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lundi, 07 octobre 2024

7 octobre. Fête du Très Saint Rosaire. 1571, 1716.

- Fête du Très Saint Rosaire. 1571, 1716.

" Saint Dominique convertit cent mille albigeois en leur faisant connaître et aimer les mystères adorables du saint Rosaire. Imitons l'exemple de ce grand ouvrier des gloires temporelles de la Reine des Anges et nous travaillerons avec fruits à la conversions de ces Albigeois du [XXIe siècle] qui blasphèment tout ce qu'ils ignorent et se dépravent dans les choses qu'ils n'étudient qu'au profit de leurs abjectes passions."
M. l'abbé Combalot. Instructions.

Saint Dominique recevant le Très Saint Rosaire.
Retable de l'église Saint-Ronan. Locronan, Bretagne.

En action de grâces de la décisive victoire remportée à Lépante par la flotte chrétienne sur la flotte turque, le premier dimanche d'octobre 1571, le saint Pape Pie V institua une fête annuelle sous le titre de Sainte Marie de la Victoire ; mais peu après, le Pape Grégoire XII changea le nom de cette fête en celui de Notre-Dame-du-Rosaire.

Saint Dominique. Vittorio Crivelli. XVe.

Le Rosaire avait été institué par saint Dominique au commencement du XIIIe siècle. Par le zèle des Papes, et aussi par les fruits abondants qu'il produisait dans l'Église, il devenait de plus en plus populaire. Au XVe siècle, le bienheureux Alain de La Roche, Dominicain, fut suscité par Marie pour raviver cette dévotion si excellente.

Le bienheureux Alain de La Roche. Le Caravage. XVIIe.

Plus tard, dans les premières années du XVIIIe siècle, parut un homme extraordinaire appelé à bon droit le Dominique des temps modernes, et qui fut le grand propagateur, l'apôtre de la dévotion au saint Rosaire ; c'est saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Depuis saint Dominique, il n'y a pas eu d'homme plus zélé que ce grand missionnaire pour l'établissement de la confrérie du Rosaire : il l'érigeait dans tous les lieux où elle ne l'était pas; c'est le moyen qu'il jugeait le plus puissant pour établir le règne de Dieu dans les âmes. Il composa lui-même une méthode de réciter le Rosaire, qui est restée la meilleure entre toutes, la plus facile à retenir, la plus instructive et la plus pieuse. L'Apôtre de l'Ouest récitait tous les jours son Rosaire en entier, suivant sa méthode, et le faisait de même réciter publiquement tous les jours dans ses missions, et il a fait un point de règle à ses disciples de suivre son exemple.

La bataille de Lépante. Paul Véronèse. XVIIe.

Par son Rosaire quotidien, Montfort convertissait les plus grands pécheurs et les faisait persévérer dans la grâce et la ferveur de leur conversion ; il pouvait dire :
" Personne ne m'a résisté une fois que j'ai pu lui mettre la main au collet avec mon Rosaire !"
Il avait mille industries pour propager et faire aimer le Rosaire: là, c'étaient quinze bannières représentant les quinze mystères du Rosaire; ailleurs, d'immenses Rosaires qu'on récitait en marchant, dans les églises ou autour des églises, à la manière du chemin de la Croix. Il exaltait le Rosaire dans ses cantiques ; un tonnerre de voix répondait à la sienne, et tous les échos répétaient, de colline en colline, les gloires de cette dévotion bénie.

Saint Louis-Marie Grignon de Montfort.

Son oeuvre a continué après lui ; c'est le Rosaire à la main que la Vendée, en 1793, a défendu ses foyers et ses autels ; c'est aussi le Rosaire ou le chapelet à la main que les populations chrétiennes paraissent dans toutes les cérémonies religieuses.

Extraits de l'Année liturgique de dom Prosper Guéranger :

Les fils du siècle ont coutume, à la fin d'une année, de récapituler leurs profits. Ainsi s'apprête à faire aussi l'Eglise. Bientôt nous la verrons dénombrer solennellement ses élus, inventorier leurs reliques saintes et parcourir les tombes de ceux qui dorment dans le Seigneur, rappeler la consécration à l'Epoux de sanctuaires anciens et nouveaux. Aujourd'hui, c'est d'un résumé plus auguste encore, d'un profit plus grand qu'il s'agit : l'Eglise inscrit en tête du bilan sacré le gain provenu à Notre-Dame des mystères qui composent le Cycle. Noël, la Croix, le triomphe de Jésus, c'est notre sainteté à tous ; c'est aussi, mais combien mieux, et tout d'abord, celle de Marie. Offrant donc premièrement à l'auguste Souveraine du monde le diadème qui lui revient avant tous, l'Eglise le compose à bon droit de la triple couronne des mystères sanctifiants qui furent pour elle toute joie, toute douleur et toute gloire.

Mystères joyeux, qui nous redisent l'Annonciation, la Visitation, la Nativité de Jésus, la Purification de Marie, Jésus retrouvé au temple. Mystères douloureux d'agonie, de flagellation, de couronnement d'épines, de portement de croix, de crucifiement. Mystères glorieux : Résurrection, Ascension du Sauveur, Pentecôte, Assomption, couronnement de la Mère de Dieu. C'est le Rosaire de Marie ; plant fécond dont le salut de Gabriel fit épanouir les fleurs, dont les guirlandes parfumées relient de Nazareth notre terre au sommet des cieux.

Sous sa forme présente, Dominique le révéla au monde au temps de la crise albigeoise, vraie guerre sociale, laissant trop prévoir ce que serait désormais l'histoire pour la cité sainte. Il fit plus alors que la lutte armée pour la défaite de Satan.

Il est aujourd'hui la ressource suprême de l'Eglise. Sommaire facile, toujours présent, du Cycle liturgique, on dirait que les antiques formes de la prière sociale n'étant plus à la taille des peuples, l'Esprit-Saint veut par lui sauvegarder pour les isolés de nos tristes temps l'essentiel de cette vie d'oraison, de foi, de vertu chrétienne, que la célébration publique du grand Office entretenait jadis parmi les nations. Dès avant le XIIIe siècle, la piété populaire connaissait l'usage de ce qu'elle se plut à nommer le psautier laïque, à savoir la Salutation angélique cent cinquante fois répétée ; mais ce fut le partage de ces Ave Maria en dizaines, attribuées à la considération d'un mystère particulier pour chacune, qui constitua le Rosaire. Divin expédient, simple comme l'éternelle Sagesse qui l'avait conçu, et dont la portée fut grande ; car en même temps qu'il amenait à la Reine de miséricorde l'humanité dévoyée, il écartait d'elle l'ignorance, nourricière d'hérésie, et lui réapprenait " les sentiers consacrés par le sang de l'Homme-Dieu et les larmes de sa Mère ".

C'est l'expression du grand Pontife qui sous l'angoisse universelle, naguère encore, indiquait le salut où plus d'une fois déjà l'ont trouvé nos pères. Les Encycliques de Léon XIII ont consacré le présent mois à cette dévotion chérie du ciel; il a honoré Notre-Dame en ses Litanies d'une invocation nouvelle à la Reine du très saint Rosaire ; il a donné son dernier développement à la solennité de ce jour. Elevée désormais à la dignité de seconde Classe, riche d'un Office propre exprimant son objet permanent, cette fête est deux fois en outre le monument d'insignes victoires, honneur du nom chrétien.

Soliman II, le plus grand des sultans, avait mis à profit la dislocation de l'Occident par Luther, et rempli le XVIe siècle de la terreur de ses exploits. Il laissait à son fils, Sélim II, l'espoir fondé enfin de réaliser le programme de sa race: l'humiliation squs le Croissant de Rome et de Vienne, sièges de la papauté et de l'empire. La flotte turque, maîtresse de la Méditerranée presque entière, menaçait d'aborder bientôt l'Italie, quand, le 7 octobre 1571, eut lieu sa rencontre, au golfe de Lépante, avec les galères pontificales soutenues des forces de l'Espagne et de Venise. C'était un dimanche : par tout le monde, les confréries du Rosaire accomplissaient leur œuvre de supplication ; l'œil éclairé d'en haut, saint Pie V suivait du Vatican l'action engagée par le chef de son choix, don Juan d'Autriche, contre les trois cents vaisseaux de l'Islam. Journée mémorable, où la puissance navale des Ottomans fut anéantie ! L'illustre Pontife, dont l'œuvre était achevée, ne devait point célébrer ici-bas l'anniversaire du triomphe ; mais il voulut toutefois en immortaliser le souvenir par une commémoration annuelle de Sainte-Marie de la Victoire. Son successeur, Grégoire XIII, changea ce titre en celui de Sainte-Marie du Rosaire, et désigna le premier dimanche d'octobre pour la fête nouvelle, autorisant à la célébrer les églises qui posséderaient un autel sous la même invocation.

Cette concession restreinte devait se généraliser un siècle et demi plus tard. Innocent XI avait, en mémoire de la délivrance de Vienne par Sobieski, étendu la fête du Très Saint Nom de Marie à toute l'Eglise. En 1716, Clément XI voulut de même reconnaître par l'inscription de la fête du Rosaire au calendrier universel la victoire que le prince Eugène venait de remporter, sous les auspices de Notre-Dame des Neiges, à Péterwardin, au cinq août de cette année ; victoire suivie de la levée du siège de Corfou, et que devait compléter, l'année d'après, la prise de Belgrade.