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samedi, 20 janvier 2024

20 janvier. Saint Fabien, pape et martyr. 250.

- Saint Fabien, pape et martyr. 250.

Papes : Saint Antère (prédécesseur, 236+) ; Saint Corneille (successeur). Empereur romain (période de l'anarchie militaire) : Trajan Dèce.

" Il est digne ! Il est digne !"
Acclamation des électeurs à l'élection de saint Fabien.


Election de saint Fabien. Jacques Huguet l'Ancien. XVe.

L'un des deux grands Martyrs qui partagent, sur le Cycle, les honneurs de cette journée, saint Fabien (l'autre étant saint Sébastien), fut Pontife de l'Eglise de Rome. Saint Fabien reçut la couronne du martyre l'an 250, sous la persécution de Trajan Dèce. Considérons les mérites de cet deux athlètes du Christ.

A l'exemple de ses prédécesseurs, saint Clément et saint Anthéros, le saint Pape Fabien prit un soin particulier de faire rédiger les Actes des Martyrs ; mais la persécution de Dioclétien, qui nous a privés d'un si grand nombre de ces précieux monuments condamnés aux flammes par les édits impériaux, nous a ravi le récit des souffrances et du martyre de notre saint Pontife. Quelques traits seulement de sa vie pastorale sont arrivés jusqu'à nous ; mais nous pouvons prendre une idée de ses vertus, par l'éloge que fait de lui saint Cyprien, qui l'appelle un homme incomparable, dans une Lettre qu'il écrit au Pape saint Corneille, successeur de Fabien.

L'évêque de Carthage célèbre aussi la pureté et la sainteté de la vie du saint Pontife, qui domina d'un front tranquille les orages dont l'Eglise fut agitée de son temps. On aime à contempler cette tête calme et vénérable sur laquelle une colombe alla se reposer, pour désigner dans Fabien le successeur de Pierre, le jour où le peuple et le clergé de Rome étaient réunis pour l'élection d'un Pontife, après le martyre d'Anthéros. Ce rapport avec le Christ désigné pour le Fils de Dieu, dans les eaux du Jourdain, par la divine colombe, rend plus sacré encore le touchant caractère de Fabien. Dépositaire de la puissance de régénération qui réside dans les eaux depuis le baptême du Christ, il eut à cœur la propagation du Christianisme ; et parmi les Evêques qu'il sacra pour annoncer la foi en divers lieux, l'Eglise des Gaules en reconnaît plusieurs pour ses principaux fondateurs.


Saint Fabien et saint Sébastien. Paolo di Giovanni. XIVe.

Fabien, comme on dirait fabriquant la béatitude suprême, c'est-à-dire se l’acquérant à un triple droit, d'adoption, d'achat et de combat.

Saint Fabien, romain d'origine, était fils de Fabius. Le pontificat de saint Antère, dit saint Eusèbe de Césarée, n'avait duré qu'un mois. On rapporte qu'après le martyr de ce pape, Fabien revenait de la campagne avec quelques amis, lorsqu'il fut soudain et par une merveilleuse disposition de la grâce divine, appelé inopinément à la tête du clergé. Fabien entra dans l'Eglise au moment où tous les frères étaient réunis pour procéder à l'élection. Nul ne songeait à l'élire.

Plusieurs se préoccupaient de donner leurs suffrages à quelque nobles et illustres personnages. En effet, Gordien (le père), procclamé empereur par les légions campées en Afrique, était entré, par son mariage avec Fabia Orestia, dans cette grande famille des Fabii, dont le pape saint Fabien était lui-même un mùembre. On conçoit dès lors comment l'élection pontificale des catacombes, coïncidant avec l'acclamation de l'armée, du Sénat et du peuple en faveur des deux empereurs Gordien, pouvait être, au point de vue humain, d'une humilité immense pour l'Eglise.


Saint Fabien et saint Sébastien. Graduel à l'usage de
l'abbaye Notre-Dame de Fontevrault. XIIIe.

Tout à coup, une colombe, descendue par un des lucernaires de la catacombe, vint se reposer sur sa tête. Elle semblait rappeler celle dont l'Esprit-Saint avait revêtu la forme pour descendre sur le Sauveur, aux rives du Jourdain. L'assemblée, émue à ce spectacle et manifestement inspirée de l'Esprit de Dieu, poussa dans un transport d'allégresse l'acclamation unanime :
" Il est digne ! Il est digne !"
Malgré la résistance de Fabien, on l'entera et on le fit asseoir sur le trône pontifical.

Saint Fabien fut le premier pape élu simple laïque, pour être élevé au sommet de la hiérarchie sacrée. Il justifia par toute sa vie ce choix miraculeux. Il assigna un diacre à chacune des sept régions de la Rome chrétienne, et y plaça aussi un sous-diacre pour diriger les notaires chargés de reccueillir intégralement les Actes des Martyrs.

Saint Fabien défendit que les juges séculiers se mêlassent des causes ecclésiastiques. Il interdit aussi le mariage par affinité aux personnes alliées jusqu'au cinquième degré ; n'entendant néanmoins pas que les mariages dans le quatrième degré, faits et consommés, fussent rompus.

Il ordonna que les fidèles communiassent au moins aux trois fêtes principales fêtes de l'année.

Il statua également que, tous les ans, au jour de la Cène du Seigneur, on renouvellerait le saint Chrême, après avoir brûlé l'ancien.

Par ses ordres, de nombreuses constructions furent exécutées dans les cimetières et les galeries des catacombes.


Saint Fabien et Philippe l'Arabe. Legenda aurea.
Bx J. de Voragine. R. de Montbaston. XIVe.

La fin du pontificat de saint Fabien correspondait au règne de Philippe l'Arabe, qui était chrétien ainsi que sa femme, l'impératrice Severa. Mais le César eut peur d'agir en chrétien. Dieu ne voulait pas qu'un homicide arborât le premier le drapeau pacifique de la Croix sur le monde. Philippe, en arrivant au trône avait mis à mort le fils de son ancien maître ; c'est pourquoi la veille de Pâques, quand il se présenta à l'Eglise d'Antioche, le patriarche saint Babylas refusa de lui en ouvrir les portes. L'empreur se soumit. Pourtant il ne rendit de services à l'Eglise qu'en ce sens qu'il ne la persécuta point, et même, lors de la célébration du premier millésime romain, il ne permit ni les combats de gladiateurs, ni les massacres du cirques ; le souffle chrétien avait visiblement inspiré l'empereur.

Saint Fabien profita de la paix qui régnait alors pour répandre de plus en plus les lumières de l'Evangile. Allié par la naissance à la famille impériale des Gordiens et à presque toutes celles de l'ancien patriarcat de Rome, il dut étendre les conquêtes de la foi dans les plus hauts rangs de la société, où l'on voyait, à la fin du IIIe siècle, un si grand nombre d'illustres Chrétiens. Les églises, ruinées pendant les persécutions précédentes, furent réparées et ornées avec le plus de décence possible.

Haymon rapporte que l’empereur Philippe, voulant assister aux vigiles de Pâques et participer aux mystères, il lui résista et ne lui permit d'y assister qu'après avoir confessé ses péchés et être resté parmi les pénitents.


Décollation de saint Fabien.
Benvenuto di Giovanni di Meo del Guasta. XVe.

Enfin, Dèce ayant usurpé l'empire, et désirant mettre la main sur les trésors qu'on lui fit entendre avoir été laissé par son prédecesseur à l'Eglise, renouvela les persécutions qui avaient cessé et arrosa la terre du sang des fidèles. Alors, dit saint Cyprien, commença une suite interminable de tortures de la part des bourreaux.

Les poursuites n'avaient plus seulement pour fin la condamnation, et pour consolation la mort. On graduait la cruauté par une série de raffinements, de façon que la victime survécût aux supplices. On ne voulai pas lui accorder trop tôt la couronne. On la fatiguait dans l'espoir de fléchir son courage, et s'il lui arrivait, grâce à la miséricorde de Dieu, de mourir avant l'heure prévue, les bourreaux se croyaient trompés.

Telle fut la septième persécution générale. Sa première victime fut le pape saint Fabien qui eut la tête tranchée le treize des calendes de février (le 20 janvier). Il fut enseveli au cimetière de Calliste, sur la voie Appienne.

Ce martyre, qui rouvrait avec éclat l'ère des luttes sanglantes, eut un grand retentissement dans la chrétienté. Le clergé de Rome en informa les autres églises ; le fait est certain ; nous connaissons même un des messagers. Le sous-diacre Crementius fut envoyé à Carthage avec une lettre authentique des prêtres et des diacres romains, dans laquelle la mort glorieuse du pontife était, pour l'édification générale, relatée dans tous ses détails ( nous n'avons plus ce récit hélas, mais une épître de saint Cyprien en fait foi).

Saint Fabien siégea quinze ans et quatre jours. Il fit cinq ordinations au mois de décembre, et il créa vingt-deux Prêtres, sept Diacres, et onze Evêques pour divers lieux.

On lui donne pour attribut l'épée, instrument de son martyre et la colombe qui le désigna au choix du peuple chrétien.

L'Eglise a toujours solennisé la fête de saint Fabien avec celle de saint Sébastien, comme il paraît dès le temps de saint Grégoire le Grand. Son office n'était autrefois que semi-double ; mais le pape Pie V, en la réformation du bréviaire, en 1550, l'a ordonné double, ainsi qu'il se célèbre.

Des reliques de notre saint pape étaient encore conservées au début du XXe siècle à l'Hôtel-Dieu d'Amiens.


Décollation de saint Fabien. Jacques Huguet l'Ancien. XVe.

PRIERE

" Ainsi se sont écoulés les jours de votre Pontificat, longs et orageux, Ô Fabien ! Mais, pressentant l'avenir de paix que Dieu réservait à son Eglise, vous ne vouliez pas que les grands exemples de l'âge des Martyrs fussent perdus pour les siècles futurs, et votre sollicitude veillait à leur conservation. Les flammes nous ont ravi une grande partie des trésors que vous aviez amassés pour nous ; à peine pouvons-nous formuler quelques détails de votre propre vie ; mais nous en savons assez pour louer Dieu de vous avoir choisi dans ces temps difficiles, et pour célébrer aujourd'hui le glorieux triomphe que remporta votre constance. La colombe qui vous désignait comme l'élu du ciel, se reposant sur votre tête, vous marquait comme le Christ visible de la terre ; elle vous dévouait aux sollicitudes et au martyre ; elle avertissait l'Eglise entière de vous reconnaître et de vous écouter.

Vous donc, Ô saint Pontife, qui avez eu ce trait de ressemblance avec l'Emmanuel dans le mystère de l'Epiphanie, priez-le pour nous afin qu'il daigne se manifester de plus en plus à nos esprits et à nos cœurs. Obtenez-nous de lui cette docilité à sa grâce, cette dépendance d'amour à l'égard de ses moindres volontés, ce détachement de toutes choses, qui furent l'élément continuel de votre vie, au milieu de cette tourmente qui menaça, durant quinze années, de vous engloutir. Enfin un dernier tourbillon vous enleva, calme et préparé, pour vous porter, par le martyre, jusque dans le sein de Celui qui avait déjà accueilli un si grand nombre de vos brebis. Nous aussi, nous attendons la vague qui doit nous détacher de la grève, et nous pousser jusqu'au ciel ; demandez, Ô Pasteur, qu'elle nous trouve prêts. Si l'amour du divin Enfant vit en nous, si nous imitons, comme vous, Ô Fabien, la simplicité de la colombe, notre voie est sûre. Nous offrons nos cœurs ; hâtez-vous de les préparer."

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vendredi, 19 janvier 2024

19 janvier. Saint Canut, roi de Danemark, martyr. 1086.

- Saint Canut IV (ou Knut), roi de Danemark, martyr. 1086.
 
Pape : Saint Victor III. Roi d'Ecosse : Malcolm III. Roi d'Angleterre : Guillaume Ier le Conquérant. Roi de France : Philippe Ier. Empereur du Saint-Empire : Henri IV.

" Il a imité la passion du Seigneur : marchons sur ses traces."
Brev. rom.


Statue de saint Canut à Odensée - Royaume de Danemark.

Les Rois Mages, comme nous l'avons dit, ont été suivis, à la crèche du Sauveur, par les saints Rois chrétiens ; il est juste que ceux-ci soient représentés sur le Cycle, dans cette saison consacrée au mystère de sa Naissance. Parmi les saints Rois que donna en si grand nombre à l'Eglise et à la société européenne le onzième siècle, si fécond en toutes sortes de merveilles catholiques, Canut IV, sur le trône de Danemark, se distingue entre les autres par l'auréole du martyre. Propagateur zélé de la foi du Christ, législateur habile, guerrier intrépide, pieux et aumônier, il eut tous les genres de gloire d'un prince chrétien. Son zèle pour l’Eglise, dont les droits alors étaient en même temps ceux des peuples, fut le prétexte de sa mort violente ; et il expira, dans une sédition, avec le caractère sublime d'une victime immolée pour sa nation.

Son offrande au Roi nouveau-né fut l'offrande du sang ; et il échangea la couronne périssable pour cette autre couronne dont l'Eglise orne le front de ses martyrs, et qui ne se fane jamais. Les annales du Danemark, au onzième siècle, sont peu familières à la plupart des habitants de la terre ; mais l'honneur qu'a eu cette contrée de posséder un Roi martyr est connu dans toute l'étendue de l'Eglise, et l'Eglise habite le monde entier. Cette puissance de l'Epouse de Jésus-Christ pour honorer le nom et les mérites des serviteurs et des amis de Dieu, est un des plus grands spectacles qui soient sous le ciel ; car les noms qu'elle proclame deviennent immortels chez les hommes, qu'ils aient été portés par des rois, ou qu'ils n'aient servi qu'à distinguer les derniers de ses enfants.

Saint Canut était fils naturel de Suenon II, dont le grand-oncle nommé aussi Canut, avait régné en Angleterre. Suénon, qui n'avait pas d'enfant légitimes, prit un soin particulier de l'éducation du jeune Canut qui alliait de belles qualités d'âme à celles du corps. Suénon le mit sous la conduite de maîtres habiles qui remarquèrent bientôt une profonde piété qui relevait ses autres qualités.

Dès qu'il fut en âge de commander les armées, il le fit avec supériorité et assurance. Ses premiers coups d'essais furent de purger les mers des pirates qui désolaient les côtes de Danemark et de soumettre les peuples qui s'adonnaient à ces forfaits.

A la mort de Suénon en 1074, plusieurs Danois voulurent placer notre saint sur le trône (le trône en Danemark a presque toujours été électif jusqu'en 1660), mais, par crainte de son esprit guerrier, ils lui préférèrent l'un de ses frères Harald (Suénon II eut treize fils naturels), septième du nom, bientôt surnommé le fainéant, et qui régna jusqu'en 1080.

Saint Canut s'était retiré en Norvège auprès du roi Halstan qui l'avait reçu avec de vives démonstrations d'estime. Ce roi engagea souvent saint Canut à prendre les armes contre son jeune frère, mais notre saint s'y refusa toujours avec constance. Il chercha toujours, depuis la Norvège, à se rendre utile à sa patrie. Cette attitude résolue et sans faiblesse lui gagna le coeur des Danois qui l'élirent à la mort d'Harald VII en 1080.

Le début de son règne fut marqué par de très retentissants succès militaires sur les Sembes, les Estons et les Curètes qui ravageaient régulièrement ses Etats et que la molesse honteuse d'Harald n'avait pas su arrêtés. Il fit porter avec détermination les lumières de la foi à tous les peuples qui ne la connaissaient pas encore, en particulier en Courlande, en Samogitie et en Livonie.

Les succès ne l'enorgueillissaient pas et il déposait toujours sa couronne aux pieds du Roi des Rois, Notre Seigneur Jésus-Christ en lui faisant offrande de sa personne et de son royaume. Il s'unit avec Adélaïde, fille de Robert comte de Flandres. De cette union naquit Charles, surnommé plus tard dans sa maturité Le Bon.
 

Saint Canut IV de Danemark. Manuscrit flamand du XIIe.

Il eut à connaître des abus qui s'étaient développés dans son royaume et les corrigea avec une extrême sévérité et en prenant toujours le parti du faible contre le puissant. Il édicta des lois très sévères (et les fit appliquer) pour réduire toutes sortes de crimes auxquels s'adonnaient ses peuples, enclins il est vrai à une extrême violence.

L'Angleterre étant passée sous le contrôle de Guillaume le Conquérant en 1066, saint Canut n'en fit pas moins valoir ses droits sur l'île. Hélas, toutes les opérations qu'il monta échouèrent par défaut d'allié. Une dernière opération échoua par la faute de son frère Olas, duc de Schleswig, qui tergiversant et retardant la mise en route, provoqua la désertion quasi-complète des troupes. A cette occasion, au plan intérieur, le saint roi voulut instaurer la dîme ecclésiastique. Il décrêta qu'en cas de désertion, les Danois paieraient soit la dîme soit une forte taxe. Par détestation de la dîme, les Danois préférèrent s'acquiter de fortes taxes.
 
Saint Canut en fut mortifié et exigea dans le recouvrement de la taxe une grande fermeté en espérant ainsi que ses sujets reviendraient sur leur choix. Le recouvrement de la taxe donna lieu bientôt à une mutinerie importante, emmenée par deux gouverneurs de la province de Wensyssel. Le roi, instruit de l'approche des révoltés, engagea la reine et ses enfants à se retirer auprès de son beau-père et alla avec un corps de troupes important dans l'île de Fionie et plus exactement dans la ville d'Odensée, capitale de l'île.

Bientôt, les mutins ne voulant pas affronter un prince dont ils connaissaient les qualités de commandement et la qualité de ses troupes, lui envoyèrent une ambassade qui fit serment que tout les révoltés cessaient le combat et qu'ils rentraient dans les résolutions du roi. Saint Canut crut ces protestations, malgré les avertissements de son frère Benoît qui avait éventé la fourberie de cette ambassade. Quelques temps plus tard, alors que le roi avait relâché sa vigilance et que ses troupes étaient éparses, il apprit que l'armée des mutins marchait vers Odensée pour l'y surprendre.

Selon la coutume, il alla à l'église Saint-Alban pour entendre la messe, communier et faire ses dévotions pour se préparer au combat. Pendant que son frère Benoît faisait des prodiges aux portes de l'église pour en défendre l'accès, une pierre vint atteindre le front de saint Canut.
Comme les révoltés ne pouvaient entrer dans l'église, défendue par un Benoît, frère du roi, assisté par saint Michel, le chef des forcenés demanda à rencontrer le roi afin de négocier des conditions de paix. Canut ordonna qu'on le laissât entrer. Le traître, Egwind Blancon, se baissa profondément devant le roi et se releva brutalement et poignarda saint Canut.
 
L'assassin monta sur l'autel pour s'enfuir par la fenêtre du choeur mais Palmar, un des principaux officiers du roi, le trancha en deux de sorte que la moitié du corps d'Egwind tomba dehors et l'autre resta dans l'église. Ce spectacle ranima la fureur des mutins qui massacrèrent le reste de la troupe après une résistance héroïque. Outre saint Canut qui fut achevé d'un lancer de javelot alors qu'il recommandait son âme à Dieu à l'autel, Benoît fut tué ainsi que dix-sept autres vaillants soldats.
 

Le martyr de saint Canut - Christian-Arlbrecht von Benzon.

Dieu vengea la mort de son serviteur en affligeant le Danemark d'une famine qui dura les huit années du règne suivant (celui d'Olas II, le même qui avait fait échouer l'opération en Angleterre à l'origine de l'établissement de la dîme ecclésiastique).
 
A l'issue de ce règne funeste, Eric III, prince religieux, déplaça les restes de saint Canut pour les mettre dans un lieu plus digne et envoya une ambassade à Rome afin de représenter au Souverain Pontife la sainteté de notre saint.

La chasse des reliques de saint Canut fut magnifiquement ornée et on y lit l'inscription suivante :
" L'an de Jésus-Christ 1086, dans la ville d'Odensée, le glorieux roi Canut, trahi, comme Jésus-Christ, à cause de son zèle pour la religion, et de son amour pour la justice, par Blancon [Edwig], l'un de ceux qui mangeaient à sa table, après s'être confessé, et avoir participé au sacrifice du corps du Seigneur, eut le côté percé, et tomba contre terre devant l'autel, les bras étendu en croix. Il mourut pour la gloire de Jésus-Christ, et reposa en lui le vendredi 7 juin, dans la basilique de Saint-Alban, martyr, dont quelques temps auparavant il avait apporté des reliques d'Angleterre en Danemark."
 

La cathédrale Saint-Canut à Odensée. Royaume de Danemark.

Saint Canut a un office particulier dans le bréviaire romain, le 19 janvier.
Ses attributs sont les flèches et la lance, instruments de son supplice.
 
PRIERE

" Le Soleil de justice s'était déjà levé sur votre contrée, Ô saint Roi, et tout votre bonheur était de voir ses rayons illuminer votre peuple. Comme les Mages de l'Orient, vous aimiez à déposer votre couronne aux pieds de l'Emmanuel; et, un jour, vous avez offert jusqu'à votre vie pour son service et pour celui de son Eglise. Mais votre peuple n'était pas digne de vous ; il répandit votre sang, comme l'ingrat Israël versera le sang du Juste qui nous est né, et dont nous honorons, en ces jours, l'aimable enfance. Cette mort violente que vous avez rendue profitable à votre peuple, en l'offrant pour ses péchés, offrez-la encore pour le royaume que vous avez illustré.

Depuis longtemps, le Danemark a oublié la vraie foi ; priez, afin qu'il la recouvre bientôt. Obtenez pour les princes qui gouvernent les Etats chrétiens, la fidélité à leurs devoirs, le zèle de la justice, et le respect de la liberté de l'Eglise. Demandez aussi pour nous au divin Enfant le dévouement dont vous étiez animé pour sa gloire ; et si nous n'avons pas, comme vous, une couronne à mettre à ses pieds, aidez-nous à lui soumettre nos cœurs."

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jeudi, 18 janvier 2024

18 janvier. Chaire de saint Pierre à Rome.

- Chaire de saint Pierre à Rome.
 
" Tu es Petrus, et super hanc Petram aedificabo Ecclesiam meam. Et portae inferi non praevalebunt adversus eam. Et tibi dabo claves regni coelorum : et quodcumque ligaveris super terram, erit ligatum et in coelis, et quodcumque solveris super terram, erit solutum et in coelis."
" Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. Et je te donnerai les clefs du royaume des cieux : tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux."
Notre Seigneur Jésus-Christ à saint Pierre. Saint Matthieu, XVI, 18-19.
 

Roman de Dieu et de sa mère. XVe.

L’archange avait annoncé à Marie que le Fils qui naîtrait d'elle serait Roi, et que son Royaume n'aurait point de fin ; instruits par l'Etoile, les Mages vinrent, du fond de l'Orient, chercher ce Roi en Bethléhem ; mais il fallait une Capitale à ce nouvel Empire ; et parce que le Roi qui devait y établir son trône devait aussi, selon les conseils éternels, remonter bientôt dans les cieux, il était nécessaire que le caractère visible de sa Royauté reposât sur un homme qui fût, jusqu'à la fin des siècles, le Vicaire du Christ.

Pour cette sublime lieutenance, l'Emmanuel choisit Simon, dont il changea le nom en celui de Pierre, déclarant expressément que l'Eglise tout entière reposerait sur cet homme, comme sur un rocher inébranlable. Et comme Pierre devait aussi terminer par la croix ses destinées mortelles, le Christ prenait l'engagement de lui donner des successeurs dans lesquels vivraient toujours Pierre et son autorité.

Mais quelle sera la marque de cette succession, dans l'homme privilégié sur qui doit être édifiée l'Eglise jusqu'à la fin des temps ? Parmi tant d'Evêques, quel est celui dans lequel Pierre se continue ? Ce Prince des Apôtres a fondé et gouverné plusieurs Eglises; mais une seule, celle de Rome, a été arrosée de son sang ; une seule, celle de Rome, garde sa tombe : l'Evêque de Rome est donc le successeur de Pierre, et, par là même, le Vicaire du Christ. C'est de lui, et non d'un autre, qu'il est dit : " Sur toi je bâtirai mon Eglise ". Et encore : " Je te donnerai les Clefs du Royaume des cieux ". Et encore : " J'ai prié pour toi, pour que ta foi ne défaille pas ; confirme tes frères ". Et encore : " Pais mes agneaux; pais mes brebis ".


Chaire de saint Pierre.

L'hérésie protestante l'avait si bien compris, que longtemps elle s'efforça de jeter des doutes sur le séjour de saint Pierre à Rome, croyant avec raison anéantir, par ce stratagème, l'autorité du Pontife Romain, et la notion même d'un Chef dans l'Eglise. La science historique a fait justice de cette puérile objection ; et depuis longtemps, les érudits de la Réforme sont d'accord avec les catholiques sur le terrain des faits, et ne contestent plus un des points de l'histoire les mieux établis par la critique.

Ce fut pour opposer l'autorité de la Liturgie à une sr étrange prétention des Réformateurs, que Paul IV, en 1558, rétablit au dix-huit janvier l'antique fête de la Chaire de saint Pierre à Rome ; car, depuis de longs siècles, l'Eglise ne solennisait plus le mystère du Pontificat du Prince des Apôtres qu'au vingt-deux février. Désormais, ce dernier jour fut assigné au souvenir de la Chaire d'Antioche, la première que l'Apôtre ait occupée.

Aujourd'hui donc, la Royauté de notre Emmanuel brille de tout son éclat ; et les enfants de l'Eglise se réjouissent de se sentir tous frères et concitoyens d'un même Empire, en célébrant la gloire de la Capitale qui leur est commune à tous. Lorsque, regardant autour d'eux, ils aperçoivent tant de sectes divisées et dépourvues de toutes les conditions de la durée, parce qu'un centre leur manque, ils rendent grâces au Fils de Dieu d'avoir pourvu à la conservation de son Eglise et de sa Vérité, par l'institution d'un Chef visible dans lequel Pierre se continue à jamais, comme le Christ lui-même dans Pierre. Les hommes ne sont plus des brebis sans pasteur ; la parole dite au commencement se perpétue, sans interruption, à travers les âges ; la mission première n'est jamais suspendue, et, par le Pontife Romain, la fin des temps s'enchaîne à l'origine des choses.

" Quelle consolation aux enfants de Dieu !" S'écrie a Bossuet, dans le Discours sur l'Histoire universelle ; " mais quelle conviction de la vérité quand ils voient que d'Innocent XI, qui remplit aujourd'hui (1681) si dignement le premier Siège de l'Eglise, on remonte, sans interruption, jusqu'à saint Pierre, établi par Jésus-Christ prince des Apôtres : d'où, en reprenant les Pontifes qui ont servi sous la Loi, on va jusqu'à Aaron et jusqu'à Moïse ; de là jusqu'aux Patriarches et jusqu'à l'origine du monde !


Bible historiale. Guiard des Moulins. Saint-Omer. XIVe.

Pierre, en entrant dans Rome, vient donc accomplir et expliquer les destinées de cette cité maîtresse ; il vient lui promettre un Empire plus étendu encore que celui qu'elle possède. Ce nouvel Empire ne s'établira point parla force, comme le premier. De dominatrice superbe des nations qu'elle avait été jusqu'alors, Rome, parla charité, devient Mère des peuples; mais, tout pacifique qu'il est, son Empire n'en sera pas moins durable."

Ecoutons saint Léon le Grand, dans un de ses plus magnifiques Sermons, raconter, avec toute la pompe de son langage, l'entrée obscure, et pourtant si décisive, du Pêcheur de Génésareth dans la capitale du paganisme :

" Le Dieu bon, juste et tout-puissant, qui n'a jamais dénié sa miséricorde au genre humain, et qui, par l'abondance de ses bienfaits, a fourni à tous les mortels les moyens de parvenir à la connaissance de son Nom, dans les secrets conseils de son immense amour, a pris en pitié l'aveuglement volontaire des hommes, et la malice qui les précipitait dans la dégradation, et il leur a envoyé son Verbe, qui lui est égal et coéternel. Or, ce Verbe, s'étant fait chair, a si étroitement uni la nature divine à la nature humaine , que l'abaissement de la première jusqu'à notre abjection est devenu pour nous le principe de l'élévation la plus sublime.

Mais, afin de répandre dans le monde entier les effets de cette inénarrable faveur, la Providence a préparé l'Empire romain, et en a si loin reculé les limites, qu'il embrassât dans sa vaste enceinte l'universalité des nations. C'était, en effet, une chose merveilleusement utile à e l'accomplissement de l'œuvre divinement projetée, que les divers royaumes formassent la confédération d'un Empire unique, afin que la prédication générale parvînt plus vite à l'oreille des peuples, rassemblés qu'ils étaient déjà sous le régime d'une seule cité.

Cette cité, méconnaissant le divin auteur de ses destinées, s'était faite l'esclave des erreurs de tous les peuples, au moment même où elle les tenait presque tous sous ses lois, et croyait a encore posséder une grande religion, parce qu'elle ne rejetait aucun mensonge ; mais plus durement était-elle enlacée par le diable, plus merveilleusement fut-elle affranchie par le Christ.


Antiphonaire à l'usage de la collégiale Saint-Pierre d'Angers. XVe.

En effet, lorsque les douze Apôtres, après avoir reçu par l'Esprit-Saint le don de parler toutes les langues, se furent distribué les diverses parties de la terre, et qu'ils eurent pris possession de ce monde qu'ils devaient instruire de l'Evangile, le bienheureux Pierre, Prince de l'ordre Apostolique, reçut en partage la citadelle de l'Empire romain, afin que la Lumière de vérité, qui était manifestée pour le salut de toutes les nations, se répandît plus efficacement, rayonnant du centre de cet Empire sur le monde entier.

Quelle nation, en effet, ne comptait pas de nombreux représentants dans cette ville ? Quels peuples eussent jamais pu ignorer ce que Rome avait appris ? C'était là que devaient être écrasées les opinions de la philosophie ; là que devaient être dissipées les vanités de la sagesse terrestre ; là que le culte des démons devait être confondu ; là enfin devait être détruite l'impiété de tous les sacrifices, dans ce lieu même où une superstition habile avait rassemblé tout ce que les diverses erreurs avaient jamais produit.

Est-ce que tu ne crains pas, bienheureux Apôtre Pierre, de venir seul dans cette ville ? Paul l'Apôtre, le compagnon de ta gloire, est encore occupé à fonder d'autres Eglises ; et toi, tu t'enfonces dans cette forêt peuplée de bêtes farouches, tu marches sur cet océan dont la profondeur est pleine de tempêtes, avec plus de courage qu'au jour où tu marchais sur les eaux. Tu ne redoutes pas Rome, la maîtresse du monde, toi qui, dans la maison de Caïphe, avais tremblé à la voix d'une servante de ce prêtre. Est-ce que le tribunal de Pilate, ou la cruauté des Juifs, étaient plus à craindre que la puissance d'un Claude ou la férocité d'un Néron ? Non ; mais la force de ton amour triomphait de la crainte, et tu n'estimais pas redoutables ceux que tu avais reçu la charge d'aimer. Sans doute, tu avais déjà conçu le sentiment de cette intrépide charité, au jour où la profession de ton amour envers le Seigneur fut sanctionnée par le mystère d'une triple interrogation. Aussi n'exigea-t-on autre chose de ton âme, si ce n'est que, pour paître les brebis de Celui que tu aimais, ton cœur dépensât pour elles la substance dont il était rempli.

Ta confiance, il est vrai, devait s'accroître au souvenir des miracles si nombreux que tu avais opérés, de tant de précieux dons de la grâce que a tu avais reçus, et des expériences si multipliées de la vertu qui résidait en toi. Déjà tu avais instruit les peuples de la Circoncision, qui avaient cru à ta parole ; déjà tu avais fondé l'Eglise d'Antioche, où commença d'abord la dignité du nom Chrétien ; déjà tu avais soumis aux lois de la prédication évangélique le Pont, a la Galatie, la Cappadoce, l'Asie et la Bithynie ; et alors, sûr du progrès de ton œuvre et de la durée de ta vie, tu vins élever sur les remparts de Rome le trophée de la Croix du Christ, là même où les conseils divins avaient préparé pour toi l'honneur de la puissance suprême, et la gloire du martyre."

L'avenir du genre humain par l'Eglise est donc pour jamais fixé à Rome, et les destinées de cette ville sont pour toujours enchaînées à celles du Pontife immortel. Divisés, de races, de langages, d'intérêts, nous tous, enfants de l'Eglise, nous sommes Romains dans l'ordre de la religion; et ce titre de Romains nous unit par Pierre à Jésus-Christ, et forme le lien de la grande fraternité des peuples et des individus catholiques.


Bible historiale. Guiard des Moulins. XVe.

Notre Seigneur Jésus-Christ par Pierre, Pierre par son successeur, nous régissent dans l'ordre du gouvernement spirituel. Tout pasteur dont l'autorité n'émane pas du Siège de Rome, est un étranger, un intrus. De même, dans l'ordre de la croyance, Jésus-Christ par Pierre, Pierre par son successeur, nous enseignent la doctrine divine, et nous apprennent à discerner la vérité de l'erreur. Tout Symbole de foi, tout jugement doctrinal, tout enseignement, contraire au Symbole, aux jugements, aux enseignements du Siège de Rome, est de l'homme et non de Dieu, et doit être repoussé avec horreur et anathème. En la fêle de la Chaire de saint Pierre à Antioche, nous parlerons du Siège Apostolique comme source unique de la puissance de gouvernement dans l'Eglise ; aujourd'hui, honorons la Chaire romaine comme la source et la règle de notre foi.

Empruntons encore ici le sublime langage de saint Léon, et interrogeons-le sur les titres de Pierre à l'infaillibilité de l'enseignement. Nous apprendrons de ce grand Docteur à peser la force des paroles que le Christ prononça pour être le titre suprême de notre foi, dans toute la durée des siècles :

" Le Verbe fait chair était venu habiter au milieu de nous, et le Christ s'était dévoué tout entier à la réparation du genre humain. Rien qui n'eût été réglé par sa sagesse, rien qui se fût trouvé au-dessus de son pouvoir. Les éléments lui obéissaient, les Esprits angéliques étaient à ses ordres; le mystère du salut des hommes ne pouvait manquer son effet ; car Dieu, dans son Unité et dans sa Trinité, daignait s'en occuper lui-même. Cependant de ce monde tout entier, Pierre seul est choisi, pour être préposé à la vocation de toutes les nations, à tous les Apôtres, à tous les Pères de l'Eglise. Dans le peuple de Dieu, il y aura plusieurs prêtres et plusieurs pasteurs; mais Pierre régira, par une puissance qui lui est propre, tous ceux que le Christ régit lui-même d'une manière plus élevée encore. Quelle grande et admirable participation de son pouvoir Dieu a daigné donner à cet homme, ô frères chéris ! S'il a voulu qu'il y eût quelque chose de commun entre lui et les autres pasteurs, il l'a fait à la condition de donner à ceux-ci, par Pierre, tout ce qu'il voulait bien ne pas leur refuser.


Heures à l'usage de Rome. XVe.

Le Seigneur interroge tous les Apôtres sur l'idée que les hommes ont de lui. Les Apôtres sont d'accord, tant qu'il ne s'agit que d'exposer les différentes opinions de l'ignorance humaine. Mais quand le Christ en vient à demander à ses disciples leur propre sentiment, celui-là est le premier à confesser le Seigneur, qui est le premier dans la dignité apostolique. C'est lui qui dit :
" Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant."
Jésus lui répond :
" Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ni la chair ni le sang ne t'ont révélé ces choses, mais mon Père qui est dans les cieux. C'est-à-dire : Oui, tu es heureux, car mon Père t'a instruit ; les pensées de la terre ne t'ont point induit en erreur, mais l'inspiration du ciel t'a éclairé. Ce n'est ni la chair ni le sang, mais Celui-là même dont je suis le Fils unique, qui m'a fait connaître à toi. Et moi, ajoute-t-il, je te le dis : De même que mon Père t'a dévoilé ma divinité, à mon tour, jeté fais connaître ton excellence. Car tu es Pierre, c'est-à-dire, de même que je suis la Pierre inviolable, la Pierre angulaire qui réunit les deux murs, le Fondement si essentiel que l'on n'en saurait établir un autre : ainsi, toi-même, tu es Pierre, car tu reposes sur ma solidité, et les choses qui me sont propres par la puissance qui est en moi, te sont communes avec moi par la participation que je t'en fais. Et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise ; et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Sur la solidité de cette pierre, je bâtirai le temple éternel ; et mon Eglise, dont le faîte montera jusqu'au ciel, s'élèvera sur la fermeté de cette foi."

La veille de sa Passion, qui devait être une épreuve pour la constance de ses disciples, le Seigneur dit ces paroles :
" Simon, Simon, Satan a demandé à vous cribler comme le froment ; mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Quand tu seras converti , confirme tes frères."
Le péril de la tentation était commun à tous les Apôtres ; tous avaient besoin du secours de la protection divine ; car le diable se proposait de les remuer tous, et de les écraser tous. Cependant le Seigneur ne prend un soin spécial que de Pierre seul ; ses prières sont pour la foi de Pierre, comme si le salut des autres était en sûreté, par cela seul que l'âme de leur Prince n'aura point été abattue. C'est donc sur Pierre que le courage de tous s'appuiera, que le secours de la grâce divine sera ordonné, afin que la solidité que le Christ attribue à Pierre, soit par Pierre conférée aux Apôtres.


Retable de la chaire de saint Pierre. Le Bernin. Rome. XVIIe.

Dans un autre Sermon, l'éloquent Docteur nous fait voir comment Pierre vit et enseigne toujours dans la Chaire Romaine :
" La disposition établie par Celui qui est la Vérité même, persévère donc toujours, et le bienheureux Pierre, conservant la solidité qu'il a reçue, n'a jamais abandonné le gouvernail de l'Eglise. Car tel est le rang qui lui a été donné au-dessus de tous les autres, que, lorsqu'il est appelé Pierre, lorsqu'il est proclamé Fondement, lorsqu'il est constitué Portier du Royaume des cieux, lorsqu'il est établi Arbitre pour lier et délier, avec une telle force dans ses jugements qu'ils sont ratifiés jusque dans les cieux, nous sommes à même de connaître, par le mystère de si hauts titres, le lien qu'il avait avec le Christ. Maintenant, c'est avec plus de plénitude et de puissance qu'il remplit la mission qui lui fut confiée ; et toutes les parties de son office et de sa charge, il les exerce en Celui et avec Celui par qui il a été glorifié.

Si donc, sur cette Chaire, nous faisons quelque chose de bien, si nous décrétons quelque chose de juste, si nos prières quotidiennes obtiennent quelque grâce de la miséricorde de Dieu, c'est par l'effet des œuvres et des mérites de celui qui vit dans son Siège et y éclate par son autorité. Il nous l'a mérité, frères chéris, par cette confession qui, inspirée à son coeur d'Apôtre par Dieu le Père, a dépassé toutes les incertitudes des opinions humaines, et mérité de recevoir cette fermeté de la Pierre que nuls assauts ne pourraient ébranler. Chaque jour, dans toute l'Eglise, c'est Pierre qui dit: Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant ; et toute langue qui confesse le Seigneur est instruite par le magistère de cette voix. C'est cette foi qui triomphe du diable, et brise les liens de ceux t qu'il tenait captifs. C'est elle qui introduit au ciel les fidèles au sortir de ce monde; et les portes de l'enfer ne peuvent prévaloir contre elle. Telle est, en effet, la force divine qui la garantit, que jamais la perversité hérétique ne l'a pu corrompre, ni la perfidie païenne la surmonter."

" Qu'on ne dise donc point, s'écrie Bossuet, dans le Sermon sur l'Unité de l'Eglise, qu'on ne dise point, qu'on ne pense point que ce ministère de saint Pierre finit avec lui : ce qui doit servir de soutien à une Eglise éternelle, ne peut jamais avoir de fin. Pierre vivra dans ses successeurs, Pierre parlera toujours dans sa Chaire : c'est ce que disent les Pères ; c'est ce que confirment six cent trente Evêques, au Concile de Chalcédoine."
 
Et encore :
" Ainsi l'Eglise Romaine est toujours Vierge ; la foi Romaine est toujours la foi de l'Eglise ; on croit toujours ce qu'on a cru, la même voix retentit partout ; et Pierre demeure, dans ses successeurs, le fondement des fidèles. C'est Jésus-Christ qui l'a dit; et le ciel et la terre passeront plutôt que sa parole."

De Concordia Evangelistarum. XIIe.

Tous les siècles chrétiens ont professé cette doctrine de l'infaillibilité du Pontife romain enseignant l'Eglise du haut de la Chaire apostolique. On la trouve enseignée expressément dans les écrits des saints Pères, et les Conciles œcuméniques de Lyon et de Florence se sont énoncés, dans leurs actes les plus solennels, d'une manière assez claire pour ne laisser aucun doute aux chrétiens de bonne foi. Néanmoins, l'esprit d'erreur, à l'aide de sophismes contradictoires, et en présentant sous un faux jour quelques faits isolés et mal compris, essaya, durant une période trop longue, de faire prendre le change aux fidèles d'un pays dévoué d'ailleurs au siège de Pierre. L'influence politique fut la première cause de cette triste scission, que l'orgueil d'école rendit trop durable. Le seul résultat fut d'affaiblir le principe d'autorité dans les contrées où elle régna, et d'y perpétuer la secte janséniste, dont les erreurs avaient été condamnées par le Siège Apostolique. Les hérétiques répétaient, après l'Assemblée de Paris en 1682, que les jugements qui avaient proscrit leurs doctrines, n'étaient pas en eux-mêmes irréformables.

L'Esprit-Saint qui anime l'Eglise a enfin extirpé cette funeste erreur. Dans le Concile du Vatican, il a dicté la sentence solennelle qui déclare que désormais ceux qui refuseraient de reconnaître pour infaillibles les décrets rendus solennellement par le Pontife romain en matière de foi et de morale, ont cessé par là même de faire partie de l'Eglise catholique. C'est en vain que l'enfer a tenté d'entraver les opérations de l'auguste assemblée, et si le Concile de Chalcédoine s'était écrié :
" Pierre a parlé par Léon " ; si le troisième Concile de Constantinople avait répété : " Pierre a parlé par Agathon " ; le Concile du Vatican a proclamé : " Pierre a parlé et parlera toujours par le Pontife romain ".

Remplis de reconnaissance pour le Dieu de vérité qui a daigné élever et garantir de toute erreur la Chaire romaine, nous écouterons avec soumission d'esprit et de cœur les enseignements qui en descendent. Nous reconnaîtrons l'action divine dans la fidélité avec laquelle cette Chaire immortelle a su conserver la vérité sans tache durant dix-huit siècles, tandis que les Sièges de Jérusalem, d'Antioche, d’Alexandrie et de Constantinople ont pu à peine la garder quelques centaines d'années, et sont devenus l'un après l'autre ces chaires de pestilence dont parle le Prophète.


Heures à l'usage d'Autun. XVe.

En ces jours consacrés à honorer l'Incarnation du Fils de Dieu et sa naissance du sein d'une Vierge, rappelons-nous que c'est au Siège de Pierre que nous devons la conservation de ces dogmes qui sont le fondement de notre Religion tout entière. Non seulement Rome nous les a enseignés par les apôtres auxquels elle donna mission de prêcher la foi dans les Gaules ; mais quand les ténèbres de l'hérésie tentèrent de jeter leur ombre sur de si hauts mystères, ce fut Rome encore qui assura le triomphe de la vérité par sa décision souveraine. A Ephèse, où il s'agissait, en condamnant Nestorius, d'établir que la nature divine et la nature humaine, dans le Christ, ne forment qu'une seule personne, et que, par conséquent, Marie est véritablement Mère de Dieu ; à Chalcédoine, où l'Eglise avait à proclamer, contre Eutychès, la distinction des deux natures dans le Verbe incarné, Dieu et homme: les Pères de deux Conciles œcuméniques déclarèrent qu'ils ne faisaient que suivre, dans leur décision, la doctrine qui leur était transmise par les lettres du Siège Apostolique.

Tel est donc le privilège de Rome, de présider par la foi aux intérêts de la vie future, comme elle présida par les armes, durant des siècles, aux intérêts de la vie présente, dans le monde connu alors. Aimons et honorons cette ville Mère et Maîtresse, notre patrie commune ; et, d'un cœur filial, célébrons aujourd'hui sa gloire.

HYMNE

Voici ces admirables strophes où Prudence exprime avec tant de noblesse la prière que fit saint Laurent en faveur de Rome chrétienne, pendant que les charbons ardents dévoraient ses membres sur le gril embrasé :



Bréviaire à l'usage de Besançon. XVe.

" Ô Christ ! Dieu unique, splendeur, vertu du Père, auteur de la terre et des cieux, toi dont la main éleva ces remparts,

Toi qui as placé le sceptre de Rome au-dessus des destinées de l'humanité ! dans tes conseils, tu as voulu que le monde entier cédât à la toge, et se soumit aux armes du Romain,

Afin de réunir sous une loi unique tant de nations divisées de mœurs, de coutumes, de langage et de sacrifices.

Le moment est venu ; le genre humain tout entier a passé sous l'empire de Rémus ; l'unité remplace maintenant la dissemblance des usages.

Ton dessein, Ô Christ, a été d'enlacer l'univers d'une même chaîne sous l'empire du nom Chrétien.

Fais donc, fais chrétienne aujourd'hui, en faveur des Romains qui sont à toi, cette Rome, l'instrument et le centre de l'unité pour les autres villes qui invoquent ton Nom ;

Car c'est en elle que les membres se réunissent dans un seul tout mystérieux.

L'univers a subi la loi de douceur ; que le jour vienne où sa superbe capitale,

Sous ce joug de grâce qui a réuni les races les plus ennemies, adoucisse aussi sa fierté; que Romulus à son tour devienne fidèle, et que Numa s'abaisse devant la foi.

Dans le secret sanctuaire de son foyer, le successeur des Catons vénère honteusement encore les Pénates autrefois chassés de Troie.

Le Sénat honore encore Janus aux deux visages; il persiste à rendre un culte dégoûtant, hérité de ses pères, au dieu Sterculus et au vieux Saturne.

Efface, Ô Christ, ce déshonneur; envoie ton Gabriel montrer aux aveugles fils d'Iule quel est le Dieu véritable.

Déjà, nous Chrétiens, nous possédons le gage assuré de cette espérance ; déjà règnent dans Rome les deux Princes des Apôtres.

L'un, noble instrument de la vocation des Gentils ; l'autre, assis sur la première Chaire, a reçu le soin d'ouvrir et de fermer les portes de l'éternité.

Fuis, adultère, incestueux Jupiter, délivre Rome de ta présence ; fuis et laisse en sa liberté le peuple du Christ.

C'est Paul qui te poursuit ; c'est le sang de Pierre qui crie contre toi; paie maintenant les forfaits de Néron.

Je vois venir un prince, un Empereur serviteur de Dieu ; son zèle s'indignera de voir Rome esclave de ces sacrifices d'ignominie.

Il viendra fermer les temples ; il en scellera les portes d'ivoire. Par son ordre, d'éternels verrous en défendront le seuil.

De ce jour, le marbre ne verra plus l'impur sang des victimes souiller sa blancheur, et les idoles, spectacle désormais innocent , demeureront debout sans hommages."

HYMNE

L'Hymne qui suit est suspendue à la balustrade de la Confession de saint Pierre, dans la Basilique Vaticane, pour l'usage des pèlerins :


Heures à l'usage de Rome. XVe.

" Saint Apôtre, porte-clefs des cieux, secourez-nous par vos prières, rendez-nous accessibles les portes des palais célestes.

Vous avez lavé votre péché dans les larmes abondantes de la pénitence, obtenez que nous aussi lavions des pleurs nos crimes par continuels.

Un Ange vint délier vos chaînes ; vous, daignez nous arracher aux liens criminels qui nous captivent.

Ô pierre solide de l'Eglise, colonne qui ne peut fléchir ! Donnez-nous force et constance ; que l'erreur en nous ne renverse pas la foi.

Protégez Rome que vous avez jadis consacrée par votre sang ; sauvez les nations qui se confient en vous.

Soyez le défenseur de la société des fidèles qui vous honorent ; que la contagion ne vienne pas lui nuire, ni la discorde la diviser.

Détruisez les artifices que l'ancien ennemi a dressés contre nous, comprimez sa fureur atroce, et que sa rage ne s'exerce pas sur nous.

Contre ses assauts furieux, donnez-nous des forces au moment de la mort, afin que, dans ce combat suprême, nous puissions demeurer victorieux.

Amen."

PRIERE

" Nous sommes donc établis sur Jésus-Christ dans notre foi et dans nos espérances, Ô Prince des Apôtres, puisque nous sommes établis sur vous qui êtes la Pierre qu'il a posée. Nous sommes donc les brebis du troupeau de Jésus-Christ, puisque nous vous obéissons comme à notre pasteur. En vous suivant, Ô Pierre, nous sommes donc assurés d'entrer dans le Royaume des cieux, puisque vous en tenez les clefs. Quand nous nous glorifions d'être vos membres, Ô notre Chef, nous pouvons donc nous regarder comme les membres de Jésus-Christ même ; car le Chef invisible de l'Eglise ne reconnaît point d'autres membres que ceux du Chef visible qu'il a établi. De même, quand nous gardons la foi du Pontife Romain, quand nous obéissons à ses ordres, c'est votre foi, Ô Pierre, que nous professons, ce sont vos commandements que nous suivons ; car si le Christ enseigne et régit en vous, vous enseignez et régissez dans le Pontife Romain.


Psautiers et heures à l'usage de Beaune. XIVe.

Grâces soient donc rendues à l'Emmanuel qui n'a pas voulu nous laisser orphelins, mais qui, avant de retourner dans les cieux, a daigné nous assurer, jusqu'à la consommation des siècles, un Père et un Pasteur. La veille de sa Passion, voulant nous aimer jusqu'à la fin, il nous laissa son corps pour nourriture et son sang pour breuvage. Après sa glorieuse Résurrection, au moment de monter à la droite de son Père, ses Apôtres étant réunis autour de lui , il constitua son Eglise comme une immense bergerie, et il dit à Pierre : " Pais mes brebis , pais mes agneaux ". Par ce moyen, Ô Christ, vous assuriez la perpétuité de cette Eglise ; vous établissiez dans son sein l'unité, qui seule pouvait la conserver et la défendre des ennemis du dehors et du dedans. Gloire à vous, architecte divin, qui avez bâti sur la Pierre ferme votre édifice immortel ! Les vents ont soufflé, les tempêtes se sont déchaînées, les flots ont battu avec rage ; mais la maison est demeurée debout, parce qu'elle était assise sur le roc. (Matth. VII, 25.).

Rome ! en ce jour où toute l'Eglise proclame ta gloire, et se félicite d'être bâtie sur ta Pierre, reçois les nouvelles promesses de notre amour, les nouveaux serments de notre fidélité. Toujours tu seras notre Mère et notre Maîtresse, notre guide et notre espérance. Ta foi sera à jamais la nôtre ; car quiconque n'est pas avec toi n'est pas avec Jésus-Christ. En toi tous les hommes sont frères, et tu n'es point pour nous une cité étrangère, ni ton Pontife un souverain étranger. Nous vivons par toi de la vie du cœur et de l'intelligence ; et tu nous prépares à habiter un jour cette autre cité dont tu es l'image, cette cité du ciel dont tu formes l'entrée.

Bénissez, Ô Prince des Apôtres, les brebis confiées à votre garde ; mais souvenez-vous de celles qui sont malheureusement sorties du bercail. Loin de vous, des nations entières que vous aviez élevées et civilisées par la main de vos successeurs, languissent, et ne sentent pas encore le malheur d'être éloignées du Pasteur. Le schisme glace et corrompt les unes ; l'hérésie dévore les autres. Sans le Christ visible dans son Vicaire, le Christianisme devient stérile et peu à peu s'anéantit. Les doctrines imprudentes qui tendent à amoindrir la somme des dons que le Seigneur a conférés à celui qui doit tenir sa place jusqu'au jour de l'éternité, ont trop longtemps desséché les cœurs de ceux qui les professaient; trop souvent elles les ont disposés à substituer le culte de César au service de Pierre. Guérissez tous ces maux, Ô Pasteur suprême ! Accélérez le retour des nations séparées ; hâtez la chute de l'hérésie du seizième siècle ; ouvrez les bras à votre fille chérie, l'Eglise d'Angleterre : qu'elle refleurisse comme aux anciens jours. Ebranlez de plus en plus l'Allemagne et les royaumes du Nord ; que tous ces peuples sentent qu'il n'y a plus de salut pour la foi qu'à l'ombre de votre Chaire. Renversez le colosse monstrueux du Septentrion, qui pèse à la fois sur l'Europe et sur l'Asie, et déracine partout la vraie religion de votre Maître. Rappelez l'Orient à son antique fidélité ; qu'il revoie, après une si longue éclipse, ses Sièges Patriarcaux se relever dans l'unité de la soumission à l'unique Siège Apostolique.



Institution de l'Eglise. Recueil de peintures sacrées.
Illustrateur : Gondar. Ethiopie. XVIIIe.

Nous enfin qui, par la miséricorde divine et par l'effet de votre paternelle tendresse, sommes demeurés fidèles , conservez-nous dans la foi Romaine, dans l'obéissance à votre successeur. Instruisez-nous des mystères qui vous ont été confiés ; révélez-nous ce que le Père céleste vous a révélé à vous-même. Montrez-nous Jésus, votre Maître ; conduisez-nous à son berceau, afin qu'à votre exemple, et sans être scandalisés de ses abaissements, nous ayons le bonheur de lui dire comme vous : Vous êtes le Christ, le Fils du Dieu vivant !"

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mercredi, 17 janvier 2024

17 janvier. Saint Antoine le Grand, abbé, premier père des solitaires d'Egypte. 356.

- Saint Antoine le Grand, abbé, premier père des solitaires d'Egypte. 356.
 
Pape : Saint Libère. Empereur romain d'Orient : Constance II.

" Personne ne saurait se flatter d'entrer dans le royaume des cieux sans avoir passer par la tentation."
Saint Antoine le Grand.


Saint Antoine. Grandes heures d'Anne de Bretagne.
Jean Bourdichon. XVIe.

Aujourd'hui, l'Orient et l'Occident s'unissent pour célébrer le Patriarche des Cénobites, le grand Antoine. Avant lui, la profession monastique existait déjà, comme le démontrent d'irrécusables monuments ; mais il apparaît comme le premier des Abbés, parce que le premier il a établi sous une forme permanente les familles de moines, livrés au service de Dieu, sous la houlette d'un pasteur.

D'abord hôte sublime de la solitude, et fameux par ses combats avec les démons, il a laissé se réunir autour de lui les disciples que ses œuvres merveilleuses et l'attrait de la perfection lui avaient conquis ; et le déserta vu, par lui, commencer les monastères. L'âge des Martyrs touche à sa fin ; la persécution de Dioclétien sera la dernière ; il est temps pour la Providence, qui veille sur l'Eglise, d'inaugurer une milice nouvelle. Il est temps que le caractère du moine se révèle publiquement dans la société chrétienne ; les Ascètes, même consacrés, ne suffisent plus. Les monastères vont s'élever de toutes parts, dans les solitudes et jusque dans les cités, et les fidèles auront désormais sous les yeux, comme un encouragement à garder les préceptes du Christ, la pratique fervente et littérale de ses conseils. Les traditions apostoliques de la prière continuelle et de la pénitence ne s'éteindront pas, la doctrine sacrée sera cultivée avec amour, et l'Eglise ne tardera pas à aller chercher, dans ces citadelles spirituelles, ses plus vaillants défenseurs, ses plus saints Pontifes, ses plus généreux Apôtres.

Car l'exemple d'Antoine inspirera les siècles à venir ; on se souviendra à jamais que les charmes de la solitude et les douceurs de la contemplation ne surent le retenir au désert, et qu'il apparut tout à coup dans les rues d'Alexandrie, au fort de la persécution païenne, pour conforter les chrétiens dans le martyre. On n'oubliera pas non plus que, dans cette autre lutte plus terrible encore, aux jours affreux de l'Arianisme, il reparut dans la grande cité, pour y prêcher le Verbe consubstantiel au Père, pour y confesser la foi de Nicée, et pour soutenir le courage des orthodoxes. Qui pourrait jamais ignorer les liens qui unissaient Antoine au grand Athanase, ou ne pas se rappeler que cet illustre champion du Fils de Dieu visitait cet autre Patriarche, au fond de son désert, qu'il procurait de tous ses moyens l'avancement de l'œuvre monastique, qu'il plaçait dans la fidélité des moines l'espoir du salut de l'Eglise, et qu'il voulut écrire lui-même la vie sublime de son ami ?


Saint Antoine au désert. Maître de l'Observance. XVe.

C'est dans cet admirable récit qu'on apprend à connaître Antoine ; c'est là que se révèlent la grandeur et la simplicité de cet homme qui fut toujours si près de Dieu. Agé de dix-huit ans, déjà héritier d'une fortune considérable, il entend lire à l'église un passage de l'Evangile où notre Seigneur conseille à celui qui veut tendre à la vie parfaite de se désapproprier de tous les biens terrestres. Il ne lui en faut pas davantage ; aussitôt il se dessaisit de tout ce qu'il possède, et se fait pauvre volontaire pour toute sa vie.

L'Esprit-Saint le pousse alors vers la solitude, où les puissances infernales ont dressé toutes leurs batteries pour faire reculer le soldat de Dieu ; on dirait que Satan a compris que le Seigneur a résolu de se bâtir une cité au désert, et qu'Antoine est envoyé pour en dresser les plans. Alors commence une lutte corps à corps avec les esprits de malice, et le jeune Egyptien demeure vainqueur à force de souffrances. Il a conquis cette nouvelle arène dans laquelle se consommera la victoire du christianisme sur le Prince du monde.

Après vingt ans de combats qui l'ont aguerri, son âme s'est fixée en Dieu ; et c'est alors qu'il est révélé au monde. Malgré ses efforts pour demeurer caché, il lui faut répondre aux hommes qui viennent le consulter et demander ses prières ; des disciples se groupent autour de lui, et il devient le premier des Abbés. Ses leçons sur la perfection chrétienne sont reçues avec avidité ; son enseignement est aussi simple que profond, et il ne descend des hauteurs de sa contemplation que pour encourager les âmes. Si ses disciples lui demandent quelle est la vertu la plus propre à déjouer les embûches des démons, et à conduire sûrement l'âme à la perfection, il répond que cette vertu principale est la discrétion.


Saint Antoine battu par les démons. Francesco di Cenni. XIVe.

Les chrétiens de toute condition accourent pour contempler cet anachorète dont la sainteté et les miracles font bruit dans tout l'Orient. Ils s'attendent aux émotions d'un spectacle, et ils ne voient qu'un homme d'un abord aisé , d'une humeur douce et agréable. La sérénité de ses traits reflète celle de son âme. Il ne témoigne ni inquiétude de se voir environné de la foule, ni vaine complaisance des marques d'estime et de respect qu'on lui prodigue ; car son âme, dont toutes les passions sont soumises, est devenue l'habitation de Dieu.

Il n'est pas jusqu'aux philosophes qui veulent explorer la merveille du désert. Les voyant venir, Antoine leur adresse le premier la parole :
" Pourquoi donc, Ô philosophes, leur dit-il, avez-vous pris tant de peines pour venir visiter un insensé ?"
Déconcertés d'un tel accueil, ces hommes lui répondirent qu'ils ne le croyaient pastel, mais qu'ils étaient au contraire persuadés de sa haute sagesse.
" A ce compte, reprit Antoine, si vous me croyez sage, imitez ma sagesse."
Saint Athanase ne nous apprend pas si la conversion fut le résultat de leur visite. Mais il en vint d'autres qui osèrent attaquer, au nom de la raison, le mystère d'un Dieu incarné et crucifié. Antoine sourit en les entendant débiter leurs sophismes et finit par leur dire :
" Puisque vous êtes si bien établis sur la dialectique, répondez-moi, je vous prie : A quoi doit-on plutôt croire quand il s'agit de la connaissance de Dieu, ou à l'action efficace de la foi, ou aux arguments de la raison ?
- A l'action efficace de la foi, répondirent-ils.
- Eh bien ! reprit Antoine, pour vous montrer la puissance de notre foi, voici des possédés du démon, guérissez-les avec vos syllogismes ; ou si vous ne le pouvez, et que j'y parvienne par l'opération de la foi, et au nom de Jésus-Christ, avouez l'impuissance de vos raisonnements, et rendez gloire à la croix que vous avez osé mépriser."
Antoine fit trois fois le signe de la croix sur ces possédés, et invoqua le nom de Jésus sur eux : aussitôt ils furent délivrés.


La tentation de saint Antoine. Maître du Sermon d'Eglise. XVe.

Les philosophes étaient dans la stupeur et gardaient le silence.
" N'allez pas croire, leur dit le saint Abbé, que c'est par ma propre vertu que j'ai délivré ces possédés ; c'est uniquement par celle de Jésus-Christ. Croyez aussi en lui, et vous éprouverez que ce n'est pas la philosophie, mais une foi simple et sincère qui fait opérer les miracles."
 
On ignore si ces hommes finirent par embrasser le christianisme ; mais l'illustre biographe nous apprend qu'ils se retirèrent remplis d'estime et d'admiration pour Antoine, et avouèrent que leur visite au désert n'avait pas été pour eux sans utilité.

Cependant le nom d'Antoine devenait de plus en plus célèbre et parvenait jusqu'à la cour impériale. Constantin et les deux princes ses fils lui écrivirent comme à un père, implorant de lui la faveur d'une réponse. Le saint s'en défendit d'abord ; mais ses disciples lui ayant représenté que les empereurs après tout étaient chrétiens, et qu'ils pourraient se tenir offensés de son silence, il leur écrivit qu'il était heureux d'apprendre qu'ils adoraient Jésus-Christ, et les exhorta de ne pas faire tant d'état de leur pouvoir, qu'ils en vinssent à oublier qu'ils étaient hommes. Il leur recommanda d'être cléments, de rendre une exacte justice, d'assister les pauvres et de se souvenir toujours que Jésus-Christ est le seul roi véritable et éternel.

Ainsi écrivait cet homme qui était né sous la persécution de Décius, et qui avait bravé celle de Dioclétien : entendre parler de Césars chrétiens, lui était une chose nouvelle. Il disait au sujet des lettres de la cour de Constantinople :
" Les rois de la terre nous ont écrit ; mais qu'est-ce que cela doit être pour un chrétien ? Si leur dignité les élève au-dessus des autres, la naissance et la mort ne les rendent-elles pas égaux à tous ? Ce qui doit nous émouvoir bien davantage et enflammer notre amour pour Dieu, c'est la pensée que ce Maître souverain a non seulement daigné écrire une loi pour les hommes, mais qu'il leur a aussi parlé par son propre Fils."


La tentation de saint Antoine. Pieter Huys. Flandres. XVIe.

Cependant, cette publicité donnée à sa vie fatiguait Antoine, et il lui tardait d'aller se replonger dans le désert, et de se retrouver face à face avec Dieu. Ses disciples étaient formés, sa parole et ses œuvres les avaient instruits ; il les quitta secrètement, et ayant marché trois jours et trois nuits, il arriva au mont Colzim, où il reconnut la demeure que Dieu lui avait destinée. Saint Jérôme fait, dans la Vie de saint Hilarion, la description de cette solitude.
" Le roc, dit-il, s'élève à la hauteur de mille pas : de sa base s'échappent des eaux dont le sable boit une partie ; le reste descend en ruisseau, et son cours est bordé d'un grand nombre de palmiers qui en font une oasis aussi commode qu'agréable à l'œil."
Une étroite anfractuosité de la roche servait d'abri à l'homme de Dieu contre les injures de l'air.

L'amour de ses disciples le poursuivit, et le découvrit encore dans cette retraite lointaine ; ils venaient souvent le visiter et lui apporter du pain. Voulant leur épargner cette fatigue, Antoine les pria de lui procurer une bêche, une cognée et un peu de blé, dont il sema un petit terrain. Saint Hilarion, qui visita ces lieux après la mort du grand patriarche, était accompagné des disciples d'Antoine qui lui disaient avec attendrissement :
" Ici, il chantait les psaumes ; là, il s'entretenait avec Dieu dans l'oraison ; ici, il se livrait au travail ; là, il prenait du repos, lorsqu'il se sentait fatigué ; lui-même a planté cette vigne et ces arbustes, lui-même a disposé cette aire, lui-même a creusé ce réservoir avec beaucoup de peines pour l'arrosement du jardin."
 
Ils racontèrent au saint, en lui montrant ce jardin, qu'un jour des ânes sauvages étant venus boire au réservoir, se mirent à ravager les plantations. Antoine commanda au premier de s'arrêter, et lui donnant doucement de son bâton dans le flanc, il lui dit :
" Pourquoi manges-tu ce que tu n'as pas semé ?"
Ces animaux s'arrêtèrent soudain, et depuis ils ne firent plus aucun dégât.


Saint antoine recevant l'habit d'un ange.
Hymnes et prières. Ethiopie. XVIIe.

Nous nous laissons aller au charme de ces récits ; il faudrait un volume entier pour les compléter. De temps en temps, Antoine descendait de sa montagne, et venait encourager ses disciples dans les diverses stations qu'ils avaient au désert. Une fois même il alla visiter sa sœur dans un monastère de vierges, où il l'avait placée, avant de quitter lui-même le monde. Enfin, étant parvenu à sa cent cinquième année, il voulut voir encore les moines qui habitaient la première montagne de la chaîne de Colzim, et leur annonça son prochain départ pour la patrie.

A peine de retour à son ermitage, il appela les deux disciples qui le servaient depuis quinze ans, à cause de l'affaiblissement de ses forces, et il leur dit :
" Mes fils bien-aimés, voici l'heure où, selon le langage de la sainte Ecriture, je vais entrer dans la voie de mes pères. Je vois que le Seigneur m'appelle, et mon cœur brûle du désir de s'unir à lui dans le ciel. Mais vous, mes fils, les entrailles de mon âme, n'allez pas perdre, par un relâchement désastreux, le fruit du travail auquel vous vous êtes appliqués depuis tant d'années. Représentez-vous chaque jour à vous-mêmes que vous ne faites que d'entrer au service de Dieu et d'en pratiquer les exercices : par ce moyen, votre bonne volonté sera plus énergique, et ira toujours croissant. Vous savez quelles embûches nous tendent les démons. Vous avez été témoins de leurs fureurs, et aussi de leur faiblesse. Attachez-vous inviolablement à l'amour de Jésus-Christ ; confiez-vous à lui entièrement, et vous triompherez de la malice de ces esprits pervers. N'oubliez jamais les divers enseignements que je vous ai donnés ; mais je vous recommande surtout de penser que chaque jour vous pouvez mourir."


La tentation de saint Antoine. Cornelis Massys. XVIe.

Il leur rappela ensuite l'obligation de n'avoir aucun commerce avec les hérétiques, et demanda que son corps fût enseveli dans un lieu secret, dont eux seuls auraient connaissance.
" Quant aux habits que je laisse, ajouta-t-il, en voici la destination : vous donnerez à l'évêque Athanase une de mes tuniques, avec le manteau qu'il m'avait apporté neuf, et que je lui rends usé."
C'était un second manteau que le grand docteur avait donnée Antoine, celui-ci ayant disposé du premier pour ensevelir le corps de l'ermite Paul.
"Vous donnerez, reprit le saint, l'autre tunique à l'évêque Sérapion, et vous garderez pour vous mon cilice."
Puis, sentant que le dernier moment était arrivé, il se tourna vers les deux disciples :
" Adieu, leur dit-il, mes fils bien-aimés; votre Antoine s'en va, il n'est plus avec vous."

C'est avec cette simplicité et cette grandeur que la vie monastique s'inaugurait dans les déserts de l'Egypte, pour rayonner de là dans l'Eglise entière ; mais à qui ferons-nous hommage de la gloire d'une telle institution, à laquelle seront désormais attachées les destinées de l'Eglise, toujours forte quand l'élément monastique triomphe, toujours affaiblie quand il est en décadence ? Qui inspira à Antoine et à ses disciples l'amour de cette vie cachée et pauvre, mais en même temps si féconde, sinon, encore une fois, le mystère des abaissements du Fils de Dieu ? Que tout l'honneur en revienne donc à notre Emmanuel, anéanti sous les langes, et cependant tout rempli de la force de Dieu.


Saint Antoine et l'abbé trop sévère.
Fleur des histoires. Jean Mansel. XVe.

Antoine naquit en Egypte de parents nobles et chrétiens, qu'il perdit dès sa jeunesse. Entrant un jour dans une Eglise, il entendit lire ces paroles de l'Evangile :
" Si vous voulez être parfait, allez et vendez tout ce que vous avez, et donnez-le aux pauvres."
Il pensa que ces paroles s'adressaient à lui, et crut devoir obéir à la lettre au Christ notre Seigneur. Il vendit donc son bien, et en distribua tout l'argent aux pauvres. Dégagé de cet embarras, il résolut de mener sur la terre une vie céleste. Mais, pour descendre dans une arène si périlleuse, il jugea qu'il devait adjoindre au bouclier de la foi, dont il était armé, le secours des autres vertus, et il se prit d'une telle ardeur pour les acquérir, que tous ceux en qui il en voyait briller quelqu'une, il s'appliquait aussitôt à les imiter.

Nul ne surpassa jamais sa continence et sa vigilance. Il dépassait tous les autres en patience, en mansuétude, en miséricorde, en humilité, dans le travail et dans l'étude des divines Ecritures. Il avait une telle horreur de l'approche et des discours des hérétiques et des schismatiques, principalement des Ariens, qu'il ne voulait pas même qu'on les abordât. Il couchait à terre, lorsqu'il était contraint de prendre quelque sommeil. Il se portait au jeûne avec tant d'ardeur qu'il ne mangeait que du pain avec du sel, et ne buvait que de l'eau ; encore ne prenait-il cette nourriture et ce breuvage qu'après le coucher du soleil ; souvent même il s'abstenait de nourriture pendant deux jours, et très souvent il passait la nuit en prières. Antoine, étant devenu ainsi un vaillant soldat de Dieu, fut attaqué de diverses tentations par l'ennemi du genre humain ; mais le très saint jeune homme en triomphait par le jeûne et par la prière. Toutefois, après de nombreuses victoires sur Satan, Antoine ne se croyait pas encore en sûreté ; car il connaissait les innombrables artifices que le diable emploie pour nuire.

C'est pourquoi il se retira dans une vaste solitude de l'Egypte, où, avançant tous les jours dans la perfection chrétienne, il en vint à mépriser les démons, dont les assauts étaient d'autant plus violents qu'Antoine se montrait plus fort dans la résistance ; jusque-là qu'il leur reprochait leur faiblesse. Souvent, pour animer ses disciples à combattre contre le diable , et pour leur apprendre par quelles armes ils le pourraient vaincre, il leur disait :
" Croyez-moi, mes Frères, Satan a redoute les veilles, les prières, les jeûnes, la pauvreté volontaire, la miséricorde, l'humilité, mais surtout l'ardent amour pour notre Seigneur Jésus-Christ, dont la croix lui est si redoutable, que le seul signe de cette croix le terrasse et le met en fuite."

Il devint lui-même si formidable aux démons, qu'un grand nombre de possédés en Egypte furent délivrés par la seule invocation du nom d'Antoine. La renommée de sa sainteté était si grande, que Constantin le Grand et ses fils lui écrivirent pour se recommander à ses prières. Enfin, âgé de cent cinq ans, ayant une infinité d'imitateurs du genre de vie qu'il avait institué, il assembla ses moines , et, après les avoir instruits des règles les plus parfaites de la vie chrétienne, illustre par sa sainteté et ses miracles, il alla au ciel, le seize des calendes de février.

SEQUENCE

Le moyen âge des Eglises d'Occident nous a légué, dans les anciens Missels, plusieurs Proses en l'honneur de saint Antoine. Comme elles sont assez peu remarquables, nous n'en donnerons ici qu'une seule :


Saint Antoine faisant l'aumône.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

" Chantons en pieux accords, et, par dévotes louanges,célébrons Antoine.

Exaltons le Saint de Dieu, et honorons en ses Saints l'auteur de toutes choses.

Antoine foule aux pieds la fleur du monde, et ses trésors et ses honneurs, pour obéir à l'Evangile.

Il s'enfuit au désert, pour ne pas courir au hasard, en cette arène de la vie.

Sa vie, à lui, fut admirable : comme ermite, il resplendit de gloire ; mais voici que l'ennemi cauteleux

Livre bataille ; Antoine subit de rudes et fréquents assauts ; mais il n'est point abattu par le choc du diable.

A grands coups il est flagellé, et les démons impitoyables le déchirent horriblement.

Mais la lumière brille au ciel, et dans les nues a résonné l'éclatante voix de Dieu :

Parce que vaillamment tu as combattu dans la lutte, ton nom sera connu en toute contrée.

Tout l'univers te proclamera ; pour repousser les maladies ardentes, partout tu seras invoqué.

Nous voyons cet oracle accompli, Ô Antoine ! et le monde entier rempli de ton nom.

Toute gent dévote t'implore et t'offre ses vœux de reconnaissance, pour tes puissants bienfaits.

Tantôt sous la forme d'une femme séduisante, tantôt sous l'apparence d'un or précieux,

Le démon lui tend des pièges. Fourbe, à quoi bon tant d'audace, pour succomber dans la lutte ?

Mille fraudes, mille astuces sont vaines ; à lui seul, il fait reculer l'enfer frémissant.

Devant ce soldat vétéran, sous sa robuste main, l'ennemi tremble et grince des dents.

Sans cuirasse pour protéger sa poitrine, l'athlète a tenu tête à un pareil champion.

De l'eau pour boisson, la terre pour lit : ce sont là ses armes, et il est vainqueur.

Des herbes pour nourriture, des feuilles de palmier pour vêtement, des bêtes féroces pour compagnons dans sa solitude.

Des prières assidues, un travail sans relâche, un sommeil court ont éteint les feux de la volupté.

Il confond les Ariens et les philosophes profanes ; il visite Paul, et ce voyage n'est ni vain ni superflu.

Il le trouve encore vivant, et voit sa sainte âme s'envoler aux cieux, laissant son corps à la terre.

Maintenant, Ô Antoine, tu jouis de la gloire dans l'empire de la lumière : laisse émouvoir tes compatissantes entrailles sur nous, courbés sous le poids de la chair.

Et pour nous arracher à la mort de la terrible géhenne, tends-nous la main ; défends-nous du feu ardent, et procure-nous la gloire après le trépas.

Amen."

XVII DIE JANUARII

L'Eglise Grecque procède avec enthousiasme à la louange de saint Antoine, dans ses Menées, dont nous avons extrait les strophes suivantes :


Saint Antoine battu par les démons. Sano di Pietro. XVe.

" Quand tu t'enfermas, plein de joie, dans un sépulcre, Ô Père, pour l'amour du Christ, tu y souffris avec courage les assauts des démons ; tu repoussas, par la prière et l'amour, leurs tentations plus faibles qu'une fumée ; alors, les Anges applaudirent et crièrent: Gloire à Celui qui te fortifie, Antoine !

Tu parus, Ô sage, comme un autre Elie, ayant sous toi des disciples célèbres, nouveaux Elisées ; céleste père, enlevé comme sur un char, tu leur laissas ton douta le esprit ; maintenant qu'ils sont ta gloire, tu te souviens, heureux Antoine, de tous ceux qui célèbrent avec amour ta vénérable solennité."


Saint Antoine battu par les démons. Heures à l'usage de Paris. XIVe.
 
PRIERE
 
Honorons Antoine, Ange sur la terre, homme de Dieu dans le ciel, ornement du monde, la fleur des hommes vertueux, la gloire des Ascètes ; planté dans la maison du Seigneur, il a fleuri dans la justice ; et, comme un cèdre au désert, il a multiplié le troupeau des brebis spirituelles du Christ, dans la sainteté et la justice :

" Ô homme illuminé des rayons de l'Esprit, quand le divin amour te consuma et fit envoler ton âme dans la région sublime et désirable de l'amour, tu méprisas la chair et le sang, et devenu étranger au monde, tu fus uni par une ascèse profonde et un doux repos à Celui qui te remplissait; alors tu cherchais les vrais biens, et tu resplendissais comme une étoile pour illuminer nos âmes, Ô Antoine !

Toi, qui as brisé les flèches et les traits des démons par l'amour du divin Esprit, et qui as dévoilé à tous leur malice et leurs embûches , tout éclatant d'enseignements divins, de divines illustrations, tu es devenu le très brillant flambeau des Moines, la première gloire du désert, le suprême médecin des âmes malades, l'archétype des vertus, Ô Antoine, notre père !

Professant sur la terre la vie ascétique, tu as émoussé, ô Antoine, tous les traits des passions dans le torrent de tes larmes ; échelle divine et vénérable qui nous élèves jusqu'aux cieux, tu guéris les infirmités des passions de ceux qui, avec foi, crient vers toi : Etoile dorée de l'Orient, réjouis-toi, lampe et pasteur des Moines ; réjouis-toi, homme digne de louanges, disciple du désert, colonne inébranlable de l'Eglise; réjouis-toi, chef illustre et libérateur des âmes errantes ; réjouis-toi, Ô notre gloire, brillant honneur de l'univers !

Tu es devenu comme une colonne éclatante et appuyée sur les vertus, comme une nuée qui porte l'ombre, toi qui as été préposé à ceux qui, habitant le désert, contemplent Dieu dans les cieux. Tu as divisé la mer des passions par le bois de la croix ; tu as rendu facile la voie difficile et ardue qui mène au ciel, et découvert, ô très heureux, l'éternel héritage ; toi qui assistes au trône du Christ avec les purs esprits, supplie-le d'accorder à nos âmes une grande miséricorde.

Saint Antoine le Grand. Jacopo Carrucci. XVIe.

Laissant là les agitations de la vie, portant ta croix sur les épaules, tu t'es confié tout entier au Seigneur , devenu étranger à la chair et au monde, tu as été, Ô Père, le familier de l'Esprit-Saint ; c'est pourquoi, réveillant le zèle dans les peuples, tu as fait déserter les villes, transféré la cité dans la solitude. Antoine, toi qui portes Dieu, prie le Christ Dieu d'accorder la rémission des péchés à ceux qui célèbrent avec amour ta sainte mémoire.

Nous nous unissons à l'Eglise entière, Ô illustre Antoine, pour vous offrir l'hommage de notre vénération, et pour exalter les dons que l'Emmanuel vous a départis. Que votre vie a été sublime, et vos œuvres fécondes ! Vous êtes véritablement le Père d'un grand peuple, et l'un des plus puissants auxiliaires de l'Eglise de Dieu. Priez donc pour l'Ordre Monastique, et obtenez qu'il renaisse et se régénère dans la société chrétienne. Priez aussi pour chacun des membres de la grande famille de l'Eglise. Souvent, votre intercession a été utile à nos corps, en éteignant les ardeurs mortelles qui les consumaient; daignez continuer d'exercer ce pouvoir bienfaisant. Mais guérissez surtout nos âmes, trop souvent consumées de flammes plus dangereuses encore. Veillez sur nous dans les tentations que l'ennemi ne cesse de nous susciter ; rendez-nous vigilants contre ses attaques, prudents pour prévenir les occasions funestes, fermes dans le combat, humbles dans la victoire. L'ange des ténèbres vous apparaissait sous des formes sensibles ; pour nous, trop souvent, il déguise ses coups ; que nous ne soyons pas victimes de ses illusions Que la crainte des jugements de Dieu, que la pensée de l'éternité dominent notre vie tout entière ; que la prière soit notre fréquent recours, et la pénitence notre rempart. Enfin et surtout, selon votre conseil, ô Pasteur des âmes, que l'amour de Jésus nous remplisse de plus en plus, de Jésus qui a daigné naître ici-bas pour nous sauver et pour nous mériter les grâces par lesquelles nous triomphons de Jésus qui a daigné souffrir la tentation, afin de nous apprendre comment on y résiste."

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mardi, 16 janvier 2024

16 janvier. Saint Marcel Ier, pape et martyr. 304 à 310.

- Saint Marcel Ier, pape et martyr. 308-309.

Papes : Saint Marcelin (prédécesseur, +304, puis vacance jusqu'au début de l'année 308) ; Saint Eusèbe Ier (successeur).  Empereur romain à Rome : Maxence. Empereur romain d'Occident : Licinius. Empereur romain d'Orient : Galère.

" Cette vie me plait, mais elle trompe."
Saint Honorat, évêque d'Arles et fondateur de l'abbaye de Lérins. Il est fêté aussi ce 16 janvier.


Saint Marcel Ier. Missel à l'usage de Saint-Didier d'Avignon. XIVe.
 
Marcellus vient de arcens malum a se, qui éloigne le mal de soi, ou de maria percellens, qui frappe la mer, c'est-à-dire qui éloigne et foule aux pieds les adversités du monde, le monde étant comparé à la mer ; car, comme dit saint Jean Chrysostome sur saint Mathieu : " Sur la mer, il y a un bruit confus, une crainte continuelle, l’image de la mort, une véhémence infatigable des eaux, et une agitation constante ".
 
Au glorieux Pape et Martyr Hygin, vient s'adjoindre sur le Cycle son vaillant successeur Marcel ; tous deux viennent faire hommage de leurs clefs au Chef invisible de l'Eglise ; leur frère Fabien les suivra de près. Tous trois, émules des Mages, ils ont offert leur vie en don à l'Emmanuel.

Marcel a gouverné l'Eglise à la veille des jours de paix qui bientôt allaient se lever. Encore quelques mois, et le tyran Maxence tombait sous les coups de Constantin, et la croix triomphante brillait sur le Labarum des légions. Les moments étaient courts pour le martyre ; mais Marcel sera ferme jusqu'au sang, et méritera d'être associé à Etienne, et de porter comme lui la palme près du berceau de l'Enfant divin. Il soutiendra la majesté du Pontificat suprême en face du tyran, au milieu de cette Rome qui verra bientôt les Césars s'enfuir à Byzance, et laisser la place au Christ, dans la personne de son Vicaire. Trois siècles se sont écoulés depuis le jour où les édits de César Auguste ordonnaient le dénombrement universel qui amena Marie en Bethléhem, où elle mit au monde un humble enfant : aujourd'hui, l'empire de cet enfant a dépassé les limites de celui des Césars, et sa victoire va éclater. Après Marcel va venir Eusèbe ; après Eusèbe, Melchiade qui verra le triomphe de l'Eglise.

Romain d'origine, Marcel fut choisi le 21 mai 308, pour succéder à saint Marcellin, martyrisé deux mois auparavant. (Il siégea sous le règne de Maxence, cinq ans, six mois et vingt-et-un jours.)
 

Saint Marcel Baptisant. Legenda aurea.
Bx. J. de Voragine. Mâcon. XVe.

Devenu Pape, saint Marcel n'oublia point les exemples de vertus et de courage de son prédécesseur. Il obtint d'une pieuse matrone nommée Priscille, un endroit favorable pour y rétablir les catacombes nouvelles, et pour pouvoir y célébrer les divins mystères à l'abri des profanations des païens. Les vingt-cinq titres de la ville de Rome furent érigés en autant de paroisses distinctes, afin que les secours de la religion fussent plus facilement distribués aux fidèles. A la faveur d'une trève dans la persécution, Marcel s'efforça de rétablir la discipline que les troubles précédents avaient altérée. Sa juste sévérité pour les chrétiens qui avaient apostasié durant la persécution lui attira beaucoup de difficultés.

L'Église subissait alors la plus violente des dix persécutions. Dioclétien venait d'abdiquer en 305, après avoir divisé ses États en quatre parties, dont chacune avait à sa tête un César. Maxence, devenu César de Rome en 306, ne pouvait épargner le chef de l'Église universelle. L'activité du Saint Pontife pour la réorganisation du culte sacré au milieu de la persécution qui partout faisait rage, était aux yeux du cruel persécuteur, un grief de plus.

Maxence le fit arrêter par ses soldats et comparaître à son tribunal, où il lui ordonna de renoncer à sa charge et de sacrifier aux idoles. Mais ce fut en vain: saint Marcel répondit hardiment qu'il ne pouvait désister un poste où Dieu Lui-même l'avait placé et que la foi lui était plus chère que la vie. Le tyran, exaspéré par la résistance du Saint à ses promesses comme à ses menaces, le fit flageller cruellement. Il ne le condamna point pourtant à la mort ; pour humilier davantage l'Église et les fidèles, il l'astreignit à servir comme esclave dans les écuries impériales.


Saint Marcel Ier dans l'étable. Legenda aurea.
Bx. J. de Voragine. Richard de Montbaston. XIVe.

Le Pontife passa de longs jours dans cette dure captivité, ne cessant dans la prière et le jeûne, d'implorer la miséricorde du Seigneur. Après neuf mois de détention, les clercs de Rome qui avaient négocié secrètement son rachat avec les officiers subalternes, vinrent pendant la nuit et le délivrèrent. Une pieuse chrétienne nommée Lucine, qui depuis dix-neuf ans avait persévéré dans la viduité, donna asile au Pontife. Sa maison devint dès lors un titre paroissial de Rome, sous le nom de Marcel, où les fidèles se réunissaient en secret.

Maxence en fut informé, fit de nouveau arrêter Marcel, et le condamna une seconde fois à servir comme palefrenier dans un haras établi sur l'emplacement même de l'église. Saint Marcel, Pape, mourut au milieu de ces vils animaux, à peine vêtu d'un cilice. Il est le saint patron des palefrenier et des valets d'écuries. La bienheureuse Lucine l'ensevelit dans la catacombe de Priscille, sur la voie Salaria. Les reliques de ce Souverain Pontife reposent dans l'ancienne église de son nom, illustrée par son martyre, mais son chef, après avoir été conservé longtemps par l'abbaye de Cluny est toujours aujourd'hui au trésor de la cathédrale d'Autun. Il fut le dernier des Papes persécutés par le paganisme.


Vision et martyre de saint Marcel Ier. Legenda aurea.
Bx. J. de Voragine. Jacques de Besançon. XVe.
 
PRIERE

" Quelles furent vos pensées, Ô glorieux Marcel, lorsque l'impie dérision d'un tyran vous enferma en la compagnie de vils animaux ? Vous songeâtes au Christ, votre maître, naissant dans une étable, et étendu dans la crèche à laquelle étaient attachés aussi des animaux sans raison. Bethléhem vous apparut avec toutes ses humiliations, et vous reconnûtes avec joie que le disciple n'est pas au-dessus du maître. Mais de l'ignoble séjour où le tyran avait cru renfermer la majesté du Siège Apostolique, elle allait bientôt sortir affranchie et glorifiée, aux yeux de la terre entière. Rome chrétienne, abaissée en vous, allait être reconnue comme la mère de tous les peuples, et Dieu n'attendait plus qu'un moment pour livrer à vos successeurs les palais de cette fière cité qui n'avait pas encore le secret de sa destinée.


Saint Marcel Ier. Missel romain. XIVe.

Comme l'Enfant de Bethléhem, Ô Marcel, vous avez triomphé par vos abaissements. Souvenez-vous de l'Eglise qui vous est toujours chère ; bénissez Rome qui visite avec tant d'amour le lieu sacré de vos combats. Bénissez tous les fidèles du Christ qui vous demandent, dans ces saints jours, de leur obtenir la grâce d'être admis à faire leur cour au Roi nouveau-né. Demandez-lui pour eux la soumission à ses exemples, la victoire sur l'orgueil, l'amour de la croix, et le courage de demeurer fidèles dans toutes les épreuves."

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lundi, 15 janvier 2024

15 janvier. Saint Paul, premier ermite. 342.

- Saint Paul, premier ermite. 342.
 
Pape : Saint Jules Ier. Empereur romain d'Occident : Constant Ier. Empereur romain d'Orient : Constance II.

" Le mien et le tien ; cette froide parole est la source de tous les maux de cette vie."
Saint Jean Chrysostome. Oratione de S. Philogonio.


Saint Paul ermite. Dans le ciel, le corbeau préposé par Dieu
lui apporte sa nourriture. Giuseppe de Ribeira. XVIIe.

L’Eglise honore aujourd'hui la mémoire d'un des hommes le plus spécialement choisis pour représenter la pensée de ce détachement sublime que l'exemple du Fils de Dieu, né dans une grotte, à Bethléhem. révéla au monde. L'ermite Paul a tant estimé la pauvreté de Jésus-Christ, qu'il s'est enfui au désert, loin de toute possession humaine et de toute convoitise. Une caverne pour habitation, un palmier pour sa nourriture et son vêtement, une fontaine pour y désaltérer sa soif, un pain journellement apporté du ciel par un corbeau pour prolonger cette vie merveilleuse : c'est ainsi que Paul servit, pendant soixante ans, étranger aux hommes, Celui qui n'avait pas trouvé de place dans la demeure des hommes, et qui fut contraint d'aller naître dans une étable abandonnée.

Mais Paul habitait avec Dieu dans sa grotte ; et en lui commence la race sublime des Anachorètes, qui, pour converser avec le Seigneur, ont renoncé à la société et même à la vue des hommes : anges terrestres dans lesquels a éclaté, pour l'instruction des siècles suivants, la puissance et la richesse du Dieu qui suffit lui seul aux besoins de sa créature. Admirons un tel prodige ; et considérons, avec reconnaissance, à quelle hauteur le mystère d'un Dieu incarné a pu élever la nature humaine tombée dans la servitude des sens, et tout enivrée de l'amour des biens terrestres.


Saint Paul et saint Antoine.
Très belles heures de Notre Dame de Jean de Berry. XVe.

N'allons pas croire cependant que cette vie de soixante ans passée au désert, cette contemplation surhumaine de l'objet de la béatitude éternelle, eussent désintéressé Paul de l'Eglise et de ses luttes glorieuses. Nul n'est assuré d'être dans la voie qui conduit à la vision et à la possession de Dieu, qu'autant qu'il se tient uni à l'Epouse que le Christ s'est choisie, et qu'il a établie pour être la colonne et le soutien de la vérité. (II Tim. III, 15.).

Or, parmi les enfants de l'Eglise, ceux qui doivent le plus étroitement se presser contre son sein maternel, sont les contemplatifs ; car ils parcourent des voies sublimes et ardues, où plusieurs ont rencontré le péril.


Saint Paul et saint Antoine s'entretenant au désert.
Maître des prélats bourguignon. XVe.

Du fond de sa grotte, Paul, éclairé d'une lumière supérieure, suivait les luttes de l'Eglise contre l'arianisine ; il se tenait uni aux défenseurs du Verbe consubstantiel au Père : et afin de montrer sa sympathie pour saint Athanase, le vaillant athlète de la foi, il pria saint Antoine, à qui il laissait sa tunique de feuilles de palmier, de l'ensevelir dans un manteau dont l'illustre patriarche d’Alexandrie, qui aimait tendrement le saint abbé, lui avait fait présent.

Le nom de Paul, père des Anachorètes, est donc enchaîné à celui d'Antoine, père des Cénobites ; les races fondées par ces deux apôtres de la solitude sont sœurs ; toutes deux émanent de Bethléhem comme d'une source commune. La même période du Cycle réunit, à un jour d'intervalle, les deux fidèles disciples de la crèche du Sauveur.


Saint Antoine cherchant saint Paul ermite et rencontrant le satyre.
Secrets de l'histoire naturelle. XIVe.

Paul, premier ermite, au témoignage de saint Jérôme qui a écrit sa vie, se retira, pendant la persécution violente de Dèce, dans un vaste désert où il demeura 60 ans, au fond d'une caverne, tout à fait inconnue des hommes. Ce Dèce, qui eut, deux noms, pourrait bien être Gallien qui commença à régner l’an du Seigneur 256.

Saint Paul voyant donc les chrétiens en butte à toutes sortes de supplices, s'enfuit au désert. A la même époque, en effet, deux jeunes chrétiens sont pris, l’un d'eux a tout le corps enduit de miel et est exposé sous l’ardeur du soleil aux piqûres des mouches, des insectes et des guêpes ; l’autre est mis sur un lit des plus mollets, placé dans un jardin charmant, où une douce température, le murmure des ruisseaux, le chant des oiseaux, l’odeur des fleurs étaient enivrants. Le jeune homme est attaché avec des cordes tissées de la couleur des fleurs, de sorte qu'il ne pouvait s'aider ni des mains, ni des pieds.
 
Vient une jouvencelle d'une exquise beauté, mais impudique, qui caresse impudiquement le jeune homme rempli de l’amour de Dieu. Or, comme il sentait dans sa chair des mouvements contraires à la raison, mais qu'il était privé d'armes, pour se soustraire à son ennemi, il se coupa la langue avec les dents et la cracha au visage de cette courtisane : il vainquit ainsi la tentation par la douleur, et mérita un trophée digne de louanges. Saint Paul effrayé par de pareils tourments et par d'autres encore, alla au désert.

Saint Antoine cherchant saint Paul ermite et rencontrant le satyre.
Livre des merveilles. Jean Mandeville. XVe.

Antoine se croyait alors le premier des moines qui vécût en ermite ; mais averti en songe qu'il y en a un meilleur que lui de beaucoup, lequel vivait dans un ermitage, il se mit à le chercher à travers les forêts ; il rencontra un hippocentaure cet être moitié homme, moitié cheval, lui indiqua qu'il fallait prendre à droite. Bientôt après, il rencontra un animal portant des fruits de palmier, dont la partie supérieure du corps avait la figure d'un homme et la partie inférieure, la forme d'une chèvre. Antoine le conjura de la part de Dieu de lui dire qui il était ; l’animal répondit qu'il était un satyre, le dieu des bois, d'après la croyance erronée des gentils. Enfin il rencontra un loup qui le conduisit à la cellule de saint Paul. Mais celui-ci ayant deviné que c'était Antoine qui venait, ferma sa porte. Alors Antoine le prie de lui ouvrir, l’assurant qu'il ire s'en ira pas de là, mais qu'il y mourra plutôt. Paul cède et lui ouvre, et aussitôt ils se jetèrent dans les bras l’un de l’autre en s'embrassant.


Saint Paul et saint Antoine tombent dans les bras l'un de l'autre.
Détail. Sano di Pietro. XVe.

Quand l’heure du repas fut arrivée, un corbeau apporta une double ration de pain : or, comme Antoine était dans l’admiration, Paul répondit que Dieu le servait tous les jours de la sorte, mais qu'il avait doublé la pitance en faveur de son hôte. Il y eut un pieux débat entre eux pour savoir qui était le plus digne de rompre ce pain : saint Paul voulait déférer cet honneur à son hôte et saint Antoine à son ancien. Enfin ils tiennent le pain chacun d'une main et le partagent égaleraient en deux. Saint Antoine, à son retour, était déjà près de sa cellule, quand il vit des anges portant l’âme de Paul, il s'empressa de revenir, et trouva le corps de Paul droit sur ses genoux fléchis, comme s'il priait ; en sorte qu'il le pensait vivant ; mais s'étant assuré qu'il était mort, il dit :
" Ô sainte âme, tu as montré par ta mort ce que tu étais dans ta vie."


La dépouille de saint Paul et saint Antoine.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Or, comme Antoine était dépourvu de ce qui était nécessaire pour creuser une fosse, voici venir deux lions qui en creusèrent une, puis s'en retournèrent à la forêt, après l’inhumation. Antoine prit à Paul sa tunique tissue avec da palmier, et il s'en revêtit dans la suite aux jours de solennité. Il mourut environ l’an 287.

XV DIE JANUARII

Nous donnons ici les trois strophes suivantes, consacrées par l'Eglise Grecque, dans ses Menées, à la louange du premier des Ermites :

" Quand, par l'inspiration divine, tu as abandonné avec sagesse, Ô Père, les sollicitudes de la vie pour embrasser les travaux de l'ascèse ; alors, enflammé de l'amour du Seigneur, plein de joie, tu t'es emparé du désert, laissant derrière toi les passions de l'homme, et poursuivant avec persévérance ce qu'il y a de meilleur, semblable à un Ange, tu as accompli ta vie.

Séparé volontairement de toute société humaine, dès ton adolescence, Ô Paul, notre père, tu as, le premier de tous, embrassé la complète solitude, dépassant tous les autres solitaires, et tu as été inconnu pendant toute ta vie : c'est pourquoi Antoine, par un mouvement divin, t'a découvert, toi qui étais comme caché, et il t'a manifesté à l'univers.

Livré, Ô Paul, à un genre de vie inaccoutumé sur la terre, tu as habité avec les bêtes, assisté du ministère d'un oiseau, par la volonté divine ; à cette vue, le grand Antoine stupéfait, au jour où il te découvrit, te célébra sans relâche, comme le Prophète et le Maître de tous comme un être divin."


Scènes de la vie de saint Paul ermite avec saint Antoine.
Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.
 
PRIERE
 
" Vous contemplez maintenant dans sa gloire, Ô prince des Anachorètes, le Dieu dont vous avez médité, durant soixante années, la faiblesse et les abaissements volontaires ; votre conversation avec lui est éternelle. Pour cette caverne, qui fut le théâtre de votre pénitence, vous avez l'immensité des cieux ; pour cette tunique de feuilles de palmier, un vêtement de lumière ; pour ce pain matériel, l'éternel Pain de vie ; pour cette humble fontaine, la source de ces eaux qui jaillissent jusque dans l'éternité.

Dans votre isolement sublime, vous imitiez le silence du Fils de Dieu en Bethléhem ; maintenant, votre langue est déliée, et la louange s'échappe à jamais de votre bouche avec le cri de la félicité. Souvenez-vous cependant de cette terre dont vous n'avez connu que les déserts ; rappelez à l'Emmanuel qu'il ne l'a visitée que dans son amour, et faites descendre sur nous ses bénédictions. Obtenez-nous la grâce d'un parfait détachement des choses périssables, l'estime de la pauvreté, l'amour de la prière, et une continuelle aspiration vers la patrie céleste."

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dimanche, 14 janvier 2024

14 janvier. Saint Hilaire, évêque de Poitiers, docteur de l'Eglise, patron du diocèse de Poitiers. 368.

- Saint Hilaire, évêque de Poitiers, docteur de l'Eglise, patron du diocèse de Poitiers. 368.
 
Pape : Saint Damase Ier. Empereur romain d'Occident : Valentinien Ier. Empereur romain d'Orient : Valens.

" Se taire quand on doit parler est de la pusillanimité, non de la modestie."
Lib. contra Constantium.


Saint Hilaire de Poitiers. Grandes heures d'Etienne Chevalier.
Jean Fouquet. XVe.

Hilaire vient d'hilarité, parce qu'il servit Dieu avec un coeur plein de joie. Ou bien Hilaire vient de altus, haut, élevé, et arès vertu, parce qu'il fut élevé en science et en vertu, durant sa vie. Hilaire viendrait encore de hylè, qui veut dire matière primordiale, qui fut obscure, et en effet, dans ses oeuvres, il y a grande obscurité et profondeur.

Saint Hilaire naquit en Aquitaine seconde, qui " surpassait alors toutes les autres provonces gauloises en urbanité ". Son père se nommait Francaire et était d'une famille de grande noblesse. Il fut élevé dans le paganisme et ne se fit chrétien que dans l'âge mûr. Il mena une vie honnête et pure. Après la grâce de Dieu, l'étude de la philosophie puis de l'Ecriture sainte furent les causes de sa conversion :

" Je considérais que l'état le plus désirable, selon les sens, est le repos dans l'abondance, mais que ce bonheur est commun avec les bêtes. Je compris donc que le bonheur de l'homme devait être plus relevé, et je mettais dans la pratique de la vertu et dans la connaissance de la vérité. La vie présente n'étant qu'une suite de misères, il me parut que nous l'avions reçue pour exercer la patience, la modération, la douceur, et que Dieu, tout bon, ne nous avait point donner la vie pour nous rendre plus misérables en nous l'otant. 
Mon âme se portait donc avec ardeur à connaître ce Dieu, auteur de tout bien, car je voyais clairement l'absurdité de tout ce que les païens enseignaient touchant la divinité, la partageant entre plusieurs personnes, de l'un et de l'autre sexe, l'attribuant à des animaux, à des statues et à d'autres objets insensibles. Je reconnus qu'il ne pouvait y avoir qu'un seul Dieu, éternel, tout-puissant, immuable."
 

Sacre de saint Hilaire. Vies de saints. J. de Monbaston. XIVe.

Le fait qu'il semble avoir reçu le baptême peu de temps avant l'épiscopat n'indique pas qu'il n'était pas chrétien bien avant. En effet, un usage en ce temps était de ne le recevoir que dans un âge avancé ou après une longue préparation. Il avait tellement peur de perdre le trésor de la foi qu'il ne fréquentait ni les Juifs ni les hérétiques. Plus tard par charité, cette auxiliaire indispensable à la foi, le porta à modifier, le cas échéant, cette attitude.

Saint Hilaire avait une femme dont la vertu était remarquable. Ils eurent une fille Abra, qu'il engagea à demeurer vierge et à vivre pour Notre Seigneur. En ce temps, il arrivait que l'on prît des clercs ches les hommes marié mais on es engageait à ne plus avoir de commerce avec elles, sous peine d'adultère. Il reçut l'épiscopat à la fin des années 340.

Saint Hilaire était tellement conscient de la dignité de l'épiscopat que lorsqu'il voulut représenter à l'empereur qu'il méritait à ses yeux une grande considération, il lui dit :
" Episcopus ego sum !"
" Je suis évêque !"
Il considérait l'évêque comme " le prince parfait de l'Eglise, lequel doit posséder dans leur perfection les plus grandes vertus ".
" Dans un évêque, l'innocence de la vie ne suffit pas sans la science, et sans la sainteté, la plus grande science ne suffit pas davantage ; en effet, comme il est institué pour l'utilité des autres, à quoi leur sert-il, s'il ne les instruit, et ses instructions ne seront-elles pas stériles, si elle ne sont pas d'accord avec sa vie ?"
D'un prêtre, il dit sans cesse :
" Qu'il orne sa vie en prêchant, qu'il orne sa prédication en vivant ; car innocent, il n'est utile qu'à lui-même s'il n'est pas savant, sa science n'a aucune autorité s'il n'est pas innocent."
 

Concile de Séleucie. Speculum historiale. V. de Beauvais. XVe.

Il commença sa prédication avec l'évangile de saint Matthieu car " le Nouveau Testament est caché dans l'ancien et l'Ancien Testament est manifesté dans le Nouveau ". Puis il continua par saint Jean pour affirmer la divinité de Notre Seigneur Jésus-Christ.

C'est aussi, et surtout, par le combat contre les Ariens et le faible et tyrannique empereur Constance, que saint Hilaire mérita d'être le saint Athanase de l'Occident. Il entra dans le combat au moment du concile d'Arles (353), où l'empereur était présent, qui demanda aux évêques de souscrire aux hérésies ariennes. Paulin, évêque de Trèves, reffusa et fut exilé.

Plus tard dans la même année, dans un concile réunit à Milan, l'empereur fit renouveler ses admonestations et les assortit de l'ordre de condamner saint Athanase.

Il est difficile de savoir si notre saint assista à ce concile, mais, alors que les légat du pape saint Libère était exilés eux-aussi pour avoir refusé selon la mission que leur avait donner le Pontife suprême de signer cette condamnation, saint Hilaire fit parvenir à l'empereur son premier livre à Constance.
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En 356, les Ariens, emmenés par Saturnin d'Arles, convoquèrent un concile à Bézier. Saint Hilaire s'y rendit en vue de réfuter leurs erreurs. Mais Saturnin interdit qu'il fût entendu et envoya une fausse relation u concile à l'empereur. Saint Hilaire fut exilé en Phrygie avec saint Rodhane, évêque de Toulouse. De là, par ses écrits et ses ambassades, il poursuivit le gouvernement de son diocèse mais aussi son combat contre l'hérésie.
 

Saint Hilaire combattant les hérétiques. Legenda aurea.
Bx. J. de Voragine. Richard de Monbaston. XIVe.

C'est en cet exil qu'il composa son Traîté de la Trinité, afin de démasquer l'erreur et de défendre la vérité. Notre saint y prouve de la manière la plus ferme la consubstantialité du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Il y fait voir aussi que l'Arianisme ne peut être la vérité car cette doctrine n'a point été révélée à saint Pierre, dont la foi sera indéfectible car Jésus-Christ à prié précisément pour cela.

Pendant son exil, il se tint deux nouveaux conciles. L'un à Rimini, où les ignominies touchant à la vraie foi et l'autre à Séleucie (359). L'empereur ayant ordonnée que tous les évêques y fussent, saint Hilaire s'y trouva et put providentiellement s'opposer aux Ariens. Au point que ceux-ci furent même condamnés par les semi-Ariens.

A la suite, des points de désaccords grâves demeurant, on envoya une ambassade, à laquelle saint Hilaire se joignit, à Constantinople. Là les Ariens qui pulullaient trouvèrent l'occasion de tenir un nouveau concile qu'ils organisèrent à leur main (360). Saint Hilaire alors envoya une requête à Constance lui demandant, d'être confronté directement et publiquement à Saturnin d'Arles, l'auteur de son exil, et de conférer avec lui devant tout le concile de la vérité intégrale de la foi. Les Ariens persuadèrent à l'empereur de ne point accéder à ces requêtes et saint Hilaire fut renvoyé dans les Gaules et à son diocèse (360).

Sur le chemin, saint Hilaire aborda l'île de Gallinaria (aujourd'hui connue sous le nom d'Isoletta d'Albenga, qui n'était alors pas habitable par les hommes car elle était infestée de serpents venimeux. Lesquels serpents se retirèrent et disparurent dès que notre saint eût mis le pied sur l'île.


Saint Hilaire remettant les ordres mineurs à saint Martin. Marquet.
Cathédrale Saint-Gatien de Tours. XVIIe.

C'est de cette île que saint Martin, qui était déjà son disciple, l'alla chercher à Rome, sur la nouvelle qu'il était renvoyé dans les Gaules. Saint Martin manqua son maître mais le rejoignit bientôt sur la route et termina le voyage jusqu'à Poitiers avec saint Hilaire.

Saint Martin avait quitter le service militaire en 356, et c'est pour ne plus quitter saint Hilaire qu'il fonda le deuxième monastère des Gaules à Ligugé où il y passa 15 ans.

De son diocèse, saint Hilaire poursuivit son combat. Il restaura la vraie foi et remit de l'ordre dans des églises qui avaient beaucoup souffert des persécutions des Ariens. Il fut appelé bientôt " Sauveur et Père de la Patrie ".
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Clovis, quelque 150 ans plus tard, marchant au combat contre Alaric, roi des Goths, vit une grande lumière émaner de la basilique s'avancer vers lui et une voix lui dire de se hâter une fois qu'il aurait fait sa prière. Clovis comprit que saint Hilaire marcherait avec lui. La victoire fut acquise en trois heures et la défaite d'Alaric fut un désastre.

En 361, il rédigea un ouvrage destiné à Constance afin de l'exhorter avec vigueur à revenir sur ses errements et sur le soutien scandaleux qu'il donnait aux Ariens. La mrot de Constance cette même année ne lui permit pas de le lui adresser.

En 364, saint Hilaire passa en Italie où il retrouva entre autres saint Eusèbe de Verceil, pour continuer d'y combattre les hérétiques. une grande souffrance fut pour lui de voir Lucifer de Cagliari, qui avait été un intrépide défenseur de l'orthodoxie à ses côtés, faire un schisme avec quelques évêques. Contre le pape Damase, au motif qu'il trouvait trop légères les peines qu'encouraient les hérétiques et les voies de réintégration dans l'orthodoxie trop peu exigeantes.
 

Cathédrale Saint-Pierre de Poitiers.

Saint Hilaire trouva à Milan l'usurpateur Auxence, Arien, contre lequel il écrivit d'ailleurs, après avoir obtenu une confrontation publique avec Auxence en présence de l'empereur qui se termina par la déroute de l'Arien, mais n'obtint que peu de résultat car la profession de foi que fut obligé de signer Auxence le fut en termes aussi équivoques que subtils.

L'empereur le renvoya alors à Poitiers où saint Hilaire s'éteignit le 13 janvier 368 après avoir poursuivit sans relâche le combat contre les hérétiques et le gouvernement de son diocèse.

Saint Hilaire, dont des reliques sont toujours conservées à Poitiers, mais aussi au Puy-en-Velay, est représenté en évêque, terrassant des serpents (ceux qui figurent ausssi bien les hérésies que les antichrist).

ORAISON

L'Eglise de Poitiers, toujours fidèle à la mémoire de son héroïque Pontife, célèbre sa fête avec une religion filiale. Pour honorer avec plus d'éclat le témoignage rendu par le grand Docteur des Gaules, au mystère qui fait la base du Christianisme tout entier, elle chante en ce jour, à la Messe, la Préface de la Sainte Trinité. Nous donnerons ici quelques pièces liturgiques empruntées aux anciens livres de cette illustre Eglise. Les Répons suivants sont tirés en partie de la Légende du Saint, rédigée par saint Venance Fortunat, l'un de ses plus illustres successeurs :

R/. Le bienheureux Hilaire, distingué au-dessus de tous par l'honneur de la naissance, plus éclatant encore par la pureté de son cœur,
Brillant comme l'étoile du matin, a paru au milieu des astres,
R/. Le bienheureux Hilaire, Evêque de la ville de Poitiers, sorti de la région d'Aquitaine,
Brillant comme l'étoile du matin, a paru au milieu des astres.

R/. Oh ! Qu'il fut parfait dans l'état de laïque ! Les prêtres mêmes eussent désiré être ses imitateurs.
L'occupation de sa vie n'était autre que de craindre avec amour le Christ, que de l'aimer avec crainte,
V/. Ceux qui marchent sur ses traces, courent à la gloire ;
ceux qui s'en écartent, encourent la peine : au croyant la récompense ; à l'incrédule, les supplices. L'occupation de sa vie n'était autre que de craindre avec amour le Christ, que de l'aimer avec crainte.

R/. Le très saint Hilaire fut donc exilé dans la Phrygie, contrée d'Asie, pour l'accroissement de sa vertu ;
Car plus il s'éloignait, pour l'amour du Christ, du pays de sa naissance, plus il méritait de s'approcher du ciel.
V/. Etant arrivé au lieu de ses désirs, nous devons célébrer les faveurs qui lui furent accordées.
Car plus il s'éloignait pour l'amour du Christ, du pays de sa naissance, plus il méritait de s'approcher du ciel.

R/. De retour de son exil, le saint Pontife Hilaire rentra dans Poitiers, au milieu de la joie et des applaudissements de tout son peuple ;
Car l'Eglise recouvrait son Pontife, et le troupeau son Pasteur,
V/. La perle des Prélats, il est rentré dans son héritage ; louons le Seigneur, et que le chœur des Anges aussi se réjouisse.
Car l'Eglise recouvrait son Pontife, et le troupeau son Pasteur.

HYMNE

De nos jours, l'Eglise de Poitiers chante en l'honneur de son grand Evoque ces deux Hymnes composées par le pieux Simon Gourdan, chanoine régulier de cette même abbaye de Saint-Victor de Paris, tant illustrée par les Séquences de son immortel Adam :

" Depuis le jour où l'Eglise, mère féconde de tant d'hommes illustres, réunit les Gaulois à son immense troupeau, quel homme parmi eux a été comparable à Hilaire ? Quel docteur a vengé avec plus de courage le Fils engendré par le Père ?

Célèbre, Ô peuple fidèle, les titres de gloire qui le recommandent, la dignité de son élocution, les qualités nombreuses qui brillèrent en lui ; mais son suprême honneur, c'est la foi, par laquelle il proclame hautement le Fils de Dieu.

La mitre qui brille sur son auguste front n'a pas été teinte de son sang ; mais sa vie a été en proie à mille épreuves ; ses fatigues incessantes ont compense pour lui l'honneur du martyre.

La foi de Nicée resplendit par les efforts d'un tel vengeur ; en vain la fureur des enfers s'efforce d'en renverser le Symbole ; Hilaire lance les éclairs de sa parole semblable à un glaive d'or ; il chasse les loups dévastateurs.

Avec quel transport le fidèle troupeau reçoit, à son retour, le Pontife exilé. Après ses longs combats, que de lauriers Hilaire moissonne ! Ô Martin ! c'est alors qu'il t'enseigne à marcher d'un pas ferme dans le sentier des vertus.

Louange suprême au Père ; honneur égal au Fils que le Père engendre de son sein fécond : au Fils, égal au Principe, semblable en divinité ; louange pareille à l'Esprit divin !

Amen."

HYMNE

" Ni la fraude, ni la faveur des princes, ni leurs menaces, n'ébranlent l'athlète magnanime ; Pasteur, il est contraint par un ordre tyrannique de quitter son troupeau. Qui désormais repoussera la fureur des loups ?

Tu pars, Ô Pontife ! Mais tandis que ton grand cœur se soumet à l'exil, la Gaule est baignée dans les larmes ; et la terre de Phrygie, qui reçoit en toi un père, va se réjouir de posséder en toi le vengeur du Verbe.

Puissant Docteur, il illumine du flambeau d'une lumière nouvelle les ténèbres sous lesquelles se cachait l'erreur ; ses eaux vives nettoient les pâturages souillés d'un impur limon ; il éclaire des nations que l'infidélité rendait encore féroces.

Il confirme dans la foi des pasteurs chancelants : on voit revenir vers leurs troupeaux les gardiens timides que l'audace de l'hérésie en avait éloignés ; la voix d'Hilaire est pour eux la voix d'un père.

Sublime Pontife, qui, au plus haut des cieux, contemples de près le Soleil de justice, obtiens qu'il daigne nous éclairer, ce Verbe dont tu nous as fait connaître l'essence.

Qu'ils tremblent en présence du prince de ce monde ceux qui ne goûtent que les choses terrestres ; pour Hilaire, il dédaigne les fureurs d'un César irrité ; il n'affirme qu'avec plus de liberté la pure foi du Christ.

Louange suprême au Père ; honneur égal au Fils que le Père engendre de son sein fécond : au Fils, égal au Principe, semblable en divinité ; louange pareille à l'Esprit divin.

Amen."

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