dimanche, 22 septembre 2024
22 septembre. Saint Maurice et ses compagnons, martyrs à Agaune (Saint-Maurice), en Valais. 286.
Et cruor effusus fluminis instar iit.
Prodigium Alpino natura in culmine vidit,
Spectavit rubeas nam stupefacta nives."
" Sur l'ordre du tyran, la phalange invincible tombe foudroyée,
Et des fleuves de sang courent annoncer au monde son héroïque martyre.
Stupéfaite, la nature contemple un spectacle inouï :
Des neiges rouges au sommet des Alpes !"
P. Hugues Vaillant, Fast Sacri.
Sous Maximien-Hercule, qui partageait avec Dioclétien, et comme son collègue, l'empire de la république romaine, presque toutes les provinces virent déchirer et massacrer des peuples entiers de martyrs. Car non-seulement ce prince se livrait avec une sorte de fureur à l'avarice, à la débauche, à la cruauté, en un mot à tous les vices ; mais encore il était passionné pour les rites abominables des gentils, et dans la rage de son impiété contre le Roi du Ciel, il s'était armé pour détruire le nom Chrétien.
Tous ceux qui osaient faire profession de la Foi au vrai Dieu, des corps de troupes qu'il envoyait partout à leur recherche les enlevaient pour les traîner au supplice et à la mort. On eût dit qu'il avait fait trève avec les peuples barbares, afin de tourner toutes ses forces contre la Foi.
Il y avait alors dans les armées romaines une légion de soldats qu'on appelait les Thébains. La légion était un corps de 6.600 hommes sous les armes. On les avait fait venir du fond de l'Orient pour renforcer l'armée de Maxirnien. C'étaient des guerriers intrépides dans les combats, d'un courage magnanime, d'une Foi plus magnanime encore ; ils se montraient avec une noble émulation, pleins de générosité pour l'empereur et de dévouement au Christ ; car ils n'avaient point oublié dans les camps le précepte de l’Évangile, rendant fidèlement à Dieu ce qui est à Dieu, et à César ce qui est à César.
Ils refusent tous d'adorer l'empereur.
Nous n'avons pas oublié que c'est pour protéger nos concitoyens, et non pour les frapper, que nous avons pris les armes. Toujours nous avons combattu pour la justice, pour la piété, pour le salut des innocents. Jusqu'ici, au milieu des dangers que nous avons affrontés, nous n'avons pas ambitionné d'autre récompense. Nous avons combattu, par respect pour la foi que nous vous avons promise ; mais comment pourrions-nous la garder, si nous refusions à notre Dieu celle que nous Lui avons donnée ?
Nous avons vu tomber sous le glaive les compagnons de nos travaux et de nos dangers, et leur sang a rejailli jusque sur nous. Cependant nous n'avons point pleuré la mort, le cruel massacre de ces bienheureux frères ; nous n'avons pas même plaint leur sort ; au contraire, nous les avons félicités de leur bonheur, nous avons accompagné leur sacrifice des élans de notre joie, parce qu'ils ont été trouvés dignes de souffrir pour leur Seigneur et leur Dieu.
Quant à nous, nous ne sommes pas des rebelles que l'impérieuse nécessité de vivre a jetés dans la révolte ; nous ne sommes pas armés contre vous par le désespoir, toujours si puissant dans le danger. Nous avons des armes en main, et nous ne résistons pas. Nous aimons mieux mourir que de donner la mort, périr innocents que vivre coupables. Si vous faites encore des lois contre nous, s'il vous reste de nouveaux ordres à donner, de nouvelles sentences à prononcer, le feu, la torture, le fer ne nous effraient pas ; nous sommes prêts à mourir.
Nous confessons hautement que nous sommes Chrétiens et que nous ne pouvons pas persécuter des Chrétiens." (cf. Rq).
En recevant cette réponse, Maximien comprit qu'il avait à lutter contre des cœurs inflexibles dans la Foi du Christ. C'est pourquoi, désespérant de triompher de leur généreuse constance, il résolut de faire périr d'un seul coup la légion tout entière. De nombreux bataillons de soldats reçurent l'ordre de l'entourer pour la massacrer. Arrivés devant la bienheureuse légion, les impies qu'envoyait l'empereur tirèrent leurs glaives contre ces milliers de saints que l'amour de la vie n'avait point fait fuir devant la mort. Le fer les moissonnait dans tous les rangs, et il ne leur échappait pas une plainte, pas un murmure.
Ils avaient déposé leurs armes ; les uns tendaient le cou, les autres présentaient la gorge à leurs persécuteurs ; tous offraient aux bourreaux un corps sans défense. Malgré leur nombre et leur puissante armure, ils ne se laissèrent point emporter au désir de faire triompher la justice et leur cause par le fer. Une seule pensée les animait : le Dieu qu'ils confessaient S'était laissé traîner à la mort sans un murmure ; comme un agneau, Il n'avait point ouvert la bouche.
Eux de même, les brebis du Seigneur, ils se laissèrent déchirer par des loups furieux.
La terre fut couverte des cadavres de ces saintes victimes, et leur noble sang y coulait en longs ruisseaux. Jamais, en dehors des combats, la rage d'un barbare entassa-t-elle tant de débris humains ? Jamais la cruauté frappa-t-elle par une seule sentence tant de victimes à la fois, même en punissant des scélérats ? Pour eux, ils étaient punis, malgré leur innocence et leur multitude, quoique souvent on laisse des crimes sans vengeance, à cause du grand nombre des coupables. Ainsi l'odieuse cruauté d'un tyran sacrifia tout un peuple de saints, qui dédaignaient les biens de cette vie présente dans l'espérance du bonheur futur. Ainsi périt cette légion vraiment digne des Anges. C'est pour cela que notre Foi nous les montre aujourd'hui réunis aux légions des Anges, et chantant éternellement avec eux dans le Ciel le Seigneur, le Dieu des armées.
Retable représentant le martyr de la légion thébaine. XIVe.
Quant au martyr Victor, il ne faisait pas partie de cette légion ; même il n'était plus soldat, ayant obtenu, après de longs services, son congé de vétéran. Mais dans un voyage qu'il faisait, il tomba, sans le savoir, au milieu des bourreaux qui, joyeux de leur butin, se livraient aux orgies d'un grand festin. Ils l'invitèrent à partager avec eux les joies de la fête. Quand il eut appris de ces malheureux, dans l'exaltation de l'ivresse, la cause qui les réunissait, il refusa avec horreur et méprisa le festin et les convives. On lui demanda alors s'il était Chrétien ; à peine eut-il répondu qu'il l'était et le serait toujours, que tout aussitôt on se jeta sur lui et on le massacra. Ainsi frappé au même lieu que les autres martyrs, il partagea avec eux et leur mort et leurs honneurs. De ce grand nombre de saints, 4 noms seulement nous sont connus : les saints martyrs Maurice, Exupère, Candide et Victor.
Un vitrail de la cathédrale de Strasbourg représente saint Maurice vêtu en chevalier. On le peint tenant un étendard crucifère, une grande épée et la couronne d'épines. Dans la collection des Saints du cabinet des estampes de Paris, on le voit tantôt représenté à cheval ; tantôt en tête des officiers de sa légion ; tantôt avec ses compagnons d'armes, refusant de sacrifier aux idoles, puis massacré par ordre de l'empereur.
ORAISON
" Dieu tout-puissant, daignez nous entendre : que la solennité festive de vos saints Martyrs Maurice et ses compagnons soit pour nous source d'allégresse ; comme leur suffrage est notre appui, que leur naissance au ciel soit notre gloire. Par Jésus-Christ Notre Seigneur..."
CULTE ET RELIQUES
Les corps des bienheureux martyrs d'Agaune furent découverts par révélation à saint Théodore, évêque de Sion en Valais. Il fit élever en leur honneur une basilique adossée d'un côté à un énorme rocher. Or, pendant qu'on la bâtissait, il arriva un miracle que nous ne pouvons passer sous silence.
Cathédrale Saint-Maurice de Vienne. Dauphiné. France.
Parmi les miracles des saints Martyrs, nous ne devons point oublier un fait qui a eu du retentissement, et que tous ont connu. Une dame, épouse de Quincius, personnage d'un rang distingué, était atteinte d'une paralysie qui lui avait enlevé l'usage de ses pieds. Elle sollicita son mari de la faire conduire à Agaune, quoique la distance fût considérable. A son arrivée, des serviteurs la portèrent dans leurs bras jusqu'à la basilique des saints martyrs ; elle revint à pied à son hôtellerie. Et aujourd'hui, dans ces mêmes membres que la mort avait déjà frappés, elle porte partout le témoignage du miracle qui l'a guérie.
Aux miracles racontés par saint Eucher (évêque de Lyon, célèbre saint et ascète), nous ajouterons celui qui arriva à saint Martin. Ce grand prélat, qui portait une singulière dévotion à nos glorieux martyrs, se rendit à Agaune pour tâcher d'avoir de leurs reliques ; mais n'ayant pu en obtenir des moines qui possédaient ce lieu, il se transporta à l'endroit où ils avaient enduré la mort. Et là, après avoir fait une oraison très-fervente, il prit un couteau et en enleva, en forme de couronne, un morceau de terre, et aussitôt, ô prodige admirable il en sortit du sang en abondance, qu'il reçut dans un vase apporté exprès pour cela, et en laissa une partie à Agaune avec ce même couteau ; il apporta le reste à Tours, et le distribua ensuite à plusieurs églises, particulièrement à sa cathédrale et à celle d'Angers. Il en conserva seulement pour lui une petite fiole, qu'il porta toujours depuis par dévotion, et avec laquelle il voulut être enterré.
La mémoire de saint Maurice et de ses compagnons a toujours été très-célèbre dans l'Église. Les fidèles ont coutume, dans les guerres contre les ennemis de la Foi, de l'invoquer avec saint Georges, pour en obtenir la victoire par la force de leur intercession.
Les Grecs ont eu aussi un martyr du nom de saint Maurice, qui souffrit dans Apamée, le 4 juillet, et dont Métaphraste a décrit le combat. Plusieurs l'ont confondu avec celui dont nous parlons, et le cardinal Baronius confesse qu'il avait suivi cette opinion ; mais il l'a rétractée dans ses Notes sur le martyrologe romain, au 22 septembre.
Cathédrale Saint-Maurice d'Angers. France.
Le culte de Saint-Maurice et de ces compagnons, né en Valais sous les yeux des témoins de leur martyre, passa dans les Gaules vers la fin du IVe siècle ; il s'étendit plus tard en Italie ; aujourd'hui il est connu et répandu dans toute la Chrétienté. Déjà vers l'an 390, saint Théodore, évêque de Sion, envoie des ossements des Thébéens [ou Thébains] à saint Victrice, évêque de Rouen. Saint Germain, évêque d'Auxerre, fait bâtir en 420, dans sa ville épiscopale, une église en l'honneur de saint Maurice et de ses compagnons.
Les églises paroissiales élevées sous le vocable de saint Maurice et de ses illustres frères d'armes, soit dans les diocèses voisins, soit à l'étranger, sont innombrables ; il y a en Suisse peu d'églises où l'on n’aperçoive quelque part la statue de Maurice ou le signe qui le rappelle, la croix tréflée qui porte son nom figure partout; on la voit peinte aux voûtes des sanctuaires sur les vieux drapeaux, gravée sur les armoiries des villes et jusque sur les monnaies anciennes et modernes qui ont subsisté jusque dans ces derniers temps.
L'église actuelle de l'abbaye de Saint-Maurice-en-Valais, dans laquelle les reliques des martyrs thébéens furent transférées solennellement au milieu d'un concours immense de peuple, possède :
- 1. Une grande châsse plaquée en argent, ornée de nombreuses pierres précieuses, renfermant plusieurs parties du corps de saint Maurice ;
- 2. 2 bustes, l'un en argent, renfermant la tête de saint Candide, un des lieutenants de saint Maurice ; l'autre en argent doré, surmonté des armes de la maison de Savoie, renferme la tête de saint Victor, vétéran romain martyrisé avec les Thébéens ;
- 3. une statue équestre, de 50 centimètres, en argent, représentant saint Maurice ;
- 4. 2 bras en argent, enrichi de pierres précieuses, dont l'un renferme une côte et un ossement de saint Bernard de Menthon ; l'autre, les reliques de saint Innocent, martyr thébéen ;
- 5. 2 châsses plaquées argent, plus petites que celle de saint Maurice. L'une renferme des ossements des martyrs thébéens ; l'autre, les reliques des enfants de saint Sigismond, patron de la paroisse ;
- 6. 2 coupes en argent, renferment des reliques de saint Séverin, premier abbé de Saint-Maurice (478), des Thébéens, de saint François de Sales, etc. ;
- 7. un vase d’agate d'une seule pièce, don de saint Charlemagne, travail Grec de l'ère païenne, très-remarqué des connaisseurs, contenant de la terre imbibée du sang des martyrs thébéens ;
- 8. une aiguière, travail arabe non moins précieux que l’agate, présent aussi de l'empereur saint Charlemagne ; c'est émail sur or, orné de superbes saphirs ; elle contient aussi du sang de nos Martyrs ;
- 9. l'anneau de saint Maurice, véritable anneau des chevaliers romains du IIIe au IVe siècle ; c'est un saphir brut monté sur or ;
- 10. un reliquaire renfermant 127 dents des martyrs thébéens, et un autre renfermant des reliques du chef de la légion.
Les reliques de ces glorieux martyrs furent distribuées en divers endroits de la Chrétienté. Le diocèse de Troyes en possède une partie. L'église de l'abbaye de Larrivour avait une châsse dans laquelle se trouvaient des restes de saint Maurice et de ses compagnons. Cette châsse est actuellement dans l'église de Lusigny, à la muraille de la chapelle Saint-Nicolas, du côté de l’Évangile. Une relique de saint Maurice est également dans une des châsses qui proviennent de l'abbaye de Montiéramey et qui sont exposées dans l'église paroissiale.
Saint Maurice est le patron de plusieurs paroisses dans le diocèse de Nevers. Le monastère de la Visitation de Nevers possède le corps de saint Ours, un des compagnons de saint Maurice.
En 1837 une société militaire, sous le nom de Saint-Maurice, a été fondée au Mans par des officiers en retraite. Elle avait pour but de venir en aide à ceux de ses membres qui, par suite de maladies, se trouvaient dans une position fâcheuse ; de leur faire rendre les derniers devoirs d'une manière convenable ; d'assister leurs veuves et leurs orphelins ; mais elle n'existe plus.
Aujourd'hui, on peut s'interroger quant au sens de l'obéissance des Chrétiens qui servent dans l'armée de la république dite française (régime illégitime et satanique, cause et instrument de tant de martyrs religieux ou laïcs qui piétine sans cesse les droits du Souverain Maître), à l'entendement qu'ils forment de leur vocation et à la manière fausse qu'ils ont de concilier l'inconciliable...
03:00 Publié dans M | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 21 septembre 2024
21 septembre. Saint Matthieu, Apôtre, Evangéliste, martyr. Ier siècle.
- Saint Matthieu, Apôtre, Evangéliste, martyr. Ier siècle.
Pape : Saint Pierre. Empereur romain : Néron.
" Je reconnais la sainteté du bienheureux Matthieu dans l'abandon qu'il fait de tous ses biens, dans sa prompte obéissance à Jésus, dans son zèle à imiter son maître, dans l'hospitalité qu'il exerce envers lui, dans la confession qu'il lui fait de ses fautes."
Saint Thomas d'Aquin.
Saint Matthieu. Plaque de cuivre de Croix de procession.
A la suite de l'Aigle et du Lion levés les premiers au ciel de la sainte Liturgie, l'Homme paraît, en attendant que se complète, au mois prochain, le glorieux quadrige promenant le char de Dieu par le monde, entourant son trône dans les deux. Etres mystérieux, aux six ailes de séraphins, dont les yeux sans nombre fixent l'Agneau debout sur le trône et comme immolé, dont la voix répète jour et nuit : " Saint, Saint, Saint est le Seigneur Dieu tout-puissant, qui était, et qui est, et qui doit venir !" Jean les voit donnant le signal de l'acclamation des élus au Créateur et Rédempteur ; et quand toute créature, au ciel, sur la terre, sous la terre, a reconnu prosternée les titres de l'Agneau vainqueur à la divinité, à la gloire, à l'empire dans les siècles sans fin, c'est encore eux qui scellent de leur témoignage pour l'éternité l'hommage du monde, disant : Amen ! il est ainsi !
Il est donc grand et tout insigne l'honneur des Evangélistes. Matthieu, le donné, mérita son beau nom du jour où, à la parole de Jésus : " Suis-moi ! ", il se leva et le suivit ; mais le don de Dieu au publicain des bords du lac de Tibériade dépassa celui qu'il faisait lui-même. Le Très-Haut, dont les regards atteignent d'au delà des cieux Ce qu'il y a de plus bas sur la terre, aime à choisir parmi les humbles les princes de son peuple. Au plus bas rang social, Lévi l'était par sa profession, décriée du Juif, méprisée du Gentil ; mais plus humble encore apparut-il en son cœur, lorsque, n'imitant pas la délicate réserve à son endroit des autres narrateurs sacrés, il inscrivit devant l'Eglise son titre honni d'autrefois à côté de celui d'Apôtre.
C'était relever la miséricordieuse magnificence de Celui qui est venu pour guérir les malades et non les forts, pour appeler, non les justes, mais les pécheurs ; c'était, en exaltant l'abondance de ses grâces, en provoquer la surabondance : Matthieu fut appelé à écrire le premier Evangile. Sous le souffle de l'Esprit, il écrivit, dans cette inimitable simplicité qui parle au cœur, l'Evangile du Messie attendu d'Israël et que les Prophètes avaient annoncé ; du Messie docteur et sauveur de son peuple, descendant de ses rois, roi lui-même de la fille de Sion ; du Messie enfin venu, non pour détruire la Loi, mais pour la conduire au plein épanouissement de l'alliance universelle et éternelle.
Ce fut à l'occasion du banquet offert par la simplicité de sa reconnaissance au bienfaiteur divin, qu'on entendit Jésus, prenant la défense de Lévi autant que la sienne, répondre au scandale qu'y cherchaient plusieurs : Est-ce que les fils de l'Epoux peuvent gémir, tant que l'Epoux est avec eux ? Mais viendront des jours où l'Epoux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront.
Clément d'Alexandrie atteste par la suite, en effet, l'austérité de l'Apôtre qui ne vivait que de légumes et de fruits sauvages. Mais la Légende nous dira aussi son zèle pour Celui qui s'était si suavement révélé à son cœur, sa fidélité à lui garder les âmes enivrées du vin qui fait germer les vierges. Ce fut son martyre ; le témoignage du sang fut pour lui d'affirmer les devoirs et les droits de la virginité sainte.
Aussi, jusqu'à la fin des temps, l'Eglise, consacrant ses vierges, reprendra pour chacune la bénédiction qu'il prononça sur l'Ethiopienne, et que le sang de l'Apôtre-Evangéliste a pénétrée de sa vertu pour jamais.
Saint Matthieu eut deux noms, Matthieu et Lévi. Matthieu veut dire don hâtif, ou bien donneur de conseil. Ou Matthieu vient de magnus, grand, et Theos, Dieu, comme si on disait grand à Dieu, ou bien de main et de Theos, main de Dieu. En effet il fut un don hâtif puisque sa conversion fut prompte. Il donna des conseils par ses prédications salutaires. II fut grand devant Dieu par la perfection de sa vie, et il fut la main dont Dieu se servit pour écrire son Evangile. Lévi veut dire, enlevé, mis, ajouté, apposé. Il fut enlevé à son bureau d'impôts, mis au nombre des apôtres, ajouté à la société des Evangélistes, et apposé au catalogue des martyrs.
Saint Matthieu, apôtre, prêchait en Ethiopie dans une ville nommée Nadaber, où il trouva deux mages Zaroïs et Arphaxus qui ensorcelaient les hommes par de tels artifices que tous ceux qu'ils voulaient paraissaient avoir perdu la santé avec l’usage de leurs membres. Ce qui enfla tellement leur orgueil qu'ils se faisaient adorer comme des dieux par les hommes.
Saint Matthieu devant l'idole et les magiciens.
L'apôtre Matthieu étant entré dans cette ville, où il reçut l’hospitalité de l’eunuque de la reine de Candace baptisé par Philippe (Actes), découvrait si adroitement les prestiges de ces mages qu'il changeait eu bien le mal qu'ils faisaient aux hommes.
Or, l’eunuque, ayant demandé à saint Matthieu comment il se faisait qu'il parlât et comprit tant de langages différents, Matthieu lui exposa qu'après la descente du Saint-Esprit, il s'était trouvé posséder la science de toutes les langues, afin que, comme ceux qui avaient essayé par orgueil d'élever une tour jusqu'au ciel, s'étaient vus forces d'interrompre leurs travaux par la confusion des langues, de même les Apôtres, par la connaissance de tous les idiomes, construisissent, non plus avec des pierres, mais avec des vertus, une tour au moyen de laquelle tous ceux qui croiraient pussent monter au ciel.
Bas-relief représentant saint Matthieu rédigeant
Alors quelqu'un vint annoncer l’arrivée des deux mages accompagnés de dragons qui, en vomissant un feu de soufre par la gueule et par les naseaux, tuaient tous les hommes. L'Apôtre, se munissant du signe de la croix, alla avec assurance vers eux. Les dragons ne l’eurent pas plutôt aperçu qu'ils vinrent à l’instant s'endormir à ses pieds. Alors saint Matthieu dit aux mages :
" Où donc est votre art ? Eveillez-les, si vous pouvez : quant à moi, si je n'avais prié le Seigneur, j'aurais de suite tourné contre vous ce que vous aviez la pensée de me faire."
Saint Matthieu Inspiré par saint Raphaël.
Le Caravage. XVIe.
Or, comme le peuple s'était rassemblé, Matthieu commanda de par le nom de Notre Seigneur Jésus-Christ aux dragons de s'éloigner, et ils s'en allèrent de suite sans nuire à personne. Ensuite saint Matthieu commença à adresser un grand discours au peuple sur la gloire da paradis terrestre, avançant qu'il était plus élevé que toutes les montagnes et voisin du ciel, qu'il n'y avait là ni épines ni ronces, que les lys ni les roses ne s'y flétrissaient, que la vieillesse n'y existait pas, mais que les hommes y restaient constamment jeunes, que les concerts des anges s'y faisaient entendre, et que quand on appelait les oiseaux, ils obéissaient tout de suite. Il ajouta que l’homme avait été chassé de ce paradis terrestre, mais que par la naissance de Notre Seigneur Jésus-Christ il avait été rappelé au Paradis du ciel.
Saint Matthieu. Grandes heures d'Anne de Bretagne. XVIe.
Pendant qu'il parlait au peuple, tout à coup s'éleva mi grand tumulte ; car l’on pleurait la mort du fils du roi. Comme les magiciens ne pouvaient le ressusciter, ils persuadaient au roi qu'il avait été enlevé en la compagnie des dieux et qu'il fallait en conséquence lui élever une statue et un temple. Mais l’eunuque, dont il a été parlé plus haut, fit garder les magiciens et manda l’apôtre qui, après avoir fait une prière, ressuscita à l’instant le jeune homme (Bréviaire). Alors le roi, qui se nommait Egippus, ayant vu cela, envoya publier dans toutes ses provinces :
" Venez voir un Dieu caché sous les traits d'un homme."
On vint donc avec des couronnes d'or et différentes victimes dans l’intention d'offrir des sacrifices à Matthieu, mais celui-ci les en empêcha en disant :
" Ô hommes, que faites-vous ? Je ne suis pas un Dieu, je suis seulement le serviteur de Notre Seigneur Jésus-Christ !"
Alors avec l’argent et l’or qu'ils avaient apportés avec eux, ces gens bâtirent, par l’ordre de l’Apôtre, une grande église qu'ils terminèrent en trente jours ; et dans laquelle saint Matthieu siégea trente-trois ans ; il convertit l’Egypte toute entière ; le roi Egippus, avec sa femme et tout le peuple, se fit baptiser. Iphigénie, la fille du roi, qui avait été consacrée à Dieu, fut mise à la tête de plus de deux cents vierges.
Plaque de cuivre de Croix de procession. XIIe. Aix-La-Chapelle.
Après quoi Hirtacus succéda au roi ; il s'éprit d'Iphigénie et promit à l’Apôtre la moitié de son royaume s'il la faisait consentir à accepter sa main. L'Apôtre lui dit de venir le dimanche à l’église comme son prédécesseur, pour entendre, en présence d'Iphigénie et des autres vierges, quels avantages procurent les mariages légitimes. Le roi s'empressa de venir avec joie, dans la pensée que l’apôtre voudrait conseiller le mariage à Iphigénie.
Quand les vierges et tout le peuple furent assemblés, saint Matthieu parla longtemps des avantages du mariage et mérita les éloges du roi, qui croyait que l’apôtre parlait ainsi afin d'engager la vierge à se marier. Ensuite, ayant demandé qu'on fit silence, il reprit son discours en disant :
" Puisque le mariage est une bonne chose, quand on en conserve inviolablement les promesses, sachez-le bien, vous qui êtes ici présents, que si un esclave avait la présomption d'enlever l’épouse du roi, non seulement il encourrait la colère du prince, mais, il mériterait encore la mort, non parce qu'il serait convaincu de s'être marié, mais parce qu'en prenant l’épouse de son seigneur, il aurait outragé son prince dans sa femme. Il en serait de même de vous, Ô roi ; vous savez qu'Iphigénie est devenue l’épouse du roi éternel, et qu'elle est consacrée par le voile sacré ; comment donc pourrez-vous prendre l’épouse de plus puissant que vous et vous unir à elle par le mariage ?"
Quand le roi eut entendu cela, il se retira furieux de colère (Bréviaire). Mais l’Apôtre intrépide et constant exhorta tout le monde à la patience et à la constance ; ensuite il bénit Iphigénie, qui, tremblante de peur, s'était jetée à genoux devant lui avec les autres vierges. Or, quand la messe solennelle fut achevée, le roi envoya un bourreau qui tua saint Matthieu en prières debout devant l’autel et les bras étendus vers le ciel. Le bourreau le frappa par derrière et en fit ainsi un martyr. A cette nouvelle, le peuple courut, au palais du roi pour y mettre le feu, et ce fut à peine si les prêtres et les diacres purent le contenir ; puis on célébra avec joie le martyre de l’Apôtre.
Or, comme le roi ne pouvait par aucun moyen faire changer Iphigénie de résolution, malgré les instances des dames qui lui furent envoyées, et celles des magiciens, il fit entourer sa demeure tout entière d'un feu immense afin de la brûler avec les autres vierges. Mais l’apôtre leur apparut, et il repoussa l’incendie de leur maison. Ce feu en jaillissant se jeta sur le palais du roi qu'il consuma en entier ; le roi seul parvint avec peine à s'échapper avec son fils unique.
Aussitôt après ce fils fut saisi par le démon, et courut au tombeau de l’apôtre en confessant les crimes de son père, qui lui-même fut attaqué d'une lèpre affreuse ; et comme il ne put être guéri, il se tua de sa propre main en se perçant avec une épée.
Saint Matthieu - Bible grecque. Xe.
Alors le peuple établit roi le frère d'Iphigénie qui avait été baptisé par l’apôtre. Il régna soixante-dix ans, et après s'être substitué son fils, il procura de l’accroissement au culte chrétien, et remplit toute la province de l’Ethiopie d'églises en l’honneur de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Pour les [ignobles magiciens] Zaroës et Arphaxat, dès le jour ou l’Apôtre ressuscita le fils du roi, ils s'enfuirent en Perse ; mais saint Simon et saint Jude les y vainquirent.
Saint Matthieu et l'ange. Cantarini. XVIIe.
Dans saint Matthieu, il faut considérer quatre vertus :
- 1. La promptitude de son obéissance : car à l’instant où Notre Seigneur Jésus-Christ l’appela, il quitta immédiatement son bureau, et sans craindre ses maîtres, il laissa les états d'impôts inachevés pour s'attacher entièrement à Notre Seigneur Jésus-Christ.
Cette promptitude dans son obéissance a donné à quelques-uns l’occasion de tomber en erreur, selon que le rapporte saint Jérôme dans son commentaire sur cet endroit de l’Evangile :
" Porphyre, dit-il, et l’empereur Julien accusent l’historien de mensonge et de maladresse, comme aussi il taxe de folie la conduite de ceux qui se mirent aussitôt à la suite du Sauveur, comme ils auraient fait à l’égard de n'importe quel homme qu'ils auraient suivi sans motifs. Notre Seigneur Jésus-Christ opéra auparavant de si grands prodiges et de si grands miracles qu'il n'y a pas de doute que les Apôtres ne les aient vus avant de croire. Certainement l’éclat même et la majesté de la puissance divine qui était cachée, et qui brillait sur sa face humaine, pouvait au premier aspect attirer à soi ceux qui le voyaient. Car si on attribue à l’aimant la force d'attirer des anneaux et de la paille, à combien plus forte raison le maître de toutes les créatures pouvait-il attirer à soi ceux qu'il voulait."
- 2. Considérons ses largesses et sa libéralité, puisqu'il donna de suite au Sauveur un grand repas dans sa maison.
Or, ce repas ne fut pas grand par cela seul qu'il fut splendide, mais il le fut :
a) par la résolution qui lui fit recevoir Notre Seigneur Jésus-Christ avec grande affection et désir ;
b) par le mystère dont il fut la signification ; mystère que la glose sur saint Luc explique en disant : " Celui qui reçoit Notre Seigneur Jésus-Christ dans l’intérieur de sa maison est rempli d'un torrent de délices et de volupté " ;
c) par les instructions que Notre Seigneur Jésus-Christ ne cessa d'y adresser comme, par exemple : " Je veux la miséricorde et non le sacrifice " et encore : " Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecins " ;
d) par la qualité des invités, qui furent de grands personnages, comme Notre Seigneur Jésus-Christ et ses disciples.
Saint Matthieu et saint François d'Assise.
- 3. Son humilité qui parut en deux circonstances :
- la première en ce qu'il avoua être un publicain. Les autres évangélistes, dit la glose, par un sentiment de pudeur, et par respect pour saint Matthieu, ne lui donnent pas son nom ordinaire. Mais, d'après ce qui est écrit du Juste, qu'il est son propre accusateur, il se nomme lui-même Mathieu et publicain, pour montrer à celui qui se convertit qu'il ne doit jamais désespérer de son salut, car de publicain il fut fait de suite Apôtre et Evangéliste ;
- la seconde, en ce qu'il supporta avec patience les injures qui lui furent adressées. En effet quand les pharisiens murmuraient de ce que Notre Seigneur Jésus-Christ eût été loger chez un pécheur, il aurait pu à bon droit leur répondre et leur dire : " C'est vous plutôt qui êtes des misérables et des pécheurs puisque vous refusez les secours du médecin en vous croyant justes : mais moi je ne puis plus être désormais appelé pécheur, quand j'ai recours au médecin du salut et que je lui découvre mes plaies."
Saint Matthieu. Ugolin de Sienne. XVIe.
- 4. L'honneur que reçoit dans l’église son évangile qui se lit plus souvent que celui des autres évangélistes comme les psaumes de David et les épîtres de saint Paul, qu'on lit plus fréquemment que les autres livres de la sainte Ecriture.
En voici la raison : Selon saint Jacques, il y a trois sortes de péchés, savoir: l’orgueil, la luxure et l’avarice. Saul, ainsi appelé de Saül le plus orgueilleux des rois, commit le péché d'orgueil quand il persécuta l’église au delà de toute mesure. David se livra au péché de luxure en commettant un adultère et en faisant tuer par suite de ce premier crime Urie le plus fidèle de ses soldats. Matthieu commit le péché, d'avarice, eu se livrant à des gains honteux, car il était douanier. La douane, dit Isidore, est un lieu sur un port de mer où sont reçues les marchandises des vaisseaux et les gages des matelots. Telos, en grec, dit Bède, veut dire impôt.
Or, bien que Saul, David et Matthieu eussent été pécheurs, cependant leur pénitence fut si agréable que non seulement le Seigneur leur pardonna leurs fautes, mais qu'il les combla de toutes sortes de bienfaits : car du plus cruel persécuteur, il fit le plus fidèle prédicateur ; d'un adultère et d'un homicide il fit un prophète et un psalmiste ; d'un homme avide de richesses et d'un avare, il fit un Apôtre et un Evangéliste.
C'est pour cela que les paroles de ces trois personnages se lisent si fréquemment : afin que personne ne désespère de son pardon, s'il veut se convertir, eu considérant la grandeur de la race dans ceux qui ont été de si grands coupables.
D'après saint Ambroise, dans la conversion de saint Matthieu il y a certaines particularités à considérer du côté du médecin, du côté de l’infirme qui est guéri, et du côté de la manière de guérir.
Dans le médecin il y a eu trois qualités, savoir : la sagesse qui connut le mal dans sa racine, la bonté qui employa les remèdes, et la puissance qui changea saint Matthieu si subitement.
Saint Ambroise parle ainsi de ces trois qualités dans la personne de saint Matthieu lui-même :
- " Celui-là peut enlever la douleur de mon cœur et la pâleur de mon âme qui connaît ce qui est caché." Voici ce qui a rapport à la sagesse ;
- " J'ai trouvé le médecin qui habite les cieux et qui sème les remèdes, sur la terre." Ceci se rapporte à la bonté ;
- " Celui-là seul peut guérir mes blessures qui ne s'en connaît pas." Ceci s'applique à la puissance.
Saint Matthieu. Evangéliaire. Aix-La-Chapelle. IXe / Xe siècle.
Or, dans cet infirme qui est guéri, c'est-à-dire dans saint Matthieu, il y a trois circonstances à considérer ; toujours d'après saint Ambroise :
- Il se dépouilla parfaitement de la maladie, il resta agréable à celui qui le guérissait, et quand il eut reçu la santé, toujours il se conserva intact. C'est ce qui lui fait dire : " Déjà je ne suis plus ce publicain, je ne suis plus Lévi, je me suis dépouillé de Lévi, quand j'ai eu revêtu Notre Seigneur Jésus-Christ ", ce qui se rapporte à la première considération ;
- " Je hais ma race, je change de vie, je marche seulement à votre suite, mon Seigneur Jésus, vous qui guérissez mes plaies." Ceci, a trait à la deuxième considération ;
- " Quel est celui qui me séparera de la charité de Dieu, laquelle réside en moi ? Sera-ce la tribulation, la détresse, la faim ?" C'est ce qui s'applique à la troisième.
Bible arménienne. Xe siècle.
D'après saint Ambroise le mode de guérison fut triple :
- 1. Notre Seigneur Jésus-Christ le lia avec des chaînes ;
- 2. Il le cautérisa ;
- 3. Il le débarrassa de toutes ses pourritures.
Ce qui fait dire à saint Ambroise dans la personne de saint Matthieu :
- " J'ai été lié avec les clous de la croix et dans les douces entraves de la charité ; enlevez, ô Jésus ! la pourriture de mes péchés tandis que vous me tenez enchaîné dans les liens de la charité ; tranchez tout ce que vous trouverez de vicieux." Premier mode ;
- " Votre commandement, sera pour moi un caustique que je tiendrai sur moi, et si le caustique de votre commandement brûle, toutefois il ne brûle que les pourritures de la chair ; de peur, que la contagion ne se glisse comme un virus ; et quand bien même le médicament tourmenterait, il ne laisse pas d'enlever l’ulcère." Deuxième mode ;
- " Venez de. suite, Seigneur, tranchez les passions cachées et profondes. Ouvrez vite la blessure, de peur que le mal ne s'aggrave ; purifiez tout ce qui est fétide dans un bain salutaire." Troisième mode.
Saint Matthieu. Giovanni Girolamo Savoldo. XVIe.
L'évangile de, saint Matthieu fut trouvé écrit de sa main l’an du Seigneur 500, avec les os de saint Barnabé. Cet apôtre portait cet évangile avec lui et le posait sur les infirmes qui tous étaient guéris, tant par la foi de Barnabé que par les mérites de Mathieu.
Bible arménienne. XVe.
PRIERE
" Ô saint Matthieu, combien votre humilité plut au Seigneur ! C'est elle qui vous mérite d'être aujourd'hui si grand dans le royaume des cieux ; c'est elle qui fit de vous le confident de l'éternelle Sagesse incarnée. Cette Sagesse du Père qui se détourne des prudents et se révèle aux petits, renouvela votre âme dans sa divine intimité et la remplit du vin nouveau de sa céleste doctrine. Si pleinement vous aviez compris son amour, qu'elle vous choisit pour premier historien de sa vie terrestre et mortelle. Par vous l'Homme-Dieu se révélait à l'Eglise. Magnifiques enseignements que les vôtres, ne se tient pas de dire l'Epouse dans l'auguste secret des Mystères, où elle recueille l'héritage de celle qui ne sut comprendre ni le Maître adoré, ni les Prophètes qui l'annoncèrent !
Bible éthiopienne du XIVe.
Mais il est une parole entre toutes que ceux-là seuls comprennent, des élus mêmes, à qui est donné de la comprendre ; de même qu'au ciel tous ne suivent point l'Agneau partout où il va, que tous non plus ne chantent pas le cantique réservé à ceux-là seuls dont les affections ici-bas ne furent point divisées. Evangéliste de la virginité comme vous en fûtes l'hostie, veillez sur la portion choisie du troupeau du Seigneur.
Bible éthiopienne du XVIIIe.
N'oubliez cependant, Ô Lévi, nul de ceux pour qui vous nous apprenez que l'Emmanuel a reçu son beau nom de Sauveur. Le peuple entier des rachetés vous vénère et vous prie. Par la voie qui nous reste tracée grâce à vous dans l'admirable Sermon sur la montagne, conduisez-nous tous à ce royaume des cieux dont la mention revient sans fin sous votre plume inspirée."
00:15 Publié dans M | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 20 septembre 2024
20 septembre. Saint Eustache et sa famille, martyrs. 118.
- Saint Eustache et sa famille, martyrs. 118.
Pape : Saint Sixte Ier. Empereur romain : Adrien.
" Au milieu de cet océan du monde, nous sommes sans cesse ballotés par la tempête."
Saint Augustin.
Vie de saint Eustache. Legenda aurea. Bx J. de Voragine. XVe.
Un groupe de martyrs, une famille entière, le père, la mère, les fils, forment à l'étendard du salut un rempart glorieux. Rien de mieux attesté que l'antiquité de leur culte, en Orient comme en Occident. Moins assurés sont les détails de leur vie. Placide le tribun, dont Josèphe énumère les exploits dans sa Guerre des Juifs, aurait-il quelque rapport avec Eustache célébré en ce jour ? La généalogie de notre Saint le rattacherait-elle à la famille Octavia, d'où sortit Auguste ?
Et faut-il voir son direct héritier dans le noble Tertullus confiant à saint Benoît son fils Placide, l'enfant bien-aimé du patriarche, le protomartyr de l'Ordre bénédictin ? Subiaco posséda longtemps la montagne où d'antiques traditions placent le lieu de l'apparition du cerf mystérieux ; Tertullus l'aurait léguée comme héritage patrimonial au monastère auquel il donnait son fils. Mais le temps nous permet à peine de rappeler du moins que ces questions furent posées.
Il est peu de récit aussi touchant que celui de nos martyrs.
Eustache s'appelait d'abord Placide. C'était le commandant des soldats de l’empereur Trajan. Bien que adonné au culte des idoles, il pratiquait avec grande assiduité les oeuvres de miséricorde. Il avait une épouse idolâtre et miséricordieuse comme lui ; il en eut deux fils qu'il éleva selon son rang, avec une magnificence extraordinaire ; comme il se faisait un devoir de s'adonner aux oeuvres de miséricorde, il mérita d'être dirigé dans la voie de la vérité.
Un jour en effet qu'il se livrait à la chasse, il rencontra un troupeau de cerfs, au milieu desquels il en remarqua un plus beau et plus grand que lés autres, qui se détacha pour gagner une forêt plus vaste. Tandis que les autres militaires courent après les cerfs, Placide poursuit celui-ci de tous ses efforts et s'attache à le prendre. Comme il le suivait avec acharnement, le cerf parvient enfin à gravir la cime d'un rocher ; Placide s'approche et songe aux moyens de ne pas le manquer ; or, pendant qu'il considère, le cerf avec attention, il voit au milieu de ses bois la figure de la Sainte Croix plus resplendissante que les rayons du soleil, et l’image de Notre Seigneur Jésus-Christ, qui lui adresse ces paroles parla bouche du cerf, comme autrefois parla l’ânesse de Balaam :
Vision de saint Eustache. Legenda aurea.
" Placide, pourquoi Me persécutes-tu ? C'est par bonté pour toi que Je t'apparais sur cet animal. Je suis le Christ que tu honores sans le savoir : tes aumônes ont monté devant Moi, et voilà pourquoi Je suis venu ; c'est pour te chasser Moi-même par le moyen de ce cerf que tu courais."
D'autres auteurs disent pourtant que ce fut l’image qui lui apparut entre les bois dit cerf qui proféra ces paroles. En entendant cela, Placide, grandement saisi, tomba de son cheval ; revenu à lui après une heure, il se releva et dit :
" Faites-moi comprendre ce que vous me dites et alors je croirai en vous."
Notre Seigneur Jésus-Christ lui dit :
" Placide, Je suis le Christ qui ai créé le ciel et la terre, qui ai fait jaillir, la lumière et l’ai séparée des ténèbres; J'ai réglé le temps, les jours et les années ; J'ai formé l’homme du limon de la terre ; pour sauver le genre humain, Je suis apparu ici-bas avec un corps, et après avoir été crucifié et enseveli, Je suis ressuscité le troisième jour."
A ces mots, Placide tomba de nouveau sur terre et dit :
" Je crois, Seigneur, que c'est Vous qui avez tout fait, et que Vous ramenez ceux qui s'égarent."
Alors le Seigneur lui dit :
" Si tu crois, va, trouver l’évêque de la ville, et fais-toi baptiser.
- Voulez-vous, répondit Placide, que j'annonce ces vérités à ma femme et à mes fils, afin qu'eux aussi croient en Vous ?"
Le Seigneur lui dit :
" Informe-les, afin qu'ils soient purifiés comme toi : mais reviens ici demain, Je t'apparaîtrai de nouveau pour te dévoiler plus amplement l’avenir."
Quand il fut rentré à sa maison et qu'il eut rapporté ces merveilles à son épouse, au lit, celle-ci s'écria en disant :
" Mon Seigneur, et moi aussi, la nuit passée, je L’ai vu et Il m’a dit : " Demain ton mari, tes fils et toi, vous viendrez à moi : Je reconnais maintenant que c'est Notre Seigneur Jésus-Christ."
Vision de saint Eustache. Baptême de saint Eustache, de son épouse
Ils allèrent donc, au milieu de la nuit, trouver l’évêque de Rome qui les baptisa en grande joie, et qui donna à Placide le nom d'Eustache, à sa femme celui de Théospita et à ses fils ceux d'Agapet et de Théospite.
Le matin arrivé ; Eustache se rendit à la chasse, comme la veille, et parvenu au même endroit, il fit aller de divers côtés ses soldats, sous prétexte de dépister le gibier, et restant à la place où il avait eu la première vision, il eu eut une seconde : alors tombant le visage contre terre, il dit :
" Je vous supplie, Seigneur, de manifester à votre serviteur ce que vous lui avez promis.
- Tu es bienheureux, lui répondit le Seigneur, d'avoir reçu le bain de ma grâce, parce que tu as alors vaincu le diable. Tu viens de fouler aux pieds celui qui t'avait déçu. Tu vas montrer maintenant ta foi : car pour l’avoir abandonné, le diable va te livrer de grands combats : il faut donc que tu supportes de rudes épreuves afin de recevoir la couronne de la victoire. Il faut que tu souffres beaucoup afin que déchu de vaines grandeurs du monde, tu sois humilié, pour, être élevé plus tard aux honneurs spirituels. Ne faiblis donc pas : ne reporte pas la vue sur ta gloire passée, car il faut que, par la voie des tentations, tu te montres un autre Job. Cependant quand tu auras été humilié, Je viendrai à toi, et te rendrai ta gloire première. Dis-moi donc, si tu veux accepter les tentations à présent ou à la fin de ta vie ?"
Eustache répondit :
" Seigneur, s'il faut qu'il en soit ainsi, à l’instant commandez que les tentations nous éprouvent, mais donnez-nous la vertu de patience.
- Ne perds pas courage, reprit le Seigneur ; Ma grâce en effet gardera vos âmes."
Alors le Seigneur monta au ciel et Eustache revint chez lui donner ces nouvelles à sa femme.
Quelques jours s'étant écoulés, la mort, sous la forme d'une peste, se déchaînant sur tous ses serviteurs et ses servantes, les moissonna tous : peu de temps après, tous ses chevaux et tous ses troupeaux moururent subitement. Alors des scélérats, voyant ces ravages, se ruèrent pendant la nuit sur sa maison, emportèrent tout ce qu'ils trouvèrent, et pillèrent l’or, l’argent et tous ses autres biens : lui-même, avec sa femme et ses fils, rendit grâces à Dieu et s'enfuit tout nu : pour échapper à la honte, ils allèrent en Egypte. Tout ce qu'il possédait fut anéanti par la rapine des méchants.
L'empereur et le sénat entier regrettaient beaucoup la perte d'un général aussi distingué, sur lequel on ne pouvait obtenir aucun renseignement. Après avoir fait quelque chemin, les fugitifs arrivèrent à la mer où ayant trouvé un vaisseau, ils s'embarquèrent.
Saint Eustache s'exilant en bateau avec sa famille.
Alors le maître du navire, voyant que la femme d'Eustache était fort belle, conçut un grand désir de la posséder. Après la traversée, il exigea d'Eustache le prix du passage, et comme ils n'avaient pas d'argent, il ordonna que cette femme fût retenue pour payement, dans la conviction de l’avoir à soi. Eustache, informé de cela, refusa absolument d'y consentir, et comme il persistait, le maître fit signe à ses matelots de le précipiter dans la mer ; afin de pouvoir ainsi posséder sa femme.
Eustache, qui s'aperçut de cela, leur abandonna sa femme tout désolé, et prenant ses deux enfants, il s'en alla en versant des larmes :
" Malheur à moi et à vous, dit-il, car votre mère est livrée à un [homme] étranger !"
Parvenu sur les bords d'un fleuve, il n'osa le passer avec ses deux fils à la fois, parce qu'il y avait beaucoup d'eau ; mais en en laissant un sur la rive, il se mit en devoir de transporter l’autre ; quand il eut passé le fleuve à gué, il posa par terre l’enfant qu'il avait porté, et se hâta de venir prendre l’autre.
Il était au milieu du fleuve, lorsqu'un loup accourut tout à coup, saisit l’enfant qu'il venait de mettre sur la rive, et s'enfuit dans la forêt.
Eustache, qui n'espérait pas le sauver, courut à l’autre : mais en y allant survint un lion qui s'empara du petit enfant et s'en alla. Or, comme il ne pouvait l’atteindre, puisqu'il n'était encore qu'au milieu du fleuve, il se mit à gémir et à s'arracher les cheveux.
Il se serait laissé noyer, si la divine providence ne l’eut retenu. Des bergers, qui virent le lion emporter un enfant vivant, le poursuivirent avec leurs chiens, et Dieu permit que l’animal lâchât sa proie sans lui avoir fait aucun mal.
D'un autre côté, des laboureurs se mirent à crier après le loup et délivrèrent de sa gueule l’autre enfant aussi sain et sauf. Or, bergers et laboureurs, tous étaient du même village et ils nourrirent les enfants chez eux. Eustache de son côté ignorait cela ; alors il s'en alla bien triste.
Saint Eustache perdant ses enfants. Legenda aurea.
" Quel malheur pour moi ! disait-il en pleurant ; il y a peu de temps, j'étais beau comme un arbre, couvert de fruits et de feuilles ; aujourd'hui je suis tout dépouillé ! Que je suis malheureux ! j'étais entouré de soldats, et aujourd'hui je suis réduit à rester seul, n'ayant pas même la consolation de posséder mes enfants auprès de moi ! Je me souviens, Seigneur, que vous m’avez dit que je serais tenté comme Job, mais je vois que je suis traité plus durement encore. Dépouillé de tous ses biens, il avait au moins un fumier sur lequel il pût s'asseoir ; mais moi, il ne me reste pas même rien qui ressemble à cela. Il eut des amis qui compatissaient à sa position, pour moi, je n'ai eu que des bêtes féroces, qui m’ont enlevé mes enfants : sa femme lui fut laissée, la mienne m’a été ravie. Mettez fin, Seigneur, à mes tribulations ; et placez une garde à ma bouche dans la crainte que mon coeur se laisse aller à des paroles de malice, et que je mérite d'être rejeté de devant votre face."
Etouffé par ses sanglots, il alla dans un hameau où s'étant mis à gage, il garda les champs des habitants, l’espace de quinze ans ; quant à ses fils, ils furent élevés dans un autre village, sans savoir qu'ils fussent frères. Le Seigneur conserva aussi la femme d'Eustache, et l’étranger ne la connut pas ; au contraire il la renvoya intacte, après quoi il mourut.
Or, l’empereur et le peuple romain étaient fort inquiétés par les ennemis. L'empereur, qui se rappela Placide et les victoires que souvent il avait remportées par lui sur les ennemis, s'attristait singulièrement du changement survenu à la suite de sa disparition inattendue ; il envoya donc des soldats dans les différentes parties du monde, en promettant de grandes richesses et des honneurs à ceux qui l’auraient trouvé.
Or, deux soldats, qui avaient servi sous Placide, arrivèrent au village où il demeurait. Placide qui, du champ où il se trouvait, les aperçut venir, les reconnut aussitôt à leur démarche, et le souvenir de sa dignité lui revenant à la mémoire, il en fut troublé :
" Seigneur, dit-il, de même que, contre tout espoir, je viens de voir ceux qui ont vécu autrefois avec moi, faites aussi qu'un jour je puisse voir ainsi ma femme ; car, pour mes enfants, je sais qu'ils ont été dévorés par les bêtes féroces."
Alors il entendit une voix lui dire :
" Confiance, Eustache, dans peu tu seras rétabli dans tes honneurs, et tu retrouveras ta femme."
Il s'avança vers les soldats qui ne le reconnurent point ; mais après l’avoir salué, ils lui demandèrent s'il connaissait un étranger nommé Placide, qui avait une femme et deux enfants. Il avoua n'en rien savoir ; cependant sur la prière qu'il leur en fit, ils vinrent au logis et Eustache les servit. En se rappelant son ancienne position, il ne pouvait contenir ses larmes : il fut forcé de sortir pour se laver le visage et revint les servir.
Mais les soldats, qui le considéraient, se disaient l’un à l’autre :
" Quelle ressemblance frappante entre cet homme et celui que nous cherchons !"
L'un d'eux dit :
" Oui, il lui ressemble beaucoup; examinons donc ; s'il porte à la tète la cicatrice dune blessure qu'il a reçue à la guerre, c'est lui."
Ils examinèrent et ayant distingué cette marque, ils furent convaincus dès l’instant que c'était celui-là même qu'ils cherchaient. Ils se jetèrent à son cou pour l’embrasser, et s'informèrent de sa femme et de ses fils.
Eustache leur dit que ses fils étaient morts et sa femme captive. Or, les voisins vinrent tous voir ce qui se passait, les soldats ne manquèrent pas de vanter son courage et de publier la gloire qu'il s'était acquise : alors ils lui mettent sous les yeux l’ordre de l’empereur, et le revêtent d'habits précieux.
Après quinze jours de marche, ils arrivèrent auprès de l’empereur qui, à cette nouvelle, vint au-devant d'Eustache. Il ne l’eut pas plus tôt vu qu'il se jeta à son cou pour l’embrasser. Eustache raconta alors tout ce qui lui était arrivé aussitôt après, on l’entraîna au ministère de la guerre et on le contraignit à reprendre ses anciennes fonctions.
Quand il eut compté ses soldats, et qu'il eut vu qu'ils étaient en trop petit nombre relativement à la multitude des ennemis, il fit lever des recrues dans les jeunes gens de toutes les villes et des bourgades.
Or, le pays où avaient été élevés ses enfants eut à fournir deux jeunes soldats. Tous les habitants de l’endroit désignèrent au commandant militaire les deux fils d'Eustache comme les plus aptes au service.
Eustache, qui vit deux jeunes gens de bonne mine et d'un extérieur distingué, conçut pour eux une, singulière affection, et leur donna les premières places à sa table. Il partit donc pour la guerre, enfonça les bataillons ennemis, et fit reposer son armée durant trois. jours, dans l’endroit où sa femme était une pauvre hôtelière.
Or, par une permission de Dieu, les deux jeunes gens furent logés dans la maison de leur mère, sans qu'ils sussent qui elle était. Comme, ils se reposaient sur le midi, et qu'ils s'entretenaient ensemble, ils vinrent à parler de leur enfance, de leur mère assise près de là, elle écoutait avec attention ce qu'ils se racontaient l’un à l’autre.
L'aîné disait au plus jeune :
" Moi, de ma jeunesse, je ne me rappelle rien autre chose, sinon que mon père était général d'armée, et que ma mère avait une rare beauté : ils eurent deux fils, moi et un plus jeune encore, qui lui aussi était remarquablement beau. Ils nous prirent et partirent une nuit de notre maison, puis ils s'embarquèrent, mais j'ignore où ils allaient. Comme nous débarquions, je ne sais comme il se fit que notre mère resta sur le navire, et notre père s'en alla, nous portant tous les deux et pleurant. Arrivé sur le bord d'un fleuve, il le passa avec mon jeune frère et me laissa sur la rive : mais comme il revenait pour me prendre, un loup survint et enleva mon frère ; mon père était encore loin de moi, quand un lion sorti de la forêt me saisit et m'emporte dans le bois, mais des bergers m’arrachèrent de la gueule du lion, et je fus élevé dans la maison que tu connais ; je n'ai pu savoir depuis ce qu'était devenu mon père ainsi que le petit enfant."
A ce récit, le cadet se prit à pleurer et à dire :
" Par Dieu ! d'après ce que j'entends, je suis ton frère, puisque ceux qui m’ont élevé me disaient aussi : " tous t'avons arraché à un loup."
Ils se jetèrent dans les bras l’un de l’autre, et s'embrassèrent en pleurant.
La mère qui entendait cela et qui reconnaissait dans ce récit toutes les circonstances de ce qui lui était arrivé, pensa longtemps à part soi que ce pourrait bien être ses enfants. Le lendemain donc, elle alla trouver le général d'armée et lui adressa la parole en ces termes .
" Je vous prie, seigneur, de me faire reconduire dans ma patrie ; car je suis du pays des Romains et étrangère ici."
En parlant, elle vit sur lui les cicatrices que portait son mari ; alors elle le reconnut et sans pouvoir se contenir, elle se jeta à ses pieds en disant :
" Je vous en prie, seigneur, racontez-moi ce que vous faisiez autrefois ; car je pense que vous êtes Placide, général d'armée ; vous avez aussi un autre nom qui est Eustache ; ce Placide, le Sauveur l’a converti ; il a subi telle et telle épreuve ; c'est moi qui suis sa femme, j'ai été enlevée sur mer ; j'ai été préservée de toute souillure ; c'est moi qui ai eu deux fils, Agapet et Théopiste."
Récit de la vie de saint Eustache et de sa famille.
En entendant ce récit, Eustache la considère attentivement et reconnaît en elle son épouse : alors versant des larmes de joie, il l’embrassa en glorifiant Dieu le consolateur des affligés.
Son épouse lui dit alors :
" Seigneur, où sont nos enfants ?
- Ils ont été pris par des bêtes farouches, répondit-il." Il lui raconta donc comment il les avait perdus. Sa femme lui dit :
" Rendons grâces à Dieu, car je pense que comme il nous a donné, le bonheur de nous retrouver, il nous accordera encore celui de reconnaître nos enfants.
- Je vous ai dit, reprit Eustache, qu'ils ont été pris par des bêtes farouches.
- Hier, répondit-elle, comme j'étais assise dans le jardin, j'ai entendu deux jeunes gens raconter l’histoire de leur enfance de telle et telle façon, et je crois que ce sont nos enfants ; interrogez-les donc, et ils vous la diront eux-mêmes."
Alors Eustache les manda et après avoir appris ce qui se rapportait à leur enfance, il reconnut que c'étaient ses fils. Lui et sa femme les embrassent en versant un torrent de larmes et les tinrent longtemps sur leur coeur. L'armée entière était au comble de la joie de ce que ces enfants étaient retrouvés et de ce que les barbares avaient été vaincus.
A son retour, Eustache trouva Trajan mort, et ayant pour successeur Adrien, homme plus scélérat encore. En raison de la victoire qu'Eustache avait remportée, comme aussi à l’occasion de la rencontre que ce général avait faite de sa femme et de ses fils, l’empereur les reçut avec magnificence et fit préparer un grand festin. Le lendemain, il alla au temple des idoles afin d'offrir un sacrifice pour la victoire remportée sur les barbares.
Or, l’empereur voyant qu'Eustache ne voulait pas sacrifier ni pour la victoire qu'il avait remportée, ni à l’occasion de la découverte de sa famille, l’exhortait cependant à le faire. Mais Eustache lui dit :
" Le Dieu que j'adore, c'est Notre Seigneur Jésus-Christ et je n'offre de sacrifices qu'à lui seul."
Alors l’empereur, en colère, ordonna de les exposer dans le cirque avec sa femme et ses enfants, et fit lâcher contre eux un lion féroce. Le lion accourut, et baissant la tête comme s'il eût adoré ces saints personnages il s'éloigna d'eux humblement.
Vie et martyre de saint Eustache et des siens.
L'empereur ordonna aussitôt de faire rougir au feu un taureau d'airain, et commanda de les y jeter tout vifs. Les saints se mirent donc en prières et se recommandant à Dieu, ils entrèrent dans le taureau où ils rendirent leur âme au Seigneur.
Trois jours après, on les en tira en présence de l’empereur ; et on les retrouva intacts au point que pas même leurs cheveux, ni aucune partie de leurs membres n'avait été atteinte par l’action du feu. Les chrétiens prirent leurs corps et les ensevelirent en un endroit fort célèbre où ils construisirent un oratoire. Ils pâtirent sous Adrien qui commença à régner vers l’an du Seigneur 120, aux calendes de, novembre, ou, d'après quelques auteurs, le douze des calendes d'octobre (20 septembre).
PRIERE
" Nos épreuves sont légères près des vôtres, Ô Martyrs ! Obtenez-nous de ne point tromper la confiance du Seigneur, quand il nous appelle à souffrir pour lui dans ce monde. La gloire au ciel est à ce prix. Comment triompher avec le Dieu des armées, si nous n'avons marché sous son enseigne ? Or, cette enseigne est la Croix. L'Eglise le sait, et nulles extrémités ne la troublent. Elle n'ignore pas que l'Epoux veille, même quand il semble dormir ; elle compte que ses fils déjà glorifiés la protègent...
Ô Martyrs, depuis combien d'années pourtant l’invasion sacrilège assombrit ce jour de votre victoire ! Rome vous gardait avec tant d'amour ! Vengez-vous des audaces de l'enfer, et délivrez-la !"
00:15 Publié dans E | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 19 septembre 2024
19 septembre. Notre Dame de la Salette à Mélanie Calvat et Maximin Giraud. 1846.
- Notre Dame de la Salette. Son apparition à Mélanie Calvat et Maximin Giraud. 1846.
Papes : Grégoire XVI (+ juin 1846) ; Pie IX. " Roi des Français " : Louis-Philippe. Reine d'Espagne : Isabelle II. Empereur d'Autriche, roi de Hongrie : Ferdinand Ier. Roi des Deux Siciles : Ferdinand II.
" Rome perdra sa foi et deviendra le siège de l'Antéchrist."
" L'Eglise sera éclipsée, le Monde sera dans la consternation."
" Dieu sera servi et glorifié."
Paroles de Notre Dame à Mélanie Calvat et à Maximin Giraud à La Salette.
Notre Dame pleure... Statue de Notre Dame à La Salette.
La Salette vue du Ciel.
Le 19 septembre 1846, l'auguste Vierge Marie apparaissait dans le diocèse de Grenoble, sur la montagne de La Salette qui domine le village de La Salette de plus de 2500 pieds.
Comme témoins de son apparition, Marie choisit deux petits bergers qui ne se connaissaient que depuis la veille : Maximin Giraud âgé de onze ans et Mélanie Calvat âgée de quatorze ans. Maximin a raconté l'apparition comme il suit.
" Il est midi. Assis au sommet de la montagne, Mélanie et moi faisons notre frugal repas... quand tout à coup, Mélanie s'arrête, son bâton lui échappe des mains. Effrayée, elle se tourne vers moi en disant :
" Vois-tu là-bas cette grande lumière ?
- Oui, je la vois."
Cette lumière devant laquelle celle du soleil semble pâlir, paraît s'entr'ouvrir, et nous distinguons dans son intérieur la forme d'une Dame encore plus brillante... Quoiqu'à une distance de vingt mètres environ, nous entendons une voix douce disant :
" Avancez, mes enfants, n'ayez pas peur. Je suis ici pour vous annoncer une grande nouvelle."
Statue de Mélanie Calvat à la Salette.
La crainte respectueuse qui nous avait tenus en arrêt s'évanouit, nous courons à Elle. La belle Dame s'avance aussi, et suspendue en face de nous, à dix centimètres du sol, commence ainsi son discours :
" Si mon peuple ne veut pas se soumettre, Je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis le retenir. Depuis si longtemps que je souffre pour vous autres ; si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis chargée de Le prier sans cesse et vous n'en faites pas cas.
Vous aurez beau prier, beau faire, vous ne pourrez récompenser la peine que j'ai prise pour vous ! J'ai donné six jours pour travailler, je me suis réservé le septième et on ne veut pas me l'accorder ; c'est cela qui appesantit tant le bras de mon Fils. Aussi ceux qui mènent les charrettes ne savent plus jurer sans y mettre le nom de mon Fils : ce sont ces deux choses qui appesantissent tant Son bras. Si la récolte se gâte ce n'est qu'à cause de vous autres...
Il viendra une grande famine. Avant que la famine vienne, les enfants au-dessous de sept ans prendront un tremblement et mourront entre les bras des personnes qui les tiendront. Les autres feront pénitence par la famine. Les noix deviendront mauvaises et les raisins pourriront."
Statue de Maximin Giraud à la Salette.
Puis, continue Maximin, Elle nous demanda :
" Faites-vous bien vos prières mes enfants ?"
Tous les deux nous répondîmes d'une seule voix :
" Non, madame, pas guère.
- Ah ! Mes enfants, il faut bien la faire, soir et matin. Quand vous n'aurez pas le temps, récitez au moins un Pater et un Ave Maria, et si vous en avez le temps, il faut en dire davantage...
Il ne va que quelques femmes âgées à la messe. Les autres travaillent le dimanche, tout l'été, et l'hiver, quand ils ne savent que faire, ils ne vont à la messe rien que pour se moquer de la religion. Le Carême, ils vont à la boucherie comme les chiens..."
Elle termina Son discours par ces mots prononcés en français :
" Eh bien! Mes enfants, vous le ferez passer à tout mon peuple !"
Immobiles comme des statues, les yeux fixés sur la belle Dame, nous la voyions glisser sur la cime de l'herbe sans la faire fléchir... Là, en notre présence, Elle s'éleva insensiblement, resta quelques minutes entre le ciel et la terre, à une hauteur de deux mètres. Puis, la tête et le corps se confondirent avec la lumière qui l'encadrait. Nous ne vîmes plus qu'un globe de feu s'élever dans le firmament...
Statues de Notre Dame s'adressant à Mélanie Calva
Notre Dame dit un secret à Mélanie seule (et un autre à Maximin seul), qu'elle était autorisée à dire seulement à partir de 1858 :
" Les prêtres, ministres de mon Fils, les prêtres, par leur mauvaise vie, par leurs irrévérences et leur impiété à célébrer les Saints Mystères, par l'amour de l'argent, l'amour de l'honneur et des plaisirs, les prêtres sont devenus des cloaques d'impureté.
Oui, les prêtres demandent vengeance, et la vengeance est suspendue sur leurs têtes. Malheur aux prêtres et aux personnes consacrées à Dieu, lesquelles, par leurs infidélités et leur mauvaise vie, crucifient de nouveau mon Fils !
Les péchés des personnes consacrées à Dieu crient vers le Ciel et appellent vengeance, et voilà que la vengeance est à leur porte, car il ne se trouve plus personne pour implorer miséricorde et pardon pour le peuple ; il n'y a plus d'âmes généreuses, il n'y a plus personne digne d'offrir la Victime sans tache à l'Eternel en faveur du Monde.
Dieu va frapper d'une manière sans exemple.
Malheur aux habitants de la Terre ! Dieu va épuiser sa colère, et personne ne pourra se soustraire à tant de maux réunis.
Les chefs, les conducteurs du peuple de Dieu ont négligé la prière et la pénitence, et le Démon a obscurci leurs intelligences ; ils sont devenus ces étoiles errantes que le vieux Diable traînera avec sa queue pour les faire périr.
Dieu permettra au vieux serpent de mettre des divisions parmi les régnants, dans toutes les sociétés et dans toutes les familles ; on souffrira des peines physiques et morales : Dieu abandonnera les hommes à eux-mêmes et enverra des châtiments qui se succéderont pendant plus de trente-cinq ans.
La société est à la veille des fléaux les plus terribles et des plus grands événements ; on doit s'attendre à être gouverné par une verge de fer et à boire le calice de la colère divine.
Que le Vicaire de mon Fils, le Souverain Pontife Pie IX, ne sorte plus de Rome après l'année 1859 ; mais qu'il soit ferme et généreux, qu'il combatte avec les armes de la foi et de l'amour ; je serai avec lui. Qu'il se méfie de Napoléon ; son cœur est double, et quand il voudra être à la fois pape et empereur, bientôt Dieu se retirera de lui : il est cet aigle qui, voulant toujours s'élever, tombera sur l'épée dont il voulait se servir pour obliger les peuples à se faire élever.
L'Italie sera punie de son ambition en voulant secouer le joug du Seigneur des Seigneurs ; aussi elle sera livrée à la guerre, le sang coulera de tous les côtés ; les églises seront fermées ou profanées.
Les prêtres, les religieux seront chassés ; on les fera mourir, et mourir d'une mort cruelle. Plusieurs abandonneront la foi, et le nombre des prêtres et des religieux qui se sépareront de la vraie religion, sera grand ; parmi ces personnes, il se trouvera même des évêques.
Que le Pape se tienne en garde contre les faiseurs de miracle, car le temps est venu où les prodiges les plus étonnants auront lieu sur la Terre et dans les airs.
En l'année 1864, Lucifer avec un grand nombre de démons seront détachés de l'Enfer : ils aboliront la foi peu à peu et même dans les personnes consacrées à Dieu ; ils les aveugleront d'une telle manière, qu'à moins d'une grâce particulière, ces personnes prendront l'esprit de ces mauvais anges ; plusieurs maisons religieuses perdront entièrement la foi et perdront beaucoup d'âmes.
Les mauvais livres abonderont sur la Terre et les Esprits des Ténèbres répandront partout un relâchement universel pour tout ce qui regarde le service de Dieu ; ils auront un très grand pouvoir sur la nature ; il y aura des Eglises pour servir ces Esprits. Des personnes seront transportées d'un lieu à un autre par ces Esprits mauvais, et même des prêtres, parce qu'ils ne seront pas conduits par le bon esprit de l'Evangile, qui est un esprit d'humilité, de charité et de zèle pour la gloire de Dieu.
On fera ressusciter des morts et des justes (c'est-à-dire que ces morts prendront la figure des âmes justes qui avaient vécu sur la Terre afin de mieux séduire les hommes ; ces soi-disant morts ressuscités, qui ne seront autre chose que le Démon sous ces figures, prêcheront un autre Evangile contraire à celui du vrai Jésus-Christ, niant l'existence du Ciel, soit encore, les âmes des damnés. Toutes ces âmes paraîtront comme unies à leurs corps).
Il y aura en tous lieux des prodiges extraordinaires, parce que la vraie foi s'est éteinte et que la fausse lumière éclaire le Monde.
Malheur aux Princes de l'Eglise qui ne seront occupés qu'à entasser richesses sur richesses, qu'à sauvegarder leur autorité et à dominer avec orgueil ! Le Vicaire de mon Fils aura beaucoup à souffrir, parce que pour un temps, l'Eglise sera livrée à de grandes persécutions : ce sera le temps des Ténèbres ; l'Eglise aura une crise affreuse.
La sainte foi de Dieu étant oubliée, chaque individu voudra se guider par lui-même et être supérieur à ses semblables.
On abolira les pouvoirs civils et ecclésiastiques, tout ordre et toute justice seront foulés aux pieds ; on ne verra qu'homicide, haine, jalousie, mensonge et discorde, sans amour pour la patrie ni pour la famille.
Le Saint Père souffrira beaucoup. Je serai avec lui jusqu'à la fin pour recevoir son sacrifice. Les méchants attenteront plusieurs fois à sa vie sans pouvoir nuire à ses jours ; mais ni lui, ni son successeur… ne verra le triomphe de l'Eglise de Dieu.
Dans l'année 1865, on verra l'abomination dans les lieux saints ; dans les couvents, les fleurs de l'Eglise seront putréfiées et le Démon se rendra comme le roi des cœurs.
Que ceux qui sont à la tête des communautés religieuses se tiennent en garde pour les personnes qu'ils doivent recevoir, parce que le Démon usera de toute sa malice pour introduire dans les ordres religieux des personnes adonnées au péché, car les désordres et l'amour des plaisirs charnels seront répandus par toute la Terre.
Evénements prochains
La France, l'Italie, l'Espagne et l'Angleterre seront en guerre ; le sang coulera dans les rues ; le Français se battra avec le Français, l'Italien avec l'Italien ; ensuite il y aura une guerre générale qui sera épouvantable.
Pour un temps, Dieu ne se souviendra plus de la France, ni de l'Italie parce que l'Evangile de Jésus-Christ n'est plus connu.
Les méchants déploieront toute leur malice ; on se tuera, on se massacrera mutuellement jusque dans les maisons.
Au premier coup de son épée foudroyante, les montagnes et la nature entière trembleront d'épouvante, parce que les désordres et les crimes des hommes percent la voûte des Cieux.
Paris sera brûlée et Marseille engloutie ; plusieurs grandes villes seront ébranlées et englouties par des tremblements de terre ; on croira que tout est perdu ; on ne verra qu'homicide, on n'entendra que bruits d'armes et que blasphèmes. Les justes souffriront beaucoup ; leurs prières, leur pénitence et leurs larmes monteront jusqu'au Ciel, et tout le peuple de Dieu demandera pardon et miséricorde, et demandera mon aide et mon intercession.
Alors, Jésus-Christ, par un acte de sa justice et de sa grande miséricorde pour les justes, commandera à ses anges que tous ses ennemis soient mis à mort.
Tout à coup, les persécuteurs de l'Eglise de Jésus-Christ et tous les hommes adonnés au péché périront, et la Terre deviendra comme un désert.
Alors se fera la paix, la réconciliation de Dieu avec les hommes ; Jésus-Christ sera servi, adoré et glorifié ; la charité fleurira partout.
Les nouveaux rois seront le bras droit de la Sainte Eglise, qui sera forte, humble, pieuse, pauvre, zélée et imitatrice des vertus de Jésus-Christ.
L'Evangile sera prêché partout, et les hommes feront de grands progrès dans la foi, parce qu'il y aura unité parmi les ouvriers de Jésus-Christ et que les hommes vivront dans la crainte de Dieu.
Cette paix parmi les hommes ne sera pas longue : vingt-cinq ans d'abondantes récoltes leur feront oublier que les péchés des hommes sont cause de toutes les peines qui arrivent sur la Terre.
Evénements lointains
Un avant-coureur de l'Antéchrist, avec ses troupes de plusieurs nations combattra contre le vrai Christ, le seul Sauveur du Monde ; il répandra beaucoup de sang et voudra anéantir le culte de Dieu pour se faire regarder comme un dieu. La Terre sera frappée de toutes sortes de plaies (outre la peste et la famine qui seront générales) ; il y aura des guerres jusqu'à la dernière guerre qui sera alors faite par les dix rois de l'Antéchrist, lesquels rois auront tous un même dessein et seront les seuls qui gouverneront le Monde.
Avant que ceci arrive, il y aura une espèce de fausse paix dans le Monde ; on ne pensera qu'à se divertir ; les méchants se livreront à toutes sortes de péchés ; mais les enfants de la Sainte Eglise, les enfants de la foi, mes vrais imitateurs, croîtront dans l'amour de Dieu et dans les vertus qui me sont les plus chères.
Heureuses les âmes humbles, conduites par l'Esprit Saint ! Je combattrai avec elles jusqu'à ce qu'elles arrivent à la plénitude de l'âge.
La nature demande vengeance pour les hommes et elle frémit d'épouvante dans l'attente de ce qui doit arriver à la Terre souillée de crimes.
Tremblez, Terre, et vous qui faites profession de servir Jésus-Christ, et qui au-dedans vous adorez vous-mêmes ; tremblez, car Dieu va vous livrer à son ennemi parce que les lieux saints sont dans la corruption : beaucoup de couvents ne sont plus les maisons de Dieu, mais les pâturages d'Asmodée et des siens.
Ce sera pendant ce temps que naîtra l'Antéchrist, d'une religieuse hébraïque, d'une fausse vierge qui aura communication avec le vieux serpent, le maître de l'impureté ; son père sera évêque. En naissant, il vomira des blasphèmes, il aura des dents ; en un mot ce sera le Diable incarné ; il poussera des cris effrayants, il fera des prodiges, il ne se nourrira que d'impuretés.
Il aura des frères qui, quoiqu'ils ne soient pas comme lui des démons incarnés, seront des enfants de mal ; à douze ans, ils se feront remarquer par leurs vaillantes victoires qu'ils remporteront ; bientôt, ils seront chacun à la tête des armées, assistés par des légions de l'Enfer.
Les saisons seront changées, la terre ne produira que de mauvais fruits, les astres perdront leurs mouvements réguliers, la lune ne reflétera qu'une faible lumière rougeâtre ; l'eau et le feu donneront au globe de la Terre des mouvements convulsifs et d'horribles tremblements de terre qui feront engloutir des montagnes, des villes…
Rome perdra la foi et deviendra le siège de l'Antéchrist.
Les démons de l'air avec l'Antéchrist feront de grands prodiges sur la terre et dans les airs et les hommes se pervertiront de plus en plus.
Dieu aura soin de ses fidèles serviteurs et des hommes de bonne volonté ; l'Evangile sera prêché partout ; tous les peuples et toutes les nations auront connaissance de la vérité !
J'adresse un pressant appel à la Terre ; j'appelle les vrais disciples de Dieu vivant et régnant dans les Cieux ; j'appelle les vrais imitateurs du Christ fait homme, le seul et vrai Sauveur des hommes ; j'appelle mes enfants, mes vrais dévots, ceux qui se sont donnés à moi pour que je les conduise à mon divin Fils, ceux que je porte pour ainsi dire dans mes bras, ceux qui ont vécu de mon Esprit.
Il est temps qu'ils sortent et viennent éclairer la Terre. Allez et montrez-vous comme mes enfants chéris ; je suis avec vous et en vous, pourvu que votre foi soit la lumière qui vous éclaire dans ces jours de malheur. Que votre zèle vous rende comme des affamés pour la gloire et l'honneur de Jésus-Christ.
Combattez, enfants de lumière, vous, petit nombre qui y voyez, car voici le temps des temps, la fin des fins.
L'Eglise sera éclipsée, le Monde sera dans la consternation.
Mais voilà Enoch et Elie remplis de l'Esprit de Dieu ; ils prêcheront avec la force de Dieu et les hommes de bonne volonté croiront en Dieu et beaucoup d'âmes seront consolées ; ils feront de grands progrès par la vertu du Saint-Esprit et condamneront les erreurs diaboliques de l'Antéchrist.
Malheur aux habitants de la Terre ! Il y aura des guerres sanglantes et des famines, des pestes et des maladies contagieuses ; il y aura des pluies d'une grêle effroyable d'animaux ; des tonnerres qui ébranleront des villes ; des tremblements de terre qui engloutiront des pays ; on entendra des voix dans les airs ; les hommes se battront la tête contre les murailles ; ils appelleront la mort, et, d'un autre côté, la mort sera leur supplice : le sang coulera de tous côtés.
Qui pourra vaincre, si Dieu ne diminue le temps de l'épreuve ?
Par le sang, les larmes et les prières des Justes, Dieu se laissera fléchir ; Enoch et Elie seront mis à mort ; Rome, païenne, disparaîtra ; le feu du Ciel tombera et consumera trois villes ; tout l'univers sera frappé de terreur, et beaucoup se laisseront séduire parce qu'ils n'ont pas adoré le vrai Christ vivant parmi eux.
Il est temps : le soleil s'obscurcit, la foi seule vivra.
Voici le temps : l'abîme s'ouvre.
Voici le roi des rois des Ténèbres, voici la Bête avec ses sujets se disant le Sauveur du Monde. Il s'élèvera avec orgueil dans les airs pour aller jusqu'au Ciel. Il sera étouffé par le souffle de Saint Michel Archange. Il tombera, et la Terre qui depuis trois jours sera en de continuelles évolutions, ouvrira son sein plein de feu ; il sera plongé pour jamais avec tous les siens dans les gouffres éternels de l'Enfer.
Alors, l'eau et le feu purifieront la Terre et consumeront toutes les œuvres de l'orgueil de l'homme… et tout sera renouvelé.
Dieu sera servi et glorifié."
01:00 Publié dans Notre Dame la très Sainte Vierge Marie | Lien permanent | Commentaires (2)
mercredi, 18 septembre 2024
18 septembre. Saint Joseph de Copertino, de l'ordre des frères mineurs, confesseur. 1663.
" Si vous désirez mener une vie sainte, exercez-vous à l'humilité, sans laquelle toute sainteté de vie est impossible."
Saint Ephrem. De recta viv. rat.
Saint Joseph de Copertino.
Tandis qu'en France le jansénisme naissant reléguait Dieu par delà d'inexorables barrières, un humble fils du patriarche d'Assise montrait aux foules de l'Italie méridionale combien peu la terre est distante du ciel pour qui sait aimer. Quand je serai élevé de terre, j'attirerai tout à moi, disait le Seigneur (Johan. XII, 32.).
Joseph naquit de parents pieux à Copertino, ville du territoire de Salente, au diocèse de Nardo, l'an du salut mil six cent trois. Prévenu de l'amour de Dieu, il y passa en grande simplicité et innocence de mœurs les années de l'enfance et de l'adolescence. La Vierge Mère de Dieu l'ayant délivré d'une opiniâtre et cruelle maladie patiemment supportée, il se donna tout entier à la pratique de la piété et des vertus.
Basilique Saint-Joseph de Copertino à Osimo. Marche.
Dieu l'appelait à une voie supérieure, et pour s'unir plus intimement à lui, il résolut de donner son nom à l'Ordre séraphique. Après divers incidents, ses désirs furent enfin exaucés au couvent de la Grotella des Mineurs Conventuels.
D'abord rangé parmi les frères lais pour son ignorance des lettres, une disposition d'en haut le fit ensuite admettre au nombre des clercs. En effet, notre Saint n'était pas satisfait de n'être que simple religieux ; il aspirait au sacerdoce. Ambition étrange, et, selon toute apparence, présomptueuse et insensée ! à peine savait-il lire, et de toute l'Écriture, il ne put jamais expliquer qu'un texte : l'Évangile des messes de la Sainte Vierge : “ heureuses entrailles qui Vous ont porté ".
Marie cependant, contente de l'amour de Son serviteur, le seconda dans ses desseins. Car, par une disposition merveilleuse de la Providence, dans tous ses examens, il ne fut jamais interrogé que sur cet évangile, qu'il avait si bien approfondi, et sur lequel il répondit de manière à satisfaire pleinement les examinateurs les plus exigeants. Cela fait de saint Joseph de Copertino l'un des saints majeurs auquel eurent longtemps recours les étudiants....
Après ses vœux solennels on l'éleva au sacerdoce au mois de mars 1628. Notre saint se sépara complètement du monde. Il recherchait les emplois les plus humbles du couvent, il pratiquait des austérités inouïes, ne mangeait que tous les 3 ou 4 jours, et cela avec tant de modération, qu'il était facile de voir que son corps même vivait d'une nourriture cachée, que les hommes ne connaissaient pas. En effet, son corps, aussi bien que son âme, était soutenu par la sainte Eucharistie ; et après la messe qu'il célébrait tous les jours, avec une grande dévotion, l'augmentation de force qu'il avait puisée dans la sainte communion se manifestait par l'animation de ses traits et la vigueur de sa démarche. Comme à saint François, les animaux lui obéissaient, les éléments étaient dociles à sa voix ; à son attouchement, les malades étaient guéris. En un mot, la nature semblait n'avoir plus de lois en présence des désirs de Joseph.
Reliquaire de saint Joseph de Copertino.
Brisant dès lors toutes les attaches du monde et se dépouillant pour ainsi dire du nécessaire même, il affligea son corps par les cilices, les chaînes, les disciplines, par tous les genres de châtiments et de tourments, tandis qu'il nourrissait assidûment son esprit des saintes douceurs de la prière dans la plus haute contemplation. Aussi la divine charité, qui dès le plus jeune âge était déjà répandue dans son cœur, prenait-elle en lui chaque jour d'admirables et tout extraordinaires accroissements.
L'ardeur de son très grand amour parut spécialement dans les très suaves extases qui l'emportaient vers Dieu et les ravissements prodigieux qui lui étaient ordinaires. Chose admirable ! si prononcée que fût l'extase, la seule obéissance le rappelait à lui aussitôt. Il se distinguait en effet par son zèle pour la pratique de cette vertu, ayant coutume de dire qu'elle le menait et ramenait comme un aveugle, et qu'il eût préféré mourir plutôt que de ne pas obéir.
La pauvreté du patriarche séraphique l'avait pour imitateur si fidèle que, près de mourir, il put en toute vérité déclarer à son supérieur qu'il n'avait rien à résigner comme font d'autres religieux. Mort donc au monde comme a lui-même, il manifestait dans sa chair la vie du Seigneur Jésus. Lui qui sentait en quelques-uns la honteuse odeur du vice impur, exhalait de son corps un parfum miraculeux ; c'était le signe de cette pureté resplendissante que, malgré les efforts prolongés de l'esprit immonde pour l'obscurcir, il avait conservée sans une tache, opposant à la violence des assauts une garde étroite de ses sens, une macération continuelle de son corps.
Mais cette victoire, il la devait encore à la particulière protection de la très pure Vierge Marie, qu'il avait coutume d'appeler sa mère, qu'il entourait en effet comme une très douce mère de sa vénération et des plus tendres sentiments de son cœur. Combien grand n'était pas son désir de la voir aussi vénérer par d'autres, pour qu'avec son patronage, comme il disait, ils trouvassent tous les biens !
Cette sollicitude du bienheureux provenait de sa très ardente charité pour le prochain ; le zèle des âmes qui le pressait lui faisait chercher par tous les moyens à procurer le salut de tous. Sa charité s'étendait aussi aux besoins des pauvres, des malades, des affligés de toutes sortes, qu'il soulageait autant qu'il était en lui. Il n'en excluait pas ceux qui le poursuivaient de reproches, d'injures, d'outrages de tout genre ; il les supportait avec cette même patience, cette même douceur, cette même affabilité joyeuse qu'on vit briller en lui au milieu des vicissitudes infinies de ces changements de résidence que lui imposèrent les supérieurs de l'Ordre ou la sainte Inquisition.
Lévitation de saint Joseph de Copertino. Nicola Bertuzzi. XVIIIe.
Ces transports aériens, ces vols dans l'espace furent si habituels à notre Saint que les actes du procès de canonisation en rapportent plus de soixante-dix survenus dans le seul territoire de Cupertino, aussi peut-on affirmer sans crainte, que durant la moitié peut-être de sa vie, ses pieds n'ont point touché le sol.
Non seulement les peuples, mais aussi les princes admiraient son éminente sainteté, ses dons surnaturels ; telle était cependant son humilité, que s'estimant un grand pécheur il priait Dieu instamment d'éloigner de lui les grâces extraordinaires, et suppliait les hommes de jeter son corps après trépas en un lieu où sa mémoire fût entièrement effacée.
Le corps incorrompu de saint Joseph de Copertino,
Mais Dieu exalte les humbles : il avait durant la vie comblé son serviteur, l'enrichissant de la sagesse du ciel, de l'esprit de prophétie et de discernement des cœurs, de la puissance des miracles, de tous les dons ; il rendit aussi sa mort précieuse et son sépulcre glorieux.
L'obéissance, la patience, la charité croissant dans l'épreuve, donnèrent en vous leur cachet d'authenticité divine incontestable à ces faits extraordinaires, dont une contre-façon grimaçante ne dépasse pas le pouvoir naturel de l'ennemi.
Satan peut promener Simon dans les airs ; il ne saurait faire un homme humble. Digne fils du séraphin d'Assise, puissions-nous à votre suite nous envoler, non par les airs, mais dans les régions de la lumière véritable où, loin de la terre et de ses passions, notre vie soit cachée comme la vôtre avec le Christ en Dieu (Collecte et Ant. propres de la fête. Col. III, 3)."
00:15 Publié dans J | Lien permanent | Commentaires (3)
mardi, 17 septembre 2024
17 septembre. Sainte Hildegarde de Bingen, vierge et abbesse du Mont Saint-Rupert. 1179.
- Sainte Hildegarde de Bingen, vierge et abbesse du Mont Saint-Rupert. 1179.
Pape : Alexandre III. Empereur d'Allemagne : Frédéric Barberousse. Roi de France : Louis VII le Jeune.
" L'espérance est comme l'oeil de la charité, l'amour céleste est comme son coeur, et l'abstinence comme leur liaison."
Sainte Hildegarde.
Sainte Hildegarde. Gravure. Angleterre. XVIIIe.
Sainte Hildegarde naquit en 1098, à Bickelnheim, bourg d'Allemagne, au comte, de Spanheim. Son père, qui se nommait Hildebert, et sa mère, appelée Melchtide, tous deux considérables par leur noblesse et par leurs grands biens, ayant reconnu, par plusieurs indices, qu'elle était appelée à une singulière familiarité avec Dieu, et que toutes ses inclinations la portaient au seul amour de Jésus-Christ et au mépris du monde, la mirent, dès l'âge de huit ans, sous la conduite d'une sainte vierge, nommée Jutte, qui lui donna l'habit de l'Ordre de Saint-Benoît. Cette illustre fille, qui était sœur de Méginhard, comte de Spanheim, à la cour duquel vivait Hildebert, demeurait recluse dans un ermitage, sur le mont de Saint-Disibode. Elle eut un soin extraordinaire pour l'élever dans l'innocence et dans l'humilité et, pour toute science, elle lui apprit les psaumes de David, afin qu'elle pût les réciter et les chanter à la louange de Dieu.
Hildegarde protita admirablement à une si sainte école, et, par les progrès qu'elle fit dans la vertu aussi bien que par les lumières divines qu'elle recevait sans cesse du ciel, elle se confirma dans le dessein de ne rechercher que les choses célestes. Mais Dieu, pour l'épurer encore davantage et éprouver sa fidélité, lui envoya de grandes maladies ; car elle était dans une langueur continuelle accompagnée de douleurs très aiguës. Rarement elle pouvait marcher, et son corps devint si exténué, qu'elle n'était plus qu'un squelette et une image de la mort. Cependant, plus elle s'affaiblissait extérieurement, plus son esprit se fortifiait par les intimes communications qu'elle avait avec Dieu ; de sorte que la chaleur ne semblait se retirer de ses membres que pour échauffer de plus en plus son cœur et augmenter la ferveur de son amour pour Jésus-Christ.
Comme elle était ainsi uniquement appliquée à Dieu, auquel seul elle tâchait de se rendre agréable, elle entendit une voix divine qui lui commanda de mettre à l'avenir par écrit toutes les choses qu'on lui ferait connaître. Le délai qu'elle apporta à obéir à cet ordre du ciel, de peur de n'être pas approuvée des hommes, fut cause que sa maladie redoubla. L'inquiétude où elle se trouva là-dessus l'obligea d'avoir recours à un religieux elle lui découvrit le sujet de son infirmité et le commandement qu'elle avait reçu et, par le conseil qu'il lui donna, après avoir proposé l'affaire à son abbé et à d'autres personnes spirituelles, elle fut entièrement déterminée à suivre cette céleste inspiration. Dès qu'elle se fut mise en devoir de commencer, ses forces lui revinrent tout à coup et quoiqu'elle n'eût jamais appris à écrire, elle fit un livre des visions et des révélations qu'elle avait eues jusqu'alors, et le mit entre les mains de l'abbé pour l'examiner.
Il ne se fia point à son propre jugement dans une matière si délicate et si importante mais il alla à Mayence pour en conférer avec l'archevêque et les savants de son Eglise. De là il alla à Trèves, où il sut que le pape Eugène III s'était rendu après le concile de Reims, auquel il avait présidé. Ce Pape, pour ne rien décider sans une mûre délibération, envoya vers Hildegarde l'évêque de Verdun avec d'autres personnes fort éclairées, afin d'examiner par quel esprit elle avait découvert tant de merveilles. Ils rapportèrent que l'humilité et la simplicité de la Sainte étaient des marques assurées qu'elle n'était conduite que par l'Esprit de Dieu ainsi il lut lui-même ces divins écrits en présence d'Adalbéron, archevêque de Trèves, des cardinaux et de tout le clergé, et il n'y eut personne de cette savante compagnie qui ne fût ravi de leur solidité, et qui ne bénît la bonté de Dieu de s'être communiqué d'une manière si rare et si admirable a une simple fille. Saint Bernard, abbé de Clairvaux, qui était de l'assemblée, représenta au Pape qu'il ne devait pas laisser dans l'obscurité une personne à qui Dieu communiquait tant de belles lumières, mais qu'il devait employer son autorité pour confirmer ce qu'elle avait déjà dicté, et pour l'exciter à continuer d'écrire des choses semblables. Eugène, acquiesçant à ce sentiment, lui écrivit une lettre pour l'exhorter à recueillir soigneusement toutes les choses que le Saint-Esprit lui révélerait ; et, afin de l'autoriser davantage, il en écrivit une autre à l'abbé et aux religieux, pour leur faire savoir la bonne opinion qu'il avait de la sainte recluse.
L'abbé Trithème dit que saint Bernard alla la voir lui-même pour avoir le bonheur de l'entretenir ; qu'il en fut pleinement satisfait, confessa hautement qu'elle était inspirée de Dieu, l'exhorta a la persévérance, la fortifia dans les voies de son attrait, et lia même avec elle une sainte amitié, qu'il entretint par plusieurs lettres qu'il les lui écrivit, soit pour la consoler dans les continuelles maladies dont elle était attaquée, soit pour lui donner les instructions qu'il jugeait lui être nécessaires dans la conduite extraordinaire que la divine Providence gardait sur elle. Mais le P. Stilting, au tome V de septembre des Acta sanctorum, a démontré que ce fait était tout à fait faux.
Sainte Hildegarde écrivant ses visions. Livre des Scivias,
dans lequel sont rassemblées ses principales visions. XIIIe.
Cette enquête ordonnée par le Pape, et suivie d'une approbation si authentique, répandit partout le bruit de la sainteté d'Hildegarde l'odeur de ses vertus lui attira bientôt après un grand nombre de personnes, qui vinrent la consulter sur les difficultés de leur conscience, sur les moyens de faire leur salut et d'avancer dans la perfection. Plusieurs jeunes. Elles lui demandèrent l'habit religieux, et il s'en présenta un si grand nombre que son ermitage, dont sainte Jutte l'avait laissée supérieure, ne pouvant les contenir toutes, elle fut obligée d'en faire bâtir un plus spacieux. Le mont de Saint-Robert ou Rupert (près de Bingen), ainsi appelé parce qu'il était du domaine de ce saint duc, et qu'il y avait saintement fini ses jours avec la bienheureuse Berthe, sa mère, et saint Guibert, confesseur, fut le lieu de cette nouvelle retraite, qui lui fut montré divinement dans une vision.
Le comte Méginhard, dont la fille, nommée Hiltrude, s'était faite religieuse sous la conduite de notre Sainte, lui en fit la donation, après l'avoir acheté des chanoines de Mayence et du comte de Hildesheim, dont il dépendait. L'abbé et les religieux eurent bien de la peine à consentir qu'elle quittât leur voisinage; ils s'y opposèrent quelque temps mais elle tomba dans une langueur surnaturelle qui la réduisit à ne pouvoir plus se remuer ; cela lui arrivait ordinairement lorsqu'on l'empêchait d'exécuter les ordres qu'elle recevait du ciel, ou qu'elle dilférait elle-même de le faire tandis que, quand elle se mettait en état de s'y conformer, et qu'on ne la contrariait plus, ses forces lui revenaient tout à coup. L'abbé lui permit donc de se rendre au nouveau monastère de Saint-Rupert alors elle se leva de son lit, comme si elle n'eût point été malade, et s'y rendit. Ce changement causa autant de douleur aux personnes qu'elle quittait, qu'il apporta de joie à celles qu'elle allait honorer de sa présence.
Dieu continua, dans cette nouvelle demeure, de l'éclairer de ses lumières célestes. Il serait impossible d'expliquer par d'autres paroles que par les siennes de quelle manière elle les recevait ; voici ce qu'elle en dit dans une lettre à un religieux de Gemblac :
" Je suis toujours pénétrée d'une sainte frayeur, parce que je ne reconnais en moi aucun pouvoir de faire le bien mais j'étends vers Dieu mes mains comme deux ailes, et, le vent de sa grâce soufflant au milieu, je me sens puissamment soutenue de sa force divine. Depuis mon enfance jusqu'à présent, que j'ai soixante-dix ans, j'ai sans cesse dans mon esprit cette vision il me semble que je suis élevée jusqu'au firmament et que je me répands dans l'air vers les régions fort éloignées, et, en cet état, je vois dans mon âme de grandes merveilles qui me sont manifestées; je ne les vois point des yeux du corps je ne les entends point de mes oreilles je ne les découvre point par aucun de mes sens, non pas même par les pensées de mon cœur, ni par des extases, car je n'en ai jamais eu mais, ayant les yeux ouverts et étant parfaitement éveillée, je les vois clairement, jour et nuit, dans le plus profond de mon âme."
Il ne faut pas s'étonner si, dans cette heureuse disposition, elle avait tant de facilité à mettre par écrit toutes les choses que le Saint-Esprit lui révélait, non seulement dans l'ordre naturel, mais aussi dans l'ordre surnaturel.
Sainte Hildegarde composa nombre de pièces musicales sacrées.
Cet état de contemplation continuelle ne l'empêchait point de s'acquitter des fonctions de la vie active et de travailler, autant qu'il lui était possible, au salut des âmes. Elle écoutait les personnes qui venaient la trouver, pénétrait le fond de leur conscience et leur donnait toujours des avis salutaires et conformes à la situation de leur cœur. Elle répondait aux autres qui la consultaient par lettres. Le religieux Wilbert lui proposa trente questions très-épineuses, qu'elle résolut par des lumières si profondes et si sublimes, qu'on ne peut lire cet écrit sans admiration. A l'instance de l'abbé et des religieux de Saint-Disibode, elle écrivit la vie de ce saint confesseur, et, à la prière de quelques autres, elle fit celle de saint Rupert.
Elle composa sur tous les évangiles de l'année des homélies dont la lecture fait voir qu'elle ne parlait que par l'inspiration divine. Elle expliqua particulièrement l'Evangile de saint Jean dont les mystères sont incompréhensibles aux plus grands génies. Elle écrivit plus de deux cent cinquante lettres pour exhorter diverses personnes à des actes héroïques de vertu. Elle y découvre, par un don singulier de Dieu, les secrets de leur intérieur, et y donne des instructions convenables à leur état. Celles qu'elle adressa aux archevêques de Trèves, de Mayence et de Cologne contiennent plusieurs prédictions sur les calamités qui devaient arriver dans le monde.
En un mot, il n'y eut point de personnes considérables de son temps à qui elle ne donnât des conseils tout divins. Elle écrivit à Eugène III, à Anastase IV, à Adrien IV et à Alexandre III, souverains pontifes aux empereurs Conrad III et Frédéric Ier ; aux évêques de Bamberg, de Spire, de Worms, de Constance, de Liége, de Maëstricht, de Prague et de toute la Germanie ; à l'évêque de Jérusalem, à plusieurs prélats de France et d'Italie à un grand nombre d'abbés ; à sainte Elisabeth de l'Ordre de Cîteaux ; à une quantité de prêtres, de théologiens et de philosophes de l'Europe ; toutes ces épîtres sont remplies de mystères et de secrets que le Saint-Esprit lui avait révélés, et les réponses de tant de grands hommes ont été conservées au monastère de Saint-Rupert.
Elle parcourut plusieurs villes d'Allemagne pour annoncer aux ecclésiastiques et au peuple des choses que Dieu lui avait ordonné de leur manifester. Les plus pauvres avaient part à ses lumières, aussi bien que les puissants du siècle elle ne leur refusait point des lettres de consolation, quand ils lui en demandaient, et, par ses prières, elle obtenait pour eux les grâces dont ils avaient besoin dans leurs maladies, leurs misères et leurs afflictions.
Sainte Hildegarde bénissant ses religieuses. Manuscrit du XIIIe.
Elle convainquit des Juifs qui la vinrent interroger sur la loi et les Prophètes, et leur prouva que le mystère de l'Incarnation, qu'ils attendaient encore, était accompli. Elle connaissait le cœur de ceux qui venaient à elle par un esprit do curiosité, et leur disait des vérités si touchantes, qu'ils changeaient aussitôt de sentiment. Elle donnait des remèdes aux personnes qui la consultaient sur leurs maladies corporelles ou spirituelles. Elle avait souvent des révélations touchant le salut ou la damnation de ceux qui venaient la visiter. Elle voyait la gloire à laquelle les uns devaient être élevés dans le ciel, et les peines que d'autres devaient souffrir dans les enfers. Elle se servait utilement de ce discernement des esprits et des consciences pour gouverner ses religieuses. Elle prévenait leurs petits différends, leur tristesse dans leur vocation, leur paresse et leur lâcheté dans leurs fonctions régulières. Tout ce qu'elle disait était accompagné de tant de douceur et d'onction, que l'on ne pouvait résister aux impressions qu'elle faisait jusque dans. le plus intime des âmes.
Mais, quoique Notre Seigneur Jésus-Christ favorisât sa bien-aimée Hildegarde par des grâces si extraordinaires et des bénédictions si abondantes, et qu'il l'honorât presque continuellement de ses saintes visites, il ne laissa pas de permettre qu'elle fût extrêmement persécutée et affligée de plusieurs manières. Elle eut des maladies que l'on peut dire avoir été au-dessus de la nature. Elle fut une fois trente jours dans un état si pitoyable, que l'on ne savait si elle était morte, ou si son âme animait encore ses membres, tant ils paraissaient desséchés et raides. D'autres fois son corps était réduit à une telle faiblesse, qu'on n'osait pas même le toucher, de crainte de la faire mourir. Tantôt il était flétri et comme gelé, tantôt il était tout en feu par l'ardeur des fièvres violentes qui la tourmentaient. C'était néanmoins dans ces cuisantes douleurs qu'elle avait les plus belles visions et que Dieu lui communiquait de plus grandes lumières.
Nous avons déjà remarqué que son mal augmentait visiblement lorsqu'elle n'exécutait pas promptement ce qui lui était prescrit dans ses révélations. Un jour, elle devint aveugle pour n'avoir pas manifesté une chose qu'elle avait eu ordre de déclarer, et elle ne recouvra la vue qu'après y avoir satisfait. Elle souffrit aussi beaucoup de la part des démons, qui employèrent tous leurs artifices pour lui ravir son humilité, pour ébranler sa patience et pour lui faire perdre sa confiance en Jésus-Christ. Ils l'attaquèrent par d'horribles tentations de blasphème et par des pensées de désespoir. Ils se mêlèrent, par permission divine, dans ses maladies, et la traitèrent, sans pourtant toucher à son âme, avec toute la cruauté que leur rage leur put suggérer ; mais elle eut la consolation de voir des anges destinés pour la défendre contre leur fureur. Elle vit plusieurs fois un chérubin, avec un glaive de feu à la main, qui les chassait de sa présence et les obligeait de se retirer dans les enfers. Elle voyait souvent ces esprits de ténèbres dans des furies effroyables, de ce qu'au lieu de remporter la moindre victoire sur sa faiblesse, elle triomphait toujours de leur malice et s'en servait pour s'unir davantage à son Dieu.
Ruines du cloître du monastère du mont Saint-Disibode.
Aussi, ce ne furent point là les plus sanglantes persécutions qu'elle souffrit, quoiqu'elles paraissent si terribles les traits des langues médisantes lui furent bien sensibles, parce qu'elles combattaient les faveurs insignes qu'elle recevait de son Epoux. Elle était honorée, applaudie et approuvée de la manière que nous avons dite cependant la Providence permit encore au démon de susciter plusieurs personnes qui lui causèrent d'étranges peines intérieures. Les uns doutaient si ces révélations n'étaient pas plutôt des illusions que des inspirations divines. Les autres disaient hautement qu'elle était trompée et séduite, et, qu'au reste, ce n'était point à une fille simple, ignorante et sans lettres, à se mêler de composer des ouvrages de piété que ses prétendues familiarités avec le Saint-Esprit n'étaient que des imaginations creuses que les visions qu'elle débitait ne devaient passer que pour des idées chimériques, sans aucun fondement valable, et qu'enfin il fallait l'empêcher de parler, au lieu de la consulter comme un oracle. Quelques-unes même de ces religieuses se laissèrent emporter au murmure contre elle, se plaignant de son exactitude, comme trop scrupuleuse, à leur faire garder les observances régulières, et lui reprochant que, par une rêverie plutôt que par une vision, elle les avait retirées du mont de Saint-Disibode, où rien ne leur manquait, et qui était la demeure du monde la plus agréable, pour les transférer sur la colline de Saint-Rupert, lieu malsain et marécageux à cause du voisinage de la rivière de Naha, qui se décharge dans le Rhin, et où elles manquaient de toutes choses.
Mais Hildegarde demeura toujours ferme, constante et tranquille au milieu de ces tempêtes. Et si elles furent assez violentes pour la toucher à leur début, elles n'eurent jamais la force de l'abattre, ni même de l'ébranler. Comme elle ne s'était pas élevée lorsqu'on lui avait donné des louanges, elle ne se laissa pas abattre quand elle se vit calomniée. Elle regarda cette adversité du même œil qu'elle avait envisagé la prospérité, adorant sans cesse en l'une et en l'autre la divine Providence, de laquelle seule elle attendait tout son secours. Aussi Dieu, prenant sa défense en main, la mit au-dessus de l'envie il fit paraître son innocence avec éclat, châtia ses persécuteurs et les obligea de reconnaître leur faute enfin, il montra, par plusieurs merveilles, qu'elle ne faisait et n'avait rien fait que par le mouvement et la conduite de son Esprit-Saint.
Elle guérit plusieurs malades qui implorèrent, son assistance, délivra un enfant de sept mois d'une étrange tumeur qui l'affligeait dans tous ses membres, et rendit la santé à une jeune fille et à un jeune homme moribonds, en leur faisant boire de l'eau qu'elle avait auparavant bénite. Deux femmes qui avaient perdu l'esprit le recouvrèrent par ses mérites. Une autre, d'Italie, travaillée d'un flux de sang, fut guérie par une de ses lettres.
Basilique Saint-Martin.
Bingen-sur-le-Rhin. Hesse. Allemagne.
Le seul attouchement de ses habits et des choses qui lui avaient servi opérait des guérisons admirables. Elle chassa les démons du corps des possédés, et rendit la vue à un enfant aveugle.
Une jeune personne, nommée Lutgarde, eut une passion si violente, qu'elle tomba dans une langueur qui la mit à deux doigts de la mort. Ses parents, apprenant de sa propre bouche la cause de sa maladie, l'envoyèrent vers la Sainte pour lui découvrir son mal et lui demander le secours de ses prières. Hildegarde se mit aussitôt en oraison, puis elle bénit du pain, l'arrosa de ses larmes et l'envoya à la malade. La jeune fille n'en eut pas plus tôt goûté qu'elle fut entièrement délivrée de la passion qui la desséchait.
Enfin notre Sainte fit quantité d'autres miracles qu'il serait trop long de rapporter ici. Il faut observer avec une tendre dévotion que, quand elle avait fait quelque action miraculeuse, Dieu permettait que ses douleurs et ses maladies augmentassent extraordinairemeni, afin, comme elle-même le confesse dans ses écrits, qu'elle se maintînt toujours dans les sentiments d'une véritable humilité et que la grandeur de ses révélations et l'éclat des merveilles qu'elle opérait ne fissent point naître dans son esprit des pensées d'orgueil et de bonne estime d'elle-même.
Voilà quelle, fut la vie de sainte Hildegarde jusqu'à l'âge de quatre-vingt-deux ans ; après avoir prédit sa mort, par une révélation qu'elle en eut, elle alla rejoindre son Epoux céleste, qu'elle avait uniquement recherché sur la terre. Ce fut le 17 septembre, l'an de Notre-Seigneur 1179.
A l'heure de son décès, qui arriva à la pointe du jour, on vit dans le ciel deux arcs-en-ciel, se croisant l'un sur l'autre sur tout l'hémisphère, vers les quatre parties du monde et, au point de leur jonction, il paraissait un corps lumineux de la grandeur du disque de la lune, du milieu duquel il sortait une croix qui, d'abord, était assez petite, mais ensuite s'élargissait sans mesure et était encore environnée d'autres cercles lumineux, chargés aussi de croix éclatantes il en jaillissait une clarté merveilleuse dont toute la montagne était illuminée. Dieu voulait sans doute montrer par ces symboles combien cette sainte vierge avait souffert pendant sa vie, combien, par ses souffrances, elle s'était rendue agréable à Notre Seigneur Jésus-Christ, et de quelle gloire elle était récompensée dans le ciel.
Son corps, qui exhalait une très-suave odeur, fut très honorablement inhumé au monastère d'Eibingen ou Bingen, qu'elle avait si longtemps sanctifié parla pratique des plus excellentes vertus. Son tombeau a été honoré de plusieurs miracles.
La châsse contenant les reliques de sainte Hildegarde.
Abbatiale de Eibingen. Hesse. Allemagne.
On la représente :
1. au moment où, rendant le dernier soupir, une croix éclatante apparut dans le ciel ;
2. portant une église, comme fondatrice d'un monastère, celui d'Eibingen ;
3. visitée par un solitaire
4. donnant un calice et de l'argent à un pauvre prêtre ou ermite.
CULTE ET RELIQUES
Sainte Hildegarde fut ensevelie au monastère de Saint-Rupert, où on lui éleva un riche mausolée. Ce monastère ayant été pillé et brûlé, en 1632, par les protestants suédois, les religieuses bénédictines qui l'occupaient se retirèrent et emportèrent avec elles les reliques de leur sainte abbesse au prieuré d'Eibingen, au diocèse de Mayence, dont sainte Hiidegarde était la fondatrice.
C'est là qu'elle a reçu depuis les honneurs que le grand nombre de ses miracles lui ont fait rendre. Son nom est célèbre dans les fastes de l'Eglise d'Allemagne. Sa canonisation, deux fois reprise, n'a pas été terminée pour des raisons secondaires et qui ne saurait mettre en cause son haut degré de sainteté ; mais son culte est permis et le décret de béatification a été rendu. Son nom est inséré dans le martyrologe romain.
Une des visions de sainte Hildegarde, décrite par ses soins.
Maître de Sainte-Hildegarde. Livre des Scivias. XIIIe.
ECRITS
Signalons que bien des ésotéristes contemporains, la tête farcie de fausses et de mauvaises sciences et de ruineuses fantaisies de toutes sortes, sont férus de certains ouvrages de sainte Hildegarde. Ils en donnent, dans l'édition comme sur l'Internet, des interprétations truffées de sottises obscures et dangereuses.
D'autres, au fil du temps ont composé des faux qu'ils ont attribué à notre grande Sainte. D'autres reproduisent incomplètement, retranche, ajoute, etc. aux textes de l'abbesse du Mont-Rupert. On s'éloignera bien entendu de toutes les variétés d'escrocs correspondant à ces caractéristiques et à ces pratiques.
Les ouvrages que nous avons de sainte Hildegarde sont :
1. ses Lettres, au nombre de cent quarante-cinq, en y comprenant celles que diverses personnes lui adressèrent ;
2. les Scivias, ou ses visions et ses révélations, en trois livres ;
3. le livre des Ouvrages divins de l'homme simple, ou Visions sur tous le points de la théologie, en trois parties :
4. la Solution de trente-huit questions ;
5. l'explication de la Règle de saint Benoît ;
6. l'explication du symbole de saint Athanase ;
7. la Vie de saint Rupert ou Robert ;
8. la Vie de saint Disibode ;
9. Des subtilités des diverses natures des créatures, en neuf livres.
Tous ces ouvrages sont réunis au tome CXCVII de la Patrologie latine de Migne par les soins et avec les notes du docteur Heuss.
00:05 Publié dans H | Lien permanent | Commentaires (4)
17 septembre. Les stigmates de saint François d'Assise. 1224.
R. P. Nouet. Méditations.
Saint François d'Assise. Francisco de Zurbaran. XVIIe.
Bientôt la grande figure du patriarche d'Assise reparaîtra au ciel de la sainte Liturgie ; nous aurons alors à louer Dieu pour les merveilles que sa grâce opéra en lui. Aujourd'hui, si personnel que soit à François le glorieux épisode, objet de la fête, il le dépasse pourtant par ce qu'il exprime.
L'Homme-Dieu vit toujours dans son Eglise ; la reproduction de ses mystères en cette Epouse qu'il se veut semblable, est l'explication de l'histoire. Or, au XIIIe siècle, on dirait que la charité, rebutée par plusieurs, concentre en quelques-uns les feux qui suffisaient jadis à embraser des multitudes ; autant que jamais la sainteté resplendit, et cependant l'heure du refroidissement a sonné pour les peuples.
Saint François d'Assise recevant les stigmates. Giotto.
C'est aujourd'hui même l'affirmation de l'Eglise (Collecte de la fête), pour laquelle, en effet, commence la série des défections sociales avec leurs reniements, leurs trahisons, leurs dérisions, soufflets, crachats du prétoire, aboutissant à la mise hors la loi dont nous sommes témoins. L'ère de la Passion est ouverte ; l'exaltation de la sainte Croix, jusqu'ici triomphante aux yeux des nations, prend du ciel, d'où regardent les Anges, un aspect d'adaptation plus intime de l'Epouse aux souffrances de l'Epoux crucifié. Ne soyons pas étonnés si, comme fait l'artiste en présence d'un marbre précieux, l'Esprit choisit la chair du séraphin d'Assise pour y rendre pleinement sa divine pensée.
Il manifeste ainsi au monde la direction plus spéciale qu'il entend maintenant donner aux âmes ; il offre au ciel un premier exemplaire, un exemplaire complet de l'ouvrage nouveau qu'il médite : l'union plénière, sur la Croix même, du corps mystique au Chef divin. François est le premier qu'honore l'élection d'en haut ; mais après lui le signe sacré sera recueilli par d'autres, qui personnifieront également l'Eglise ; les Stigmates du Seigneur Jésus seront toujours ici ou là, désormais, visibles sur terre.
Deux ans avant sa mort, saint François s'était retiré dans la Toscane avec cinq de ses Frères, sur le mont Alverne, afin d'y célébrer l'Assomption de la Très Sainte Vierge et préparer la fête de l'archange saint Michel par quarante jours de jeûne.
C'était aux environs de la fête de l'Exaltation de la Sainte Croix, François priait les bras étendus dans l'attente de l'aube, agenouillé devant sa cellule.
" Ô Seigneur Jésus-Christ, disait-il, accorde-moi deux grâces avant que je meure. Autant que cela est possible, que dans mon âme et aussi dans mon corps, je puisse éprouver les souffrances que Toi, Tu as dû subir dans Ta cruelle Passion, et ressentir cet amour démesuré qui T'a conduit, Toi, le Fils de Dieu, à souffrir tant de peines pour nous, misérables pécheurs !"
Saint François d'Assise recevant les stigmates. El Greco. XVIIe.
Tandis qu'il contemplait avec grand recueillement les souffrances du Sauveur, voici qu'il vit descendre du ciel un séraphin sous la forme d'un homme crucifié, attaché à une croix. Cet esprit céleste portait six ailes de feu dont deux s'élevaient au-dessus de sa tête, deux s'étendaient horizontalement, tandis que deux autres se déployaient pour voler et les deux dernières recouvraient tout le corps. Devant cet étrange spectacle, l'âme de François éprouva une joie mêlée de douleur. Le séraphin s'approcha de lui et cinq rayons de lumière et de feu jaillirent des cinq plaies de l'ange crucifié pour venir frapper le côté, les deux mains et les deux pieds du Saint, y imprimant pour toujours la trace des sacrés stigmates de Notre-Seigneur.
La mystérieuse apparition disparut aussitôt, laissant le pauvre d'Assise en proie à d'inexprimables souffrances. Son côté droit laissait paraître une large plaie pourpre dont le sang sortait avec une telle abondance que ses habits en étaient tout imprégnés. Les têtes des clous apparaissaient au-dessus des mains ainsi qu'au-dessus des pieds ; leurs pointes étaient repliées de l'autre côté et enfoncées dans la chair.
Saint Bonaventure qui a écrit la vie de saint François une trentaine d'années après sa mort, affirme que ceux qui virent et touchèrent ces stigmates constatèrent que les clous étaient miraculeusement formés de sa chair et tellement adhérants que lorsqu'on les pressait d'un côté, ils avançaient tout d'une pièce de l'autre. Ces clous se trouvaient si bien unis à la chair et à la peau de saint François que même après sa mort, on essaya vainement de les en arracher. Des milliers de témoins oculaires ont contemplé les fascinantes empreintes pendant la vie et après la mort du grand dévot de la Passion de Jésus.
Attentif à tenir ses stigmates cachées, saint François couvrait ses mains et marchait chaussé. Il ne put cependant les dissimuler longtemps, car il lui devint trop douloureux de poser la plante des pieds par terre, aussi devait-il recourir malgré lui à la continuelle assistance de ses frères. Dieu qui pour la première fois, décorait un homme des stigmates de Son Fils unique, voulut manifester leur origine céleste en accordant quantités de miracles par leur vertu surnaturelle et divine.
Le pape Benoît XI voulut honorer par un anniversaire solennel et un office public, cette grâce qui n'avait jamais été accordée auparavant à la sainte Eglise. Le souverain pontife Sixte V ordonna d'insérer, dans le martyrologe romain, la mémoire des Stigmates de saint François, au 17 septembre. Le pape Paul V étendit cette fête à l'Eglise universelle dans le but d'éveiller l'amour de Jésus crucifié dans tous les coeurs.
00:00 Publié dans F | Lien permanent | Commentaires (0)