon du principe spirituel qui est monté aux cieux.

Bientôt doit sonner l'heure où la vie, réchauffant ces ossements délaissés, les animant d'un sang fécond, y reprendra son premier séjour.

Inertes cadavres couchés dans la pourriture des tombeaux, voici qu'alertes comme l'oiseau ils s'élèveront dans les airs, associés aux mêmes âmes que jadis.

Ainsi reverdit la semence desséchée, morte elle aussi, ensevelie de même : elle sort de la glèbe où on l'avait enfouie, rappelant les épis d'autrefois.

Reçois maintenant, Ô terre, ce dépôt à ta garde laissé ; que ton sein lui soit doux : nous confions à tes profondeurs ces membres humains, noble dépouille, trésor sans prix.

Cette chair fut la demeure d'une âme créée par le souffle du Tout-Puissant ; le Christ fut son roi ; la Sagesse habita ces membres et leur communiqua sa divine chaleur.

Recouvre donc ce corps à toi confié : Il ne l'oubliera pas, Celui qui en fut l'auteur ; Il te le redemandera, ce trésor, avec les traits qu'Il y grava de Sa propre image.

Qu'ils viennent bientôt les temps promis où Dieu comblera toutes nos espérances ! Alors que s'ouvriront les tombes, il faudra que tu me rendes ce visage aimé qu'aujourd'hui je te livre.

Amen."


SÉQUENCE

Souvent assignée à d'autres fêtes, la Prose suivante, œuvre d'Adam de Saint-Victor, fut cependant elle aussi chantée en plusieurs lieux pour célébrer tous les Saints.

" Que l'Eglise d'ici-bas célèbre les joies de sa mère, l'Eglise des cieux ; que le retour des fêtes annuelles la porte à désirer les éternelles.

Que la mère prête secours à la fille en cette vallée de misère ; que les armées d'en haut nous aident à mener la bataille.

Le monde, la chair et les démons multiplient contre nous les combats ; quel assaut de spectres hideux ! La quiétude du cœur en est troublée.

Toute cette engeance a les jours de fête en horreur ; elle s'évertue d'un commun accord à faire disparaître la paix de la terre.

Ici tout est mélange confus d'espoir, de crainte, de tristesse et de joie : au ciel, à peine se fit, dit l'Apocalypse, une demi-heure de silence
(Apoc. VIII, 1.).

Que fortunée est cette cité où nulle fête ne prend fin ! Combien heureuse l'assemblée où tout souci est inconnu !

Là point de maladie, point de vieillesse ni de déclin ; point de tromperie, ni de crainte d'ennemis : mais concert unanime d'allégresse, unanime amour dans les cœurs.

Là sous leur triple hiérarchie, les Anges, habitants du ciel, se prosternent joyeux devant la trine et simple Unité qui gouverne le monde.

Ils admirent, sans se lasser , Dieu qu'ils contemplent ; ils jouissent de Lui, ne s'en rassasient pas, affamés qu'ils sont d'en jouir plus toujours.

Là sont nos pères, rangés dans l'ordre du mérite ; pour eux enfin toute ombre est tombée : dans la lumière ils voient la lumière
(Psalm. XXXV, 10.).

Ces saints dont la solennité se célèbre aujourd'hui, face à face maintenant, ils voient le Roi dans sa gloire.

Là resplendit la Reine des vierges, plus haut que tous les sommets : qu'elle daigne, auprès du Seigneur, excuser nos coupables chutes.

Par les suffrages des saints, que la grâce de Jésus-Christ nous conduise de la misère présente à leur état glorieux.

Amen."

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mardi, 06 novembre 2007 | Lien permanent

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