dimanche, 19 mai 2024
19 mai. Saint Pierre-Célestin, Célestin V, pape, fondateur de la branche bénédictine des Célestins. 1296.
Statue de saint Pierre-Célestin.
Jésus ressuscité appelle en ce jour l'humble Pierre-Célestin, Pontife suprême, mais à peine assis sur la chaire apostolique, qu'il en est descendu pour retourner au désert.
Entre tant de héros dont est formée la chaîne des Pontifes romains, il devait s'en rencontrer à qui fût donnée la charge de représenter plus spécialement la noble vertu d'humilité ; et c'est à Pierre Célestin que la grâce divine a dévolu cet honneur. Arraché au repos de sa solitude pour être élevé sur le trône de saint Pierre et tenir dans ses mains tremblantes les formidables clefs qui ouvrent et ferment le ciel, le saint ermite a regardé autour de lui ; il a considéré les besoins de l'immense troupeau du Christ, et sondé ensuite sa propre faiblesse.
Saint Pierre-Célestin. Livre d'heures de Jean de Vy. XIVe.
Oppressé sous le fardeau d'une responsabilité qui embrasse la race humaine tout entière, il s'est jugé incapable de supporter plus longtemps un tel poids ; il a déposé la tiare, et imploré la faveur de se cacher de nouveau à tous les regards humains dans sa chère sollicitude. Ainsi le Christ, son Maître, avait d'abord enfoui sa gloire dans une obscurité de trente années, et plus tard sous le nuage sanglant de sa Passion et sous les ombres du sépulcre. Les splendeurs de la divine Pâque ont tout à coup dissipé ces ténèbres, et le vainqueur de la mort s'est révélé dans tout son éclat.
Mais il veut que ses membres aient part à son triomphe, et que la gloire dont ils brilleront éternellement soit, comme la sienne, en proportion de leur empressement à s'humilier dans les jours de cette vie mortelle. Quelle langue pourrait décrire l'auréole qui entoure le front de Pierre Célestin, en retour de cette obscurité au sein de laquelle il a cherché l'oubli des hommes avec plus d'ardeur que d'autres ne recherchent leur estime et leur admiration ? Grand sur le trône pontifical, plus grand au désert, sa grandeur dans les cieux dépasse toutes nos pensées.
Pierre de Morone, nommé Célestin, du nom qu'il prit lorsqu'il fut créé pape, naquit de parents honnêtes et pieux à Isernia dans les Abruzzes. il était le onzième des douze enfants de cet humble couple chrétien. Il reçut une éducation plus soignée que ses frères, grâce aux dispositions extraordinaires d'intelligence et de piété qu'il montra dès son bas âge.
A peine entré dans l'adolescence, il se retira au désert pour garantir son âme des séductions du monde. Il la nourrissait dans cette solitude par la contemplation, et réduisait son corps en servitude, portant sur sa chair une chaîne de fer.
Pendant trois ans, malgré son jeûne quotidien, il fut assailli de toutes sortes de pensées de découragement, de sensualité, de volupté ; mais il était fortifié par les fréquentes visions des Anges. Il consentit à recevoir le sacerdoce, afin de trouver dans l'Eucharistie un soutien contre les tentations.
La sainteté du solitaire lui attira des disciples : ce fut l'origine de cette branche de l'Ordre de Saint-Benoît, dont les religieux sont appelés Célestins. Ils vivaient sous des huttes faites avec des épines et des branches, mais Dieu réjouissait leur affreuse solitude par de suaves harmonies célestes et par la visite des bienheureux esprits.
Bien plus austère que ses religieux, Pierre ne mangeait que du pain de son très noir et très dur ; jeûnant quatre carêmes, ne prenant généralement que des herbes crues, une seule fois tous les trois jours. Couvert d'instruments de pénitence, il couchait sur le fer plutôt que sur la terre : une voix céleste vint lui ordonner de diminuer cette pratique excessive de la mortification.
L'Eglise Romaine ayant été longtemps sans pasteur, après une vacance du Saint-Siège pendant vingt-sept mois, le choix des cardinaux alla chercher l'humble moine au fond de son désert. Âgé de soixante-douze ans, notre Saint subit en pleurant son élection sur la chaire de saint Pierre.
Comme on place la lumière sur le chandelier, cet événement peu ordinaire ravit tout le monde de joie et d'admiration.
Mais lorsque Pierre, élevé à cette dignité sublime, sentit que la multitude des affaires préoccupant son esprit, il pouvait à peine vaquer comme auparavant à la méditation des choses célestes, il renonça volontairement à la charge et à la dignité.
Anonyme français du XVIIe.
Il reprit donc son ancien genre de vie, et s'endormit dans le Seigneur, par une mort précieuse, qui fut rendue plus glorieuse encore par l'apparition d'une croix lumineuse que l'on vit briller dans les airs au-dessus de l'entrée de sa cellule. Pendant sa vie et après sa mort, il éclata par un grand nombre de miracles qui, ayant été soigneusement examinés, portèrent Clément V à l'inscrire au nombre des Saints, onze ans après sa mort.
On ira lire avec profit les pages que les Petits Bollandistes, Rhorbacher, Alzog et Darras consacrent, dans leurs notices, consacrent à la fin de la vie de saint Pierre-Célestin et à sa réclusion volontaire qui fut organisée et surveillée fermement par son successeur Boniface VIII qui craignait que le parti de Philippe Le Bel n'instrumentalisât notre saint pour sa cause. La suite de l'histoire lui donnera raison au point de mourir des suites des blessures infligées par le fils de Cathares manichéen Nogaret, mandaté par ce prince si nuisible à l'histoire de France et à l'histoire de l'Eglise.
Mort de Boniface VIII des suites des blessures infligées
Votre nom, Ô Célestin, brillera jusqu'au dernier jour du monde sur la liste des Pontifes romains ; vous êtes l'un des anneaux de cette chaîne qui rattache la sainte Eglise à Jésus son fondateur et son époux ; mais une plus grande gloire vous est réservée, celle de faire cortège à ce divin Christ ressuscité. La sainte Eglise, qui un moment s'est inclinée devant vous pendant que vous teniez les clefs de Pierre, vous rend depuis des siècles et vous rendra jusqu'au dernier jour l'hommage de son culte, parce qu'elle reconnaît en vous un des élus de Dieu, un des princes de la céleste cour.
Prophétie illustrée de saint Pierre-Célestin.
Et nous aussi, Ô Célestin ! nous sommes appelés à monter là où vous êtes, à contempler éternellement comme vous le plus beau des enfants des hommes, le vainqueur de la mort et de l'enfer. Mais une seule voie peut nous y conduire : celle que vous avez vous-même suivie, la voie de l'humilité. Fortifiez en nous cette vertu, Ô Célestin ! Et allumez-en le désir dans nos cœurs. Substituez le mépris de nous-mêmes à l'estime que nous avons trop souvent le malheur d'en faire. Rendez-nous indifférents à toute gloire mondaine, fermes et joyeux dans les abaissements, afin qu'ayant " bu l'eau du torrent ", comme notre Maître divin, nous puissions un jour, comme lui et avec vous, " relever notre tête " et entourer éternellement le trône de notre commun libérateur."
Boniface VIII publiant les Décrétales. Liber sextus Decretalium. XIVe.
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vendredi, 17 mai 2024
17 mai. Saint Pascal Baylon, Franciscain. 1592.
- Saint Pascal Baylon, Franciscain. 1592.
Papes : Paul III ; Clément VIII. Rois de France : François Ier ; Henri IV*.
" On doit avoir pour Dieu le coeur d'un enfant, pour le prochain le coeur d'une mère, pour soi-même le coeur d'un juge."
Saint Pascal Baylon.
Saint Pascal Baylon - Eglise Saint-Pierre et Saint-Paul.
Saint Pascal Baylon naquit en Espagne, le 17 mai 1540, d'humbles cultivateurs, riches des vertus chrétiennes. Occupé dès l'âge de sept ans, à la garde des troupeaux, il passait son temps en prières et en lectures ; on dit que les Anges eux-mêmes lui donnèrent des leçons.
Le petit Pascal se plaisait surtout à réciter le Pater. Quoique pauvre, il trouvait le moyen de faire l'aumône en donnant une partie de sa nourriture à ceux qui en avaient besoin. Il était le modèle aimé et respecté de tous les bergers de la contrée. Dans un âge si tendre, il connaissait l'usage assidu des cilices, des jeûnes, des disciplines sanglantes ; on le voyait marcher pieds nus à travers les ronces et les épines, en expiation de ses péchés. Le maître chez qui ses parents l'avaient placé voulait le faire héritier de tous ses biens, mais Pascal ne convoitait que l'héritage de l'amour de Dieu et la pauvreté religieuse.
Vers l'âge de vingt ans, Pascal se sentait appelé à la vie religieuse, se rendit dans le royaume de Valence pour rejoindre le couvent des franciscains " Soccolans ", construit dans un lieu désert, près de la ville de Montforte.
Eglise Saint-Luxor. Zicavo. Corse. XVIIe.
Les " Soccolans " ou les " Alcantarins ", constituaient une réforme particulièrement austère des Francisains observants, faite par Pierre Garavito dit Pierre d’Alcantara. Pierre Garavito né en 1499 à Alcantara (Estramadure) où son père était gouverneur. A quatorze ans, il perdit son père, sa mère se remaria et il partit étudier les arts libéraux, la philosophie et le droit canon à Salamanque où il décida d'entrer chez les Frères Mineurs dont il reçut l'habit, en 1515, au couvent de Los Majaretes.
En 1519 il fut choisi comme gardien du couvent de Badajoz ; ordonné prêtre en 1524, il commença une si brillante carrière de prédicateur qu'on l'appelât à la cour du Portugal. Elu provincial de son Ordre (province Saint-Gabriel) en 1538, il instaura un régime très austère et, son mandat terminé, il se retira dans un désert, à l'embouchure du Tage, où il fonda un couvent d'ermites (1542).
Rappelé dans sa province (1544), il y fonda, près de Lisbonne, un couvent qui sera le germe d'une province nouvelle (1550). Lors d'un voyage à Rome, il reçut l'approbation de Jules III pour expérimenter une réforme radicale, sous la juridiction des mineurs observants dont le commissaire général le nomme commissaire général des mineurs réformés d'Espagne (1556) ; Paul IV lui donna tous pouvoirs pour ériger de nouveaux couvents (1559).
Pour revenir à notre Saint, son allure un peu gauche et son accoutrement bizarre, mirent en défiance les supérieurs qui lui refusèrent l'entrée du couvent. Il reprit alors son métier de berger chez des cultivateurs du voisinage, sans s'éloigner pour ne pas perdre des vue le petit campanile du couvent vers lequel se portaient ses aspirations, suivant par la pensée les offices dont il entendait les sonneries, et s’unissant profondément à la messe. Un jour que la cloche annonçait l'approche de 1'élévation, et qu’il était à genoux une hostie lui apparut soutenue par deux anges.
Les vertus de l'enfant, déjà si extraordinaires, devinrent dans le religieux, des vertus véritablement merveilleuses. Son obéissance était aussi parfaite que possible. Traité rigoureusement par son supérieur, il disait à ceux qui le plaignaient :
" Taisez-vous : le Saint-Esprit a parlé par la bouche de notre supérieur."
Quand on lui proposait de faire quelque chose, il disait souvent :
" Je ferai comme l'obéissance dira."
Anonyme espagnol du XVIIe.
Sa mortification était effrayante et ne le cédait en rien à celle des anciens solitaires. Sa charité pour les pauvres, quand il était portier, dépassait les limites ; du moins ses supérieurs le blâmaient à ce sujet ; mais il leur répondait naïvement :
" S'il se présente douze pauvres et que je donne à dix, il est bien à craindre que l'un de ceux que je renvoie ne soit précisément Jésus-Christ."
Il avait aussi une dévotion particulière envers la très Sainte Vierge Marie. Quand il le pouvait, il conduisait son troupeau auprès du sanctuaire de Notre-Dame de la Sierra. Sur sa houlette, il avait sculpté l'image de Notre-Dame, surmontée d'une hostie rayonnante, afin d'avoir toujours sous les yeux le double objet de sa dévotion. A genoux, au milieu des champs, devant sa houlette, il priait avec autant de piété que s'il se fût trouvé à l'église. Tout ce qui se présentait à son regard servait à exciter sa foi. Sans cesse il méditait sur les merveilles de la création, et s'élevait, vers Dieu qu'il contemplait dans toutes ses œuvres. Il eut plusieurs fois des ravissements et ne put pas toujours cacher aux yeux des hommes les faveurs dont il était comblé par Dieu.
Pascal prononça ses vœux perpétuels le jour de la Purification de la sainte Vierge de l'an 1565, n'ayant pas encore vingt-cinq ans accomplis. Son père gardien aimait à dire qu'il n'avait connu personne qui fût à la fois plus dur et plus doux que frère Pascal :
" plus dur à lui-même et plus doux pour les autres."
L'idéal qu'il se proposait était d'avoir " pour Dieu un cœur de fils, pour le prochain un cœur de mère, et pour lui-même un cœur de juge ".
Pascuale Lienzo. Espagne. XVIIe.
Quand il changeait de couvent, conformément à la coutume de son ordre qui veut ainsi prévenir les attaches secrètes du cœur, on ne l'entendait jamais émettre la moindre plainte. Il trouvait là une excellente occasion de se regarder comme un étranger sur la terre. En quelque lieu qu'il allât, il était toujours le même, gai, doux, affable et très déférent pour tous. Dans les différents couvents où il passait, Pascal était ordinairement chargé de la porterie et du réfectoire, parce qu'on le savait affable, discret, vigilant, actif et fidèle. Comme portier, il devait distribuer aux pauvres les restes de la table des religieux, et pour que cette aumône fût profitable à leur âme autant qu’à leur corps, il adopta l’usage de prier avec eux avant et après chaque repas.
A l'ombre du cloître, son amour pour la sainte Eucharistie grandit encore. Le plus souvent, quand ses fonctions ne le retenaient pas ailleurs, on le trouvait à 1'église, tout absorbé en Dieu. Le premier, il était debout au milieu de la nuit pour les saintes veilles ; le dernier, il regagnait sa pauvre couche pour y prendre un très court repos.
Pendant quelques temps aussi, il remplit l'office de quêteur. Sa première visite, en arrivant dans un village, était pour l'hôte divin du tabernacle. Et quand, le soir, il rentrait au monastère, épuisé de fatigue, pour se dédommager de n'avoir pu passer auprès de son bien-aimé tout le temps de ses courses, il consacrait une grande partie de la nuit à l'adoration du Très Saint-Sacrement.
Imagerie populaire du XIXe.
Le général de son ordre, Christophe de Cheffontaines, étant à Paris, il fut député vers lui pour les affaires de sa province. Il partit pour la France, sans se laisser effrayer par les dangers qu'il aurait à affronter de la part des huguenots, maîtres de presque toutes les villes qu'il lui fallait traverser. Maintes fois il fut exposé à la fureur des hérétiques qui le poursuivirent à coups de pierres et de bâton. C’est en une de ces occasions qu’il reçut à l’épaule une blessure dont il souffrit tout le reste de sa vie. Deux fois il fut arrêté comme espion et menacé de mort. Mais Dieu le délivra de tout danger.
Etant près d'Orléans, il se vit environné d'une troupe de gens qui lui demandèrent s'il croyait que le corps de Jésus-Christ était dans le sacrement de l'Eucharistie. Sur la réponse qu'il leur fit, ils voulurent entrer en controverse avec lui, pour se donner le plaisir de l'embarrasser par leurs subtilités. Mais quoiqu'il n'eût de la science théologique qu'autant qu'il avait plu à Dieu de lui en communiquer par infusion, et qu'il ne sût point d'autre langue que celle de son pays, il les confondit de telle sorte, qu'ils ne purent lui répliquer qu'à coups de pierres. Il en fut quitte pour quelques blessures dont une à la bouche qui lui donna l’air d’un éternel sourire.
Basilique Saint-Pascal Baylon. Villareal. Espagne.
Etant heureusement sorti de leurs mains, il passa devant la porte d'un château où il demanda par aumône un morceau de pain, comme il avait coutume de faire lorsqu'il était pressé par la faim. Le maître du lieu était un gentilhomme huguenot, grand ennemi des catholiques, et il était à table lorsqu'on lui dit qu'il y avait à la porte une espèce de moine en fort mauvais équipage qui demandait l'aumône.
Il le fit entrer, et après avoir longtemps considéré son habit déchiré, et son visage basané, il jura que c'était un espion espagnol, et il l’aurait tué si sa femme, qui en eut compassion, ne l'eût fait secrètement mettre à la porte, mais sans songer à lui donner un morceau de pain. Une pauvre femme catholique du village voisin lui fit cette charité ; lorsqu'après avoir repris ses forces, il se croyait en quelque sureté, il pensa être sacrifié de nouveau à la fureur de la populace que son habit avait attirée.
Un de la bande le saisit, sans s'expliquer sur ce qu'il voulait faire, et le jeta dans une étable qu'il ferma à la clef. Pascal se prépara toute la nuit à mourir le lendemain ; mais au lieu de la mort qu'il attendait, celui qui l'avait renfermé vint lui apporter l'aumône, et le fit sortir deux heures après le soleil levé.
Lorsqu'il se fut acquitté de sa mission auprès de son général, saint Pascal retourna en Espagne. En chemin, il vit venir à lui un cavalier qui, sans le saluer, lui mit la pointe de la lance contre la poitrine, et lui demanda :
" Où est Dieu ?"
Pascal, sans s'effrayer, mais aussi sans avoir le temps de réfléchir, lui répondit :
" Dans le ciel."
Le cavalier retira aussitôt sa lance, et partit sans rien dire de plus. Pascal, d'abord étonné de cette conduite, la comprit en réfléchissant davantage : le soldat l'avait épargné, parce qu'il s'était contenté de dire que Dieu est dans le ciel ; s'il avait ajouté qu'il est aussi dans l’Eucharistie, il l'aurait percé de sa lance.
Notre Saint crut alors que Dieu l’avait jugé indigne de la couronne du martyre.
On ne l'entendit jamais parler des dangers qu'il avait courus ; il se contentait de répondre en peu de mots aux questions qu’on lui posait, en supprimant avec soin tout ce qui aurait pu lui attirer quelques louanges.
Il passa les dernières années de sa vie au couvent Notre-Dame-du-Rosaire de Villareal, près de Valence. Un jour, au cours du saint sacrifice de la messe, Dieu lui révèla sa mort prochaine dont il conçut une vive joie.
Quelques jours après, il tomba gravement malade. Transporté à l’infirmerie, il y reçut les derniers sacrements avec une tendre piété, et il s'endormit doucement dans le Seigneur en prononçant le nom de Jésus. C'est le dimanche de la Pentecôte, 17 mai 1592, au moment de l'élévation de la sainte hostie dans la chapelle du couvent.
De nombreux miracles, accomplis à son sépulcre, y attirèrent de grands concours de peuple. Le 29 octobre 1618, le pape Paul V le déclara bienheureux et permit au royaume de Valence de célébrer son office. En 1621, Grégoire XV accorda cette même faveur à tous les religieux de l'ordre de Saint-François. Le 16 octobre 1690, Alexandre VIII l'inscrivit au catalogue des saints. Enfin il fut proclamé patron des congrès et oeuvres eucharistiques, le 28 novembre 1897, par Léon XIII.
Le 13 août 1936, sa tombe fut ignoblement profanée par les bêtes féroces révolutionnaires espagnoles qui brûlèrent sa dépouille incorrompue. Les ossements calcinés furent recueillis et déposés dans une nouvelle châsse le 3 juin 1952.
Saint Pascal Baylon est célèbre par sa dévotion à la Sainte Eucharistie ; il passait des heures entières, souvent ravi en Dieu, devant le Tabernacle, et parfois on le voyait suspendu en l'air par l'effet du divin amour. Quand il ne pouvait être de corps devant le Très Saint-Sacrement, il y était ordinairement en esprit. Pendant la Messe de ses funérailles, on vit ses yeux s'ouvrir deux fois, à l'élévation de l'hostie et du calice.
Custode-reliquaire de saint Pascal Baylon. XIXe.
PRIERE
" Les cieux se sont ouverts pour vous recevoir, Ô Pascal ! Dès ici-bas, l'ardeur de votre contemplation vous fit souvent pressentir les délices de l'éternité ; mais aujourd'hui tous les voiles sont abaissés, et vous contemplez pour jamais celui que vous avez tant désiré. Il ne s'agit plus pour vous de s'unir à lui par la souffrance et les abaissements ; c'est sa propre gloire, sa félicité, sa victoire, qu'il vous invite à partager.
Daignez jeter un regard sur nous qui n'avons pas votre empressement à suivre les traces du Rédempteur, et qui ne possédons encore que l'espérance d'être réunis à lui dans son éternité. Soutenez notre faiblesse, et obtenez-nous cet amour qui fait aller droit à Jésus, qui passe par-dessus les obstacles de la chair et du sang, et établit l'homme dans une parfaite conformité avec son modèle divin Faites-nous aspirera la transformation en Jésus ressuscité, qui ne peut plus mourir. Les arrhes de cette transformation sont déjà en nous par la communion au mystère pascal ; qu'elles se complètent par notre fidélité à nous tenir près de notre chef triomphant. S'il nous laisse encore dans la vallée des larmes, son œil nous suit, son amour aspire à nous voir fidèles ; encore un peu de temps, et il paraîtra.
" Voici que j'arrive vite, nous dit-il ; tiens ferme ce que tu as reçu ; je suis à la porte, et je frappe déjà. Celui qui entendra ma voix et m'ouvrira la porte, j'entrerai près de lui, et je ferai festin avec lui, et lui avec moi." (Apoc. III, 11, 20.). Ainsi la Pâque du temps se résoudra dans la Pâque éternelle. Priez, Ô Pascal, afin qu'à votre exemple nous tenions ferme ce que nous possédons déjà par la grâce de notre divin Ressuscité."
* On ne répètera jamais assez que les conditions d'accession au trône de France d'Henri de Navarre relèvent plus de l'usurpation que d'autre chose. An France, c'est le sacre qui fait le roi, la primogéniture mâle n'étant qu'une pratique admise tacitement par tous avec le temps. De ce point de vue, les formules employées lors du " sacre " d'Henri de Navarre (nous parlons ici des formules précises rédigées par saint Remi), et en particulier les serments que le souverain prête lors de ce sacramental - celui " d'exterminer les hérétiques " notamment -, ne furent pas tous prononcés. C'est Louis XIII, par sa consécration de la France à Notre Dame qui légitimera et affermira un peu plus la légitimité douteuse, contestable et contestée des Bourbons sur l'auguste trône des Francs chrétiens.
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dimanche, 12 mai 2024
12 mai. Saint Pancrace, martyr. 304.
- Saint Pancrace, martyr. 304.
Pape : Saint Marcelin. Empereur : Dioclétien.
" La mort du juste est la condamnation de la vie des impies, et la sagesse du jeune âge celle d'une longévité criminelle."
Sap. IV, 16.
Statue processionnelle. Eglise Saint-Pancrace.
Pancrace vient de pan, qui signifie tout, et gratus, agréable, et citius, vite, tout prompt à être agréable, car dès sa jeunesse il le fut. Le Glossaire dit encore que Pancras veut dire rapine, pancratiarius, soumis aux fouets, Pancrus, pierre de différentes couleurs : en effet, il ravit des captifs pour butin, il fut soumis au tourment du fouet, et il fut décoré de toutes sortes de vertus.
Saint Pancrace était un enfant d'une illustre naissance, de Synnade en Phrygie. Ayant perdu son père de bonne heure, il demeura sous la tutelle de Denis, un de ses oncles, dont le martyrologe romain fait aussi mémoire aujourd'hui comme d'un saint confesseur.
Legenda aurea. Bx. J. de Voragine. R. de Montbaston. XIVe.
Cet excellent tuteur considéra toujours Pancrace comme son propre fils et prit un soin scrupuleux de son éducation. Lorsqu'il vit Pancrace âgé de 14 ans, il décida de faire le voyage de Rome où ils jouissaient d'ailleurs d'un riche patrimoine.
Là, ils demandèrent instamment au pape Caïus de recevoir le baptême et d'être pleinement instruits des mystères de la religion chrétienne. Ce saint pape leur accorda avec grand plaisir ce qu'ils souhaitaient. Denis mourut bientôt de sa belle mort après avoir soupiré après la couronne du martyr.
Dans leur quartier était caché, avec les fidèles, le pape Corneille, qui avait contrinué à la conversion à la foi de Notre Seigneur Jésus-Christ de Denys et Pancrace.
Pancrace fut bientôt pris et conduit par-devant César. Il avait alors environ quatorze ans. L'empereur, Dioclétien, fit tous ses efforts pour l'obliger de sacrifier aux idoles. Dans un premier mouvement, Dioclétien traita Pancrace avec bonté parce que son père et lui avait été ami et qu'il était charmé par le caractère et la beauté de notre jeune Saint.
Dioclétien lui dit :
" Jeune enfant, je te conseille de ne pas te laisser mourir de male mort ; car, jeune comme tu es, tu peux facilement te laisser induire en erreur, et puisque ta noblesse est constatée et que tu es le fils, d'un de mes plus chers amis, je t'en prie, renonce à cette folie, afin que je te puisse traiter comme mon enfant."
Pancrace lui répondit :
" Bien que je sois enfant par le corps, je porte cependant en moi le coeur d'un vieillard, et grâce à la puissance de mon Seigneur Jésus-Christ la terreur que tu nous inspires ne nous épouvante pas plus que ce tableau placé devant nous. Quant à tes Dieux que tu m’exhortes à honorer, ce furent des trompeurs, des corrupteurs de leurs belles-soeurs ; ils n'ont pas eu même de respect pour leurs père et mère que si aujourd'hui tu avais des esclaves qui leur ressemblassent tu les ferais tuer incontinent. Je suis étonné de constater comment un empereur si éclairé me commande d'avoir de l'estime pour des dieux qui n'étaient que des hommes et dont la vie était si corrompue que si vos esclaves ne vivaient pas mieux aujourd'hui, vous les feriez punir exemplairement."
L'empereur donc, se réputant vaincu par un enfant, le fit décapiter sur la voie Aurélienne, vers l’an du Seigneur 287. Son corps fut enseveli avec soin par Octavie (Cocavilla), femme d'un sénateur.
Au rapport de Grégoire de Tours (Miraculorum, lib. I, chap. XXXIX.), si quelqu'un ose prêter un faux serment sur le tombeau du martyr, avant qu'il soit arrivé au chancel du choeur, il est aussitôt possédé du démon et devient hors de lui, ou bien il tombe sur le pavé et meurt.
Il s'était élevé un procès assez important entre deux particuliers. Or, le juge connaissait parfaitement le coupable. Le zèle de la justice le porta à les mener tous les deux à l’autel de saint Pierre ; et là il força celui qu'il savait avoir tort à confirmer par serment sa prétendue innocence, en priant l’apôtre de venger la vérité par une manifestation quelconque.
Or, le coupable ayant fait serment et n'ayant éprouvé aucun accident, le juge, convaincu de la malice de cet homme, et enflammé du zèle de la justice s'écria :
" Ce vieux Pierre est ou trop bas, ou bien il cède à moindre que lui. Allons vers Pancrace ; il est jeune, requérons de lui ce qui en est."
On y alla ; le coupable eut l’audace de faire un faux serment sur le tombeau du martyr ; mais il ne put en retirer sa main et expira bientôt sur place.
C'est de là que vient la pratique encore observée aujourd'hui de faire jurer, dans les cas difficiles, sur les reliques de saint Pancrace.
Martyr de saint Pancrace. Vie de saints. R. de Monbaston. XIVe.
Des années plus tard, quand saint Grégoire le Grand convertit en monastère la maison ancestrale de saint Pancrace, qui était voisine de celle de son oncle Denys, il enseigna à ses moines de vénérer le jeune Saint qui avait souffert le martyre juste à côté de leur couvent, et, quand il devint pape, il fit inclure la tête de saint Pancrace dans un buste en argent et vénérer dans sa cathédrale du Latran. Le buste retourna à l'église de Saint-Pancrace au XIIe siècle.
L'attribut de saint Pancrace est l'épée ; c'est aussi l'attribut des saints Nérée et Achillée qui sont fêtés aussi en ce jour.
Statue. Eglise Saint-Pancrace. Castellare-di-Casinca. Corse. XIXe.
RELIQUES, CULTE ET LES DIVERS NOMS DE SAINT PANCRACE
Il y a à Rome une église de son nom, et la porte anciennement appelée Aurelia, se nomme aujourd'hui Saint-Pancrace. Saint Grégoire, pape, parle de sa tombe et de ses reliques dans l'Homélie 27 sur saint Jean et dans le 3e livre de son Registre, épître 18.
Saint Grégoire de Tours, qui vivait avant lui, raconte un miracle perpétuel que Dieu y faisait par les mérites de ce saint Martyr : ceux qui allaient faire quelque serment solennel en l'église qui lui est dédiée étaient visiblement punis de Dieu, quand ils ne disaient pas la vérité : ou ils tombaient morts sur place, ou ils étaient possédés du démon, qui les tourmentaient par mille sortes de supplices à la vue de tout le monde.
Baillet écrit qu'" il s'est fait une grande distraction des reliques de saint Pancrace en diverses églises d'Europe : et comme il est assez ordinaire de voir que lorsqu'on a quelque ossement considérable d'un Saint, on se vante d'avoir son corps, on doit être moins surpris d'entendre dire que le corps de saint Pancrace se trouve en 15 ou 20 endroits différents, sans être obligé de recourir au mystère de la reproduction. Outre ce qui est resté de ses reliques dans l'église de son nom, à Rome, on voit son chef dans celle de Latran où son office se fait double en remettant celui des saints Nérée et Achillée au premier jour libre qui suit ".
On trouve aussi quelques parties de ses reliques dans celle de saint Clément et dans d'autres églises de la ville. On en montre pareillement à Albano, ville de la campagne de Rome ; dans 3 églises différentes de la ville de Bologne, où il n'est pas possible que l'on n'ait pas donné son nom à quelque corps étranger, puisque l'on produit, parmi ces reliques, une tête de saint Pancrace, outre celle qui est dans la basilique du Latran.
On aurait peut-être sujet de penser la même chose de celles que l'on garde sous le même nom à Venise, chez les religieuses de saint Zacharie ; dans le Milanais, quoiqu'il soit vrai que saint Grégoire le Grand en ait envoyé du tombeau de notre Saint à Fortunat, évêque de Milan ; à Lantosca, en Piémont, dans le Comtat de Nice ; dans plusieurs autres villes d'Italie, où on l'appelle saint Brancas ou Brancaccio ; en divers endroits de la Sicile ; à Avignon, dans deux églises différentes ; en France, où en envoyèrent de Rome les papes Pélage, pour Marseille et Tours ; saint Grégoire le Grand pour Pallade, évêque de Saintes ; d'autres à Saint-Riquier, à Saint-Malo et ailleurs.
On ne peut nombrer tous ces lieux du royaume qui se vantent d'en avoir, mais la plupart sans titre. La célébrité de son culte y est si grande, qu'il n'y a presque point de province qui ne s'en soit formé un Saint particulier en diversifiant son nom par la corruption de leur language. Car c'est lui que l'on trouve appelé saint Blancat, saint Planchas ou Planchais, saint Plancart, saint Crampasi ou Crampace, par métathèse, saint Brachs, saint Branchais, saint Blanchars, saint Blansé, et peut-être encore autrement.
Saint Pancrace est appelé Planchers en Normandie. Le pape Vitalien envoya de ses reliques à saint Wandrille, abbé de Fontenelle, qui construisit une église sous son invocation : cette double circonstance répandit son culte dans le diocèse de Coutances et dans les diocèses voisins.
Les Pays-Bas ne sont guère moins pourvus de reliques qui porent le nom de saint Pancrace. On en voit à Gand, à Douai, et à Malines ; on en voyait aussi à Utrecht et à Leyde, avant le changement de religion dans les Pays-Bas unis. On en montre à Cologne dans plusieurs églises, à Dusseldorf sur le Rhin, au duché de Berg, à Trèves, et même à Prague, en Bohème. On en a vu aussi en Angleterre, où la première église consacrée à Dieu depuis la " conversion " des Anglais par le moine saint Augustin, missionnaire de saint Grégoire le Grand, fut dédiée sous le nom et l'invocation de saint Pancrace, dans la ville de Cantorbéry. Il ne vint néanmoins des reliques de ce saint Martyr dans cette île que plus de 50 ans après. Ce fut le pape Vitalien qui en envoya, vers l'an 656, à Oswi, roi de Northumberland, pour augmenter encore le culte que les missionnaires romains y avaient établi, ou plutôt pour reconnaître et récompenser les services que ce prince rendait à l'église du pays.
La plupart des églises qui gardent des reliques sous le nom de saint Pancrace, ont quelque fête particulière en différents jours de l'année, pour célébrer leur réception ou leur translation : mais elles se réunissent à solenniser celle de son martyre au 12 de mai, quoiqu'elles ne soient pas toutes persuadées que ce qu'elles ont soit véritablement de lui. Le 12 de mai, où sa fête est marquée dans les Martyrologes du nom de saint Jérôme, dans celui de Bède, ceux du IXe siècle et les suivants, est le jour de sa sépulture plutôt que celui de sa mort. Le Calendrier romain du IVe siècle n'en fait point mention, mais il est dans celui du VIIIe siècle et dans les suivants, et dans les anciens Sacramentaires depuis le VIe siècle.
PRIERE
" La grâce divine qui vous appelait à la couronne du martyre alla vous chercher jusqu'au fond de la Phrygie, Ô Pancrace, pour vous conduire dans la capitale de l'empire, au centre de tous les vices et de toutes les erreurs du paganisme. Votre nom, confondu avec tant d'autres plus éclatants ou plus obscurs, ne semblait pas devoir laisser de trace dans la mémoire des hommes ; à quatorze ans, votre carrière était déjà terminée. Aujourd'hui cependant, votre nom est prononcé par toute la terre avec l'accent de la vénération ; il retentit à l'autel dans les prières qui accompagnent le Sacrifice de l'Agneau.
D'où vous vient, Ô jeune martyr, cette célébrité qui durera autant que le monde ? C'est qu'il était juste qu'ayant été associé à la mort sanglante de notre Christ, la gloire de son immortalité rejaillît jusque sur vous. Gloire soit donc à lui qui honore ainsi ses compagnons d'armes ! Et gloire à vous, Ô martyr, qui avez mérité une telle couronne ! En retour de nos hommages, daignez, Ô Pancrace, jeter un regard de protection sur nous. Parlez de nous à Jésus votre chef et le nôtre. Dans cette vallée d'exil, nous chantons l’Alleluia pour sa résurrection qui nous a remplis d'espérances ; obtenez qu'un jour nous répétions avec vous au ciel ce même Alleluia, devenu éternel, et qui alors signifiera non plus l'espérance, mais la possession.
Rq : Les fresques des églises de La Roche-Dame et de Villar-Saint-Pancrace reproduites dans cette notice ont été ou sont en cours de reproduction. Prions pour les donateurs privés qui ont permis ces restaurations, prions pour les authentiques artisans, autant qu'artistes d'ailleurs, qui oeuvrent à ces remarquables travaux."
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dimanche, 05 mai 2024
5 mai. Saint Pie V, pape. 1572.
I, Reg., IV, 7.
Déjà de nombreux Pontifes ont paru sur le Cycle, où ils forment une éclatante constellation près du Christ ressuscité qui, en ces jours, donna à Pierre leur prédécesseur les clefs du ciel. Nos saints Anicet, Soter, Caïus, Clet et Marcellin, tenaient en main la palme du martyre ; saint Léon seul avait combattu sans répandre son sang ; mais son grand coeur n'eût pas reculé devant ce suprême témoignage. Or voici qu'en ce jour un émule de saint Léon, donné à l'Eglise dans ces derniers siècles, vient s'unir à lui et se mêler au groupe triomphant. Comme saint Léon, saint Pie V a lutté avec ardeur contre l'hérésie ; comme saint Léon, il a sauvé son peuple du joug des barbares.
La vie entière de Pie V a été un combat. Dans les temps agités où il fut placé au gouvernail de la sainte Eglise, l'erreur venait d'envahir une vaste portion de la chrétienté, et menaçait le reste. Astucieuse et souple dans les lieux où elle ne pouvait développer son audace, elle convoitait l'Italie ; son ambition sacrilège était de renverser la chaire apostolique, et d'entraîner sans retour le monde chrétien tout entier dans les ténèbres de l'hérésie. saint Pie V défendit avec un dévouement inviolable la Péninsule menacée. Avant d'être élevé aux honneurs du pontificat suprême, il exposa souvent sa vie pour arracher les villes à la séduction. Imitateur fidèle de saint Pierre Martyr, on ne le vit jamais reculer en présence du danger, et partout les émissaires de l'hérésie s'enfuirent à son approche.
Placé sur la chaire de saint Pierre, il sut imprimer aux novateurs une terreur salutaire, il releva le courage des souverains de l'Italie, et, par des rigueurs modérées, il vint à bout de refouler au delà des Alpes le fléau qui allait entraîner la destruction du christianisme en Europe, si les Etats du Midi ne lui eussent opposé une barrière invincible. Le torrent de l'hérésie s'arrêta. Depuis lors, le protestantisme, réduit à s'user sur lui-même, donne le spectacle de cette anarchie de doctrines qui eût désolé le monde entier, sans la vigilance du Pasteur qui, soutenant avec un zèle indomptable les défenseurs de la vérité dans tous les Etats où elle régnait encore, s'opposa comme un mur d'airain à l'envahissement de l'erreur dans les contrées où il commandait en maître.
Un autre ennemi, profitant des divisions religieuses de l'Occident, s'élançait en ces mêmes jours sur l'Europe, et l'Italie n'allait être que sa première proie. Sortie du Bosphore, la flotte ottomane se dirigeait avec fureur sur la chrétienté ; et c'en était fait, si l'énergique Pontife n'eût veillé pour le salut de tous. Il sonne l'alarme, il appelle aux armes les princes chrétiens. L'Empire et la France, déchirés par les factions que l'hérésie a fait naître dans leur sein, entendent l'appel, mais ils restent immobiles ; l'Espagne seule, avec Venise et la petite flotte papale, répondent aux instances du Pontife, et bientôt la croix et le croissant se trouvent en présence dans le golfe de Lépante.
Mais il faut rappeler aujourd'hui la prédiction que fit le saint Pape, sur le soir de la grande journée du 7 octobre 1571. Depuis six heures du matin jusqu'aux approches de la nuit, la lutte durait entre la flotte chrétienne et la flotte musulmane. Tout à coup le Pontife, poussé par un mouvement divin, regarda fixement le ciel ; il se tint en silence durant quelques instants, puis se tournant vers les personnes qui étaient présentes :
" Rendons grâces à Dieu ; la victoire est aux Chrétiens !"
Les travaux de saint Pie V pour la régénération des moeurs chrétiennes, l'établissement de la discipline du concile de Trente, et la publication du Bréviaire et du Missel réformés, ont fait de son pontificat de six années l'une des époques les plus fécondes dans l'histoire de l'Eglise. Plus d'une fois les protestants se sont inclinés d'admiration en présence de ce vigoureux adversaire de leur prétendue réforme.
" Je m'étonne, disait Bacon, que L'Eglise Romaine n'ait pas encore canonisé ce grand homme."
Saint Pie V ne fut, en effet, placé au nombre des Saints qu'environ cent trente ans après sa mort : tant est grande l'impartialité de l'Eglise Romaine, lors même qu'il s'agit de décerner les honneurs de l'apothéose à ses chefs les plus respectés.
La gloire des miracles couronna dès ce monde le vertueux Pontife : nous rappellerons ici deux de ses prodiges les plus populaires. Traversant un jour, avec l'ambassadeur de Pologne, la place du Vatican, qui s'étend sur le sol où fut autrefois le cirque de Néron, il se sent saisi d'enthousiasme pour la gloire et le courage des martyrs qui souffrirent en ce lieu dans la première persécution. Il se baisse, et prend dans sa main une poignée de poussière dans ce champ du martyre, foulé par tant de générations de fidèles depuis la paix de Constantin. Il verse cette poussière dans un linge que lui présente l'ambassadeur ; mais lorsque celui-ci, rentré chez lui, ouvre le linge, il le trouve tout imprégné d'un sang vermeil que l'on eût dit avoir été versé à l'heure même : la poussière avait disparu. La foi du Pontife avait évoqué le sang des martyrs, et ce sang généreux reparaissait à son appel pour attester, en face de l'hérésie, que l'Eglise Romaine, au XVIe siècle, était toujours celle pour laquelle ces héros avaient donné leur vie sous Néron.
La perfidie des hérétiques tenta plus d'une fois de mettre fin à une vie qui laissait sans espoir de succès leurs projets pour l'envahissement de l'Italie. Par un stratagème aussi lâche que sacrilège, secondés par une odieuse trahison, ils enduisirent d'un poison subtil les pieds du crucifix que le saint Pontife avait dans son oratoire, et sur lequel il collait souvent ses lèvres. Pie V, dans la ferveur de sa prière, se prépare à donner cette marque d'amour au Sauveur des hommes sur son image sacrée ; mais tout à coup, Ô prodige ! Les pieds du crucifix se détachent de la croix, et semblent fuir les baisers respectueux du vieillard. Saint Pie V comprit alors que la malice de ses ennemis avait voulu transformer pour lui en instrument de mort jusqu'au bois qui nous a rendu la vie.
Un dernier trait encouragera les fidèles, par l'exemple du grand Pontife, à cultiver la sainte Liturgie dans le temps de l'année où nous sommes. Au lit de la mort, jetant un dernier regard sur l'Eglise de la terre qu'il allait quitter pour celle du ciel, et voulant implorer une dernière fois la divine bonté en faveur du troupeau qu'il laissait exposé à tant de périls, il récita d'une voix presque éteinte cette strophe des Hymnes du Temps pascal :
" Créateur des hommes, daignez, en ces jours remplis des allégresses de la Pâque, préserver votre peuple des assauts de la mort."
Saint Pie V, né à Bosco, ville de Lombardie, mais originaire de Bologne et de la noble famille des Ghisleri, entra à l'âge de quatorze ans dans l'Ordre des Frères Prêcheurs. On admirait en lui la patience, l'humilité profonde, la grande austérité de la vie, l'amour pour l'oraison, l'observance régulière et le zèle le plus ardent pour l'honneur de Dieu. Ses progrès dans la philosophie et la théologie furent si remarquables, qu'il fut chargé durant beaucoup d'années, et avec un grand succès, de l'enseignement de ces sciences. Il exerça la prédication en beaucoup de lieux, avec un grand profit pour ses auditeurs. Il remplit longtemps avec une force d'âme invincible les fonctions d'inquisiteur, et préserva, au péril même de sa vie, un grand nombre de villes de la séduction de l'hérésie qui faisait des efforts pour les envahir.
Paul IV, dont il était très estimé à cause de ses rares vertus, l'éleva au siège de Népi et Sutri, et deux ans après il fut admis parmi les cardinaux-prêtres de l'Eglise romaine. Transféré par Pie IV à l'Eglise de Montréal dans le Piémont, et ayant remarqué plusieurs abus qui s'étaient répandus dans ce diocèse, il en fit la visite complète ; et tout étant réglé, il revint à Rome, où il fut chargé des plus graves affaires, dans l'expédition desquelles il prit toujours le parti de la justice, et déploya une constance et une liberté apostoliques. A la mort de Pie IV, il fut élu Pape contre l'attente de tout le monde ; mais, sauf l'extérieur, il ne changea rien dans sa manière de vivre. On remarqua en lui un zèle incessant pour la propagation de la foi, une application infatigable au rétablissement de la discipline ecclésiastique, une vigilance assidue pour l'extirpation des erreurs, une bienfaisance sans bornes pour soulager les nécessités des indigents, un courage invincible pour soutenir les droits du Siège Apostolique.
Il équipa, nous l'avons déjà évoqué, une flotte puissante contre Sélim, sultan des Turcs, dont les succès avaient élevé l'audace, et remporta sur lui, à Lépante, une éclatante victoire, plus encore par ses prières à Dieu que par la force des armes. Il connut par la révélation divine, et manifesta aux personnes qui se trouvaient avec lui, cet heureux événement à l'heure même qu'il s'accomplissait. Il préparait une nouvelle expédition contre les Turcs, lorsqu'il fut atteint d'une grave maladie. Il en supporta avec une souveraine patience les cruelles douleurs, et étant arrivé à l'extrémité, et ayant reçu les divins sacrements, il rendit son âme à Dieu avec tranquillité, l'an mil cinq cent soixante-douze, âgé de soixante-huit ans, et ayant siège six ans, trois mois et vingt-quatre jours.
Son corps est entouré d'une grande vénération de la part des fidèles dans la Basilique de Sainte-Marie-Majeure, à cause des nombreux miracles que Dieu a opérés par son intercession. Ces prodiges ayant été prouvés juridiquement, il a été inscrit au nombre des Saints par le pape Clément XI.
HYMNES
Saint Pie V est une des premières gloires de l'Ordre de Saint-Dominique ; nous emprunterons donc au Bréviaire de ce saint Ordre les Hymnes qu'il consacre à la louange de l'illustre Pontife :
" Que l'orgue fasse entendre ses joyeux concerts à l’honneur de Pie ; que tous les nuages se dissipent devant l'allégresse de ce jour sacré.
Sous le nom de Michel, on le vit terrasser le dragon dans la lutte ; sous le nom de Pie, il sut réprimer l'adversaire impie.
Il fut le bouclier de l'Eglise dans les périls qui l'assaillaient ; sa forte épée moissonna les sectateurs de l'hérésie.
Imitateur du zèle de Phinéès, il veilla pour la défense des murs de la cité sainte ; il repoussa les barbares qui allaient envahir le sol chrétien, et détourna le cimeterre que la rage du Turc avait tiré contre les fidèles.
Il rétablit avec sollicitude la règle des moeurs, et opposa une barrière invincible au progrès de la secte impie.
Il ne tint pas renfermées dans ses coffres les richesses de l'Etat ; mais il sut épuiser le trésor dans les nécessités publiques.
Père rempli de bonté envers les pauvres, sa main les secourut avec profusion ; par ses largesses il nourrit un peuple que la disette avait réduit à l'extrémité.
Créateur des hommes, daignez, en ces jours remplis des allégresses de la Pâque, préserver votre peuple des assauts de la mort.
Amen."
" Le mépris des hommes pour le culte de Dieu a déchaîné le fléau de la guerre ; la vengeance a suivi le crime, et le châtiment s'apprête à fondre sur la terre.
Dans le péril où nous sommes, quel autre habitant des cieux pourrions-nous invoquer, Ô Pie, qui soit pour nous d'un secours plus efficace ?
Nul homme, Ô bienheureux Pontife, ne s'est dévoué avec plus d'ardeur que vous à procurer sur la terre la gloire du grand Dieu ;
Nul défenseur n'a plus vaillamment détourné le joug auquel les barbares allaient asservir les nations chrétiennes.
Plus puissant encore au ciel, jetez un regard sur ceux qui vous implorent ; apaisez les discordes entre les citoyens : repoussez les fureurs de l'ennemi.
Obtiens que la terre recouvre les douceurs de la paix ; rendus à la sécurité, nous chanterons d'un coeur plus joyeux nos cantiques à la louange de Dieu.
A vous la gloire, heureuse Trinité, Dieu unique ! A vous honneur et puissance dans les siècles des siècles !
Amen."
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lundi, 29 avril 2024
29 avril. Saint Pierre Martyr ou saint Pierre de Vérone, de l'Ordre des Frères prêcheurs, martyr. 1252.
Saint Marc, IX, 23.
" Veritas !"
Cri et devise des croisés pour la foi et contre les hérétiques manichéens dits " Cathares " ou " Albigeois ".
Grandes heures d'Anne de Bretagne. XVIe.
Le héros que la sainte Eglise députe aujourd'hui vers Jésus ressuscité, a combattu si vaillamment que le martyre a couronné jusqu'à son nom. Le peuple chrétien l'appelle saint Pierre Martyr, en sorte que son nom et sa victoire ne se séparent jamais. Immolé par un bras hérétique, il est le noble tribut que la chrétienté du xuie siècle offrit au Rédempteur. Jamais triomphe ne recueillit de plus solennelles acclamations.
Au siècle précédent, la palme cueillie par Thomas de Cantorbéry fut saluée avec transport par les peuples qui n'aimaient rien tant alors que la liberté de l'Eglise ; celle de Pierre fut l'objet d'une ovation pareille. Rien ne surpasse l'enthousiame du grand Innocent IV, dans la Bulle pour la canonisation du martyr :
" La foi chrétienne appuyée sur tant de prodiges brille aujourd'hui d'un éclat nouveau. Voici qu'un nouvel athlète vient par son triomphe raviver nos allégresses. Les trophées de la victoire éclatent à nos regards, le sang répandu élève sa voix, la trompette du martyre retentit, la terre arrosée d'un sang généreux fait entendre son langage, la contrée qui a produit un si noble guerrier proclame sa gloire, et jusqu'au glaive parricide qui l'a immolé acclame sa victoire. Dans sa joie, l'Eglise-mère entonne au Seigneur un cantique nouveau, et le peuple chrétien va trouver matière à des chants d'allégresse qui n'avaient pas retenti encore. Un fruit délicieux cueilli dans le jardin de la foi vient d'être placé sur la table du Roi éternel. Une grappe choisie dans la vigne de l'Eglise a rempli de son suc généreux le calice royal ; la branche dont elle a été détachée par le fer était des plus adhérentes au cep divin. L'Ordre des Prêcheurs a produit une rose vermeille dont le parfum réjouit le Roi céleste. Une pierre choisie dans l'Eglise militante, taillée et polie par l'épreuve, a mérité sa place dans l'édince du ciel." (Constitution Magnis et crebris du 9 des calendes d'avril 1253.).
Statue de saint Pierre de Vérone.
Ainsi s'exprimait le Pontife suprême, et les peuples répondaient en célébrant avec transport le nouveau martyr. Sa fête était gardée comme les solennités antiques par la suspension des travaux, et les fidèles accouraient aux églises des Frères-Prêcheurs, portant des rameaux qu'ils présentaient pour être bénits en souvenir du triomphe de Pierre Martyr. Cet usage s'est maintenu jusqu'à nos temps dans l'Europe méridionale, et les rameaux bénits en ce jour par les Dominicains sont regardés comme une protection pour les maisons où on les conserve avec respect.
Quel motif avait donc enflammé le zèle du peuple chrétien pour la mémoire de cette victime d'un odieux attentat ? C'est que Pierre avait succombé en travaillant à la défense de la foi, et les peuples n'avaient alors rien de plus cher que la foi. Pierre avait reçu la charge de rechercher les hérériques manichéens, qui depuis longtemps infectaient le Milanais de leurs doctrines perverses et de leurs mœurs aussi odieuses que leurs doctrines. Sa fermeté, son intégrité dans l'accomplissement d'une telle mission, le désignaient à la haine des Patarins ; et lorsqu'il tomba victime de son noble courage, un cri d'admiration et de reconnaissance s'éleva dans la chrétienté. Rien donc de plus dépourvu de vérité que les déclamations des ennemis de l'Eglise et de leurs imprudents fauteurs, contre les poursuites que le droit public des nations catholiques avait décrétées pour déjouer et atteindre les ennemis de la foi.
Saint Lazare et saint Pierre de Vérone. Chapelle de la Miséricorde.
Dans ces siècles, aucun tribunal ne fut jamais plus populaire que celui qui était chargé de protéger la sainte croyance, et de réprimer ceux qui avaient entrepris de l'attaquer. Que l'Ordre des Frères-Prêcheurs, chargé principalement de cette haute magistrature, jouisse donc, sans orgueil comme sans faiblesse, de l'honneur qu'il eut de l'exercer si longtemps pour le salut du peuple chrétien. Que de fois ses membres ont rencontre une mort glorieuse dans l'accomplissement de leur austère devoir ! Saint Pierre Martyr est le premier des martyrs que ce saint Ordre a fournis pour cette grande cause ; mais les fastes dominicains en produisent un grand nombre d'autres, héritiers de son dévouement et émules de sa couronne. La poursuite des hérétiques n'est plus qu'un fait de l'histoire ; mais, à nous catholiques, il n'est pas permis de la considérer autrement que ne la considère l'Eglise.
Aujourd'hui elle nous prescrit d'honorer comme martyr un de ses saints qui a rencontré le trépas en marchant à l'encontre des loups qui menaçaient les brebis du Seigneur ; ne serions-nous pas coupables envers notre mère, si nous osions apprécier autrement qu'elle le mérite des combats qui ont valu à Pierre la couronne immortelle ? Loin donc de nos coeurs catholiques cette lâcheté qui n'ose accepter les courageux efforts que firent nos pères pour nous conserver le plus précieux des héritages ! Loin de nous cette facilité puérile à croire aux calomnies des hérétiques et des prétendus philosophes contre une institution qu'ils ne peuvent naturellement que détester ! Loin de nous cette déplorable confusion d'idées qui met sur le même pied la vérité et l'erreur, et qui, de ce que l'erreur ne saurait avoir de droits, a osé conclure que la vérité n'en a pas à réclamer !
Saint Pierre de Vérone et une donatrice.
Saint Pierre Martyr, né à Vérone de parents infectés des erreurs des Manichéens, combattit presque dès son enfance contre les hérésies. A l'âge de sept ans, comme il allait aux écoles, son oncle paternel, qui était hérétique. lui ayant demandé ce qu il y avait appris.il répondit qu'il y avait appris le Symbole de la foi chrétienne : et ni les caresses ni les menaces de son père et de son oncle ne purent ébranler sa constance dans la vraie doctrine. Parvenu à l'adolescence, il vint à Bologne pour faire ses études. Ce fut là qu'étant appelé par le Saint-Esprit à un genre de vie plus élevé, il entra dans l'Ordre des Frères-Prêcheurs.
Très vite, ses vertus brillèrent avec un grand éclat dans la religion et dans l'étude, au point qu'il fut très rapidement apte à recevoir les ordres sacré, et il conserva coeur et ses sens dans une telle pureté, que jamais il ne se sentit souillé d'aucun péché mortel. Il mortifiait sa chair par les jeûnes et les veilles, et il élevait son esprit à la contemplation vies choses divines. Occupé sans cesse à l'oeuvre du salut des âmes, il avait un don particulier pour réfuter les hérétiques. Il mettait tant de force dans sa prédication, qu'une multitude innombrable de personnes affluait autour de lui pour l'entendre, et beaucoup se convertissaient et faisaient pénitence.
Legenda aurea. Bx J. de Voragine. XVe.
Le démon, irrité, résolut de le traverser par toutes les voies imaginables. Notre Saint prêchait à Florence : c'était dans le vieux marché, parce que les églises n'étaient pas assez vastes pour le grand nombre de personnes qui accourait pour l'entendre.
Ce monstre d'enfer y parut sous la forme d'un cheval noir courant à toute bride ; il semblait prêt à fendre la foule et à écraser tous ceux qu'il rencontrerait sur son passage ; mais le Saint faisant le signe de la Croix, dissipa ce fantôme, et tout le peuple le vit s'évanouir comme de la fumée.
Après la prédication, saint Pierre se mettaut ordinairement au confessionnal pour y recevoir les pénitents. Un jour, il s'en trouva un qui, touché du regret de ses fautes, s'accusa d'avoir donné un coup de pied à sa mère ; le saint Confesseur lui en fit une sévère réprimande et, pour l'exciter davantage à la sainte contrition, il lui dit que le pied qui avait ainsi frappé sa mère mériterait d'être coupé. Dès qu'il fut rentré chez lui, le pénitent se coupa lui-même le pied. Saint Pierre, que le peuple accusait déjà d'imprudence, l'ayant appris, vint trouver le pénitent, prit son pied, le réunit à sa jambe et, ayant fait le signe de la Croix, le remit en son premier état. Ce miracle fit concevoir plus d'estime que jamais pour sa sainteté et sa très-sage conduite.
Cependant Dieu éprouve la vertu de ses Saints. Alors qu'il était un jour au couvent de Saint-Jean-Baptiste, à Côme, Notre Père des cieux favorisa saint Pierre de Vérone de plusieurs visites du ciel ; ainsi, les saintes Agnès et Cécile lui apparurent dans sa cellule et conférèrent avec lui d'une voix claire et intelligible. Un des religieux du couvent, passant devant la cellule de notre Saint, entendant cette conférence, s'imagina que c'était effectivement avec des femmes que saint Pierre s'entretenait. Il alla donc chercher d'autres frère pour témoins, leur fit constater derrière la porte les entretiens que notre saint avait avec sainte Agnès et sainte Cécile, et ils s'en furent tous se plaindre au chapître et au supérieur.
Saint Pierre, par humilité, et voulant tenir discrète les faveurs qu'il avait reçues du ciel, ne s'en défendit point. Le supérieur relégua alors notre Saint au couvent d'Iësi, dans la Marche d'Ancône, pour y mener une vie retirée et ne plus paraître en public.
Un jour, au pied de la Croix, il lui arriva de s'en plaindre amoureusement à Notre Seigneur Jésus-Christ :
" Eh quoi ! Mon Dieu ! Vous savez mon innocence ! Comment souffrez-vous que je demeure si longtemps dans l'infâmie ?"
Notre Seigneur lui répondit :
" Et moi, Pierre, n'étais-je pas innocent ? Avais-je mérité les opprobres et les douleurs dont j'ai été accablé dans le cours de ma Passion ? Apprends donc de moi à souffrir avec joie les plus grandes peines, sans avoir commis les crimes pour lesquels on te les impose."
Dès lors, profondément touché par les paroles du divin Maître, notre Saint mit toute son ardeur à souffrir dans la joie et la félicité son humiliation.
Bientôt, Dieu fit paraître la vérité de ce qui s'était passé au couvent de Côme et saint Pierre de Vérone fut rappeler de son exil et parut devant ses frères avec encore plus d'éclat qu'auparavant.
Martyre de saint Pierre de Vérone.
Dès qu'il fut délivré de sa prison, il reprit les armes de la parole de Dieu pour combattre l'hérésie. Le pape Grégoire IX, qui connaissait sa science et son zèle, le nomma inquisiteur général de la foi en 1232.
C'est principalement à Milan que saint Pierre travaillait de toutes ses forces à la conversion de hérétiques. Un jour qu'il se décourageait quelque peu, Notre Dame la très sainte Vierge Marie lui apparut et l'encouragea :
" Pierre, j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne soit jamais ébranlée ; continue donc et persévère en ton premier travail."
Il passa alors à Céséna, où il convertit un grand nombre d'hérétiques et guérit des malades, à Ravenne, à Mantoue, à Venise, etc.
Enfin, il arriva au couvent de Côme, dont il avait été nommé prieur, charge qu'il avait déjà tenu dans les couvents de Gênes, Aoste et Iësi.
L'ardeur de sa foi l'enflammait tellement , qu'il souhaitait de mourir pour elle, et demandait instamment à Dieu cette grâce. Ce furent les hérétiques qui la lui procurèrent, selon qu'il l'avait annoncé lui-même peu auparavant dans une prédication. Comme il exerçait la charge d'Inquisiteur, un jour qu'il allait de Côme à Milan, un impie meurtrier nommé Carino lui déchargea sur la tète deux coups d'épée. Le saint, presque mort, prononça avant de rendre le dernier soupir le Symbole de la foi que dans son enfance il avait confessée avec le courage d'un homme. L'assassin revint à la charge, et lui ayant plongé son épée dans le flanc, le saint alla au ciel recevoir la palme du martyre, l'an du salut 1252, avec le religieux qui l'accompagnait, nommé Dominique.
Son corps fut porté dans l'église Saint-Eustorge de Milan et sa sainteté éclata bientôt par un grand nombre de miracles. Son assassin, qui avait échappé à la justice, rentra bientôt en lui-même, regretta très amèrement son crime et demanda à entré dans l'ordre des frères prêcheurs : ce qui lui fut accordé.
L'année suivante Innocent IV l'inscrivit au nombre des Martyrs le 25 mars et ordonna qu'on le fêterait le 29 avril et non le 5 du même mois qui fut le jour de son martyre parce que ce jour pouvait être occupé par Pâques.
Saint Pierre de Vérone. Gravure italienne du XVIe.
Protecteur du peuple chrétien , quel autre mobile que celui de la charité vous dirigea dans vos travaux ? Soit que votre parole vive et lumineuse reconquit sur l'erreur les âmes abusées, soit que marchant droit à l'ennemi, votre vigueur le forçât à fuir loin des pâturages qu'il venait empoisonner, vous n'eûtes qu'un but, celui de préserver les faibles de la séduction. Combien d'âmes simples auraient joui avec délices de la vérité divine que la sainte Eglise faisait arriver jusqu'à elles, et qui, misérablement trompées par les prédicants de l'erreur, sans défense contre le sophisme et le mensonge, perdent le don de la foi et s'éteignent dans l'angoisse ou dans la dépravation ! La société catholique avait prévenu de tels dangers.
Elle ne souffrait pas que l'héritage conquis au prix du sang des martyrs fût en proie aux ennemis jaloux qui avaient résolu de s'en emparer. Elle savait que l'attrait de l'erreur se rencontre souvent au fond du cœur de l'homme déchu, et que la vérité, immuable en elle-même, n'est assurée de demeurer en possession de notre intelligence qu'autant qu'elle y est défendue par la science ou par la foi : la science qui est le partage du petit nombre, la foi contre laquelle l'erreur conspire sans cesse, sous les apparences de la vérité. Dans les âges chrétiens, on eût regardé comme coupable autant qu'absurde de garantir à l'erreur la liberté qui n'est due qu'à la vérité, et les pouvoirs publics se considéraient comme investis du devoir de veiller au salut des faibles, en écartant d'eux les occasions de chute, comme le père de famille prend soin d'éloigner de ses enfants les périls qui leur seraient d'autant plus funestes que leur inexpérience ne les soupçonne pas.
Obtenez-nous, Ô saint martyr, une estime toujours plus grande de ce don précieux de la foi qui nous maintient dans le chemin du ciel. Veillez avec sollicitude à sa conservation en nous et en tous ceux qui sont confiés à notre garde. L'amour de cette sainte foi s'est refroidi chez plusieurs ; le contact de ceux qui ne croient pas les a accoutumés à des complaisances de pensée et de parole qui les ont énervés. Rappelez-les, Ô Pierre, à ce zèle pour la vérité divine qui doit être le trait principal du chrétien. Si, dans la société où ils vivent, tout conspire pour égaliser les droits de l'erreur et ceux de la vérité, qu'ils se sentent d'autant plus obligés à professer la vérité et à détester l'erreur. Réchauffez donc en nous tous, Ô saint martyr, l'ardeur de la foi, " sans laquelle il est impossible à l'homme d'être agréable à Dieu " (Heb.XI, 6.). Rendez-nous délicats sur ce point de première importance pour le salut, afin que, notre foi prenant toujours de nouveaux accroissements, nous méritions de voir éternellement au ciel ce que nous aurons cru fermement sur la terre."
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vendredi, 26 avril 2024
27 avril. Saint Pierre Canisius de Nimègue, docteur de l'Eglise, apôtre de l'Allemagne. 1597.
- Saint Pierre Canisius de Nimègue, docteur de l'Eglise, apôtre de l'Allemagne. 1597.
Pape : Clément VIII. Empereur du Saint-Empire : Rodolphe II de Habsbourg.
Salvien.
Saint Pierre Canisius. Gravure du XVIe.
Humilité et soumission, ces deux mots résument toute l'oeuvre de saint Ignace, dont saint Pierre Canisius fut l'un des premiers et des plus grands disciples. On a souvent tourné en dérision cette sublimité de l'obéissance recommandée aux religieux de la Compagnie de Jésus. On s'est moqué du fameux perinde ac cadaver. Mais a-t-on réfléchi que ce grand précepte de la soumission est la condition sine qua non de toute autorité divine ou humaine ? Conçoit-on une royauté, comprend-on une armée, imagine-t-on une traversée maritime sans l'obéissance au chef du pouvoir, de l'expédition ou du vaisseau ? La soumission est la garantie de toute puissance.
Et l'humilité, cette vertu qu'il n'est donné à l'homme de comprendre que se lève les yeux en haut, n'a-t-elle pas été de tous temps le cartère distinctif de la vraie grandeur ? L'orgueil qui lui est opposé, comme l'indépendance à la soumission, ne sont-ils pas les deux vices fondamentaux qui ont amené la ruine du protestantisme ?
Luther et saint Ignace naissent en même temps : l'un prêche la révolte à l'autorité, et ses premiers disciples appliquant rigoureusement les principes de leur maître, arrivent à l'impuissance et à l'alarchie ; l'autre recommande à ses enfants la soumission à l'autorité, et trois siècles ne font qu'assurer à son oeuvre une plus longue durée.
Magnifique et vivant enseignement que cette lutte perpétuelle de la vérité contre l'erreur ! Chaque ère qui se lève sur le monde l'atteste, mais chaque ère aussi vient proclamer plus haut le triomphe de cette vérité immuable comme son principe, qui est le bien et le vrai éternel, sur l'erreur qui, malgré ses formes chaque jour différentes, n'est que ruine et poussière ; car elle ne s'appuie que sur le faux et sur le mal.
Martin Luther. Lucas Cranach. XVIe.
Notre saint du jour n'est plus " populaire ". Et pour cause ! Il fut un combattant jamais vaincu des droits de l'Eglise contre les désordres de l'anarchie, un champion de la vérité contre les sectateurs des ténèbres du mensonges. Nos temps qui s'enfoncent chaque jour un peu plus sous l'empire du prince de ce monde combattent ardemment - jusque dans leur commémoraison - des figures comme celle de saint Pierre Canisius. Ce champion du concile de Trente ne saurait guère plus plaire à la secte usurpatrice du si beau nom catholique qui plastronne à Rome et coule lentement dans un syncrétisme satanique.
N'importe ! Honorons en ce 27 avril, le grand saint Pierre Canisius, infatigable apôtre de la vérité, de Notre Seigneur Jésus-Christ et de son Eglise, et de Notre Dame pour laquelle il avait - avec saint Michel archange - une particulière et tendre dévotion.
La famille de Pierre Canisius était l'une des plus distinguées de la Hollande ; son père, d'abord conseiller du duc Charles de Lorraine, fut ensuite bailli de Verdun. Né en 1521, c'est sous le toit paternel que Pierre passa, dans l'innocence, ses premières années. Puis, il fut envoyé à Cologne, pour y apprendre les belles-lettres. En peu de temps, il eut achevé son cours d'humanités et reçut le grade de docteur en droit civil. Il vint alors à Louvain pour s'initier au droit canonique.
On était alors aux plus mauvais jours du XVIe siècle. Luther s'était levé du sein de l'Eglise, impétueux, opiniâtre, orgueilleux à l'excès. Poussé par l'esprit du mal et de la révolte, cet homme avait dépouillé sa robe de moine et, l'anathème à la bouche, avait voué au catholicisme la plus implacable des haines ; il avait juré la ruine de la Papauté. Canisius naissait à Nimègue pendant que le moine brûlait, à Wittemberg, les bulles de Léon X.
Le Pape Léon X.
Rien désormais ne devait arrêter l'hérésiarque. Il jeta du même coup le gant au Pape et à l'empereur Charles Quint. Le Pape, assisté de Jésus-Christ, résiste et triomphe ; mais l'empereur, d'abord fidèle, se trouble bientôt à la vue de la guerre qui le menace et, au prix de concessions malheureuses, achète la soumission momentanée de ses sujets révoltés. Quand Luther meurt, dans une agonie ignoble et digne de celui qui l'inspira depuis qu'il avait quitter l'Eglise, son oeuvre est achevée, la prétendue Réformation a jeté dans l'Europe entière ses racines profondes.
Elles se développe rapidement. L'Allemagne qui les reçoit avec le plus de faveur doit en être la première victime ; avec la foi catholique la constitution impériale est menacée ; les princes, qui ne sont plus obéis, se révoltent à leur tour contre Charles Quint ; le sang coule à flots de tous côtés.
L'Eglise se reccueille un instant : puis assistée de l'Esprit Saint, elle se lève tout entière à la voix de son chef, et s'affirme plus vivante et plus forte que jamais. A la ligue formée à Smalkalde par les protestants, elle oppose le concile de Trente... C'est saint Pierre Canisius qui doit nous introduire dans l'assemblée des Pères de l'Eglise.
C'est là que se forma le jeune religieux ; aussi ses progrès dans la voie de la perfection furent si rapides que son noviciat à peine achevé à Cologne sous la direction du Père Pierre Lefèvre, il fut jugé digne de la prêtrise et tout aussitôt appelé à succéder à ce même Pierre Lefèvre, dans la charge de supérieur. Nous le retrouvons expliquant aux théologiens de l'Université les épîtres de saint Paul, et les Evangiles aux élèves du collège du Mont, et préparant en même temps une édition des oeuvre du mystique Jean Tauler et une nouvelle édition des oeuvres de saint Cyrille d'Alexandrie et de saint Léon le Grand. Mais tout à coup il est convié à de plus grandes destinées. De ce moment commence sa lutte contre la Révolution ou prétendue Réforme.
Charles Quint. Tiziano Vecellio. XVIe.
Un grand scandale est venu fondre sur l'Eglise d'Allemagne : l'archevêque de Cologne, Hermann de Weda, s'est laissé séduire et entraîné dans l'hérésie. A la vue de la trahison de son pasteur, la cité s'indigne ; le clergé, l'Université, les magistrats, jaloux de conserver intact le trésor de leur foi, se décident à demander la déposition du coupale. Toutefois, nul n'osait se rendre près de Charles Quint et de Georges d'Autriche, prince-évêque de Liège, pour présenter une aussi grave requête. On jette les yeux sur notre saint : c'est lui qui sera, près de l'empereur et du cardinal, l'interprète chargé de réclamer contre l'indignité du coupable. Délicate mission qui témoigne de l'estime qu'on avait déjà pour le jeune jésuite !
Pendant son voyage, le saint s'était rencontré à Ulm avec le cardinal Othon Truchess, évêque d'Augsbourg. Le prélat, frappé de son rare mérite, résolut de l'envoyer au concile de Trente comme son théologien. Saint Ignace de Loyola, consulté, répondit au cardinal que son choix ne pouvait mieux tomber. Ce fut en vain qu'au retour de son négociateur, Cologne fit valoir ses droits sur lui ; Canisius avait sa place marquée au sein des Pères du concile.
La réunion des Pères de l'Eglise à cette époque semblait impossible. L'empereur Charles-Quint pris entre les Catholiques et les Protestants, ne voulait rien faire qui semblât favoriser les uns ou les autres ; le roi de France ne souhaitait pas une assemblée où le Pape serait le maître : enfin le Pape lui-même pouvait craindre quelque entreprise contre son autorité : et cependant, au milieu de tant de difficultés et d'entraves, l'oeuvre de Dieu s'accomplit, et la foi fut sauvée. Eternel enseignement que de tout temps Dieu se plaît à donner aux audacieux qui voudrait résister à son Christ et à son Eglise.
Saint Ignace de Loyola.
Parmi la foule nombreuse de prélats et de théologiens appelés au concile par la voix du Pontife romain, Canisius, dès le début des sessions, fut placé au premier rang. Au moment où, les préliminaires terminés, le concile allait commencer ses séances dogmatiques, des fièvres se déclarèrent à Trente et le siège de l'assemblée fut transféré à Cologne. Assisté du savant jésuite Jacques Laynez, théologien du Pape, Canisius fut chargé de faire le relevé exact des erreurs avancées au sujet des sacrements par les hérétiques et de reccueillir dasn les monuments de la tradition les bases des règles définitives. L'attente de saint Ignace et du cardinal Othon Truchess ne fut pas trompée : chaque fois que le jeune jésuite élevait la voix au sein de l'assemblée, les Pères du concile admiraient en lui l'homme de Dieu, venant avec sa noble et touchante éloquence remuer les coeurs et convaincre les esprits.
Mais voici qu'après les troubles qui suivirent le meurtre du duc de Plaisance l'assemblée est dissoute : notre saint Pierre Canisius est appelé à Rome par saint Ignace. Nous le retrouverons bientôt à la prochaine session du concile.
Saint Ignace et saint Pierre Canisius avaient, il semble, hâte de se mieux connaître... Qui dira les épanchements de ces deux âmes ! Saint Ignace initiait saint Pierre Canisius aux secrets desseins du Seigneur sur son oeuvre naissante, et, qui sait ? dans sa sublime bonté, le Très-Haut déchirant les voiles de l'avenir, leur montraiet peut-être cette compagnie de Jésus embrassant l'univers entier de flammes de l'amour divin et tout à la fois régénérant l'ancien monde et convertissant le nouveau.
Saint Pierre Canisius conférant avec le cardinal
Othon Truchess et un légat apostolique.
Tout, au temps de saint Ignace, était à fonder : il fallait des maîtres capables d'éclipser leurs rivaux hérétiques. On sait que Luther dut une partie de sa puissance à son éloquence ardente, à sa facilité prodigieuse pour traiter les matières philosophiques et religieuses dans sa langue maternelle ; les disciples qui devaient le remplacer dans son enseignement l'imitaient et acquéraient très vite ce prestige qui éblouit les esprits faibles. Saint Ignace forma des maîtres qui surpassèrent bien vite les prétendus réformateurs.
Saint Pierre Canisius, après cinq mois passés dans la prière et l'étude près de son supérieur, partit pour Messine ; et lui qui peu de temps auparavant siégeait parmi les Pères du concile, eut à enseigner la réthorique. Pendant un an, il s'acquitta de cette mission avec ce dévouement, cet amour du devoir qui lui faisait trouver du charme au moindre des emplois. Il devait reparaître bientôt sur une plus vaste scène.
Il est subitement rappelé par Rome pour y prononcer ses voeux solennels : c'était, pour ainsi parler, l'achèvement de l'homme de Dieu. Pierre se consacre solennellement et irrévocablement à l'oeuvre de la Providence ; Ignace peut mourir en paix, il compte un vaillant lutteur de plus dans son armée d'élite.
C'est à l'Allemagne qu'appartient désormais le religieux profès ; nous allons voir ce vrai réformateur à l'oeuvre.
Le duc Guillaume de Bavière. Peter Gartner. XVIe.
Le duc Guillaume a fait demander de saints maîtres pour relever l'instruction publique en Bavière. Canisius, Le Jay, Salmeron, trois disciples prédestinés du général de la Compagnie de Jésus, reçoivent l'ordre de se rendre à Ingolstadt pour y fonder un collège. Ils int pour tout bagage le crucifix, les Exercices spirituels et le Ration studiorum ou " plan d'études ". Avec ces deux petits livres, les Jésuites ont remué le monde ; dans le premier, ils puisent cette force surhumaine qui les guide au-delà des mers vers les peuples infidèles ; le second leur sert de règle infaillible dans l'oeuvre d'éducation de la jeunesse.
Le duc Guillaume n'eut qu'à se louer des Jésuites ; le succès le plus éclatant vint couronner leurs efforts. L'Université nomme Canisius son recteur ; il se défend de cet honneur, mais Ignace ordonne, et le religieux se soumet. De ce jour tout prospère, les livres entachés d'hérésie sont enlevés aux étudiants, les discussions entre maîtres et élèves s'apaisent, la parole du saint ranime au coeur de la jeunesse le respect et l'amour du travail. Aussi, l'Université veut perpétuer la mémoire de son recteur et inscrit son éloge dans ses annales.
Quand les six mois de son rectorat furent achevés, l'apôtre d'Ingolstadt put rendre grâces à Celui qui se plaisait à répandre tant de faveurs par ses mains.
Le bruit de ses merveilles se répandait rapidement dans l'Allemagne ; de tous côtés, des lettres et des prières étaient adressées aux supérieurs de Canisius ; on le voulait partout. Ferdinand, roi des Romains, appuyé par le souverain Pontife, obtint sa présence à Vienne.
Ferdinand, roi des Romains.
L'Autriche, à son arrivée, présentait un spectacle navrant. Le clergé séculier, les Ordres religieux, les écoles, étaient infectés de la lèpre hideuse dont Luther avait partout déposé le germe. Les villes n'avaient plus de pasteurs, les sacrements n'étaient plus administrés, les cérémonies religieuses n'étaient plus célébrées. Saint Pierre Canisius est d'abord effrayé de l'immensité du mal, mais bientôt il se prosterne devant Dieuet obtient de lui que l'Autriche soit régénérée.
Notre saint se multiplie ; il prêche à la cour, il prêche au peuple, il catéchise les enfants. Soudain, terrible châtiment de Dieu ! La peste éclate dans la ville ; c'est encore notre saint qu'on retrouve au chevet des mourants, soignant les corps et régénérant les coeurs des malheureux Viennois. Enfin, il obtient du Saint-Père un jubilé, c'est lui qui en est le prédicateur ; et au milieu d'un concours immense, il venge l'honneur méconnu des indulgences.
En même temps, la générosité de nobles familles aidant, il ouvre un pensionnat ; les fils des plus nobles habitants y accourent. Bientôt l'angélique Stanislas Kotska, guidé par la Vierge Marie, viendra se former là aux saintes vertus qui doivent charmer le monde. Vienne renaissait à la foi ; le roi des Romains voulut récompenser le zèle de l'apôtre, en lui offrant le siège épiscopal de ce diocèse, qu'il venait de transformer si heureusement. Notre saint accepta pendant quelques temps le devoir d'une charge si lourde mais il en refusa les honneurs.
Nous l'avons dit : à l'apostaolat de la parole, saint Pierre Canisius sut joindre l'apostolat de la plume. Faisons halte, pour ainsi dire, au milieu de sa vie, pour parler de celui de ses ouvrages qui est rester le plus célèbre et le plus populaire ; son catéchisme.
Ferdinand, ce prnce que nous voyions tout à l'heure si plein d'admiration pour le saint, avait réclamé de saint Ignace un exposé court et solide de la doctrine chrétienne. C'est à Canisius, comme au plus capable, que fut confié une oeuvre aussi importante. Cet abrégé de la doctrine chrétienne, Summa doctrinae christianae, restera, avec le catéchisme du concile de Trente, comme un éternel monument du triomphe de l'Eglise sur l'erreur au temps de Luther.
Saint Pierre Canisius. Gravure du XVIe.
A peine le livre eut-il paru, que Ferdinand, par un rescrit solennel, le répandit dans tout l'empire. Philippe II d'Espagne imita bientôt son oncle, et le fit imprimer dans les Etats de l'ancien et du nouveau monde ? Il fut traduit dans toutes les langues de l'Europe : la Russie, la Pologne, la Suède, le Danemark, l'Angleterre, l'Irlande, la Hollande et la Suisse, connurent à peine, pendant bien longtemps, d'autre exposition élémentaire de la foi catholique.
" En 1686, nous dit le révérend Père Alet, quand le catéchisme de Canisius fut publié à Paris par l'autorité de Mgr de Harlay, on était au moins, la préface le constate, à la quatre centième édition."
La raison de ce succès et en même temps son plus grand éloge sont tombés des lèvres augustes de Pie IX, dans le bref de la béatification de saint Pierre Canisius :
" Ayant remarqué que l'hérésie se propageait partout au moyen de petits livres, Canisius pensa qu'il n'y avait pas de meilleur remède contre le mal qu'un bon abrégé de la Doctrine chrétienne. Il composa donc le sien, mais avec tant d'exactitude, de clarté et de précisions qu'il n'en existe pas de plus propre à instruire et à confirmer les peuples dans la foi catholique."
Dominé par les sentiments de cette extrême humilité qui le caractérisait, saint Pierre Canisius avait résolu de ne pas se faire connaître comme l'auteur du catéchisme, mais le secret, peut-être mal gardé, fut bientôt divulgué, et la renommée de notre saint s'en accrut immensément. Ce ne fut plus l'Allemagne seulement qui réclama sa présence ; la Transylvanie, la Hongrie, la Silésie, la Pologne se le disputèrent bientôt.
La Summa doctrinae christianae.
Nommé sur ces entrefaites provincial d'Allemagne par saint Ignace, le saint s'occupa d'abord d'assurer l'existence complète des collèges de Prague, d'Ingolstadt et de Munich ; puis au moment où il allait se rendre en Bavière, il fut appelé au colloque de Worms.
Les Protestants avaient demandé aux seigneurs d'Allemagne, présents à la diète de Ratisbonne, qu'un certain nombre d'hommes choisis dans les deux camps vinssent se réunir en conféérence dans la ville de Worms? Cette proposition plus à Ferdinand : il voulait ménager les susceptibilités des princes luthériens, dont il allait avoir besoin pour faire la guerre aux Musulmans. Saint Pierre Canisius, malgré une certaine répugnance, se rendit au colloque sur le désir de ses supérieurs : il y trouva déjà réunis le vieux Philippe Mélanchton, l'âme damnée de Luther, Erasme Scneff, Henri Buttinger et Flach Francowitz, tous prédicants acharnés du " pur Evangile ". Il y eut d'abord, il faut le dire, et le triomphe n'en fut que plus éclatant, il y eut peu d'enthousiasme du côté des catholiques, les discussions chaque jour renouvelées n'amenaient point de vrais résultats. Saint Pierre Canisius eut alors recours à son grand moyen ; il pria, et une inspiration du ciel le secourut aussitôt.
Philippe Mélanchton. Lucas Cranach. XVIe.
Il était facile de voir que les théologiens de l'hérésie ne s'entendaient pas entre eux, même sur les articles les plus essentiels. Or, le colloque n'avait été accordé qu'aux seuls partisans de la Confession d'AUgsbourg. Il insinua donc que, pour éviter la confusion, il serait utile d'écarter les docteurs qui n'admettraient pas cette règle de foi. On ne saurait dire combien cette proposition inattendue déconcerta les dissidents. Les voilà qui commencent à s'attaquer les uns les autres. Les Sacramentaires condamnent les Anabaptistes, les Anabaptistes les Sacramentaires et ainsi des différentes sectes. Mélanchton, malgré son grand âge, a le chagrin de se voir insulté par ses disciples. Bientôt on en vient aux injures, aux outrages les plus violents, et l'on pu craindre un moment qu'il n'y eut une véritable mêlée. Enfin, les plus emportés ont le dessus, et cinq, qui avaient montré plus de modération, sont réduits à quitter la place. Ils s'éloignent, en laissant entre les mains du président une protestation contre l'indigne conduite de leurs collègues.
Le colloque ne pouvait plus se prolonger dans des conditions si nouvelles. Le roi des Romains décida que l'assemblée était dissoute et l'on se sépara, à la grande désolation des hérétiques, qui s'en prirent à saint Pierre Canisius de leur échec. En effet, amis et ennemis s'accordaient à reconnaître que c'était à lui que revenait l'honneur d'un résultat si heureux pour la cause catholique.
Les Luthériens vaincus essayèrent alors leurs armes les plus honteuses contre celui qu'on appelait déjà le " marteau des hérétiques " : ils inventèrent contre lui des fables ridicules, répandirent partout les plus infâmes calomnies. L'homme de Dieu redoubla de patience et méprisa ces attaques et s'ingénia sans s'émouvoir à multiplier contre ses adversaires les actes de la plus ardentes charité. On l'appelait dans l'Alsace supérieure, il en traversa toutes les villes en faisant le bien et en guérissant les tristes blessures que la prétendue Réforme infligeait à l'Eglise.
Buste de saint Pierre Canisius. Munich. XVIIe.
Mais le mal s'aggravait toujours et il venait d'atteindre la Pologne? Le Pape aussitôt y envoie un nonce apostolique ; deux théologiens l'accompagnent ; l'un est notre saint. A son arrivée, il trouva la religion dans le plus grand des périls.
Ce malheureux pays était alors gouverné par l'indolent Sigismond. Ce prince, à la vue des ravages déjà causés par la prétendue Réforme, réunit une diète à Piotrkow. Mais l'élan et l'enthousiasme manquèrent d'abord à cette assemblée ; saint Pierre Canisius essaya à plusieurs reprise de remuer la foi dans les coeurs indifférents, ses efforts furent à la fin récompensés. Sigismond, stimulé par lui, déclara solennellement qu'il n'entendait point qu'on touchât aux droits de l'Eglise.
Cependant les sessions du concile de Trente, un instant suspendues, allaient reprendre leur cours. Pie V, l'empereur Ferdinand et les légats apostoliques jugèrent d'un commun accord que la présence de Canisius était nécessaire ; ils n'avaient pas oublié cette éloquence si douce à la fois et si ferme qui les avaient aussi de quel poids était l'autorité de Canisius, de quelle valeur serait une décision motivée par lui.
Edition du catéchisme de saint Pierre Canisius.
Arrivé à Trente le 14 mai 1562, il trouva le saint cardinal Osius, son ami, tout près de mourir. Mais la joie que ressentit le prélat à embrasser celui qu'il désirait voir si ardemment lui rendit soudain la santé.
A la reprise des travaux de l'assemblée, Canisius fut chargé de présider une commission qui dut revoir l'Index ou Catalogue des livres condamnés. Plusieurs fois le saint apôtre eut à traîter devant les Pères le grand sujet de l'Eucharistie. C'est alors que son coeur débordait vraiment sur ses lèvres. La foi l'inspirait et les théologiens assemblés rendaient grâces à Dieu qui leur parlait par une bouche si éloquente. Quant à l'orateur, il écrivait à ce propos :
" Il m'a été commandé de parler au Concile, c'est à d'autres que le succès était recommandé. Le Seigneur m'a aidé en vue des prières de notre Compagnie. A Lui seul toute la gloire."
Le Concile se sépara définitivement en 1563. Restait maintenant à faire accueillir ses décisions par les princes de l'Allemagne.
Le souverain Pontife, dans son anxiété, ne savait qui charger d'une aussi délicate mission, quand il jeta les yeux sur Canisius ; il le nomma aussitôt nonce apostolique et l'envoya en Allemagne. La tâche fut remplie au-delà de toute espérance, et bientôt l'on vit les seigneurs promulguer les décrets du Concile apportés par le nonce. Cette mission touchait à sa fin quand le Pape Pie V ordonna à Canisius de se rendre à la diète d'Augsbourg qui s'ouvrait le 24 mars 1566.
Eglise Saint-Pierre-Canisius de Vienne. Autriche.
Un nouveau péril menaçait l'Eglise. L'Islamisme était prêt à fondre sur la Chrétienté. Pour détourner ce fléau, il fallait une armée puissante. Les Protestants refusaient de souscrire aux subsides nécessaires pour lever des troupes. A la diète, ce fut encore Canisius qui par sa fermeté triompha de toutes ces résistances, et on le vit provoquer de la part des Catholiques une adhésion solennelle aux décrets du Concile de Trente.
Après tant de labeurs, le repos semblait permis ; mais pour le saint le repos était dans la lutte même. Le souverain Pontife apprend un jour que les principautés hérétiques de Magdebourg on t composé et publié les annales ecclésiastiques intitulées : Centuries de Magdebourg. C'était un odieux pamphlet, rempli des calomnies les plus perfides contre l'Eglise catholique. Le saint Pape, ému d'une telle nouvelle, ordonne à Canisius de réfuter cette mordante satire, et le bienheureux donne au monde le livre des Altérations de la parole divine, chef-d'oeuvre de controverse en même temps que brillante apologie de la Religion.
Le pape Grégoire XIII.
A peine la réfutation a-t-elle paru que Grégoire XIII envoie Canisius en députation auprès des princes de l'Allemagne, pour les engager à consolider l'établissement du collège germanique en fondant dans leur pays d'autres collèges et des séminaires en faveur de la jeunesse allemande.
D'Allemagne, saint Pierre Canisius revient à Rome pour régler les affaires de la fondation du collège germanique, puis il repart pour le colloque de Nuremberg, accompagnant l'évêque de Brescia. Le colloque est différé, et tandis que le saint se croit un instant libre, voici qu'il lui reste à accomplir une dernière et magnifique mission.
Une supplique des évêques de Bâle, de Constance et de Lausanne était venue signaler à Grégoire XIII le danger que la foi courait dans la Suisse catholique. L'évêque de Verceil, chargé par le Pape de rendre compte de l'état du pays, écrivit à Rome que le seul moyen de sauver la religion était d'y établir un collèges dirigé par les Pères de la Compagnie de Jésus. Ce projet fut approuvé, mais lorsqu'on apprit en Suisse que les Jésuites étaient sur le point d'arriver, Protestants et Catholiques s'unirent dans les plus menaçantes déclamations. Les calomnies répandues à dessein sur la compagnie de Jésus portaient leurs fruits. Un seul homme, pensa-t-on à Rome, est capable de triompher de ces résistances. C'était nommer Canisius. La présence seule du saint apôtre changea l'aspect de ce pays.
Saint Pierre Canisius prêchant. Suisse. XVIIe.
A peine arrivé à Fribourg, le saint fut l'objet de la vénération de tous : un collège y fit fondé et Canisius se plut à le diriger lui-même. Quoique recteur de la maison qui veanit de s'ouvrir, notre saint trouvait encore le temps de prêcher, de visiter les malades et de convertir les dissidents.
Les Fribourgeois s'attachaient de plus en plus à leur apôtre. Un jour, les Luthériens de Genève, de Lausanne, de Bâle, envoient à Fribourg de honteux libelles contre la Compagnie de Jésus. Le canton de Fribourg répond à ces calomnies en s'engageant par un serment solennel à maintenir toujours intacte la foi catholique.
Le 5 août 1596, les bâtiments du collège venaient d'être terminés : on en fit la solennelle inauguration. A la fin de la cérémonie, le saint vieillard appuyé sur son bâton voulut remercier les Fribourgeois de leurs généreux sacrifices et de leurs fidélité : il les supplia de ne jamais trahir leur sainte foi et leur promit le dévouement impérissable de la Compagnie de Jésus.
Cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Suisse.
Ce fut son Nunc dimittis. Ne désirant plus rien que le ciel, le saint vieillard se renferma tout entier en Dieu. Bientôt, pour que rien ne manquât à ses mérites déjà si nombreux, il fut atteint d'une hydrophisie qui lui fit souffrir un véritable martyre. Le 20 décembre 1597, après quatre mois de souffrances aigües, il déclara que sa vie sur la terre était enfin terminée et le lendemain, vers trois heures de l'après-midi, en présence de ses frères, il rendit à Dieu sa belle âme. Il était âgé de 78 ans ; il en avait passé 54 dans la Compagnie de Jésus.
A peine la nouvelle se fut-elle répandue, qu'on eut dit qu'une calamité publique avait soudain fondue sur la cité. On se pressait en foule aux portes du collège, on attendait avec anxiété que les restes du saint fussent exposés à la vénération publique. Enfin, une chapelle ardente fut disposée, et les Fribourgeois purent venir en foule s'agenouiller près du corps du bienfaiteur. Les uns restaient là immobiles et comme attendant que ses lèvres vinssent se ranimer pour leur adresser de saintes paroles ; d'autres se prosternaient pour baiser avec respect les mains et les pieds du serviteur de Dieu ; quelques uns, voulant à tout prix satisfaire leur dévotion, lui coupaient en cachette une mèche de cheveux ; on alla jusqu'à mettre en lambeaux ses vêtements sacrés.
Le surlendemain, le clergé, le sénat, la magistrature firent élever le corps et lui rendirent les honneurs funèbres, aux frais du trésor public, dans la cathédrale Saint-Nicolas, où il fut inhumé, avec la réserve que la précieuse dépouille serait rendue aux Jésuites dès qu'ils disposeraient d'une église pour la recevoir.
Eglise Saint-Michel de Fribourg. Le corps de notre saint
L'oraison funèbre du vénérable défunt fut prononcée par le prévôt du Chapitre. Les Fribourgeois, jalous de perpétuer à jamais la mémoire de saint Pierre Casinius, firent graver sur sa tombe une inscription qui retraçait en termes magnifiques les services que le saint apôtre avait rendu à la cause de la Religion.
Le 20 novembre 1864, Rome était en fête. Pie IX ordonnait qu'aux yeux de la ville et du monde le titre et les honneurs de Bienheureux fussent décernés au vénérable Pierre Canisius.
Canonisé, il a été proclamé Docteur de l'Eglise en 1925 et sa fête fut déplacée du 20 décembre au 27 avril.
On représente saint Pierre Canisius ayant près de lui un chien qui aboie contre l'hérésie. En effet, son nom hollandais, De Hond, signifie chien. C'est aussi la raison pour laquelle les Luthériens, furieux de leurs défaites systématiques contre lui et mécontents de ses oeuvres, l'appellent encore aujourd'hui le chien de Nimègue.
Statue de saint Pierre Canisius dans sa ville natale, Nimègue.
On peut trouver sa châsse dans la chapelle du Collège Saint-Michel de Fribourg autrefois tenu par les Jésuites.
Rq : On téléchargera le trésor qu'est le Catéchisme de saint Pierre Canisius sur ce lien : http://liberius.net/auteur.php?id_auth=10
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mardi, 16 avril 2024
16 avril. Saint Paterne ou saint Pair, évêque d'Avranches, et saint Scubilion, le compagnon de sa solitude. 565.
- Saint Paterne ou saint Pair, évêque d'Avranches, et saint Scubilion, le compagnon de sa solitude. 565.
Pape : Jean III. Roi de France : Sigebert Ier.
" Efforcez-vous d'affermir votre vocation et votre élection par les bonnes oeuvres."
II Pet., I, 10.
Saint Paterne et saint Scubilion.
Saint Paterne, dit autrement saint Pair, naquit à Poitiers, ville de Guyenne, vers l'an 480, de parents fort illustres par leur noblesse et par les charges qu'ils possédaient. Son père y remplissait des fonctions importantes. Après la mort de celui-ci, Julite, sa veuve, éleva son fils dans les principes qu'une mère vertueuse peut inspirer à ses enfants, et le jeune Paterne fit de grands progrès dans l'exercice de la loi chrétienne.
Il avait ainsi atteint sa vingtième année, lorsque cédant à une inspiration du ciel, il prit l'habit religieux au monastère d'Ansion, appelé depuis Saint-Jouin-de-Marnes. Son esprit d'ordre, sa discrétion, son amour de la régularité persuadèrent à son abbé qu'il remplirait bien la charge de cellérier, et en effet il s'en acquitta de manière à prouver qu'un jour il pourrait diriger des affaires autrement importantes.
Bientôt, il voulut chercher une solitude plus retirée, afin d'y vivre selon une pratique plus parfaite de l'humilité, de la mortification et de la pénitence. Il s'en ouvrit à son confrère nommé Scubilion et ils s'enfuirent en secret dans une région lointaine pour se fixer dans la Normandie, non loin de la ville de Coutances, ville déjà pourvue d'un évêché. Il n'y vécurent pas longtemps sans que le peuple, attiré vers eux par des vertus qui l'édifiait, ne leur rendît bientôt importunes des visites journalières qui leur ôtaient la liberté de la prière et des saints exercices.
Eglise Saint-Pair. Saint-Pair-sur-Mer
Ils y vécurent quelques temps comme des ermites, en un lieu fort solitaire ; enfin, un homme de bien de ce pays les pria d'aller à un village nommé Scicy, pour en convertir les habitants qui vivaient encore dans les ténèbres du paganisme. Ils y allèrent et y semèrent le bon grain de l'Evangile ; mais cette terre, n'étant pas disposée à le recevoir, ne produisit pas le fruit qu'on pouvait en attendre. Au contraire, les habitants, féroces comme des bêtes sauvages, les accablèrent d'outrages.
Cependant, les deux saints personnages se retirèrent dans une caverne où il vécurent pendant trois. Au bout de ce temps, l'abbé d'Ansion, Générosus, qui, admirant l'excès de leur pénitence, essaya néanmoins de la modérer : il reconduisit saint Scubilion au monastère poitevin, et recommanda saint Paterne à l'évêque de Coutances, Léontien. Ce prélat, connaissant les talents que Dieu vait donné pour la prédication de l'Evangile à notre Saint, l'ordonna diacre d'abord, puis prêtre en 512.
Saint Paterne. Eglise Saint-Paterne.
Saint Paterne fit bien profiter le talent du Seigneur et, rejoint par saint Scubilion sur ordre de l'abbé d'Ansion, il entreprit de convertir la contrée de Scicy, d'arracher les restes de l'idolâtrie, et, de faire ainsi pour toutes les contrées qu'il parcourut avec son saint confrère : le Cotentin, le Bessin, le pays du Mans, d'Avranches, de Rennes en Bretagne (à ce sujet, on ne confondra pas saint Patern, dit l'Ancien, premier évêque de Vannes au Ve siècle, que l'on fête au 15 avril, et dont une magnifique église de cette ville porte le nom et conserve une infime et précieuse partie de ses reliques). Il établit dans toutes ces provinces des monastères qu'il peupla de saints religieux dont il fut le supérieur et l'abbé.
Dieu l'honora de si grands et de si fréquents miracles, que le bruit de sa sainteté se répandit bientôt à la cour de Childebert, roi de France ; et ce prince l'envoya prier de venir à Paris. Ce ne fut sur son parcours que miracles : par ses prières et le signe de la croix, il rendait la vue aux aveugles, délivrait les possédés, etc.
Eglise Saint Paterne. Louvigné-de-Bais. Marches de Bretagne.
Après avoir satisfait à ce que le roi désirait de lui, il s'en retourna en sa première solitude du Cotentin, près de Scicy, jusqu'à ce que Notre Seigneur Jésus-Christ lui fit voir en songe trois saints évêques décédés depuis peu, saint Melaine, saint Léontien et saint Vigor le consacré lui-même évêques. Pensant être trompé par une illusion, saint Paterne n'en parla à personne, mais bientôt l'évêque d'Avranches décéda et il fut porté sur le siège épiscopal par la volonté unanime du clergé et du peuple.
Saint Paterne gouverna cette église l'espace de treize ans avec tout le zèle et toute la sollicitude d'un vigilant prélat. Il assista au troisième concile de Paris, en 557, et, de retour à Avranches, il tomba malade le lendemain de Pâques, alors qu'il se disposait à rendre visite au monastère de Scicy qu'il avait fondé et qui était si cher à son coeur puisque c'est saint Scubilion qui en était l'abbé.
Se sentant en danger, il envoya prier saint Scubilion de le venir assister en ce dernier passage. Mais son messager en rencontra un autre en chemin, qui venait de la part de ce saint abbé, aussi tombé malade, lui faire la même prière. Ainsi, l'évêque et l'abbé moururent le même jour, le 16 avril 565, pour se rencontrer ensemble à une même heure devant le tribunal de Dieu et dans la posssession de l'éternité bienheureuse.
Nos deux Saints choisirent leur sépulture dans l'église du monastère de Scicy. Il arriva de plus, que les convois, dont l'un était conduit par saint Lô (ou Laud), évêque de Coutances, et l'autre par Lascivius, évêque d'un autre lieu, arrivèrent ensemble et au même moment devant la porte de l'église du monastère.
Tombe renfermant le sarcophage de saint Pair.
RELIQUES
Les reliques de saint Paterne et de saint Scubilion se toruvent toujours dans l'église de Scicy - devenue aujourd'hui Saint-Pair-sur-Mer -, qui est depuis longtemps l'église paroissiale.
Des parties de ces reliques ont été détachées et ont été transportées à Issoudun et à Orléans, où l'on bâtit des églises du nom de saint Paterne. Il faut mentionner que celle d'Issoudun n'existe plus : elle fut ravagée pendant la tempête révolutionnaire. Les saintes reliques ont été sauvé par un brave homme et existent toujours et sont conservées dans l'église Saint-Cyr de la même ville. Cette ville avait aussi reçu des reliques de saint Patern l'Ancien, premier évêque de Vannes ; les bêtes sauvages révolutionnaires s'en emparèrent et les détruisirent.
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